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2.4 Les formes du phosphore dans les boues

2.4.2 La dephosphatation et la production de boues

Traitement de phosphore ou

dephosphatation

Dans les stations d'epuration depourvues de dispositif de dephosphatation, l'abattement des concentrations en phosphore total de l'euent est compris entre 20 % et 40 % (Mc Ghee, 1991). Ce resultat re ete, en partie, la sedimentation du phosphore organique particulaire dans les eventuelles installations de decantation primaire. Il s'explique surtout par l'assimilation de phosphore soluble par le oc bacterien. En e et, les bacteries utilisent du phosphore pour assurer leur metabo-lisme energetique (voir x1.4, page 14). Elles contiennent en moyenne 1 atome de phosphore pour 100 atomes de carbone. Le phosphore ainsi extrait de l'euent se retrouve integralement dans les boues, sous-produits de l'epuration.

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Cependant, comme il est rappele dans l'introduction, certaines stations sont equipees pour atteindre de meilleures performances quant a l'abattement du phos-phore. C'est notamment le cas d'installations situees sur des bassins versants sen-sibles a l'eutrophisation. La dephosphatation peut ^etre assuree par voie physico-chimique et/ou biologique.

La dephosphatation physico-chimique est generalement assuree par adjonction de sel de fer ou d'aluminium, parfois de chaux. La litterature specialisee invoque generalement la precipitation de strengite, de variscite et le cas echeant d'apatite, pour expliquer ces procedes (Brett et al., 1997; Mc Ghee, 1991; De Renzo, 1978). Ainsi, selon les cas, le dosage des reactifs est calcule a partir des reactions suivantes:

Utilisation de sels d'aluminium : Al2(SO4)3.14H2O+ 2PO3;

4 ! 2AlPO4 #+ 3SO2;

4 + 14H2O Na2Al2O3 + 2PO3;

4 ! 2AlPO4 #+ 2NaOH + 6OH; Utilisation de chaux:

CaO + H2O! Ca2+ + 2OH; 10Ca2+ + 6PO3;

4 + 2OH;

! Ca10(PO4)6(OH)2 # Utilisation de sels de fer:

FeCl3 + PO3; 4 ! FePO4 #+ 3Cl; FeClSO4 + PO3; 4 !FePO4 #+ Cl; + SO2; 4 3FeCl2 + 2PO3; 4 ! Fe3(PO4)2# + 6Cl; 3FeSO4 + 2PO3; 4 !Fe3(PO4)2 #+ 3SO2; 4

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En realite, l'etude des boues produites fait appara^tre des mineraux aux formules structurales plus complexes (voir chapitre 9).

L'emploi de sels de fer produit les meilleurs rendements dans les gammes de pH courantes. L'optimum de precipitation de phosphates ferriques appara^t a des pH relativement acides (4,5{5). Dans le cas des phosphates ferreux, le pH optimal serait plut^ot compris entre 7 et 8. Cependant, des etudes canadiennes indiquent, assez logiquement, que l'adjonction de phosphates ferreux ne produit une precipitation e ective du phosphore qu'apres oxydation des ions Fe2+en Fe3+(Brett et al., 1997). L'adjonction de reactifs peut se faire en plusieurs points de la liere de traite-ment, comme l'illustre la gure 2.5. L'apport en amont de la decantation primaire ameliore le rendement de l'ouvrage quant a l'abattement des matieres en suspension et de la matiere organique. En revanche, a ce stade, la consommation de reactif est maximale. La quantite de boues primaires peut s'accro^tre de 100 % a 200 % lors de l'emploi de chaux en pre-precipitation. Lorsque le precipite de phosphate est recupere avec les boues secondaires dans les clari cateurs (decanteurs secondaires), l'apport de reactif est realise en amont immediat de l'aeration ou directement dans le bassin. Eventuellement, l'injection simultanee en plusieurs points, y compris en aval immediat de l'aeration, peut ^etre employee. En France, ces techniques de pre-cipitation simultanee sont les plus employees. Elles conduisent a des rendements de 70 % a 90 % sur le phosphore. En e et, dans la boue activee, le phosphore initialement organique de l'euent brut est mineralise. A ce stade, il peut donc ^etre precipite. En contre partie, ce mode de dephosphatation engendre un accrois-sement de la quantite de boues produites de 30 % a 65 % (Bowker et Stensel, 1990; Laheurte et Boeglin, 1993). Exceptionnellement, la dephosphatation est assuree au cours d'un traitement tertiaire: c'est le cas de la station d'epuration de Rennes ou une partie de l'euent passe dans un ltre a sable.

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La dephosphatation biologique utilise l'aptitude de certains organismes bacte-riens a accumuler le phosphore sous forme de polyphosphates. Ce phenomene a ete observe par Greenburg et al. des 1955. Pres de 50 % des bacteries impliquees ap-partiennent au groupe Acinetobacter-Moraxella-Mima (Kerdachi et Roberts, 1985; Oerther et al., 1998). Des techniques d'identi cation et d'isolation de ces organismes ont recemment ete proposees par Ubukata et Takii (1980), a partir de l'etude de Microlunatus phosphorovus. L'accumulation de polyphosphates dans ces organismes necessite des mediateurs enzymatiques. Tonkovic (1998) a montre que l'expression des enzymes concernees etait in uencee par les conditions d'oxydoreduction du mi-lieu. Ainsi, la reaction est induite dans les stations d'epuration par des periodes d'anaerobiose qui s'apparentent a un (( stress)) pour les micro-organismes. En fait, une succession de phases anaerobies et aerobies contribue aussi a favoriser la po-pulation bacterienne apte a accumuler les polyphosphates au detriment des autres bacteries. Le rendement epuratoire sur le phosphore en est ameliore.

Déssablage Déshuilage

Décantation primaire

Eventuel traitement tertiaire

(filtre à sable, désinfection filtre lamellaire)

Comptage et rejet Clarification (décantation secondaire) Bassin d'aération (boue activée)

Recirculation des boues Extraction

Effluent brut Dégrillage Pré-traitements Pré-précipitation Précipitation simulatanée Post précipitation Circuit de l'eau Boues Injection de réactif

{

Traitement primaire Traitement secondaire ou biologique

Figure 2.5 {

Schema d'une station d'epuration biologique standard { Points d'injection possibles des reactifs employes pour assurer une dephosphatation physico-chimique.

Plusieurs lieres de traitement biologiques sont employees. Elles di erent par le nombre et la succession des zones anoxiques, anaerobies et aerobies2. Certains procedes ne traitent qu'une partie de l'euent. Ils sont installes en derivation.

Dans les conditions optimales de fonctionnement, le traitement biologique per-met d'eliminer 80% a 85% du phosphore. Le rendement depend de la temperature, de la nature et de la quantite de matiere organique disponible, des caracteristiques de l'euent (rapport entre P, N et matiere organique)

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En France, ce mode de traitement est souvent associe a un traitement physico-chimique complementaire. C'est notamment le principe retenu dans le procede(( Phostrip )).

La dephosphatation biologique n'entra^ne pas de surproduction signi cative de boues. Cependant, elle occasionne des contraintes de gestion de la liere boue. En e et, les bacteries placees a nouveau en conditions anaerobies ont tendance a liberer le phosphore accumule. Ce((relargage))entra^ne des retours excessifs de phosphore en t^ete de station. Les zones tampons avant epaississement sont donc prohibees et l'epaississement doit ^etre assure par ottation ou adjonction de chaux.

2. Ces denominations sont propres a l'ingenierie du traitement des eaux : un milieu anaerobie se caracterise par l'absence d'O2 dissous, mais la presence d'autres accepteurs d'electrons tels que NO;

3 ou SO2;

4 . Dans un milieu anoxique, ces derniers sont absents

Traitement des boues

Apres clari cation, une part des boues extraites est (( recirculee )), c'est a dire renvoyee en t^ete des bassins d'aeration. La fraction concernee est liee a plusieurs parametres de fonctionnement dont la teneur en boue souhaitee dans les bassins d'aeration, la hauteur du voile dans les clari cateurs et, surtout, l'^age moyen des boues. Les boues d'epuration produites en exces ont une teneur en matiere seche inferieure a 5 % (classiquement, 25 a 30gL;1 en sortie de clari cation, apres un traitement biologique). Lorsque la le de traitement comporte une decantation pri-maire, le produit recupere est mixte et comporte une part de boues primaires tres fermentescibles.

Les boues produites doivent ^etre stockees, transportees et eliminees (si possible valorisees). Pour cela, la liere de traitement des boues doit permettre d'en reduire la teneur en eau. Elle vise aussi une stabilisation3 au moins partielle du produit.

Ainsi, les lieres boues comportent une etape prealable de conditionnement. Celle-ci doit permettre de faciliter l'epaississement et la deshydratation. Elle est realisee sur la boue fra^che ou, le cas echeant, apres digestion. Elle consiste no-tamment en l'apport de sels de fer ou d'aluminium, ou de polymeres organiques cationiques (anioniques dans des cas particuliers). Il s'agit donc, pour une part, des m^emes reactifs que ceux de la dephosphatation physico-chimique. Dans les cas du conditionnement, ces reactifs permettent la coagulation et la oculation des particules collodales de charge negative.

L'epaississement permet d'accro^te la siccite4 jusqu'a des valeurs comprises entre 5 % et 10 %. Ce resultat est generalement obtenu par decantation gravitaire. Cependant, dans les stations equipees d'une dephosphatation biologique, l'epaissis-sement est preferentiellement realise par ottation.

La liere peut ensuite comporter une etape de stabilisation. Celle-ci peut ^etre assuree par voie anaerobie dans des reacteurs fermes souvent chau es. On parle alors de digestion anaerobie. Ce procede economise une aeration complementaire et produit un(( bio-gaz)) (essentiellement du methane) qui sert, le cas echeant, de source d'energie dans la station. La stabilisation aerobie necessite une aeration de la boue. Cependant, elle est moins sensible aux variations des caracteristiques de la boue.

Dans les stations d'epuration biologiques recentes, dimensionnees selon les normes des boues activees en aeration prolongee et depourvues de decantation primaire, la digestion est super ue. En e et, l'^age des boues atteint, garantit une stabilite rela-tive du produit. Cependant, pour ces lieres, le conditionnement comporte souvent un apport de chaux. Cette etape peut ^etre consideree comme un moyen d'accro^tre la siccite de la boue ainsi qu'un mode de stabilisation. En e et, c'est generalement

3. La stabilisation de la boue est une reduction de sa propension a entrer spontanement en fermentation. Elle peut ^etre obtenue par un traitement chimique qui vise a inhiber toute activite biologique (chaulage) ou un traitement biologique qui favorise la mineralisation de la matiere organique biodegradable.

4. Taux de matieres seches du produit, generalement exprime en % ou g L;1.

de la chaux vive qui est utilisee. Cette derniere s'hydrate spontanement au contact de l'eau (reaction exothermique). Ainsi le chaulage constitue un apport de matiere seche et, de surcro^t, contribue a consommer de l'eau. Il favorise ainsi l'augmen-tation de la teneur en matiere seche de la boue. Par ailleurs, la chaux possede une action bactericide ecace en raison de l'accroissement du pH qu'engendre sa solubilisation. C'est ainsi qu'elle contribue a la stabilisation.

En n, dans les stations plus importantes, la siccite des boues est encore accrue a n de permettre le stockage. Cette derniere etape consiste generalement en une deshydratation mecanique. Les ltres a bandes ainsi que les centrifugeuses classiques permettent d'obtenir des boues deshydratees p^ateuses de 15 a 25 % de siccite. Les centrifugeuses de conception plus recente permettent d'obtenir un produit a pres de 30 % de matieres seches. Les ltres presses sont employes pour obtenir un produit dit(( solide)) entre 30 et 50 % de siccite. En n, le sechage thermique est utilise sur les installations les plus importantes, lorsque les contraintes de transport de la boue sont importantes. Il permet d'obtenir un produit contenant moins de 10 % d'eau.