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L’institution d’un avant-contrat adapté à la vente d’immeubles à rénover

Section II : Le contenu de la vente d’immeubles à rénover

A. L’institution d’un avant-contrat adapté à la vente d’immeubles à rénover

224. Dans la pratique de la vente de biens immobiliers, l’acte définitif est

généralement précédé d’un avant-contrat dont la forme et la nature peuvent varier en fonction de l’opération projetée sur l’immeuble. Au regard du formalisme du contrat de vente régissant les rénovations d’immeubles, on peut légitimement penser que le législateur n’a pas souhaité reproduire à l’identique, l’avant-contrat conçu pour les ventes d’immeubles à construire. En effet, ce n’est pas un contrat préliminaire de réservation389

qui précède le contrat définitif de vente d’immeubles à rénover, mais plutôt une promesse de vente390. Néanmoins, convient-il de remarquer que comme le contrat de réservation,

la promesse de vente préparant la vente à rénover doit contenir les éléments constitutifs

389 En vertu de l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation, le contrat préliminaire ou

contrat de réservation, est une convention aux termes de laquelle le constructeur réserve au profit de l’acquéreur l'immeuble ou partie d’immeuble à construire en fonction des plans et descriptifs établis, et d'un prix prévisionnel de la vente qui sera consentie. La réservation s’effectue en contrepartie d’un dépôt de garantie par l’acquéreur sur un compte spécial, dont les fonds seront indisponibles, incessibles et insaisissables jusqu’à la conclusion de l’acte définitif. À la lecture de l’article R. 261-28 du même Code, le montant du dépôt de garantie ne peut être supérieur à 5% du prix prévisionnel de vente si le délai de réalisation de la vente n’excède pas un an, ou dépasser les 2% si ce délai de réalisation n’excède pas deux ans.

390 Elle peut selon les cas, revêtir une forme unilatérale ou synallagmatique. Conformément au droit

commun, la promesse unilatérale de vente est la convention par laquelle un individu, le promettant, s'engage envers un autre qui l'accepte, le bénéficiaire, à conclure une vente dont les conditions sont d'ores et déjà déterminées, si celui-ci le demande dans un certain délai. Quant à la promesse synallagmatique de vente ou compromis de vente, l’article 1589 du Code civil dispose qu’elle « vaut vente, lorsqu’il y a consentement

105 du contrat définitif. Le cas échéant, l’acte préparant la vente doit obéir aux prescriptions de l’article 1583 du Code civil391.

225. Cependant, nonobstant quelques points de similitude392, les avant-contrats qui

précèdent les ventes d’immeubles à construire et à rénover présentent tout de même des différences qu’il y a lieu d’exposer.

226. Ainsi, s’agissant de l’avant-contrat régissant les ventes d’immeubles à construire,

il ressort de l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation, que lorsque les parties ont opté pour sa mise en place393, le contrat de réservation doit « comporter les

indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, à la qualité de la construction et aux délais d'exécution des travaux, ainsi qu'à la consistance, à la situation et au prix du local réservé ». À noter que dans ce texte régissant le contenu de l’avant-

contrat des ventes d’immeubles à construire, et plus particulièrement celui de la VEFA - dont le régime est très semblable à celui des ventes d’immeubles à rénover - il n’est pas fait mention de l’engagement futur du vendeur de garantir une bonne fin de l’opération394.

227. Cette première différence peut nous paraître cohérente à bien des égards. En effet,

elle pourrait simplement résulter de la dénomination et de la finalité de l’avant-contrat. Si l’on considère que le contrat préliminaire de réservation a juste pour but de réserver le futur immeuble résultant des travaux de construction, il est alors justifié que l’acte se limite aux éléments essentiels du bien395 sans nécessairement préciser l’obligation future

du vendeur de fournir une garantie financière d’achèvement396.

391 O. BARRET, « Promesse unilatérale de vente », Rép. Dr. imm. 2011, n° 40.

392 J.-L. BERGEL, J.-J. EYROLLES, E. GAVIN-MILLAN-OOSTERLYNCK, F. ROUVIERE, L.

TRANCHANT et J.-Ph. TRICOIRE, La vente d’immeubles à rénover, op. cit., p. 84.

393 Puisque la mise en place d’un contrat de réservation demeure avant tout, un acte facultatif.

394 Dans ce cas de figure, la finalisation ou achèvement d’une opération de construction ou de rénovation

dans les ventes d’immeubles à construire ou à rénover est sécurisée par une garantie financière d’achèvement.

395 Les éléments essentiels du bien à construire renvoient à ses caractéristiques, son prix, au délai de

réalisation des travaux. Cf., art. R. 261-25 et s. du Code de la construction et de l’habitation.

396 Cette conception du contrat préliminaire se rapproche de celle de Monsieur le Professeur Jean-Louis

BERGEL qui précise que si la convention est conclue avant la mise au point définitive du projet, le réservant ne s’engage pas à construire ou vendre, mais s’interdit seulement de réserver au profit d’un tiers, in J.-L. BERGEL, « Les contrats préliminaires de réservation dans les ventes d’immeubles à construire : unité ou dualisme », JCP 1975, I, 2669.

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228. En revanche, si l’acte préliminaire constitue la phase préparatoire du contrat

définitif, et donc le prélude du déroulement de la relation contractuelle, il est alors paradoxal qu’il ne fasse aucune référence à l’obligation de garantie de bonne fin dont la mention pourrait rassurer l’acquéreur. Car, on pourrait bien imaginer que l’institution d’une telle mesure au stade de l’avant-contrat servirait d’indicateur à l’acquéreur, quant à la détermination du vendeur de tout mettre en œuvre pour lui garantir un dénouement heureux.

229. Aussi, peut-on considérer que le législateur ait souhaité lever toute confusion

possible avec le contrat préliminaire, en conférant un contenu plus étendu à la promesse de vente d’immeubles à rénover ? En effet, l’avant-contrat de la vente d’immeubles à rénover doit, en plus de comporter les indications essentielles relatives aux caractéristiques de l’immeuble et aux travaux397, préciser l’engagement du vendeur de

produire lors de la signature de l’acte définitif, les justifications des garanties visant à sécuriser l’opération398. Cela dit, faut-il alors prétendre qu’il soit aussi fait référence à la

garantie financière d’achèvement de la VEFA dès le contrat de réservation, au titre du destin commun399 qu’elle partage avec la garantie d’achèvement de la vente d’immeubles

à rénover ? Ou alors, faut-il simplement comprendre que le fait que l’engagement futur du vendeur de fournir une garantie d’achèvement soit mentionné dès l’avant-contrat de vente à rénover résulte de la fonction première d’une promesse qui désigne l’engagement de faire quelque chose ?

Sur la base de ce second postulat, s’observe une différence de nature entre ces deux formes d’avant-contrat. Partant, il serait finalement cohérent que l’engagement du vendeur de fournir une garantie d’achèvement figure dans l’avant-contrat de vente d’immeubles à rénover et non dans celui de VEFA, le premier désignant une promesse et le second une simple réservation400.

397 En vertu de l’article L. 262-9 du CCH, sont visées ici les caractéristiques essentielles de l’existant, objet

des travaux de rénovation, son prix, le descriptif, ainsi que le délai de réalisation desdits travaux.

398 CCH., art. L. 262-9, ibidem.

399 Les garanties d’achèvement de VEFA et de vente d’immeubles à rénover visent à financer l’achèvement

de l’opération en cas de défaillance du vendeur.

400 Sur la qualification et le contenu du contrat préliminaire : les juges du fond estiment que son contenu et

la qualification ne dépendent aucunement de la volonté des parties. Ceux-ci doivent obéir à un formalisme préétabli par la loi, in CA Paris 29 juin 1976, JCP N 1977, II, p. 23, note P. Meysson et M. Tirard. Ce qui implique que les parties ne pourraient par exemple pas insérer dans le contrat préliminaire une obligation de fourniture de garantie.

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230. Par ailleurs, comme le précise la doctrine, le contrat préliminaire est un contrat

sui generis synallagmatique qui comporte des obligations réciproques aux termes

desquelles, le vendeur s'engage en contrepartie d'un dépôt de garantie, à réserver à un potentiel acquéreur un immeuble401. Cette définition contribue en outre à distinguer le

contrat préliminaire du contrat de promesse de vente qui selon les cas, peut revêtir une forme synallagmatique ou unilatérale402.

231. Au vu des considérations susvisées, on peut globalement considérer que les

penseurs de la vente d’immeubles à rénover lui ont conçu un avant-contrat différent de celui régissant les autres ventes d’immeubles du secteur protégé. Une autre différence d’importance entre la promesse de vente d’immeubles à rénover et le contrat de réservation réside dans le droit applicable. En matière de promesse, le droit commun prime sur le droit spécial. Le deuxième alinéa de l’article R. 262-15 du Code de la construction et de l’habitation dispose en ce sens que : la promesse de vente à rénover est soumise « aux règles de droit commun relatives à la vente d’immeubles existants ». Cependant, nous nous interrogeons sur cette option prise par les créateurs du présent contrat.

232. Tout d’abord, on peut se demander si la soumission de la promesse de vente à

rénover au droit commun reconnaît implicitement l’admission d’une promesse unilatérale d’achat. Pour rappel, cette convention désigneun contrat par lequel le promettant s'engage à acheter un bien appartenant au bénéficiaire, si ce dernier consent à le lui vendre403. Le

cas échéant, s’opère une inversion des rôles par rapport à la promesse unilatérale de vente. L’acquéreur devient promettant et le vendeur bénéficiaire de la promesse. Or, le fait que l’article L. 262-9 ne mentionne que « la promesse de vente » semble exclure l’hypothèse d’une promesse formulée par l’acquéreur de l’immeuble404. Certains auteurs soutiennent

tout de même que la promesse unilatérale d’achat puisse être admise lorsqu’elle est conclue à titre gratuit405.

401 Cass. 3e civ., 27 oct. 1975, D. 1976 ; G.P. 1976, 1, 67, note M. Peisse.

402 J.-B. AUBY, H. PERINET-MARQUET et R. NOGUELLOU, Droit de l’urbanisme et de la construction, op. cit., p. 1020.

403 O. BARRET, « Promesse unilatérale de vente », Rép. Dr. imm. 2011, n° 31.

404 J.-B. AUBY, H. PERINET-MARQUET et R. NOGUELLOU, Droit de l’urbanisme et de la construction, ibidem.

405J.-L. BERGEL, J.-J., EYROLLES, E. GAVIN-MILLAN-OOSTERLYNCK, F. ROUVIÈRE, L.

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233. Enfin, à l’instar de la doctrine, on peut s’interroger si le versement d’un dépôt de

garantie peut être effectué par l’acquéreur au stade de la signature de la promesse. Toutefois, cette interrogation disparaît au regard de l’article L. 262-8 qui énonce que l’acquéreur effectue le règlement du prix en fonction de l’état d’avancement des travaux. Cette même disposition indique par ailleurs que le vendeur n’est en droit d’exiger ou d’accepter aucun versement, aucun dépôt, aucune souscription ou acceptation d’effets de commerce, avant la date à laquelle la créance est exigible.

234. À ce texte, viennent s’additionner les articles R. 262-10 et L. 262-1 du Code

précité. Le premier interdit, dans l’hypothèse où la vente serait conclue sous condition suspensive, que le moindre versement puisse être effectué avant sa réalisation. Quant au second article, il prévoit que le premier versement correspondant au prix de l’existant ne puisse avoir lieu qu’au stade du contrat définitif. L’analyse combinée de ces dispositions laisse in fine entendre qu’aucun versement ne puisse être effectué par l’acquéreur au moment de la conclusion de l’avant-contrat de vente d’immeubles à rénover.

En plus de sa formation, la volonté du codificateur de confectionner un cadre propre à la vente d’immeubles à rénover se prolonge au stade de son exécution.

B. Les ajustements opérés au stade de l’exécution de la vente d’immeubles à