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Des critiques méthodologiques nombreuses

L’utilité concrète des différents rapports de compétitivité est considérablement limitée à cause de leurs grandes faiblesses méthodologiques :

5-1- La qualité des sources : la qualité des sources peut être contestable en particulier le

cas des données issues d’enquêtes d’opinion. Par exemple, la méthode IMD consiste à interroger des groupes d’hommes d’affaires nationaux sur leur opinion concernant leur pays d’origine. On constate ici que l’échantillon des personnes change à chaque fois qu’on change de pays ce qui peut créer des écarts difficilement mesurables se rapportant à l’esprit plus ou moins critique d’un groupe envers son propre pays.

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- HATEM, F., Les indicateurs comparatifs de compétitivité et d’attractivité : une rapide revue de littérature. Op.cit. PP. 5-6.

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En outre, en ce qui concerne les critères de localisation, quelques études montrent que les réponses des dirigeants d’entreprises aux enquêtes d’opinion peuvent s’écarter assez fortement des critères de choix réellement mis en œuvre.

5-2- Le choix des indicateurs : des a priori idéologiques peuvent influencer le choix des

indicateurs de base et risquent, par conséquent, d’altérer le travail de comparaison. Par exemple, une pression fiscale élevée n’est pas, à elle seule, un facteur de non compétitivité. Il se peut que ces impôts servent à financer certains services de base que le pays ne souhaite pas financer avec les mécanismes de marché. Tout dépond, en fait, de l’efficacité de l’utilisation de l’argent public.

D’ailleurs, ces différents indicateurs nous montrent à quel point des choix idéologiques implicites ou même une absence de réflexion méthodologique sérieuse peuvent brouiller l’analyse objective de la situation. Par exemple, les index ONU de « développement humain » multiplient les indicateurs relatifs à la santé, à l’éducation, etc. pour se focaliser sur la qualité de la dépense en négligeant les conditions de financement. Tandis que l’indicateur Forbes ne s’intéresse qu’au niveau des prélèvements publics et néglige totalement la restitution sous forme de services publics. En ce qui est de l’Heritage Foundation, l’idéologie est plus radicale, pour elle toute dépense publique élevée est néfaste y compris en santé ou éducation.

L’approche de l’IMD, quand à elle, semble plus équilibrée, en combinant des indicateurs mesurant la pression fiscale et la restitution sous forme de services publics et tente même de mesurer leur qualité. Néanmoins, la pondération des différentes composantes de l’index se fait d’une façon un peu aléatoire à cause des critères retenus pour définir la liste des indicateurs, et des biais involontairement introduits par le nombre d’indicateurs retenus dans chaque catégorie.

5-3- Le mode de calcul de l'indicateur de synthèse : le mode de calcul de l’indicateur de

synthèse, les pondérations retenues pour chaque indice de base et la formule de calcul utilisée pour établir l’index synthétique posent, en effet, problème.

Récemment, l’OCDE a mené des travaux, non publiés, sur la base de données IMD montrant que les mêmes données de base peuvent conduire à de différents classements globaux et ce en fonction des pondérations accordées à chaque composante et même du mode de calcul retenu pour la mesure des indicateurs élémentaires (classement, regroupements par niveaux, écart à la moyenne, sélection des seules données extrêmes..) et leur combinaison (moyenne arithmétique, géométrique, etc.).

5-4- Une utilité pratique limitée : dans la pratique, une méthode d’évaluation de la

compétitivité ou l’attractivité d’un territoire donné, même très perfectionnée et fiable, ne peut être suffisante pour générer une décision concrète d’investissement ou de promotion d’un type d’investissement. L’utilisation de cet outil reste donc très limitée.

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Effectivement, trop général, ce type d’approche fournit des indications globales inadaptables aux spécificités de chaque type d’activité et de chaque projet. De ce point de vue, il existe des situations évidentes : un pays très développé, à la population très éduquée et bien rémunérée, peut être plus compétitif pour attirer des centres de recherche que des industries de main d'œuvre.

D’autres situations sont beaucoup moins évidentes : par exemple, un pays qui compte un nombre limité de laboratoires de recherche peut disposer, dans une seule ville ou région, d’un pôle d’excellence spécialisé capable d’attirer des investisseurs sur un créneau précis. Les approches « macro » présentées plus haut ne fournissent pas d’outils utilisables pour représenter la diversité des potentiels du territoire concerné mis à part une image générale très globalisante, très floue, ou déformée.1

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59 Conclusion

La pertinence des indicateurs de synthèse suscite des débats entre économistes. Certains considèrent que, de toutes façons, tous les indicateurs de synthèse sont biaisés, et accordent beaucoup d’intérêt aux indicateurs fournis par une méthode transparente ayant des critères convenables car ils fournissent des informations sur l’évolution dans le temps, du classement d’un pays par exemple, et les raisons de cette évolution. D’autres y sont contres et soulignent la difficulté à obtenir une pondération correcte des critères, les biais indésirables engendrés par la méthode de les mesurer, les instruments de mesure hétérogènes réunissant des critères qualitatifs et objectifs, etc.

D’une manière générale, les deux points de vue découlent d’un certain raisonnement. Il est vrai que les indicateurs synthétiques, non seulement, paressent dangereux à cause de leur médiatisation excessive et simplistes mais ont également une utilisation limité dans la pratique. Alors que d’un autre côté, ils peuvent également servir dans des opérations intéressantes de comparaison qui, au-delà de la construction d’indicateurs synthétiques, utilisent des méthodes plutôt inédites et sérieuses pour concentrer et traiter un nombre important d’information comparatives.

Chapitre 4: Types, déterminants et