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PARTIE 2 RETOUR D’EXPERIENCE DE NANTES METROPOLE

2.5. L ES RESEAUX DE CHALEUR : VERS PLUSIEURS FORMES DE GESTION DES RESEAUX

En saisissant l’opportunité de contribuer à la diversification énergétique de son territoire dans le cadre d’une politique nationale de subventionnement (Ademe), NM s’est engagée dans le développement de la distribution de chaleur par réseau de chaleur alimenté principalement par des énergies fatales (incinération des déchets) et biomasse (bois).

La construction d’un réseau de chaleur peut constituer un outil politique non négligeable. D’une part, il s’agit d’un projet concret touchant un nombre conséquent d’habitants, et d’autre part cela permet aux acteurs territoriaux d’affirmer leur légitimité sur le volet de la distribution énergétique, qui est encore aujourd’hui géré par les entreprises nationales de distribution historiques comme ErDF et GrDF.

Outre les questions de la pertinence de ce choix du réseau de chaleur du point de vue environnemental (origine du bois si biomasse, émission de particules fines, émission de GES dans le cas de l’incinération du plastique par le biais de l’usine d’incinération des ordures ménagères), la création de réseaux de chaleur à NM soulève aussi d’autres considérations intéressantes.

Développer des réseaux structurants, inciter et accompagner des acteurs locaux à la création et au développement des petits réseaux de chaleur font partie de la politique publique de l’énergie. 24 Il faut entendre par là deux modes de gestion différentes de ces réseaux : dans le premier cas, NM est le gestionnaire des réseaux avec mise en place d’une délégation de service public, dans le second cas, NM conseille les initiateurs du projet qui en gardent la gestion.

On peut citer les exemples des réseaux de chaleur de la Chantrerie et de Rezé. Ces deux réseaux sont gérés par des AFUL : association foncière urbaine libre.

Figure 26 : Projets de réseaux de chaleur à Nantes Métropole – Source : NM

Dans le code de l’urbanisme, il est précisé que les associations foncières urbaines libres sont des associations syndicales ayant par exemple pour objet « la construction, l’entretien et la gestion d’ouvrages

d’intérêt collectif tels que voirie, aire de stationnement, et garages enterrés ou non, chauffage collectif, espaces verts plantés ou non, installations de jeux, de repos ou d’agrément ».

Le premier réseau construit et géré par ce type de montage à NM est le réseau de la Chantrerie. Ce réseau de chaleur regroupe 5 établissements publics. Sachant que certains réseaux devaient transiter sous domaine public pour relier les différents bâtiments, NM a été consultée.

NM a soutenu cette initiative en participant notamment au montage juridique du dossier, ce qui a conduit à la création de l’AFUL de la Chantrerie. Au terme d’une consultation, Cofely a été choisi pour réaliser et exploiter le réseau et la chaufferie pour une durée de 20 ans. C’est donc Cofely qui investit dans la construction du réseau sachant que le retour sur investissement est basé sur la vente de la chaleur sur 20 ans aux différents membres de l’AFUL. Le seul interlocuteur de Cofely est l’AFUL : c’est l’AFUL qui en définitive vend la chaleur aux différents établissements. Un bail à construction a été établi entre l’AFUL et Cofely et un contrat a été signé. Les membres de l’AFUL n’étant pas spécialistes de tels contrats, ils se sont entourés d’un assistant maîtrise d’ouvrage.

Suite à cette expérience fructueuse, NM a proposé ce type de montage à la Mairie de Rezé lorsque cette dernière a fait connaître son souhait de réaliser à son tour un réseau de chaleur en partenariat avec des bailleurs sociaux et quelques établissements publics (lycée, maison de retraite..).

Les porteurs du projet n’ont, au départ, pas forcément compris pourquoi Nantes Métropole, qui porte la compétence énergie, n’a pas pris en charge le projet comme sur le réseau Centre-Loire par exemple. Néanmoins, l’option AFUL a permis d’aller bien plus vite que dans le cas d’une délégation de service publique menée par NM et a amené les différents acteurs locaux à s’impliquer dans le projet. L’expérience est donc globalement positive en termes d’opérationnalité et de réactivité même si elle n’a pas été politiquement complètement comprise au départ.

Quelques caractéristiques intéressantes peuvent être soulevées :

- La Mairie de Rezé, qui a principalement porté le projet s’est conformé aux exigences du code des Marchés publics lors de la consultation afin de ne pas se voir taxée de contournement de ce dernier par l’intermédiaire de l’AFUL

- Le fonctionnement administratif de l’AFUL engendre des frais, celle-ci devant s’entourer de personnes compétentes dans différents domaines : juriste, comptabilité, technique… Dans le cas de l’AFUL de Rezé, ces frais ne sont pas intégrés dans le prix de vente de la chaleur mais sur le budget général de la commune.

- Contrairement au cas de la Chantrerie, l’AFUL de Rezé a laissé la possibilité à l’opérateur de desservir d’autres organismes non membres de l’AFUL comme des copropriétés. Les copropriétés établissent alors un contrat directement avec l’opérateur. L’AFUL a tout de même un droit de regard et fixe le prix de la chaleur vendue mais des coûts de raccordement supplémentaires pourront être facturés.

Dans les deux cas, des autorisations d’occupations temporaires du domaine public ont du être accordées par NM, une partie des réseaux transitant sous voie publique. Les personnes rencontrées ont, de plus, insisté sur l’importance de la motivation des acteurs. Ce type de montage suppose la présence d’une personne qui porte le projet et réussit à convaincre les principaux organismes de se regrouper pour gérer le projet puis l’exploitation du réseau de chaleur.

Ce type de montage pose plusieurs questions :

- Peut-il être adapté à plus petite échelle et géré par des associations syndicales regroupant des particuliers ?

La question s’est déjà plus ou moins posée. Certains particuliers voulant se regrouper pour effectuer un petit réseau de chaleur ont pu voir leur demande être refusée, le réseau ainsi prévu devant transiter sous domaine public. Il s’agit du même raisonnement que celui appliqué pour la collecte des eaux usées. Autre exemple, il peut arriver que, bien que la solution réseau chaleur soit pertinente du point de vue technico-économique, le projet ne voit pas le jour, seul l’investissement direct par les futurs usagers ayant été envisagé.

- Quel rôle NM doit-elle assurer a minima ? La solution AFUL ne peut-elle pas devenir une concession déguisée sans véritable contrôle du concessionnaire ? Doit-elle intervenir dans la définition du contrat ?

- Doit-il y avoir égalité entre les différents usagers du réseau de chaleur ? La question de l’égalité des usagers se pose aussi lorsque la gestion du réseau revient à NM, au même titre que lorsque certaines personnes sont desservies par le gaz et d’autre non. Certaines personnes ont donc accès à une énergie moins chère. De manière à limiter le poids des avantages accordés à une seule partie de la population, NM a proposé à l’opérateur l’option suivante : garder un prix de vente de la chaleur assez élevé mais restant inférieur au prix du gaz et investir les gains par rapport au coût réel de la chaleur dans la prolongation du réseau de chaleur de manière à pouvoir toucher une plus grande partie des habitants.