• Aucun résultat trouvé

Premier Chapitre

V. REPRESENTATIONS ET STEREOTYPES 1. Les représentations

3. Définitions des stéréotypes

On notera de nombreuses définitions, mais commençons par l'étymologie d'abord Etymologiquement, le terme stéréotype est composé du préfixe stéréo dérivant de l‟adjectif grec stereos (solide et opiniâtre) et du suffixe type désignant le caractère d‟imprimerie ou l‟image imprimée.

Les premiers usages du terme viennent du monde de l‟imprimerie. En 1922, le journaliste américain LIPPMANN W. utilise pour la première fois ce terme en le décrivant comme «les images dans notre tête » 117 qui s‟intercalent entre la réalité et notre image de la réalité. Il s‟agit alors d‟une représentation collective et simplifiée d‟un groupe.

Par exemple, quand on dit que les Français associent communément l‟Espagne à la fiesta, à la paella, à la corrida, etc.; l‟Italie à la pizza, à Venise, à la mafia, etc.; l‟Angleterre à Big Ben, au tea time, au rosbeef ; le Portugal à la morue, au fado et à la pilosité abondante, etc.

Chaque communauté a une image d'elle- même et des autres, ce qui conduit à deux types de stéréotypes118 :

Les autostéréotypes: qui sont des représentations communément partagées d‟un groupe d‟appartenance par rapport à lui-même, le regard sur soi.

Les hétérostéréotypes: qui sont des images que le groupe a des autres groupes.

115Op.cit. 1996, pp 119-120

116 Ibid,

117 LIPPMANN W., in AMOSSY R. : Les idées reçues. Sémiologie du stéréotype, Nathan Université, coll le texte, Paris, 1991, p.9

118 CHAVES R.-M., FAVIER L., PELISSIER S. : op.cit, p.51

61

Le stéréotype peut naitre à travers une expérience vécue selon le principe globalisant suivant : «Lorsqu‟on en a vu un, on les a tous vus ». Par exemple «J‟ai visité cette ville Dans un magasin, la vendeuse n‟était pas aimable. Donc, les habitants de cette ville ne sont pas accueillants»119.

Les stéréotypes ne sont pas innés, mais transmis par notre culture d‟origine ou notre groupe d‟appartenance. Ils sont généralement véhiculés par les manuels scolaires, les médias et la publicité.

Le stéréotype est l‟image que nous avons des autres, un ensemble de croyances qui présente une image simplifiée des caractéristiques d‟un groupe. Le stéréotype n‟est pas forcément négatif : les asiatiques sont considérés comme discrets, calmes et travailleurs, les suisses des méticuleux. « Le préjugé » ajoute une appréciation défavorable, négative, péjorative (de méfiance, de mépris envers quelqu‟un en raison de son appartenance. Tout ceci laisse soulever trois éléments fondamentaux des stéréotypes :

En ce qui concerne l‟origine des stéréotypes, il faut dire qu‟

« on peut, au minimum, distinguer les stéréotypes de la culture «noble» ou («cultivée»), qui comportent les expressions, les scénarios, les personnages, les idées issus de la littérature, et ceux qui proviennent de la culture anthropologique (ou « de masse »), et qui comportent les clichés diffusés par la télévision, le cinéma ». La chanson, les journaux et les autres médias de masse »120.

Autrement dit, les stéréotypes ne viennent presque jamais de notre expérience directe, mais plutôt de notre culture ambiante et de ses normes, de notre éducation, tant à la maison qu‟à l‟école ou dans les médias.

Selon ZARATE G. le stéréotype est «un ensemble de traits censés caractériser ou typifier un groupe, dans son aspect physique et mental et dans son comportement. Cet aspect s‟éloigne de la «réalité» en la restreignant, en la tronquant et en la déformant»121.C‟est la relation de l‟individu avec son espace culturel dans sa communauté qui détermine l‟image des cultures et des ailleurs auxquels il n‟appartient pas.

Mais il importe surtout ici de souligner que la connaissance des différents ensembles de stéréotypes est nécessaire à la saisie d‟un grand nombre d‟énoncés. Quoi

119 Ibid.

120 GALISSON R. : 1995. Op.cit. p.112

121 ZARATE, G. : Enseigner une culture étrangère, Hachette, Paris1986, p.66

62

qu‟aient pu dire naguère certains sociologues soucieux d‟enrayer la fortune scolaire de la

« culture bourgeoise », les référents littéraires et artistiques ne sont pas des codes de luxe dont l‟usage serait nécessaire aux seuls héritiers des classes aisées : « il suffit de tourner les pages de n‟importe quel journal pour y trouver une surabondance de titres et de citations d‟œuvres légitimées».122

En d‟autres termes, les stéréotypes se forment à partir de certains termes ou expressions donnant une valeur plus ou moins, dépréciative à une personne ou un groupe.

Il peut s‟agir de classe sociale, de race ou autre. Ainsi les stéréotypes peuvent se mettre en jeu dans divers contextes et peuvent toucher tous les acteurs d‟une situation de communication à divers degrés.

AMOSSY R. indique à ce sujet que

« Le stéréotype schématise et catégorise ; mais ces démarches sont indispensables à la cognition, même si elles entrainent une signification parfois excessive. Nous avons besoin de rapporter ce que nous voyons à des modèles préexistants pour pouvoir comprendre le monde, faire des prévisions et régler nos conduites ». 123

L‟utilisateur du stéréotype pense souvent à procéder à une simple description. En fait, il considère une réalité quelconque comme un moule auquel peut s‟adapter toute une communauté. En d‟autres termes, il tend à envisager toutes les unités composantes d‟un groupe sous le même angle, en les cernant dans un même classement. Ainsi tout individu sera jugé comme entité ayant les mêmes qualités et surtout les mêmes défauts que les autres. Le stéréotype est donc, dans la plupart du temps, une généralisation d‟une idée, plus ou moins fausse, à un groupe tout entier.

A ce sujet selon ZARATE G.124un stéréotype est composé de :

– La simplification: le stéréotype est une simplification de la réalité qui exige un choix limité d‟éléments spécifiques, d‟omissions conscientes et de simple oubli ;

– La généralisation: on simplifie la réalité et on la généralise (les Français sont romantiques. Les arabes sont des sultans avec beaucoup de femmes tout autour)

122DUFAYS J.-L.: Stéréotypes apprentissage inter culturalité: fondements théoriques et pistes didactiques in

« Quelle didactique de l’interculturel dans les nouveaux contextes du FLE »/S Proximités E.M.E, 2006, p.62

123 AMOSSY R., Stéréotypes et clichés, discours, société, Nathan, Paris, 1997, p.178

124 Op.cit, p.66

63

Quant à leurs valeurs, nous pensons que chacun de nous aimerait penser qu‟il n‟a aucun stéréotype sur les autres. C‟est bien sûr inexact : tous, nous avons tendance à classer, à catégoriser même si nous nous en défendons. Il faut l‟admettre. Et d‟ailleurs, les stéréotypes (contrairement aux préjugés) ne sont pas sans utilité. Ils nous aident à donner du sens au monde qui nous entoure et dont nous ne pouvons pas cerner la complexité ; ils nous servent aussi à affirmer notre propre identité.

Comme l‟explique aussi bien PORCHERL:

« Les stéréotypes sont à la fois nécessaires et insuffisants pour comprendre une culture .Cci est vivante, et, en tant que telle, se nourrit de stéréotypes, sur elle-même et sur les autres. On ne gagne jamais une bataille contre des mythes et les stéréotypes sont des mythes simplificateurs comme eux, fascinant comme eux ».125

Enfin, ils ne sont ni immuables ni permanents126« Les stéréotypes naissent, se développent, se modifient… et meurent !ils évoluent dans le temps »127 . Prenons le cas, pour la France, des Italiens ou des Espagnols. Beaucoup d‟entre eux vivaient en France en tant que travailleurs immigrés, donc en provenance de pays moins développés et occupant des emplois peu valorisés (dans le bâtiment, essentiellement). Conséquence : les Français les considéraient avec condescendance.

« Et puis, le temps a passé, l‟Italie puis l‟Espagne se sont développées à leur touret peu à peu l‟image concernant leurs habitants s‟est modifiée. Aujourd‟hui, les stéréotypes concernant les Italiens sont très largement positifs : on les considère comme cultivés, artistes, élégants, voire sophistiqués, séducteurs … Quant aux Espagnols, la Movida est passée par là et ils nous apparaissent entreprenants, modernes, pleins de confiance en eux »128.