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Deuxième Chapitre

III. PRINCIPES ET OBJECTIFS DE LA DIDACTIQUE DES LANGUES-CULTURES- ETRANGÈRES

2. La compétence culturelle : définitions et composantes

Le stade final pour ne pas dire la finalité de l‟apprentissage d‟une langue étrangère, est décrit par quelques didacticiens comme le stade où l‟apprenant possède une compétence culturelle de communication qui fait que l‟apprenant maîtrise non seulement les mécanismes de fonctionnement de la langue, c'est-à-dire l‟aspect linguistique, mais aussi d‟autres aspects liés à la culture étrangère. Quelle est donc cette compétence culturelle ?

Pour BENADAVA S., avoir une compétence culturelle, c‟est

« posséder un savoir minimum, factuel ou textuel, relatif à une collectivité donnée, participer à un consensus sémiologique, maîtriser les règles socioculturelles président à l‟utilisation des différents systèmes signifiants, et connaître les stéréotypes propres à la communauté visée ».188

Autrement dit, il s‟agit d‟un vaste programme qui touche aux différents aspects de la vie en communauté qu‟il est difficile et compliqué d‟étudier sans y consacrer un effort énorme et considérable et beaucoup de temps. GSCHWIND H, quant à lui, présente la compétence culturelle comme indispensable à une bonne communication sans heurts, sans blocages :

« Communiquer efficacement dans un échange interculturel présuppose la connaissance de normes réglant les conduites communicatives dans la culture de

187 Ibid, p.162

188 BENADAVA S. : « La civilisation dans la communication », in Le français dans le monde, n° 84, Avril 1984, Hachette, Paris, pp.78-86

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l‟autre, la possession d‟une compétence culturelle de communication permettant d‟éviter certains blocages interactifs ».189

Comment peut –on arriver à cette compétence dans un espace classe, sachant que la classe est un lieu où l‟on ne communique pas d‟une manière authentique ; on n‟y fait que simuler des situations de communication? La vraie communication se fait généralement dans des situations d‟interactions authentiques, c‟est pourquoi nous pensons que ZARATE G. a raison de définir la compétence culturelle comme n‟étant pas « une addition de savoirs, mais plutôt la familiarité avec un nombre réduit de connaissances, limitées à une expérience plus ou moins riche du monde ».190

Selon HOLEC H.191, ce qui fera l‟objet de l‟acquisition d‟une compétence culturelle, ce sera donc la civilisation ou la culture partagée évoquée par GALLISSON R.

Cette culture s‟acquiert partout au contact d‟autrui, dans les relations sociales et par le biais des médias.

Cette compétence culturelle n‟est rien d‟autre que la composante socioculturelle de la compétence communicative à laquelle MOIRAND S.192 fait référence.

Pour cette dernière,« posséder une compétence communicative, c‟est avoir une connaissance pratique des règles non seulement linguistiques, mais aussi psychologiques, sociales et culturelles qui commandent la production et l‟interprétation de la parole à l‟intérieur d‟une communauté ».193

En d‟autres termes, la compétence de communication est la prise de conscience des règles psychologiques, culturelles et sociales qui dirigent, voire contrôlent la parole dans une société donnée. Il s‟agit d‟une maîtrise-plus ou moins-commune des codes linguistiques et culturels auxquels les deux inters actants font appel dans des situations pratiques de la vie quotidienne.

Toutefois, inscrire la compétence culturelle/communicative dans un contexte académique implique trois qualités. D‟après VATTER CH., chaque enseignant devrait

189 GSCHWIND H. : Analyse sociolinguistique, De la communication et didactique;Application à un cours de langue, De vive voix, Hatier/Crédif, Paris, 1981, p.49

190 ZARATE G. : « Objectiver le rapport culture maternelle /culture étrangère », in Le français dans le monde, n° 181, Nov –déc, 1983, pp.34-39

191 Op. cit.

192Op.cit. p.20

193 Ibid, p.20

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s‟appuyer sur trois niveaux afin de pouvoir donner à l‟apprenant une compétence (inter) culturelle d‟une manière optimale.194

 Un niveau de connaissances qui comprennent des informations sur la culture d‟origine et sur celle de la langue «cible». Il s‟agit de se rendre compte des règles de communication et du contexte situationnel qui déterminent l‟interaction entre les deux interlocuteurs;

 Un niveau de capacités (ou soft skills) affectives. Ces dernières relevant des compétences communicatives et sociales qui se réfèrent notamment à la performance concrète dans une situation d‟interaction interculturelle;

 La motivation de l‟apprenant, son implication et sa volonté de participer à des situations où des rencontres interculturelles pourront avoir lieu.

ZARATE G. donne la définition minimale de la compétence culturelle :« On appelle compétence culturelle un ensemble d‟aptitudes permettant d‟expliciter lesréseaux de significations implicites, à partir desquelles se mesure l‟appartenance à une communauté culturelle donnée ».195

Nous pourrons donc dire que la compétence culturelle aide l‟individu à définir son appartenance ethnique dans une communauté quelconque. Il s‟agit d‟un ensemble de savoirs et connaissances qui donnent sens à un groupe ethnique quelconque et à partir duquel l‟on aurait la capacité de définir le soi dans un contexte culturel donné.Une appartenance qui varie en fonction de plusieurs paramètres, tels que l‟âge, le sexe, le milieu social et la profession.

Selon toujours ZARATE G., la compétence culturelle, « c‟est ce qui transforme le silence en parole, ou ce qui reconstitue l‟épaisseur du non-dit dans la communication »196. Cela vaut qu‟elle est la capacité d‟un étranger à s‟adapter immédiatement au passage d‟un contexte culturel à un dissemblable dans un dynamisme mutuel et une transparence des

194 VATTER CH.: in THIEBLEMONT-D. S.: L’interculturalité dans tous ses états. Nancy: Presses Universitaires de Nancy, 2006, p. 55

195 ZARATE G.: « Les représentations en Didactique des langues et cultures », In : Notions en questions, rencontres en didactiques des langues, n°2, Janvier.: université René Descartes, ENS de Fontenay/Saint-Cloud, Paris, 1997, p. 29

196 ZARATE G. : in BLONDEL A. et al. :Que voulez-vous dire? Compétence culturelle et stratégies didactique, Duculot, Bruxelles, 1998, p.5

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significations au cours de l‟échange. La réalisation de cet objectif reste utopique,et pour les enseignants et pour les apprenants.

Pour ce faire, l‟individu doit s‟armer d‟un capital d‟informations sur la géographie, les modes de vies, les valeurs et la conception du monde de la société en question. Cette chasse aux différences lui permet la connaissance de l‟autre, l‟adoption d‟une attitude tolérante et l‟acquisition d‟une habileté à intervenir efficacement dans un système de pensée différent. L‟opération précédente délivre de nobles comportements tels que le respect de l‟autre, la préservation de la dignité, l‟appréciation d‟un monde multiculturel, l‟instruction des esprits, aptitude primordiale, afin d‟éliminer tout obstacle susceptible de nuire au déroulement de la situation de communication. Elle aide à diffuser une bonne image de soi et de sa propre culture en même temps.

Cette compétence sera abordée en classe de langue pour les besoins d‟acquisition d‟une compétence langagière. Autrement dit, l‟acquisition d‟une langue et de sa pratique sociale. Cet objectif implique que soient envisagées sur le plan didactique les conséquences d‟une volonté d‟étudier la langue comme berceau de la culture. Il suppose que les apprenants acquièrent un certain nombre de connaissance, mais surtout qu‟ils soient exercés à certains types de reconnaissance. Toutefois, ZARATE G.197 n'accepte pas l'idée qu'il faut donner à l'étranger la même compétence culturelle que celle d'un natif. Son argument, c'est que l'apprentissage de la culture maternelle et étrangère est de nature différente car l'appartenance à une culture impose une représentation du monde. Cette représentation du monde diffère pour un étranger et pour un natif.

Nous estimons qu‟enseigner une culture n‟est pas comme enseigner des règles grammaticales. A l‟issue de ce qui précède, nous trouvons plus correct la définition

de WEIDMAN-K. pour qui, par «compétence culturelle », il faut entendre

«La connaissance approfondie de la culture cible avec la faculté de comprendre et d‟interpréter les connotations culturelles et d‟évoluer pleinement dans un contexte socioprofessionnel ».198

197 Op.cit. p.7

198 WEIDMAN-K. :Acquisition et évaluation de la compétence culturelle: du contexte pédagogique au contexte professionnel, 2000, p.75, in BLONDEL A. et al, Que voulez-vous dire? Compétence culturelle et stratégies didactiques, Ducolot , Bruxelles, 1998, p.8

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ABDALLAH-PRETCEILLE M.199 de son côté analyse ce concept sous l‟angle de sa dimension contrastive, en lui donnant la définition suivante: « la connaissance des différences culturelles, ]…[ une analyse en termes de structures et d‟états » .

Autrement dit, cela aura pour objectif de mener des études analytiques des mœurs et des coutumes de populations déterminées. Elle est donc une simple connaissance des faits et des caractéristiques des cultures de l‟autre. Ce à quoi semble s‟opposer PORCHER L. , qui propose une vision évolutive et mouvante du concept.

Pour ce dernier la compétence culturelle doit être comprise comme « toute approche en termes de savoir-faire, c'est-à-dire la capacité pour un individu donné de s‟orienter dans la culture de l‟autre à partir d‟une démarche compréhensive et non pas seulement descriptive ».200

Selon cette grosse pointure de la didactique, la compétence culturelle est la capacité de comprendre le fonctionnement d‟une société donnée à partir des systèmes de classement. Ces derniers se présentent comme des repères culturels qui donneront à l‟étranger la capacité de se comporter lors d‟un échange dans des situations de la vie quotidienne.

« Une compétence culturelle peut-elle être définie à partir d‟une analyse des besoins culturels (par analogie avec les besoins langagiers) ? Quelles sont les informations et les connaissances culturelles dont aurait besoin un locuteur pour communiquer dans une situation donnée ? »201s‟interrogeait ABDALLAH- PRETCEILLE M.

La question demeure de savoir si ces connaissances factuelles favorisent réellement la communication. Les réponses divergent et recoupent le clivage culturalisme/

interculturalisme; compétence culturelle/compétence interculturelle. Dans la première hypothèse, l‟accent est mis sur les connaissances culturelles (et linguistiques) en s‟appuyant sur des travaux ethnographiques. Dans la seconde hypothèse, la compétence communicationnelle repose sur la capacité des interlocuteurs à repérer le culturel dans les échanges langagiers.

« Dans cette perspective, l‟approche interculturelle n‟est pas une reformulation modernisée de l‟approche civilisationelle et ne correspond pas à une nomenclature

199 Op. cit. p. 32

200 Op.cit. p.

201 Ibid, pp.95-96

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de faits, de dates, de monuments, d‟œuvres littéraires et artistiques. Mais de communiquer avec des individus dont les caractéristiques identitaires sont différentes » 202, disait ABDALLAH-PRETCEILLE M.

Le développement des travaux sur l‟ethnographie de la communication appliquée à la didactique des langues, ceux sur l‟anthropologie de la communication203, malgré leurs divergences, réintroduisent la culture non pas dans la langue mais dans la communication, opérant un recentrage sur la communication d‟où ABDALLAH -PRECEILLE M.204 distingue les malentendus et les dysfonctionnements.

Nous pensons que la culture joue un rôle important dans l‟enseignement des langues, toutefois, il faudra à notre sens se contenter d‟une initiation minimale mais efficace .Dans cette vision, TRESCADES P.205 propose un modèle de compétence culturelle, dans un contexte bilingue qui semble intéressant. Ce modèle est axé sur la « reconnaissance de l‟autre » .Il attribue à ce modèle un certain nombre de caractères. Ainsi cette compétence culturelle sera :

- « Interprétative » :c'est-à-dire qu‟elle s‟occupera de « la compréhension des traits socioculturels »et non de leur reproduction;

- « différentielle » : l‟enseignement da culture d‟une langue étrangère doit déboucher sur la compréhension des systèmes des deux langues et des deux cultures en présence et sur leur ouverture les uns aux autres;

- « différenciée » : cette caractéristique rejoint les deux premières, mais en plus, une compétence culturelle différenciée permet l‟introduction aux diversités culturelles et aux variétés sociolinguistiques;

- « réduite »: une compétence culturelle est essentiellement individuelle, fragmentaire et subjective;

-« adaptée» : une compétence culturelle est généralement enseignée et adaptée au public visé et des paramètres comme l‟âge et les objectifs des apprenants interviennent dans l‟enseignement; »

202 Op. cit. pp.95.96

203 ABDALLAH-PRETCEILLE M. :«Compétence culturelle, .Pour une anthropologie de la communication», in Le français dans le monde, janvier 1996, pp.95-96

204 Ibid, p.99.

205 TRESCADES P. : «La compétence culturelle», in le français dans le monde , n°85, Hachette , Paris, 1985

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Ce modèle de compétence culturelle paraît intéressant, du fait qu‟il peut être exploité pour l‟élaboration d‟un programme ou d‟une progression dans l‟apprentissage de la culture étrangère dans des situations de bilinguisme. Les caractéristiques ci-dessus favorisent trois principes fondamentaux dans l‟enseignement d‟une culture étrangère,à savoir : la compréhension de l‟autre, la relation d‟une culture, et sa diversité. La notion de compétence culturelle est une notion souvent difficile à cerner. Elle est perçue comme un idéal par l‟enseignement d‟une langue étrangère. Cette manière d‟envisager la compétence culturelle vient du fait qu‟on sépare la culture de la langue.