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Publiée à la fin des années 1880, une illustration vouée à perpétuer la mémoire de Martyrs de Chicago160 [Fig. 7] se trouva rapidement au centre d’une polémique

interprétative. Mettant en scène les martyrs pendus devant lesquels se recueille une foule éclectique, cette représentation, initialement conçue pour être vendue et diffusée

159 Dès les années 1880, les relations sont parfois difficiles entre les anciens communards et les

anarchistes. Jules Guesde, devenu socialiste, et Henri de Rochefort sont souvent, pour une raison ou une autre, dénoncés dans les journaux. La Révolte publie en juin 1888, une courte annonce mentionnant sa relation houleuse avec Rochefort et son journal L'Intransigeant. « Vengeance d'un marchand de papier », La Révolte, vol. 1, n° 37 (16-22 juin 1888), p. 1.

160 Martyrs de Chicago (1886). George Engel, Samuel Fielden, Adolph Fischer, Louis Lingg, Oscar

Neebe, Albert Parsons, Michael Schwab et August Spies, anarchistes américains, furent arrêtés suite aux émeutes de Haymarket Square durant lesquelles une bombe lancée tua plusieurs policiers. La moitié d'entre-eux fut exécutée, un autre se suicida en prison. Voir Robert Justin Goldstein, Political

Repression in Modern America: From 1870 to 1976, Chicago: University of Illinois Press, 2001, pp.

comme image de propagande dans les milieux du journal La Révolte, fut à l’origine d’une controverse qui réduisit de beaucoup les attentes face à son potentiel de propagande et de vente. Dans

ses mémoires, Jean Grave qualifie l'eau-forte « d'assez mal réussie » l'excusant laconiquement en ajoutant « c'était notre début161 ». Un

détail de l’image, soit l’individu entretenant au premier plan la flamme dans une vasque, apparut à plusieurs comme un prêtre, donnant à l’eau-forte un c a r a c t è r e m y s t i q u e inacceptable. Félix Dubois

cite les propos d’un anarchiste au sujet de l’image : « Sans cette erreur, c’est cent- mille exemplaires que nous eussions répandus parmi les camarades de tous les pays pour que la vue de leur martyre réchauffât sans cesse leur zèle162 ». Premier exemple

161 Jean Grave, Le Mouvement libertaire sous la Troisième République, op. cit., p. 303. 162 Félix Dubois, Le Péril anarchiste, op. cit., pp. 146-147.

Fig. 7. Tilly, « Les Martyrs de Chicago », c1888.

de production d'une image moralisatrice répondant à l'appel de Kropotkine, « Les Martyrs de Chicago » fut l'objet d'une prise de conscience de la nécessité d'un exercice de définition identitaire et moral du mouvement anarchiste en face de l'actualité révolutionnaire. En effet, loin d’être liée à la volonté, exprimée par Le

Révolté, de glaner dans les journaux des illustrations déjà faites, la production

d’images originales suppose l’intervention de divers acteurs dont les références idéologiques et culturelles peuvent entrer en contradiction avec la doctrine. Cette polémique indique à quel point l’image de propagande est considérée comme devant à la fois répandre l’Idée, mais également rendre correctement l’image que le mouvement anarchiste souhaite donner de lui-même.

L’idée d’encourager la réflexion sur un certain nombre de sujets et de rendre plus cohérentes les actions révolutionnaires en rendant compte de leur actualité est une motivation commune à la plupart des organes de presse anarchiste. Mais une motivation plus précise semble habiter Émile Pouget, soit celle d’offrir au mouvement anarchiste un organe différent des journaux de propagande théorique, de créer une publication qui soit susceptible par sa forme d’embrasser plus largement une tradition révolutionnaire, dont la mythologie reste influente dans la culture populaire. Richard D. Sonn fait l'hypothèse qu'une bonne part de la popularité du mouvement anarchiste repose sur sa capacité à reformuler les valeurs associées à la culture populaire dans des termes idéologiquement connotés.

Anarchist and popular culture were not coterminous, but the former was derived selectively from the latter, and the movement owed its appeal largely to the degree to which its ideology corresponded to prevailing lower-class values. The movement's vitality was due to the anarchist's ability to rephrase the popular mentality in the desired ideological terms, and in doing so encourage a distinctive anarchist culture. This culture reflected such fundamental structures of discourse as lower-class speech or argot, which disposed its speakers to accept anarchist interpretations of social reality. Such mental structures helped compensate the anarchists for their lack of more overt structures of political organization163.

Bien qu'il soit problématique d'associer tout le mouvement anarchiste français à une telle utilisation de la culture populaire, et plus encore de présupposer que cette culture ou cette « mentalité » soit une entité identifiable en tant que telle, l'analyse que fait Sonn correspond bien à certaines pratiques du Père peinard. Pouget participe à la construction d'une culture anarchiste entièrement fondée sur une filiation entre les révolutions qui ont jalonné le siècle, créant un climat d'urgence révolutionnaire pour la fin du siècle, mise au défi de venger les révolutions du passé. Les événements de 1789, 1848 et 1871 sont convoqués par les textes et les images pour manifester l'identité du journal comme produit culturel solidement positionné dans le sens de l'histoire, et comme l'expression d'une masse de lecteurs dont la conscience et la valeur sont susceptibles de provoquer un retournement révolutionnaire de cette même histoire. Peu porté vers la mise en scène d’une culture populaire réifiée, le journal a comme premier réflexe identitaire de signifier son respect pour la Révolution

française désormais centenaire par le bonnet phrygien qui apparaît en couverture de publication le 14 juillet 1889 et qui orne de manière plus ou moins définitive la couverture pendant les semaines suivantes.

À l’évidence, Pouget peut compter dès le lancement de sa publication sur certaines amitiés dans les cercles artistiques, tel qu’en témoigne son frontispice [Fig. 8], qui se métamorphosera au gré des changements de format du journal Le Père

peinard de 1889 à 1900.

Véritable allégorie du journal lui-même et de la place qu’il estime être la sienne dans la vie politique française, ces dessins reproduisent en toutes lettres l’autopublicité du journal, synthèse efficace de son identité : « Bons bougres, lisez tous les dimanches Le Père peinard. Sous ce titre, chaque s e m a i n e l e g n i a f f

Fig. 8. Maximilien Luce, « Frontispice pour Le Père peinard », 1889.

journaleux, publie ses réflecs où il ne mâche pas leurs vérités aux jean-foutres de gouvernants et de patrons164. »

L’utilisation d’un personnage incarnant le journal, le Père peinard, est directement inspirée du Père Duchesne [Fig. 9], le journal des hébertistes165, et

contribue à magnifier sa filiation avec la culture médiatique de la Révolution française, répondant à une volonté de faire vivre une culture révolutionnaire passée que Pouget sent mourante en face des diverses tendances politiques se réclamant du peuple pour faire valoir leur place dans la politique contemporaine166. Cette

filiation avec le Père Duchesne prend aussi son sens dans la pérennité culturelle

164 Publicité en dernière page jusqu’en décembre 1890.

165 Xose Ulla Quiben, Émile Pouget. La Plume rouge et noire du Père Peinard, Toulouse : Les Éditions

libertaires, 2006, pp. 73-74.

166 Voir une synthèse faite par Pouget lui-même des principales motivations événementielles et

historiques qui l'incitèrent à fonder le Père peinard. Dans Almanach du Père peinard. Farci de

galbeuses histoires et de prédictions épatarouflantes pour 1894 - an 102, Paris : SPAG, 1984, pp.

31-37.

Fig. 9. « Frontispice pour Le Père Duchesne », c1790.

du journal, d'abord associé à la Révolution française, avant de renaître en 1848, puis durant la Commune de Paris167. C'est donc, pour le Père peinard, un moyen de

signifier ce qu'il associe à son identité historique, et d'incarner la continuité d'une culture populaire révolutionnaire qui baignerait tout le XIXe siècle.

À un premier frontispice, évoquant le Père peinard rédigeant dans son atelier de cordonnerie [Fig. 8], succède un nouveau frontispice [Fig. 10] qui propose une vue plus large dans laquelle de vastes fenêtres s’ouvrent sur la rue168. Le

cordonnier est toujours absorbé par ses pensées, mais il compte maintenant sur une camarade se chargeant de la cuisine et de la vente du journal, et l'arrivée d'un compagnon marque le rapport de proximité entre la rédaction et son

167 La collection de l'IISG contient une gamme importante de publications prenant comme titre le Père

Duchêne, qui furent publiées de manière discontinue tout au long du XIXe siècle et témoignant d'une

filiation avec le Père Duchesne original.

168 Le Père peinard, 2e année, n° 62 (25 mai 1890).

Fig. 10. Maximilien Luce, « Frontispice pour Le Père

peinard », 1890.

lectorat. Exécutés par Maximilien Luce, ces deux frontispices font écho à sa production picturale, en particulier à la scène d'intérieur intitulée Le Cordonnier, les

deux frères Givort [Fig. 11]. Comme le mentionne Robyn Roslak, l'ambiance de

l'œuvre, montrant le cordonnier travaillant sereinement à sa table, laisse de côté la représentation des difficultés quotidiennes des travailleurs parisiens pour se concentrer sur la dignité de leur rôle dans l'économie urbaine169. En reprenant ce

thème pour figurer un autre cordonnier, détourné de son travail principal pour s'adonner à la propagande, Luce semble vouloir associer Le Père peinard à ce même travail manuel. Symbole du travail artisanal opposé aux grands ateliers commerciaux

169 Robyn Roslak, Neo-Impressionism and Anarchism in Fin-de-Siècle France, op. cit., pp. 45-47.

Fig. 11. Maximilien Luce, Le Cordonnier, les deux frères Givort, 1884.

associés au développement industriel, l’atelier du Père peinard incarne une résistance à ces changements structuraux en valorisant l’image de l’homme de métier bien implanté dans un lieu défini duquel il s’émancipe170. Figurant l’écriture et la vente du

journal comme une activité subversive préparée en coulisse de l’actualité et reprenant l’image du révolutionnaire agissant dans la clandestinité, le frontispice du Père

peinard trace les contours les plus fondamentaux de l’identité du journal et de son

éditeur.

Apparu au cours des années suivantes, le frontispice du Père peinard justicier [Fig. 12 et Fig. 13] mettant en fuite les élites politiques, économiques et religieuses demeurera le modèle de base jusqu’à la fin de la publication. Sorti de son atelier, rendu confiant de la légitimité de sa lutte, le Père peinard n’agit plus dans l’obscurité de son atelier, mais fait figure d’acteur politique s’agitant dans la sphère publique. Réorganisant la composition du frontispice, lui ajoutant des détails, augmentant la lisibilité à l’aide de légendes écrites toujours plus nombreuses et palliant aux manques dans la définition du dessin, les transformations successives du frontispice s’accompagnent d’une moralisation croissante du Père peinard qui peut être associée

170 Nicolas Pierrot, « À l’époque où l’ouvrier sévissait dans l’art... » La représentation du travail

industriel en France dans la peinture de chevalet, 1870-1914 », dans Des plaines à l’usine. Images du

Fig. 13. Maximilien Luce, « Frontispice pour Le Père peinard », 1892. Fig. 12. Pol Cizoc, « Frontispice pour Le Père peinard », 1891.

[Illustration retirée]

à la popularité grandissante du journal de Pouget171, et plus symboliquement à la prise

d’importance de l’anarchisme dans l’univers politique français172. Il est probant

qu’avec les années, le journal semble affirmer toujours plus catégoriquement ses intentions, mais également ce qu’il conçoit être son identité politique. Dans ce cadre, les illustrations agissent le plus souvent comme de véritables allégories de l’action politique du journal et il est significatif qu’avant même de publier des illustrations pouvant servir la propagande, Pouget ait souhaité en faire usage pour la publicité de son journal.

La définition et l'analyse du lectorat-type d'un journal recèlent une difficulté considérable pour l'historien de la presse, souvent contraint à utiliser comme matériau primaire ce que le journal lui-même répercute de la relation qu'il génère entre ses éditeurs, ses auteurs et ses lecteurs173. Si la grande presse se caractérise précisément

par sa capacité à fédérer un groupe de lecteurs issus de classes sociales diverses, la question du lectorat des journaux spécialisés pose de nombreux problèmes parmi lesquels l'impossibilité d'établir une relation statistique entre tirage et lectorat, les

171 Vivien Bouhey, citant un rapport de la préfecture de police, souligne qu'en 1891 « le tirage de La

Révolte arrive à peine aujourd'hui à 3500 exemplaires, tandis que le Père peinard dépasse les 16 000 »

et que « dans toutes les réunions anarchistes des groupes parisiens on ne s'occupe que de la transformation du Père peinard en journal quotidien ». Vivien Bouhey, Les Anarchistes contre la

République. Contribution à l'histoire des réseaux sous la Troisième République (1880-1914), op. cit.,

p. 229.

172 Aline Dardel, Les Temps nouveaux, 1895-1914. Un hebdomadaire anarchiste et la propagande par

l’image, op. cit., p. 11.

173 Johanna M. Smith, « Textual Encounters in Eliza Cook's Journal: Class, Gender, and Sexuality »,

inadéquations socio-économiques entre l'univers des abonnés, les ventes en kiosques et les réseaux de diffusion parallèles et, finalement, la conservation des journaux dans des lieux voués à la consultation publique versus les pratiques privées de collectionnement, rendent problématique toute tentative de systématisation du lectorat-type des journaux.

Dans ce cadre, le Père peinard constitue un cas particulier, le journal portant une attention constante à la mise en représentation de son lectorat, et donnant des indices sur son rapport subjectif à divers types de lecteurs, à défaut de fournir des indications matérielles objectives sur celui-ci. Dès l’éditorial inaugural de sa publication, Pouget doit se défendre des remarques assez dures exprimées par ses lecteurs face à son choix de vocabulaire. Une telle situation est aussi l'occasion pour lui de définir au plus près son lectorat de prédilection, au moins celui qu'il pense pouvoir rejoindre :

Les types des ateliers, le gas des usines, tous ceux qui peinent dur et triment fort, me comprendront. C’est la langue du populo que je dégoise ; et c’est sur le même ton que nous jabottons, quand un copain vient me dégotter dans ma turne et que j’allonge les guiboles par-dessus ma devanture, pour aller siffler un demi-setier chez le troquet du coin. Être compris des bons bougres c’est ce que je veux – pour le reste je m’en fous!174

174 Émile Pouget, « Comme quoi le Père Peinard se fout journaliste », Le Père Peinard, n° 1 (24 février

Tout comme les portraits de révolutionnaires et les allégories historiques, les références historiques de Pouget servent à situer le mouvement anarchiste dans une culture symbolique de la révolution, mais l'iconographie développée par le Père

peinard et la mise en scène d'un rapport de proximité avec son lectorat participent à la

construction de l'identité de l'individu révolutionnaire dans le mouvement anarchiste. En ce sens, il n'est pas anodin de voir Pouget rechercher les filiations avec les types et stéréotypes de la culture populaire, lui permettant de se détacher de l'héroïsation des figures et événements du passé pour situer l'anarchiste dans son quotidien.

Lié à Montmartre par la situation géographique de son bureau de rédaction et par son jargon, le Père peinard a été l’objet de mises en relation avec la culture de la Butte175, souvent caractérisée comme le lieu de naissance de la culture de masse176.

L'utilisation exclusive par le journal de l’argot populaire associé à la culture des cabarets montmartrois177 est sans doute due à l'intérêt de Pouget pour la presse

175 Howard G. Lay, La Fête aux boulevards extérieurs : Art and Culture in Fin de Siècle Montmartre,

PhD. Dissertation, Harvard University, 1991; Howard G. Lay, « Beau geste! » (On the Readability of Terrorism) », Yale French Studies, n° 101 (2001), pp. 79-100.

176 Howard G. Lay, « Réflecs d’un gniaff : On Émile Pouget and Le Père Peinard », dans Dean de la

Motte and Jeannene M. Przyblyski (éds) Making the News : Modernity and the Mass Press in

Nineteenth-Century France. Amherst : University of Massachussetts Press, 1999, pp. 82-138. Il est

nécessaire de souligner que l’intention est initialement distincte de celle des cabarets. L’idée selon laquelle ces cabarets incarnent la première manifestation d’une culture de masse peut se défendre à la lumière de la mise en scène d’une certaine idée de la culture populaire, ajoutant à des caractéristiques avérées de cette dernière une part de caricature visant par une forme rhétorique à en évacuer les caractères plus ou moins intéressants en termes de spectacle.

177 Pour une discussion complète des relations entre la culture des cabarets et les anarchistes, se référer

satirique qu'il collectionna178. Cet intérêt confirme partiellement l'hypothèse de Sonn:

la reformulation de cette culture populaire connotée par les pratiques artistiques d'Aristide Bruant179, Maxime Lisbonne180 et Rodolphe Salis181 par le Père peinard est

certainement avérée, mais elle n'est pas unilatérale et son efficacité supposée vient également de la représentation des valeurs révolutionnaires des anarchistes dans la culture des cabarets182. Certaines images y étant publiées manifestent effectivement

leur affection pour ce lieu en représentant le type de l’homme du peuple planté au sein d’un décor distinctif de la Butte, rappelant à plus d'un titre les images de

178 Selon Xose Ulla Quiben, les archives de Pouget conservent de nombreux exemplaires des journaux

achetés par ce dernier : Le Chat noir, La Griffe, La Bombe, Le Pétard, L’Anti-concierge. Selon l’auteur « Un journal se détache du lot, L’Assommoir, hebdomadaire se voulant « politique, satirique et littéraire ». Si le contenu ne semble en rien avoir marqué Pouget, par contre il s’est inspiré de la pagination de ce journal mettant en valeur les articles par de petites vignettes illustrées. » Dans Xose Ulla Quiben, Émile Pouget. La Plume rouge et noire du Père Peinard, op. cit., p. 73.

179 Aristide Bruant (1851-1925). Chanteur de café-concert, compositeur et poète, il participa au Chat-

noir et publia de nombreux recueils de chansons, romans et pièces de théâtre mêlant argot et folklore chansonnier.

180 Maxime Lisbonne (1839-1905). Participant de la Commune exilé en Nouvelle-Calédonie, il revient

en France lors de l'amnistie en 1880. Il s'implique par la suite dans les milieux militants et dans différents projets de cabaret.

181 Rodolphe Salis (1851-1897). Fondateur et animateur du Chat noir, il joua un rôle considérable dans

la vie culturelle parisienne des années 1880.

182 Bien que l'argot populaire du Père peinard recèle une dimension spectaculaire, il convient de

mentionner qu'au-delà du langage formel, Pouget partage avec Aristide Bruant par exemple un intérêt pour les manifestations de révolte populaire telles la Commune qui occupent une place importante dans l'imaginaire social et artistique des deux hommes. Voir David Sweetman, Explosive Acts :

Toulouse-Lautrec, Oscar Wilde, Félix Fénéon and the Art and Anarchy of the Fin de Siècle, op. cit., pp.

130-131. Maxime Lisbonne publia également dans le journal de son cabaret La Gazette du Bagne, un portrait de Louise Michel accompagné d'un texte biographique. Lisbonne hébergea les réunions de groupes subversifs tout en proposant des spectacles de cabaret satirisant tout à la fois les mondanités des élites politiques républicaines et les pratiques révolutionnaires. Voir Richard D. Sonn, Anarchism

Théophile-Alexandre Steinlen183 publiées dans Le Mirliton de Bruant184. Les images produites par Pol Cizoc [Fig. 14]

figurent moulins, dénivellations et rues étroites, rares dans le Paris fin de siècle où l’haussmannisation a fait son œuvre. Si l’on ne peut nier que le Père peinard use de l'argot et de l'imagerie populaire comme d ’ u n e s t r a t é g i e d e c o m m u n i c a t i o n c e n s é e témoigner de son authenticité, il faut aussi remettre plus largement en contexte cette utilisation qui vise d’emblée à donner à ce nouveau journal une identité dont les référents

historiques et esthétiques soient rapidement perceptibles.

183 Théophile-Alexandre Steinlen (1859-1923). Dessinateur et lithographe suisse, il fut proche du

milieu des cabarets montmartrois et participa à l'illustration de nombreuses revues et journaux