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La localisation de MatP : microscopie à Super Résolution 1) Le PALM

Chapitre 2 De l’ADN au macrodomaine : le système MatP/matS, de la localisation aux propriétés structurales

II. La localisation de MatP : microscopie à Super Résolution 1) Le PALM

Le PALM (Photo-Activated Localization Microscopy) permet de visualiser des molécules uniques par microscopie optique à fluorescence (figure 35). En microscopie photonique, le motif de diffraction de la lumière émise d’un point source est la PSF ou fonction d’étalement

du point, dont la transmission au plan de l’image est un étalement. Elle est considérée comme l’unité fondamentale d’une image, et définit la limite de résolution d’une structure à 200 nm. L’échelle moléculaire étant 10 fois inférieure, des informations précieuses sont perdues par le traitement du signal par ce système. La fonction d’étalement du point est une gaussienne en trois dimensions. Le PALM a pour objectif de déconvoluer cette fonction afin d’améliorer la résolution du système d’imagerie. Pour ce faire, des molécules individuelles compactées dans la limite de résolution d’un instrument donné, ou PSF, sont d’abord isolées les unes des autres. Chaque molécule est ensuite localisée avec plus de précision : son centre d’émission de fluorescence est précisément déterminé par l’ajustement statistique de la PSF idéale, grâce à la distribution de photons mesurée. L’isolation de chaque molécule requiert l’utilisation de protéines fluorescentes photoactivables (PA-MF) (Nienhaus et al., 2006) comme point source. Ces protéines ont la caractéristique de voir leurs propriétés spectrales modifiées par les photons incidents d’un laser. La modulation du laser permet donc d’obtenir de façon aléatoire au sein d’une population et pour une longueur d’onde donnée, des spectres d’émission de fluorescence différents permettant l’isolation des molécules. L’expérience est répétée jusqu’à ce que chaque molécule ait été isolée. Suivant cette procédure, plusieurs centaines voire milliers d’images sont générées : l’échelle de temps d’observation nécessite la fixation des échantillons. Enfin, les images reconstruites sont agrégées pour réaliser une image de PALM à haute résolution (Betzig et al., 2006).

Le but de cette expérience était de cartographier le Macrodomaine Ter via la localisation des protéines individuelles de MatP. Une collaboration avec la plateforme IMAGIF a permis de choisir la protéine photo-activable adéquate ainsi que la mise au point de la procédure d’acquisition des images, réalisée par Jim Dompierre. Afin de minimiser l’auto-fluorescence, et le bruit du détecteur, les images ont été obtenues par microscopie de fluorescence par réflexion totale interne (TIRF) (Axelrod, 1989) avec une technologie de caméra digitale quantitative (EMCCD) pouvant détecter les photons uniques. Dans cette procédure, les molécules ne sont pas directement localisées lors de l’acquisition. La reconstruction (localisation des molécules et agrégation des images) est réalisées après acquisition, mise au point par mes soins, en utilisant le logiciel RapidSTORM. Deux types de protéines fluorescente photo-activables aux propriété spectrales compatibles avec les lasers et les filtres du microscope, ont été testées : mEos2 et Dronpa. Celles-ci marquent MatP par une

fusion C-terminale au loci génomique natif dans la MG1655∆matP, avec le fragment matP- mEos2-FRT-kan-FRT, de façon à conserver un profil d’expression sauvage. La fonctionnalité de la fusion est alors vérifiée par l’observation en microscopie confocale après croissance en milieu riche, de l’absence de filamentation. a) La fusion MatP-mEos2

Eos a été isolée du corail Lobophyllia hemprichii (Wiedenmann et al., 2004). La forme modifiée mEos2 est monomérique et est capable de se replier à 37°C (McKinney et al., 2009). L’illumination de mEos2 aux UV (390 nm) promeut une photoconversion irréversible, qui modifie son pic d’émission de 516 (vert) à 581 nm (rouge) (figure 36). Cette photo- activation est irréversible, permettant le comptage des molécules isolées, propriété essentielle pour la modélisation de l’organisation du MD Ter par MatP.

L’illumination séquentielle de l’échantillon consiste en un pulse de photoconversion à 405 nm pendant 20 ms, suivie d’une acquisition et d’un blanchiment toutes les 15 images à 561nm pendant 100 ms, avec un laser d’une puissance de 0,7 kW/cm2. Cette prise d’images dure environ 15 minutes, pour environ 1000 images obtenues.

Des gammes de fixation allant de 4% à 1% de paraformaldéhyde (PFA) avec ou sans glutaraldéhyde ont été réalisées. La fixation à 1% de PFA s’est avérée être optimale. La fusion MatP-mEos2 semble être fonctionnelle : lorsque les cellules sont observées au microscope confocal, aucune filamentation n’est observée en milieu riche. La fluorescence est néanmoins très faible et permet difficilement de distinguer si les foci sont correctement positionnés, c’est à dire soit au pôle dans les nouvelles cellules, soit au septum dans les cellules plus grandes (figure 36).

Les premiers tests d’illumination séquentiels sont fonctionnels. En effet, une première illumination à 561 nm, permet de blanchir correctement les protéines déjà photoconverties. De plus, la faible activation aux UV lors de la procédure d’acquisition, provoque un scintillement uniforme du pool de protéines fluorescentes. Ce scintillement est garant d’une localisation effective des protéines lors de l’étape de reconstruction d’image. Après reconstruction de l’image par rapidSTORM, on devine le contour de la cellule indiquant que la fluorescence est détectée dans toute la cellule : MatP est donc anormalement localisée (figure 37). Il s’est avéré par la suite que la protéine mEos2 fournie était optimisée pour B.

MatPΔC20-Dronpa MatPLEU-Dronpa MatPWT-Dronpa Figure 37 : reconstruction de l’observation en PALM-TIRF des cellules d’E. coli exprimant la protéine de fusion MatP-mEos2 (logiciel RapidSTORM), à 30 nm de résolution.

subtilis. Une deuxième protéine fluorescente photo-activable a donc été testée, Dronpa.

b) La fusion MatP-Dronpa

La version tétramèrique initiale de Dronpa a été isolée du corail anthozoaire Pectiniidae. Comme Eos, c’est une protéine fluorescente photo-activable aux UV. La version modifiée monomérique utilisée en microscopie à Super Résolution a été appelée Dronpa. Sa photo- conversion aux UV la fait émettre à 518 nm (vert). Cette activation est réversible à 488 nm, la faisant passer d’un état fluorescent à un état noir (figure 36). Donpa peut subir plusieurs centaines de photo-activations, sans présenter de blanchiment significatif (Ando et al., 2004). Cette propriété est très intéressante pour les protéines cibles à faible nombre de copies dans la cellule, mais ne permet pas la quantification de celle-ci. La procédure d’acquisition est à peu près la même que pour mEos2, exceptée la longueur d’onde d’acquisition.

L’illumination séquentielle de l’échantillon consiste en un pulse de photo-conversion à 405nm pendant 20 ms, suivie d’une acquisition et d’un photo-blanchiment à 491 nm pendant 100 ms, avec un laser d’une puissance de 0,7 kW/cm2. De la même façon on génère environ 1000 images, sur des cellules fixées à 1% en PFA.

La fusion MatP-Dronpa est fonctionnelle en microscopie confocale : aucune filamentation n’est observée en milieu riche. Cette construction est même plus fonctionnelle que la construction MatP-GFP utilisée au laboratoire, même à l’état fixé. On distingue très bien les foci positionnés correctement dans la cellule (figure 36). De ce fait, des fusions de mutants de tetramérisation de MatP et Dronpa ont également été construits : MatPLEU-Dronpa et MatPΔC20-Dronpa (figure 38). Le mutant MatPLEU correspond à la substitution des principaux résidus Leucine impliquées dans la formation du domaine C-terminal coiled-coil de MatP (L143G/ L147G) et dont la fusion fluorescente doit former des foci plus étalés que la fusion fluorescente de la version sauvage de MatP. Le mutant MatPΔC20 est une version de MatP tronquée de ses vingt derniers résidus C-terminaux, dont la fusion fluorescente doit montrer plus de cellules à deux foci et une fluorescence très diffuse dans la cellule qu’avec la fusion fluorescente de la version sauvage de MatP. Les cellules MG1655 MatP-Dronpa ont donc été analysées en PALM (figure 39). Les images reconstruites par le logiciel RapidSTORM suivant une résolution de 80 nm, montrent des foci MatP assez fins, aplatis au centre de la cellule. Certaines montrent un positionnement

1 μm Figure 39 : reconstruction de l’observation en PALM- TIRF des cellules d’E. coli exprimant la protéine de fusion MatP-Dronpa (logiciel RapidSTORM).

normal des foci MatP, au pôle ou au septum, tandis que d’autres présentent une localisation de MatP assez anarchique, tout au long de l’axe d’élongation de la cellule. Ceci peut s’expliquer par l’auto-fluorescence des cellules fixées par PFA, ou à l’étape de reconstruction de l’image. Il n’est pas non plus à exclure que la fusion MatP-Dronpa ne soit complètement fonctionnelle. Néanmoins, il semble que Dronpa soit un bon candidat pour la localisation par microscopie à Super Resolution seulement, puisqu’aucune quantification n’est possible. 2) Le BaLM Le principe du BaLM (Bleaching/Blinking assisted Localization Microscopy) est le même que celui du PALM. Seules les caractéristiques optiques utilisées pour isoler les molécules sont différentes. En effet, la re-localisation ne repose non pas sur l’utilisation de protéines fluorescentes photo-activables mais sur les propriétés intrinsèques de clignotement et de blanchiment de protéines fluorescentes standard, telles GFP ou mCherry (Burnette et al., 2011). Cette technique présente ainsi le même désavantage que l’utilisation de Dronpa en PALM, à savoir que la protéine cible ne peut pas être quantifiée. En revanche, cette technique présente l’avantage d’une acquisition plus rapide qui ne dure que quelques minutes, puisqu’elle ne nécessite pas de cycles d’illumination séquentielle. Les cellules ne sont donc pas fixées, ce qui permet de limiter l’autofluorescence. Une fusion fonctionnelle MatP-mCherry en C-ter, déjà construite et utilisée pour d’autres travaux a été exploitée. La reconstruction des images a été réalisée à l’aide du plugin du logiciel ImageJ, QuickPALM suivant une résolution de 80 nm (figure 40). Les foci MatP sont très bien localisés. Néanmoins, comme le PALM, le BaLM ne semble pas permettre de décrire une structure spécifique décrivant l’interaction de MatP avec les sites matS, au cours du cycle cellulaire.

Le surenroulement de l’ADN est un moyen de compaction commun à tous les matériels génétiques. Il a été mis en évidence et particulièrement décrit par l’étude de l’organisation du nucléoïde bactérien où il est négatif (Bauer and Vinograd, 1968). Le surenroulement induit une dynamique structurale supérieure à celle de la seule double hélice d’ADN Watson- Crick (Irobalieva et al., 2015). De ce fait, il a été montré que le surenroulement bactérien est partitionné entre une forme contrainte d’une part et une forme libre d’autre part, qui prend majoritairement la forme de plectonèmes branchés (Boles et al, J Mol Biol, 1990). A ce jour, seul le chromosome de D. radiodurans possède un surenroulement majoritairement toroïdal donc peu diffusible (Levin-Zaidman et al., 2003). Les études menées sur le surenroulement de la chromatine eucaryote sont plus récentes : les nucléosomes qui les organisent, contraignent l’ADN sous une forme surenroulée négative toroïdale (Benyajati and Worcel, 1976) et un surenroulement diffusible a été décelée chez l’homme (Kramer and Sinden, 1997) et chez la drosophile (Jupe et al., 1993). De ce fait, le surenroulement aurait un impact majeur sur la stabilité des nucléosomes (Sheinin et al., 2013), donc sur la régulation des processus ADN-dépendants. En plus, les eucaryotes présentent des domaines topologiques isolés comme chez les procaryotes (Naughton et al., 2013). Il semble que la communauté scientifique soit désormais consciente de l’importance d’étudier la dynamique de la topologie de l’ADN, aussi bien pour l’organisation du chromosome que pour la régulation des processus vitaux (Hirano, 2014).

I. Le système Res : avantages et inconvénients