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2.2 Estimation des emprises inondées sur un réseau hydrographique

2.2.2 La modélisation hydraulique intégrée à la prévision

Quelques travaux de recherche, dont ceux deSchumann et al. (2013), ont été conduits afin de développer des modèles de prévisions des surfaces inondées à grande échelle et à haute résolution spatiales. Cependant, les données nécessaires à la validation de ce type de modélisation sont rarement disponibles sur de grandes échelles spatiales. Les applications et tests de ces approches se limitent souvent à des secteurs géographiques peu étendus.

BreZo

BreZo est un modèle hydraulique 2D, appliqué sur un maillage non structuré de cellules triangulaires. Ce type de modèle est idéal pour la modélisation hydraulique des cours d’eau aux géométries complexes (Begnudelli and Sanders, 2006). L’algorithme du modèle est ro-buste et efficace pour suivre constamment le volume de fluide et l’élévation de la surface libre dans les cellules partiellement submergées du modèle. Ce modèle a fait l’objet de travaux concluants sur la modélisation des étendues inondées (Sanders,2007). Ces travaux proposent une évaluation des résultats obtenus à partir de différentes sources de données topographiques et de différents niveaux de résolution.

Dans le cadre de travaux d’anticipation des crues (Nguyen et al., 2015b), le modèle hydro-logique HL-RDHM a été couplé au modèle hydraulique BreZo aux États-Unis (figure 2.18). L’application de ce couplage a été effectué sur le bassin versant du Cedar, dans l’Iowa aux État-Unis, drainant une surface de 20 000 km2. Les caractéristiques de ce bassin sont dé-crites dans un rapport technique Américain précisant, en particulier, l’occupation des sols majoritairement de type agricole (Linhart and Eash, 2010).

Figure 2.18 –Cascade de modélisation HiResFlood-UCI couplant le modèle pluie-débit HL-RDHM au modèle hydraulique BreZo, d’après Sanders (2007)

Le modèle a été testé sur sa sensibilité aux données d’entrée et aux valeurs de ses paramètres. La résolution des données topographiques est importante pour l’optimisation des simulations obtenues par le modèle (les mailles doivent avoir une taille inférieure à 30 mètres). En paral-lèle, il s’avère que ce modèle hydraulique est sensible à la rugosité en lit mineur et majeur, impliquant une vigilance importante de l’utilisateur sur les choix de ces coefficients.

Les hauteurs d’eau simulées à partir de six inondations passées ont été comparées à celles dis-ponibles aux stations de mesures, révélant une erreur de hauteur d’eau maximale de 0,82 m, présageant une bonne modélisation de l’étendue des surfaces simulées.

Les résultats des étendues simulées ont pu être comparés à des photographies aériennes post-catastrophe de l’inondation de 2008 dans l’Iowa aux État-Unis (Nguyen et al., 2015a). Les résultats dévoilent une forte similitude des étendues simulées par rapport à celles photogra-phiées. Ces résultats prometteurs sont en attente de nouvelles validations avant de déployer la chaîne de modélisation HiResFlood-UCI à une zone géographique plus étendue.

Les résultats de ces travaux laissent entrevoir des perspectives intéressantes de développe-ment de la méthode à une échelle plus grande. Toutefois, la forte sensibilité du modèle aux paramètres, dont le coefficient de rugosité, peut freiner son déploiement à ces échelles et nécéssiter une longue phase de calage et d’ajustements.

De plus, le territoire de l’Iowa possède une topographie à pentes très faibles, d’approximative-ment 0,2% entre les têtes de bassins versants (Cf. carteNguyen et al.(2015a)). L’efficacité de la méthode sur un secteur à forte pente, comme le territoire des Rocheuses ou les Cévennes-Vivarais dans le sud de la France reste à démontrer.

Travaux de l’Institut National de la Recherche Scientifique du Québec

Dans le cadre de la prévision des crues au Canada, des travaux ont établi une relation débit-hauteur au droit de l’ensemble des cellules d’un modèle numérique de terrain dans le but d’estimer et de prévoir la profondeur de submersion pour un débit donné (Poulin et al., 2012). Tout d’abord, une étape de construction de la relation débit-hauteur est réalisée en tous points du domaine à partir des cotes de récurrences officielles disponibles (T=0, 2, 20 et 100 ans). Cette relation hauteur-débit construite correspond à un catalogue de relations hauteur-débit sur chacun de ces points (figure 2.19).

La seconde étape consiste à déterminer, pour ces niveaux de débits obtenus, le niveau de la surface d’eau associée et subséquemment de dériver l’étendue de la plaine inondable et la profondeur de submersion en tous points de la zone inondée en utilisant un modèle numérique de terrain (figure 2.20).

Le résultat de la seconde étape est une approximation de la réalité, contrôlé en grande partie par la relation hauteur-débit effectuée au cours de la première étape.

À notre connaissance, ces travaux n’ont pas encore fait l’objet d’une phase d’évaluation des modélisations réalisées par rapport à des événements passés.

Figure 2.19 – Méthode de détermination de la relation hauteur-débit pour chaque cellule de la zone étudiée, d’après Poulin et al. (2012)

Figure 2.20 –Modélisation hydraulique locale de l’étendue et de la profondeur de submersion pour un débit de 83 m3/s sur un tronçon de la rivière Saint-Charles (46˚53’36.9"N 71˚21’26.2"W), Québec, d’après Poulin et al. (2012)

LISFLOOD-FP

Le modèle à base physique LISFLOOD-FP1 a été développé dans le but de simuler une inondation dynamique de manière simple (Bates and Roo,2000), pour être déployé à grande échelle. Le modèle calcule des hauteurs d’eau dans chaque cellule régulière d’une grille et à chaque pas de temps, et peut donc simuler la propagation dynamique des ondes de crue sur les plaines inondables à topographie complexe (figure 2.21). Ce modèle provient de travaux de recherche, dont le but était d’améliorer la prévision des inondations et l’évaluation des risques d’inondation.

Figure 2.21 – Modélisation de la plaine inondable de manière dynamique par LISFLOOD-FP

À partir de ce modèle des travaux ont été effectués à différentes échelles, depuis l’échelle planétaire décrite dans Schumann et al. (2013) ou Sampson et al. (2015) à celle de la ville présentée dans Merkuryeva et al. (2015) ou Apel et al. (2009).

Les premiers travaux sont ambitieux et de nombreuses améliorations sont nécessaires avant que ce projet soit opérationnel, notamment l’acquisition de données plus précises concernant la topographie et la bathymétrie (Schumann et al., 2013). Les calculs dédiés à la réalisation de cartes des surfaces inondées par périodes de retour s’avèrent très longs (figure 2.22). En optimisant les temps de calculs sur plusieurs machines, il faut 24 heures pour produire ce type de carte à l’échelle de l’Afrique (Sampson et al.,2015).

Figure 2.22 – Résultats d’une simulation globale fixée pour une période de retour 100 ans sur, (a) toute l’Afrique, (b) le delta du Niger, et (c) la plaine inondable du fleuve Zambèze, d’après

Sampson et al. (2015)

D’autres travaux emploient LISFLOOD-FP dans le but de réaliser des prévisions de surface inondée à une échelle plus limitée. Ces travaux ont permis de prévoir des surfaces inondées à 12 heures d’anticipation, rafraîchies toutes les heures à l’échelle de la commune de Daugavpils2 en Lettonie (figure 2.23).

Figure 2.23 – Prévisions de zones inondées à partir de LISFLOOD-FP, d’après

Merkuryeva et al. (2015)

Des simulations sur des événements passés ont été effectuées pour connaître la qualité des résultats proposés par la méthode par rapport aux surfaces inondées réelles. Il s’avère que les résultats sont proches, avec une étendue inondée similaire supérieure à 90%.

Toutefois, le calcul du modèle est effectué de maille en maille, principe plus adapté aux cours d’eau en zone de larges plaines inondables, ce qui semble plus complexe à adapter à une partie des cours d’eau encaissé sujets aux crues-éclair.

2.2.3 Recommandations pour une modélisation de qualité et