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La modélisation de l’interaction acousto-optique

1.3 Une synthèse sur l’imagerie optique des milieux diffusants épais

2.1.1 La modélisation de l’interaction acousto-optique

Un effet incohérent a été modélisé en 1998 par Mahan et al. [26]. L’inter- action acousto-optique y est comprise comme une modification du transfert radiatif lumineux du fait des modifications des caractéristiques de diffusion, comme le coefficient de diffusion, au passage de l’onde de pression. Cet effet minime n’a cependant jamais été montré expérimentalement. Nous considé- rons donc l’interaction acousto-optique comme de nature cohérente.

Cette modulation de la phase trouve son origine dans deux effets : la mise en vibration des diffuseurs et le réseau d’indice de réfraction au passage de l’onde de pression. Pour modéliser cette modulation de phase, Leutz et Maret [25] ont rapporté en 1995 l’utilisation de techniques couramment rencontrées en DLS (Dynamique Light Scattering). La grande majorité des études théo- riques menées par la suite ayant repris la même approche, je vais en exposer ici brièvement la démarche.

La modulation acousto-optique cohérente

Nous considérons un milieu d’indice de réfraction n0, de diffusion isotrope. Nous faisons l’approximation de diffusion faible, en considérant que le libre parcours moyen de diffusion ls est très supérieur à la longueur d’onde optique

λ, soit ls  λ. Nous considérons qu’il n’existe aucune corrélation entre les différents trajets optiques. Ce milieu est illuminé par une lumière cohérente de vecteur d’onde optique k0 et est parcouru par une onde ultrasonore de pulsation ωU S. Pour simplifier l’écriture, nous considérons ici que le milieu est totalement insonifié.

La modulation acousto-optique est calculée à partir de la fonction d’auto- corrélation temporelle G1(τ) du champ diffusé E(t) en sortie de l’échantillon, définie par

G1(τ) =

Z

0

p(s)hEs(t)Es(t + τ)ids (2.1) où Es(t) est le champ lumineux correspondant à longueur optique s et où

p(s) est la fonction densité de probabilité de s, à savoir la fraction de l’intensité

lumineuse incidente parcourant un chemin optique de longueur s. Cette fonc- tion d’autocorrélation permet par la suite d’obtenir l’intensité optique modulée aux harmoniques nωU S par l’application du théorème de Wiener-Khinchin, se- lon In= /ωUS Z 0 ωU S cos(nωU Sτ)G1(τ)dτ, (2.2)

La phase du champ diffusé Espeut être modifiée par la propagation acous- tique ou par d’autres effets comme le mouvement brownien. En considérant que ces deux effets sont totalement décorrélés, nous pouvons simplement séparer leur contribution respective [25]. Nous tenons compte ici que de la modulation acousto-optique, ce qui amène

hEs(t)Es(t + τ)i = hexp[−i(

s/l+1 X j=1 ∆φnj(t, τ) + s/l X j=1 ∆φdj(t, τ))]i, (2.3)

où ∆φnj(t, τ) = φnj(t + τ) − φnj(t) et φnj est la variation de phase sur le trajet d’indice j de longueur optique s due à la modulation de l’indice de réfraction, et où ∆φdj(t, τ) = φdj(t + τ) − φdj(t) et φdj est la variation de phase au niveau du j`eme événement de diffusion due à la mise en vibration des diffuseurs.

Une approximation importante est l’approximation de faibles modulations. Nous pouvons alors simplifier cette expression en écrivant

hEs(t)Es(t + τ)i = exp[− 1 2h( s/l+1 X j=1 ∆φnj(t, τ) + s/l X j=1 ∆φdj(t, τ))2i]. (2.4) De là, il faut exprimer les déphasages provenant des deux effets. Leutz et Maret en 1995 [25], puis Kempe et al. en 1997 [27] ont modélisé pour leur part la contribution du déplacement des diffuseurs. En 2001, Wang [28] a quant à lui considéré les deux contributions. Dans le développement de la variance de la modulation de la phase, je ne tiens pas compte des termes croisés entre ces deux effets, développés par Sakadzic et al.[29]. Je considère donc ces deux effets non corrélés, à savoir

h( s/ls+1 X j=1 ∆φnj(t, τ) + s/ls X j=1 ∆φdj(t, τ))2i= h( s/ls+1 X j=1 ∆φnj(t, τ))2i+ h( s/ls X j=1 ∆φdj(t, τ))2i (2.5) Je ne développerai pas les calculs des variances des variations de phase des deux effets, qui sont bien menés dans les articles déjà cités [25, 27, 28]. Par contre, l’écriture des déphasages induits par ces deux effets sont intéressants.

La vibration des diffuseurs Considérons le j`eme événement de diffusion à

la position rj, diffusant un photon de vecteur d’onde unitaire incident kj sur le vecteur d’onde unitaire kj+1 . De par la mise en mouvement du diffuseur par l’onde acoustique de vecteur amplitude A, la variation de la phase induite s’écrit [28]

φdj(t) = −n0k0(kj+1− kj) · Asin(kU S· rj− ωU St) (2.6) L’isotropie de diffusion implique que les contributions de deux événements différents ne sont pas corrélées. Ainsi, la contribution de la mise en vibration des diffuseurs ne dépend pas du rapport entre la longueur d’onde acoustique

λU S et le libre parcours moyen de diffusion ls, caractérisé par kU Sls. Nous pouvons par ailleurs noter que l’amplitude du déphasage est linéaire au champ de déplacement acoustique et donc à la pression ultrasonore.

La modulation de l’indice de réfraction Considérons maintenant le jeme`

libre parcours de diffusion de longueur lj reliant les j − 1eme` et jeme` événements de diffusion successifs, selon un vecteur d’onde optique kj . La variation de

∆n s’écrit [28] φnj(t) = lj Z 0 k0∆n(rj−1, sj, θj)dsj (2.7) où la modulation de l’indice de réfraction ∆n s’exprime selon

∆n(rj−1, sj, θj) = n0ηkU SAsin(ka· rj1 + kasjcos(θj) − ωU St), (2.8) où η est un coefficient lié au coefficient adiabatique piezooptique δn/δp du matériau, à sa densité ρ et à la vitesse de l’onde acoustique cU S selon η = δn/δpρc2

U S.

Ici la modulation de l’indice est cumulée sur tout le libre parcours de diffu- sion. La modulation acousto-optique correspondante dépend donc de la gran- deur caractéristique kU Sls. Nous pouvons de nouveau remarquer que l’ampli- tude du déphasage est linéaire au champ de déplacement acoustique et donc à la pression ultrasonore. Enfin, notons que les contributions provenant de la modulation de l’indice de réfraction sur deux libres parcours de diffusion du même chemin optique peuvent être couplées.

La fonction d’autocorrélation du champ diffusé En considérant ces

deux effets de modulations, le calcul de la fonction d’autocorrélation du champ amène [28] G1(τ) = ∞ Z 0 p(s)exp(−2s l (δd+ δn)(n0k0A) 2[1 − cos(ω U Sτ)])ds (2.9) où δd et δn correspondent respectivement à la composante de la vibration des diffuseurs et de la modulation de l’indice de réfraction. Notons que δd est une constante, au contraire de δnqui est fonction de la grandeur caractéristique

kU Sls et du coefficient η.

La fonction d’autocorrélation G1(τ) ne peut être explicitée de manière ana- lytique pour une géométrie quelconque. Cependant, pour quelques configura- tions simples, dont la transmission dans un milieu diffusant à faces parallèles, la probabilité de densité de photons p(s) est donnée analytiquement par la théo- rie de la diffusion [30]. Je n’expliciterai pas ici cette fonction qui alourdirait le propos.

Les caractéristiques de la modulation acousto-optique A partir de

la fonction d’autocorrélation G1(τ) écrite ainsi, nous pouvons déjà dégager quelques caractéristiques de la modulation.

– Le terme [1−cos(ωU Sτ)] traduit la modulation à la fréquence ultrasonore

– En regard du terme (δn+ δd), la grandeur kU Sls caractérise le régime de modulation acousto-optique, à savoir si la modulation est dominée par la contribution de la vibration des diffuseurs ou au contraire par la modulation de l’indice. Le changement de régime dépend de la nature de l’échantillon. Pour une solution aqueuse, le changement s’effectue pour

kU Sls '1 [28]. En dessous, les deux contributions sont équivalentes. Au dessus le régime de la modulation de l’indice prédomine. Cet effet peut s’expliquer par l’augmentation du chemin optique entre deux diffusions, sur lequel s’intègre la contribution due à la modulation de l’indice. Pour continuer la caractérisation de la modulation acousto-optique, je préfère m’appuyer sur la formulation adoptée par Kempe et al. [27]. Leur modélisation est légèrement différente à la modélisation ici exposée. Cette différence vient principalement du fait qu’ils ont considéré un champ de déplacement acous- tique A(r) non uniforme dans le milieu diffusant, et que par conséquent la modulation ne s’accumule pas uniformément sur tout le trajet optique. En ne tenant pas compte du terme de décorrélation de type mouvement brownien, ils ont formulé la fonction d’autocorrélation de manière simplifiée selon

G1(r, τ) ∝ −k

2

l3

Z

dr00I(r00)P (r, r00)A2(r00)[1 − cos(ωU Sτ)] (2.10) où P (r, r00) est la probabilité qu’un trajet optique passant au point r00 de l’échantillon ressorte au point r de la surface de sortie, et où I(r00) est l’intensité lumineuse au point r00.

Cette autre formulation souligne trois autres caractéristiques.

– Par le terme I(r00), la modulation acousto-optique dépend du flux lumi- neux local dans l’échantillon diffusant.

– Par le terme A2(r00), la modulation acousto-optique dépend de l’intensité acoustique locale.

– Par l’intégration R

dr00, la modulation acousto-optique est intégrée sur

toute la colonne acoustique.

Une synthèse sur la modélisation de la modulation acousto-optique

en milieu diffusant Ces premières modélisations ont permis de décrire

convenablement les deux effets cohérents à l’origine de l’interaction acousto- optique en milieu diffusant. Elles ont permis notamment de montrer que ces deux effets sont de même importance pour kU Sls . 1, pour une solution aqueuse. Cette interaction se traduit par une modulation à la fréquence ul- trasonore ωU S et à ses harmoniques nωU S. Elle s’intègre sur toute la colonne acoustique et est proportionnelle aux densités locales des flux acoustique et optique.

Cette dernière propriété est pour nous fondamentale, car elle est à la base de l’intérêt porté à l’imagerie acousto-optique. En nous informant sur la den- sité locale de photons, la modulation acousto-optique nous permet en effet de remonter à l’absorption optique locale du milieu diffusant, ce qui justifie

épais.

Cependant, ce modèle ne considère aucune anisotropie de diffusion, très forte dans les milieux biologiques. De plus, sa forme analytique n’est valable que pour des configurations géométriques simples, comme un échantillon à faces parallèles. Par ailleurs, il ne décrit pas d’excitations acoustiques focalisées ou impulsionnelles. Enfin, il est mal adapté à la description de milieux plus hétérogènes. D’autres études ont ainsi été menées pour compléter et préciser ces premières modélisations.