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La compétitivité : méprises et critiques

4-1-1- La course concurrentielle entre pays et le jeu à somme nulle : selon Krugman,

les politiciens préfèrent bien lier les fondements des déséquilibres comme le chômage, par exemple, au manque de compétitivité vis à vis des partenaires étrangers. Alors, ils réduisent l'économie internationale à un combat entre nations qui amènerait une situation dite de jeu à somme nulle, c’est-à-dire que ce qu'un pays gagnerait dans le commerce international, son partenaire le perdrait.

La multiplication des anti-mondialistes confirme cette idée selon laquelle, dans le commerce international, il y a un perdant et un gagnant et que si on ne peut pas gagner, alors il ne faut pas accepter d'échanger. Dans cet ordre d’idée, les pays en voie de développement se feraient exploiter par les pays développés, alors que ces derniers seraient dans l’incapacité de concurrencer devant les pratiques déloyales de dumping social ou monétaire employées par les pays en voie de développement. Il serait donc judicieux d’inciter les uns et les autres à décliner les propositions d’échange.

Il clair qu’aucun pays n’accepte un échange dont il en sortirait perdant. Or, les commentateurs s’accorderaient à dire que ce ne sont pas toujours les mêmes qui perdent, parfois ce sont les pays développés et d’autres les pays en développement qui perdent.

4-1-2- Avantages comparatifs et les trois lacunes : Ces points de vue concernant la

compétitivité internationale négligent trois choses importantes.

Premièrement, il faut considérer les théories du commerce international dans ce domaine. Ainsi, la théorie de Ricardo confirme que l'échange international au niveau des pays est un jeu gagnant-gagnant. La deuxième méprise est encore plus répandue puisqu'on juge à tort que cette théorie est une " doctrine " qui plus est, libérale, qui serait une justification du tout marché et du " laissez-faire, laissez passer ".2

En réalité, l’idée principale de l'avantage comparatif c’est qu’il est applicable et adéquat aussi bien pour une économie planifiée que pour une économie de marché, puisqu'il s'agit de se dire qu'il vaut mieux se spécialiser dans ce que l'on sait le mieux faire et d'échanger ensuite ses compétences contre celles d'un partenaire.

1

- LACHAAL, L., La compétitivité : Concepts, définitions et applications. Op.cit. P. 30.

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Finalement, la troisième confusion concerne les conséquences du commerce international. Dans la mesure où le commerce permet aux nations d'échanger leur savoir faire et leurs compétences, il est mieux que le non-échange. Néanmoins dans le processus d'échange, les pays qui produisent les biens substituts des importations sont plus menacés par la compétitivité d'autres pays (la concurrence internationale) que ceux qui fabriquent les biens exportés qui font, en revanche, un gain. Par exemple, l'industrie du textile, ses territoires, ses salariés, seront menacés par les importations asiatiques et ces secteurs vont perdre de l'importance rendant difficile la reconversion des ouvriers et des régions. Tant dis qu’une autre industrie embauchera et fera enrichir sa région et son pays d'implantation. La théorie économique nous apprend alors que, pour que le gain soit bien réparti sur l'ensemble de la nation, il faut garantir une fonction de distribution des gagnants vers les perdants. Si cette fonction de répartition fonctionne mal, il faut alors se poser la question de l'efficacité de l’Etat et de ses agents plutôt que de remettre en cause l'échange lui-même. La question de la compétitivité est alors repoussée vers le haut, vers les rouages de l'Etat lui même et sa gouvernance globale. Un pays compétitif serait donc un pays avec une bonne gouvernance de l'Etat. L’absence de corruption, la transparence et la démocratie deviendraient alors les facteurs décisifs de la compétitivité d'une nation. On constate toujours que les pays qui réalisent le moins de croissance et d'amélioration de bien être à l'ensemble de leur population sont aussi ceux qui sont le plus souvent en guerre, où l'on remarque une absence de démocratie et où la corruption touche profondément le système économique et social.1

4-1-3-Avantages comparatifs et compétitifs : le pays comparé à une grande entreprise : D’après l'ex-président américain Bill Clinton, chaque pays " est comme une

grande entreprise en concurrence sur le marché mondial ". Les Etats-Unis, l'Europe et le Japon seraient par exemple des concurrents de la même manière que les compagnies de Coca-Cola et Pepsi-Cola.

Mais selon Krugman, il est clair que cela n'a rien à voir pour de nombreuses raisons : Une firme par définition vend tout ou quasiment à l'extérieur de son organisation. La situation est entièrement différente pour un pays où la plus grande partie (entre 60 et 90 %) de ce qui est produit dans le pays est consommé par les consommateurs de ce même pays. 2

1

- Ibid.

2

- MUCCHIELLI, J-L., 2002. La Compétitivité : définitions ; indicateurs et déterminants. Dossier team. PP. 9-10.

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4-1-4- Les méprises entre attractivité et compétitivité : En fait, il existe des

contradictions entre certains concepts de compétitivité internationale, la plus claire c’est celle qui concerne le commerce extérieur et les investissements étrangers. Au premier abord, une nation est considérée compétitive si elle est capable de maintenir ses parts de marché à l'étranger et son excédent commercial et avoir, parallèlement, un territoire compétitif, c'est-à-dire capable d'attirer des investissements étrangers sur son sol. Si son territoire est plus attractif que celui des autres nations, il devrait y avoir moins d'investissements sortants que d'investissements entrants et la balance des capitaux directs devrait être excédentaire. Mais, du point de vue macroéconomique les deux positions sont simultanément difficiles à envisager. Partant du principe comptable que la balance des paiements, comme document comptable, doit être équilibrée et que celle-ci est composée de la balances des biens et services (BC) et de la balance des capitaux (BK), alors, on a l'équation d'équilibre suivante :

BP= BC + BK avec BP = 0 => BC = - BK

La balance des biens et services va être l'inverse de la balance des capitaux. Donc un déficit des capitaux va coïncider avec un excédent commercial et vice versa.1

4-2- Critiques de la compétitivité

4-2-1- L’idéologie de la compétitivité : Avant le 11 septembre, l'idéologie de la

compétitivité est résumée par quelques petites idées : les pays sont engagés dans une guerre économique, industrielle et technologique sans pitié à l'échelle planétaire. L'objectif principal est de survivre. La survie est impossible sans être compétitif ; hors compétitivité, pas de croissance, pas de bien-être économique et social, et surtout pas d'indépendance politique ; le rôle essentiel de l'Etat, des villes, de l'école, et même des syndicats est de préparer l'environnement le plus favorable aux entreprises pour qu'elles soient (ou deviennent, ou restent) compétitives dans cette guerre mondiale 2

« La compétitivité a eu ses évangélistes, ses théologiens, ses prêtres et, bien entendu, ses fidèles : c’est-à-dire l'opinion publique "matraquée" par les discours sur la compétitivité. Les principaux évangélistes ont été les quelques dizaines d'économistes et d'experts de renommée internationale qui, aux Etats-Unis, en Europe et au Japon, ont prétendu avoir trouvé les "lois naturelles" de l'économie moderne - dite de marché - en y introduisant de nombreux ingrédients empruntés à des théories philosophiques et scientifiques liées, à tort ou à raison, à Hobbes (« l’homme est loup pour les autres »), Darwin (« la sélection naturelle »), Spencer (« la sélection par les plus aptes »), Nietzsche (l’importance de l’hero).. »3

Dans les années quatre-vingt-dix, le monde est transformé en une célébration planétaire de la religion de l’économie capitaliste au nom de la Sainte Trinité Libéralisation,

1

-Ibid.

2

- PETRELLA, R., 2001. Critique de la compétitivité. Texte pour la conférence de Valencia. Op.cit.

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Dérégulation et Privatisation. (Cf. la figure 1-1 une illustration démonstrative de la «nouvelle théologie de l’économie capitaliste mondiale »).1

4-2-2-Les effets de l'idéologie et de la politique de la compétitivité

- La consolidation de la suprématie de la logique de guerre entre les entreprises, les

opérateurs économiques, et même les Etats, au sein des sociétés à l’échelle mondiale. - La réduction du rôle de l'Etat dans la pensée et dans les visions et les stratégies des agents économiques, politiques et du grand public, face à l’agrandissement d'un grand système d'ingénierie financière, juridique et bureaucratique mis à la disposition de la performance commerciale des firmes.

- La baisse considérable des pratiques de la démocratie.

- L’affaiblissement du pouvoir de régulation politique, et de définition et de promotion de

l’intérêt général de la part de l’Etat.

- La marchandisation de la vie. L'histoire du XIXe et du XXe siècle a été l'histoire de la

diminution, voire de l'élimination des excès pervers du capitalisme et de sa prétention à gouverner la société.

- Et finalement, l’aggravation de la violence culturelle à travers le monde. Celle-ci a pris deux principales formes. Premièrement, il s’agit de l'affaiblissement de la réflexion et des débats sur l'éthique, la connaissance, la science, la technologie, le bien-être, la richesse, le progrès, la paix et la guerre, les rapports Nord-Sud et l'environnement, engendrés par la mondialisation compétitive. En deuxième lieu, la marginalisation, voire l’élimination, de la valeur des cultures et des modes de vie qui n’ont pas pu, ou voulu, admettre de s’insérer dans la marche « triomphante » de l’Occident. 2

1

- Ibid.

2

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29 Conclusion

Le concept de la compétitivité a toujours existé, depuis le 15ème siècle, malgré que le terme soit récent.

L’ouverture des frontières est, de plus en plus, une réalité. Si certains pays ont longtemps été tenus en dehors de ce mouvement de libéralisation, ils sont aujourd’hui, en particulier depuis l’adoption des plans d’ajustement structurel, sur la voie d’une ouverture à marche forcée.

Pour la plupart des économistes, la compétitivité de la nation (rattachée aux échanges commerciaux) est un concept pertinent dans la mesure où elle est la capacité d'un pays à réaliser son objectif de croissance économique en s'insérant dans le commerce international.

En se basant sur ce premier chapitre, il est clair qu'il y a certaines lacunes dans la littérature existante sur la compétitivité nationale. Premièrement, il n'y a pas une définition communément acceptée de la compétitivité nationale. Alors que de nombreuses définitions sont offertes, il y a encore un manque de conceptualisation globale de la compétitivité nationale. Deuxièmement, dans les définitions existantes et les cadres conceptuels de la compétitivité nationale, la plupart d'entre eux négligent l'aspect dynamique de la compétitivité nationale, à savoir l'évolution de la compétitivité nationale.

Chapitre 2 : Revue de la littérature