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La construction des échantillons des villes

Les distributions rang-taille en Chine et en Inde

2.2 Base de données - Echantillonnage

2.2.2 La construction des échantillons des villes

Dans cette thèse, les villes chinoises et indiennes sont définies de façon administrative. La raison principale de ce choix réside dans la possibilité d’obtenir des séries statistiques annuelles fiables pour la période étudiée, ce qui aurait été impossible avec une définition fonctionnelle.

Les échantillons des villes sont construits en fixant la borne inférieure à une taille égale à 100000 habitants. Ce choix se justifie par la conjonction de trois facteurs. D’abord, cette taille semble être le seuil de définition statistique de la ville dans les deux pays, même si le cas chinois s’avère plus compliqué, compte tenu des nombreux changements dans les découpages administratifs que le pays a opérés depuis cinquante ans. Ensuite, les villes, en dessus de ce seuil, représentent, en 2001, 59,01% de la population urbaine chinoise et 69,25% de la population urbaine indienne respectivement, ce qui signifie qu’elles illustrent, de façon conséquente, une grande partie des dynamiques urbaines en cours. Enfin, en dessous de ce seuil, les séries statistiques annuelles des populations des villes sont fortement incomplètes, notamment pour l’Inde, ce qui aurait conduit à l’élimination de nombreuses villes dans les études économétriques, en faussant, ainsi, la représentativité des résultats obtenus.

Pour la Chine, les sources statistiques utilisées sont celles des Chinese Urban Statistical Yearbooks,13. Le pays a connu trois grands changements dans la définition administrative et statistique des aires urbaines et rurales, intervenus en 1945, 1963 et 1984. Obéissant aux impératifs politiques de contrôle des migrations par le système Hukou, les deux premiers s’appuient sur des critères très sélectifs de la définition d’une ville avec, comme résultat, une diminution très forte du nombre de villes et de la population urbaine. Ainsi, le changement d’échelle et de définitions en 1963 a conduit

13 Une partie des données des Chinese Urban Statistical Yearbooks a été récupérée auprès

de la Banque de données de l’Université de Michigan, (University of Michigan Database), directement connectée au China Statistical Office.

à une diminution de 41,7% du nombre officiel de villes. La modification de 1984 a assoupli les critères de définition d’une unité urbaine, ce qui a conduit à un recensement de 210 villes supplémentaires par rapport à 1982. Ces changements conduisent à des fortes discontinuités dans les séries statistiques chinoises et posent de nombreux problèmes pour l’analyse des évolutions de long terme (Wu, 1994 ; Kojima, 1995 ; Zhang et Zhao, 1998 ; Zhou et Ma, 2003 ; Anderson et Ge, 2005 ; Xu Lai, 2008).

De façon officielle, la population urbaine en Chine est définie comme la population non agricole dans les aires urbaines ou les villes, en fin d’année civile. Le principe de base de cet indicateur est l’enregistrement de la population sur le lieu de résidence principale. Cependant, à partir du recensement de 1984, une partie de la « population temporaire » est également comptabilisée. En 2000, cette application a été élargie à l’ensemble de la population temporaire des villes.

Il est important de noter que depuis 1984, et surtout en 2000, la définition administrative des villes et des bourgs, outre les critères démographiques, s’est enrichie de critères économiques et géographiques, permettant d’avoir une vision nettement plus fine du système urbain chinois. Ainsi, le critère d’une densité minimale de 1500 habitants/km2, retenu pour désigner un espace urbain, est étendu aux centres-villes des arrondissements et des bourgs, ce qui signifie que les villes chinoises revêtent, dorénavant, des formes et des tailles géographiques différentes.

Par ailleurs, un critère de contiguïté des zones urbaines est adopté, afin de pouvoir comptabiliser en une seule unité des bourgs, anciennement séparés et aujourd’hui fusionnés sous l’ampleur de l’étalement urbain.

Enfin, des critères économiques, tels que le PIB par habitant, ont été introduits dans la définition urbaine, permettant notamment le reclassement de certains bourgs ou districts ruraux en bourgs et districts urbains, même si la population non agricole est minoritaire.

L’ensemble de ces modifications donne une vision plus fine du système urbain chinois, mais conduit en même temps à une définition moins tranchée de la ville, avec une superposition de plusieurs niveaux

– auxquels il faut ajouter les quatre municipalités relevant directement de l’autorité centrale -, qui peuvent se voire attribuer le qualificatif urbain.

Ainsi, en 2004, 4 villes ont le statut de quasi-province, 283 villes le statut préfectoral et 374 villes le statut de district, mais plusieurs arrondissements ou bourgs sont également définis en tant qu’aires urbaines (China Statistical Yearbook, 2004). L’annexe 2.2 présente un organigramme du découpage administratif territorial en Chine en indiquant les différents niveaux de définition d’une unité urbaine.

Dans cette thèse, les séries des villes chinoises vont de 1984 à 2004.

Elles s’appuient sur la définition actuelle de la ville en Chine, en vigueur depuis les modifications administratives de 1984 et 1991, ainsi que les ajustements apportés en 2000. Le choix de commencer en 1984 est lié à un choix de fiabilité statistique, car le National Bureau of Statistics chinois propose des séries de données des villes ajustées aux critères de 2000, jusqu’à cette date ; avant 1984, les données sur les tailles des villes correspondent aux critères des recensements précédents et ne sont donc pas exploitables. Par ailleurs, certaines corrections ont été apportées aux données obtenues et certaines villes ont été exclues de l’échantillon, du fait d’une absence d’informations pour certaines années14. Enfin, ni Hong Kong, ni les villes du Tibet ne sont comptabilisées.

Pour l’Inde, les données de base proviennent des recensements généraux de population (Census of India), opérés tous les dix ans. La définition actuelle d’une aire urbaine est celle qui fut établie en 1961 et corrigée en 1981. Elle s’appuie sur deux critères de base : une représentation institutionnelle et un ensemble de critères économiques et démographiques, tels que la taille de la population (le seuil minimal exigé est de 5000 habitants), la proportion de la main d’œuvre non agricole (75% des travailleurs doivent être engagés dans des activités non agricoles), et la densité de population (au moins 400 habitants/km2).

14 Le travail de « toilettage » de l’échantillon a été mené en collaboration avec S.Fu, chercheur à la South-Western University of Finance and Economics de Chengdu et Z.Chen, chercheur à l’University of International Economics and Finance de Beijing, dans le cadre d’une collaboration de recherche (Dimou et al., 2008).

Ces critères posent, néanmoins, certains problèmes. En premier lieu, ils peuvent induire des omissions car de nombreuses localités, dans les Etats indiens ruraux, semblent tournées vers l’agriculture, tout en remplissant les conditions démographiques pour être désignées en tant qu’aires urbaines (Bhagat, 1992). En second lieu, le seuil de 5000 habitants est probablement trop faible pour désigner une ville. C’est la raison pour laquelle le Census indien définit les villes (Classe I) comme les seules unités urbaines qui affichent une population supérieure à 100000 habitants15. Ainsi, parmi les 5161 unités urbaines en 2001, seules 483 ont le statut de ville. Comme en Chine, elles peuvent revêtir différentes formes institutionnelles, selon leur taille : districts, sous-districts, blocks. L’annexe 2.3 propose une présentation de l’organigramme institutionnel du territoire indien.

A partir de 1981, la définition des unités urbaines de Classe I tient compte des effets de l’étalement urbain, en modifiant leurs frontières géographiques. Ceci rapproche fortement la définition de ces unités à celle des villes fonctionnelles. C’est la raison pour laquelle, dans certains classements internationaux qui retiennent des critères administratifs de définition des villes, les grandes villes indiennes apparaissent en première et deuxième position, leur aire administrative se confondant avec l’aire d’agglomération, contrairement aux villes des autres pays.

Les villes d’Assam et du Jammu et Kashmir ont été exclues de l’échantillon car il n’y a pas eu de recensement, en 1981 et en 1991 respectivement dans ces deux Etats, pour des raisons de troubles politiques.

Enfin, l’échantillon des villes indiennes est construit sur la période 1981–2001. La raison principale de ce choix est liée aux limitations imposées par les sources statistiques. La source la plus fiable est celle des Census qui ont lieu tous les dix ans (1981–1991–2001), en rappelant qu’un

15 Le Census indien considère cinq types d’unités urbaines, selon leur taille. Seules les unités urbaines de Classe 1 (avec une population supérieure à 100 000 habitants sont désignées en tant que villes. Les autres cinq classes – qui peuvent également être des unités rurales - vont de 50 000 à 99 999 (Classe II), de 20 000 à 49 999 (Classe III), de 10 000 à 19 999 (Classe IV) et de 5 000 et 9 999 habitants (Classe V). Une sixième classe comprend les localités de moins de 5 000 habitants qui ne peuvent être qualifiées

certain nombre de changements de définitions de la ville en 1981 rend difficile la comparaison avec les décennies antérieures.

Par ailleurs, il a fallu établir des données annuelles pour les villes de plus de 100000 habitants, car ces séries statistiques n’existent pas. Elles ont été élaborées grâce à deux séries de données obtenues de sources différentes : celles de la croissance démographique naturelle, publiées annuellement par le Registrar General of India et celles des migrations rurales – urbaines, disponibles dans les Migration Tables annuelles. Ces informations ont été fournies, sur commande, par Datanet qui est une émanation du Department of Statistics, Planning and Public Grievances du gouvernement indien16.

Pour chaque ville, il a fallu ajouter, les soldes démographiques naturel et migratoire annuels sur les données obtenues par les Census. Les écarts entre les résultats de ces calculs et ceux obtenus par les Census pour les années 1991 et 2001 sont minimes, ce qui nous permet de considérer que ces séries de données sont pertinentes. Ce travail fut extrêmement long et minutieux mais a permis de construire la seule base de données existante de ce type – à notre connaissance - pour les tailles des villes indiennes.

Les choix présentés ci-dessus permettent la construction d’échantillons de villes chinoises et indiennes comparables entre eux et dans le temps.

Certes la période de référence (1984–2004, pour la Chine et 1981–2001 pour l’Inde) est courte pour saisir des dynamiques urbaines. Néanmoins, ces périodes correspondent à des mutations économiques, sociales et politiques profondes accélérées dans ces deux pays, d’où l’intérêt d’étudier leurs effets éventuels sur les systèmes urbains correspondants.

16 Depuis trois ans, cet organisme entretient le site indiastat.com qui fournit un ensemble

de données statistiques sur l’Inde et qui propose également des prestations de service individualisées.

2.2.3 Caractéristiques des échantillons des villes