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Chapitre 1 Préambule épistémologique : sur la sociologie et la société

1. L’objectivation du chercheur : éthique et projet d’autonomie

Le complexe de l’objectivité

La sociologie mise de l’avant à l’intérieur de cette thèse n’a aucunement l’allure d’une entreprise purement cognitive au sens où elle ne poursuivrait que la tâche de faire progresser positivement le savoir de type sociologique. Certes, avec Durkheim qui postula, dans Les règles de la méthode sociologique, la nécessité de traiter des faits sociaux comme des choses ou, encore, avec Weber qui, dans Le savant et le politique, mit de l’avant le présupposé opératoire de la neutralité axiologique2, on a cherché, à « l’origine3 », à faire de la sociologie une discipline scientifique de même nature que toutes les autres4. Or, cette tendance originelle de la sociologie à faire siens les préceptes d’une science positive a été mise en cause, entre autres, par Horkheimer (mais aussi Castoriadis5, Freitag6 et bien d’autres) qui a bien montré qu’il y a toujours des intérêts non scientifiques qui conditionnent toute démarche se prétendant scientifique. C’était d’ailleurs là un des grands

2 Max Weber, Le savant et le politique, (1959), Paris : Union générale d’Éditions, 1963. Il est toutefois

pertinent d’indiquer qu'Isabelle Kalinowski soutient, par la retraduction La Science, profession et

vocation, suivie de son essai Leçons wébériennes sur la science et la propagande (France : Éditions

Agone, 2005) que la traduction de Wertfreiheit par « neutralité axiologique » s’inscrivait dans une sorte de stratégie anti-marxiste. Pour rendre justice au propos de Weber, elle oppose { l’idée de neutralité axiologique celle de « non-imposition des valeurs ». Il ne serait alors pas question de ne pas en avoir ou de les combattre, mais de ne pas les imposer ce qui donne une autre allure à Weber.

3 Selon Mucchielli, l’idée des pères fondateurs de la discipline sociologique serait davantage un mythe

qu’une réalité. Il y aura eu, bien plus, un contexte social et historique au sein duquel elle a progressivement émergé et elle ne fut pas portée par quelques héros (Mythes et histoire des sciences

humaines, Paris : La Découverte, 2004).

4 Dans un texte portant sur la finalité de la connaissance sociologique, Raymond Boudon, grand nom du

courant de l’individualisme méthodologique, construit une typologie des « postures » sociologiques qui se seraient formées tout au long du développement de la sociologie au cours des 19e et 20e siècles.

Celles-ci s’étendraient au sein de quatre types possibles : le genre cognitif, le genre caméraliste, le genre critique et le genre expressif. (Raymond Boudon, « À quoi sert la sociologie », Cités, 10, 2002, rubrique « Grand article », p. 133-156). S’il accorde malgré tout une légitimité et un intérêt à tous les types dégagés au sein de son analyse, il est sans équivoque : « l’objectif cognitif étant toutefois le plus "naturel", pour la sociologie comme pour toute discipline s’affichant comme scientifique » (ibid., p. 153). Le programme de la sociologie serait lié, depuis son origine, au genre cognitif et ce dernier serait en déclin pour des raisons extérieures à la sociologie elle-même, soit parce qu’il y aurait eu, au cours du 20e siècle, une augmentation de la « demande sociale » des autres types. Ainsi, selon sa lecture, la

sociologie ne saurait se distinguer des autres sciences, puisque « les démonstrations sociologiques sont rigoureusement de même nature que celles de n’importe quelle discipline scientifique » (ibid., p. 137). Il s’agit l{ d’une posture épistémologique envers laquelle nous éprouvons de sérieuses réserves.

5 Castoriadis, 1975, p. 30. 6 Freitag, 1986.

objectifs qu’il a tenté d’insuffler à l’École de Francfort en héritant de sa direction7. « Ce qui manque [à la science], disait-il, c’est la réflexion sur soi, la connaissance des mobiles sociaux qui la poussent dans une certaine direction, par exemple à s’occuper de la lune et aujourd’hui de Mars, et non du bien-être des hommes8. » La science, comme la technique, n’est jamais neutre, bien que l’objet de la science (dites pure) soit, lui, d’une complète et totale neutralité.

Les questions qui se posent dans un champ de connaissance ou dans un autre sont toujours conditionnées par la société historique au sein de laquelle elles se posent et par laquelle elles peuvent uniquement se poser. L’objectivité « absolue » est une position impossible pour plus d’une raison. Il y a tout d’abord la subjectivité du chercheur elle-même qui la rend impossible. Il a beau naviguer dans l’abstraction avec pensées et concepts afin de rendre compte du réel ou de la réalité, il n’en demeure pas moins un être fait de chair, un feu émotionnel, et un être socialisé par une société spécifique, conditions qui influencent profondément tous ses raisonnements et toutes ses interprétations. La perspective qu’il adopte n’est pas non plus atemporelle, coupée de tout référent culturel et historique, ou « acontextuelle », coupée de tout repère symbolique-géographique. Elle est, au contraire, un produit social-historique. L’objet typique aux sciences sociales et humaines, particulier et distinct de celui des sciences de la nature, est le dernier élément rendant impossible la position de l’objectivité « absolue » en sociologie9. Un objet capable de tenir un discours

7 Luc Ferry et Alain Renault, Présentation, Max Horkheimer, Théorie critique Essais, Paris : Payot, 1978. 8 Horkheimer, 1978, p. 356.

9 Cette question ne fait pas l’unanimité en sociologie et elle travaille en fait les sciences sociales depuis

leur origine. Déj{, l’historien Droysen aurait inauguré l’élaboration d’une méthode interprétative vers 1850 (Julien Freund, Sociologie de Max Weber, Paris : PUF, 1966, p. 81) bien que ce soit plus clairement avec Dilthey, issu de la mouvance du romantisme allemand, que l’idée d’un objet propre aux sciences humaines et sociales fait son apparition. Comme l’explique Freund, « Il fut, à proprement parler, le premier à concevoir une épistémologie autonome de ces disciplines » (Julien Freund, Les théories des

sciences humaines, Paris : PUF, 1973, p. 79). L’idée de la nécessité de deux épistémologies est donc aussi

vieille que la sociologie elle-même. Dilthey ne s’accordait pas avec les vues de Spencer et Comte, défenseurs du positivisme, qui n’avaient pas spécifié le caractère particulier des sciences de l’homme par rapport aux sciences de la nature. Dilthey dira : « Les sciences humaines ne forment pas un tout constitué selon la logique, un tout dont la structure serait analogue à celle de notre connaissance de la nature; leur ensemble s’est développé tout autrement, et il est nécessaire que nous le considérions maintenant tel qu’il s’est historiquement développé » (Dilthey in Freund, 1973, p. 83). Freund résumera l’essentiel de ce qui est { retenir, pour notre propos, de Dilthey : « Sans entrer dans les détails des analyses qui, selon Dilthey, justifient cette position, il faut retenir qu’il y aurait "une démarcation entre le règne de la nature et le règne de l’histoire", de sorte que le globis intellectualis se diviserait en deux hémisphères, chacun groupant une catégorie de sciences en un tout original de relations de même type

sur lui-même n’offre pas les mêmes possibilités cognitives que celles offertes par une roche ou par un animal. Il conditionne une autre attitude cognitive, nettement différente de celle caractérisant les sciences pures, à l’intérieur de laquelle neutralité et objectivité sont propulsées sur un autre plan.

L’objectivation du chercheur

En suggérant que l’objectivité pure ou la neutralité axiologique n’est pas une option souhaitable en sociologie, nous ne suggérons aucunement qu’il faille verser complètement de l’autre côté et sombrer dans le relativisme nombriliste le plus insignifiant. Après tout, la sociologie n’est pas un art ni un champ de possibilités poétiques, elle n’est pas littérature, mais une discipline aspirant à la validité scientifique. Tout chercheur doit donc consentir à admettre et à respecter certaines règles et certaines limites, sans lesquelles il ne serait tout simplement plus « chercheur ». Au fil de ses recherches sur l’interprétation en sociologie, Freund en est venu à suggérer une position offrant une première balise afin de limiter, sans le nier, le subjectif inhérent à toute entreprise cognitive. Loin d’élever la neutralisation des valeurs du chercheur en solution au problème, Freund suggère plutôt de faire de leur reconnaissance formelle une des conditions de possibilité de l’objectivité en sociologie : « L’objectivité consiste donc dans la reconnaissance par le sociologue des présuppositions et des valeurs qui orientent sa recherche, à condition qu’il ne triche pas avec les règles de la critique interne10. » Il s’agit certainement là d’un pas fait en dehors de l’hermétisme de la neutralité axiologique, mais il s’agit néanmoins d’un seul pas, et cela est insuffisant pour avancer. Il ne suffit pas, en effet, de faire l’inventaire de nos valeurs personnelles comme s’il s’agissait d’une liste d’épicerie. Une fois reconnue la nécessité d’admettre les valeurs qui orientent la recherche, que reste-t-il à faire ? Suffit-il de mettre de côté ces valeurs et de passer ensuite à l’analyse ? Nous sommes plutôt d’avis qu’il faut en dégager de véritables conséquences épistémologiques. Il faut rendre ces valeurs « opérationnelles », c’est-à-dire

et chacun donnant lieu à un système de sciences authentiques et également positives » (Freund, 1973, p. 85). Notons aussi que l’effort de Dilthey fut critiqué { ses débuts, entre autres par Rickert et Windelband. Pour eux, il était inacceptable de fractionner la réalité. Leur solution passait par une classification des sciences, non { partir de l’objet, mais { partir des perspectives selon qu’elles ont pour objectif de connaître les lois du phénomène ou de le connaître dans sa singularité (Freund, 1966, p. 32- 33).

10 Julien Freund, « De l’interprétation dans les sciences sociales », Cahiers internationaux de sociologie,

qu’il faut établir un lien entre celles-ci et les règles internes au travail sociologique, sans quoi l’exercice sera vain.

Poursuivant la réflexion sur l’interprétation en sociologie dans un texte traitant des difficultés et des possibilités de l’analyse d’un objet fait de significations, Dumais nous conduit sur une piste encore plus pertinente que le seul jeu des valeurs :

N'y aurait-il pas lieu d'examiner davantage l'activité même du théoricien qui demeure une conduite humaine comme une autre, avec ses finalités, sa structure et son dynamisme ? Il faudrait partir alors du fait que la théorie, c'est une forme de vie. Et, dans le cas du sociologue, théoriser, c'est se demander ce que la société signifie pour lui. C'est en même temps chercher à savoir comment le théoricien produit ses activités, c'est-à-dire à quelles règles du jeu il souscrit, lorsqu'il se met à discourir sur la société11.

La tâche épistémologique de l’objectivation du chercheur se décompose en deux moments importants. Il s’agit, dans un premier temps, de rendre clair ce que signifie la société pour le chercheur, procédé moins évasif et permissif que de seulement admettre ses valeurs. Il s’agit ensuite de mettre à jour les règles auxquelles le chercheur souscrit lorsqu’il tient sur la société un discours à prétention sociologique. En ce qui a trait au premier point, il semble important de voir qu’il y a en réalité deux degrés possibles accompagnant cette exigence, dont la portée respective n’est pas du tout de même nature. Le premier degré, de nature historique ou normative, est celui qui se tient dans le cadre d’un rapport effectif entre un sociologue et sa société. C’est ce premier point que nous allons très bientôt aborder à partir du projet d’autonomie soutenu par Castoriadis. Le second se situe, quant à lui, à un degré proprement ontologique et consiste à faire porter l’interrogation sur le sens de l’être-société en tant que tel. Je ne fais que l’indiquer ici, il sera question au prochain exposé de ce deuxième sens de l’impératif lorsque l’ontologie du social-historique de Castoriadis sera abordée. Disons que ce deuxième sens se dirige vers le deuxième objectif de l’objectivation du chercheur mis en lumière plus tôt, à savoir rendre claires les règles auxquelles nous adhérons. Nous croyons, en effet, qu’il y a une relation très serrée entre la conception ontologique de l’être-société à partir de laquelle nous réfléchissons et les possibilités cognitives s’offrant à la connaissance détaillée de cet objet tout comme des méthodes possibles pour en rendre compte.

La question de la signification de la société pour le chercheur est potentiellement problématique : « En sciences humaines, on en conviendra, dit Dumais, les intérêts des théoriciens risquent de se démarquer assez difficilement des intérêts des idéologues. C'est que dans ce cas plus qu'ailleurs, la théorisation relève, au fond, de l'éthique12. » L’éthique n’est pas la morale13. La tâche de l’objectivation du chercheur n’est donc pas un prétexte pour « exprimer » sa subjectivité, son expérience singulière ou sa vision « personnelle » du monde, de l’homme et de la vie en société. Toutes les valeurs ne se valent pas quand il est temps de relever cet impératif épistémologique. Certes, d’un point de vue subjectif, la personne engagée dans un acte de connaissance doit absolument reconnaître et admettre les valeurs qui guident sa recherche avant même de l’entreprendre, mais celles-ci doivent néanmoins demeurer extérieures au procédé de recherche comme tel. La visée éthique, de son côté, peut littéralement finaliser la connaissance sociologique, au sens précis de lui octroyer une finalité. Telle que nous la concevons, la véritable sociologie n’est alors pas au service de quelque puissance privée que ce soit, afin de participer à son développement ou à sa rentabilité, et elle n’est pas davantage au service de n’importe quelle orientation politique se présentant sur la place publique. La sociologie véritable est profondément animée par une visée cognitive, sans laquelle elle perdrait toute pertinence et toute valeur. Mais il nous semble important d’ajouter que cette visée doit aussi témoigner du questionnement éthique accompagnant l’expérience démocratique s’étant manifestée à deux reprises en Occident. Ce sera ici un a priori, notre premier postulat. Ce positionnement

12 Ibid., p. 19.

13 À ne pas confondre avec l’éthique { la carte de Lipovetsky ou avec toute autre logique impliquant la

prolifération de codes déontologiques. Nous pourrions illustrer par un exemple cette distinction, en nous servant du cas de la laïcité qui a occupé, ici au Québec avec la commission sur les accommodements « raisonnables », le centre des débats publics en 2007 et encore avec le cours Éthique

et culture religieuse ayant remplacé les cours d’enseignement religieux depuis peu. Il y a en effet entre

la laïcité et l’éthique un état de parenté très proche. Contrairement { une idée que ses détracteurs laissent souvent entendre, la laïcité n’est pas l’incarnation de l’idéal social de ceux qui seraient athées. Un État athée imposerait sa morale « athée », bannirait toutes les religions et y enseignerait que la croyance est une forme élémentaire de maladie mentale (du côté plus extrémiste) ou la montrerait comme une forme d’art ou de création (du côté plus nuancé). Un État laïc est, au contraire, l’incarnation d’un principe éthique et son défi est de ne pas céder aux pressions des morales qui, d’ailleurs, assument mal d’être mises toutes sur un même plan, surtout pour la morale dominante dans un contexte toujours un peu plus multiculturel. L’éthique est la recherche constante d’une meilleure coexistence des différents alors que la morale en est seulement une proposition tranchée et définie, généralement indiscutable posant un « nous » et un « autre » de manière tranchée. La recherche d’une meilleure coexistence n’est pas non plus de même nature que le multiculturalisme qui abandonne devant la tâche de cette recherche et se replie vers le bas favorisant ainsi l’expression et l’effectuation de toutes les particularités.

nous rattachera donc à la théorie critique, parce que c’est elle plus que toute autre qui a su le mieux articuler la question éthique et la théorie au fil du temps sans souffrir d’un complexe d’infériorité scientifique.

L’enjeu de la révolution

Depuis qu’elle se déploie dans le monde des sciences sociales, la théorie critique a toujours été rivée, de près ou de loin, à la question éthique. En suspectant constamment ce qui est de bloquer ce qui pourrait être, en cherchant toujours à démasquer les causes arbitraires de la domination qui se font passer pour des vérités éternelles, elle avait toujours en vue le bien commun14. On le voit clairement dans l’œuvre de Marx, notamment dans son parti pris avoué pour le socialisme et, même, dans la méthode et la stratégie discursive à l’œuvre dans Le Capital, lorsqu’il utilise systématiquement des exemples de personnes concrètes afin de montrer l’exploitation et la souffrance d’individus réels. Le questionnement éthique traverse aussi l’ensemble des réalisations de l’école de Francfort sous la gouverne d’Horkheimer, entreprise théorique qui fut nettement animée par une quête éthique. C’est d’ailleurs en raison d’un souci de cette nature qu’Horkheimer en viendra à abandonner l’horizon révolutionnaire du marxisme pour se tourner vers une attitude beaucoup plus conservatrice (rien à voir avec le courant politique), où la sauvegarde du devenu historique remplace le désir de révolution.

14 Selon Loïc Wacquant (La pensée critique comme dissolvant de la doxa, 2001, http://www.homme-

moderne.org/societe/socio/ wacquant/pensecri.html), la notion de critique { l’origine de la philosophie renverrait { un premier sens, d’obédience kantienne, qui « désigne l’examen évaluatif des catégories et des formes de connaissance afin d’en déterminer la validité et la valeur cognitives ». La critique a ici l’allure d’un questionnement épistémologique. La deuxième acception est d’obédience marxienne, elle « pointe les armes de la raison vers la réalité sociohistorique et se donne pour tâche de porter au jour les formes cachées de domination et d’exploitation qui la façonnent afin de faire apparaître, en négatif, les alternatives qu’elles obstruent et excluent ». Pour Wacquant, l’idéal n’est pas tant l’un ou l’autre de ces pôles que leur synergie : « La connaissance des déterminants sociaux de la pensée est indispensable pour l’affranchir un tant soit peu des déterminismes qui pèsent sur elle (comme sur toute pratique sociale) et donc pour la rendre capable de nous projeter mentalement hors du monde tel qu’il nous est donné de sorte { inventer concrètement des futurs autres que celui qui est inscrit dans l’ordre des choses. Bref, la pensée critique est celle qui nous donne les moyens de penser le

monde tel qu’il est et tel qu’il pourrait être ». Freitag, lui, ancrerait davantage l’origine de la théorie

critique chez Hegel : « Comprise dans la perspective qui lui a été donnée par Hegel, l’approche critico- dialectique se présente ainsi globalement comme une "épistémologie" de la pratique en général, à caractère phénoménologique et herméneutique » (Freitag, 1986, p.25), un sens qui correspond au 2e

Pendant longtemps, l’idée de révolution (comme processus de transformation radicale de la société vers le mieux) a été au centre de l’approche critique, et elle était conçue comme une sorte de passage nécessaire pour toute entreprise d’amélioration du genre humain et de la vie en société. Marx, par exemple, la voyait advenir « naturellement » à la jonction du déploiement des processus contradictoires du capitalisme. Elle réalisait même, à l’intérieur de sa théorie, une sorte de fonction rédemptrice et nécessaire. Toutefois, avec la trajectoire effectivement prise par la « révolution » des bolcheviques, avec Lénine et Staline, elle a perdu son auréole de noblesse dans une bonne partie de la tradition postmarxiste, et chez Horkheimer en premier lieu. C’est ainsi que l’idée d’une transformation radicale de la société par la révolution a été abandonnée et balayée en dehors de l’horizon théorique de l’école de Francfort15. Voyons justement comment Horkheimer exposa le problème au sein