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2.4 Stratégies des agriculteurs pour gérer les risques agricoles

2.4.3 L’influence de l’environnement dans la gestion des risques

Pour pouvoir mettre sur pied des stratégies de gestion des risques grâce à leurs ressources (naturelles, humaines, sociales, physiques et financières), les agriculteurs subissent en permanence des influences internes et externes de l’environnement (figure 3).

Figure 3 : Facteurs qui influencent la gestion des risques

Source : W B (2014)

Les flèches retour signifient que les répercussions des chocs peuvent affecter la propension des chocs futurs.

2.4.3.1 Les conditions internes

Les ménages sont de petites unités mais complexes. Leurs caractéristiques peuvent avoir une influence substantielle sur la capacité du ménage pour faire face aux risques et exploiter les opportunités. En particulier le capital financier, l’expérience, l’éducation, etc. ont un impact sur la capacité des ménages à la gestion efficace des risques. Résultat Chocs Environnement externe Conditions internes Gestion des risques

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2.4.3.1.1 Education

Il n’est pas aisé pour des ménages qui présentent simultanément une faiblesse des moyens de subsistance et de niveau d’éducation (les non instruits) de mettre en œuvre des stratégies d’adapatation de long terme. Les agriculteurs sont dans une nécessité d’une formation continue et de nouvelles compétences pour adopter de nouvelles technologies, techniques de culture, l’adoption des intrants et semances de variétés plus productives et plus résistantes aux aléas climatiques. Une meilleure éducation facilite donc la transition des ménages ruraux vers les secteurs non agricoles en leur permettant d’acquérir de nouvelles compétences, ce qui à son tour accroît leur productivité et élargit leurs possibilités de travail et de revenus. Ces compétences les aident également à s’engager dans une diversification des revenus ex ante et à interpréter plus précisément les prévisions et les risques climatiques (Baez & Mason, 2008). La compréhension du risque est une porte d’entrée pour prendre de bonnes décisions de gestion dans des situations où l’adversité et la perte sont possibles et pour développer des stratégies visant à atténuer la possibilité d’événements indésirables.

Quoique le niveau de diversification diffère à travers le pays par les conditions physiques, agro-écologiques et la biodiverité, les conditions socio-économiques et institutionnelles, le niveau d’éducation exerce une influence notable dans les stratégies de diversification. L’étude menée en Ethiopie a montré que le niveau d’éducation d’un ménage est positivement lié aux stratégies de diversification des ménages surtout pour les chefs de ménages (Benin et al., 2004). La formation et l’encadrement technique doivent revêtir un caractère particulier auprès des agriculteurs et le cas échéant dans la prise de décisions face aux risques. Les agronomes et moniteurs doivent avoir une compréhension solide et pratique des risques auxquels les agriculteurs sont confrontés ainsi que de l’éventail de stratégies de gestion des risques possibles. Ils doivent être capables de fournir les informations requises aux agriculteurs pour mieux évaluer les risques et les conséquences potentielles des risques. Enfin, ils doivent être en mesure d’aider les agriculteurs à identifier les options de gestion des risques les plus appropriées, d’évaluer leurs effets (les avantages/coûts) ainsi que l’impact des stratégies à entreprendre sur les ménages des agriculteurs.

Bref, la gestion du risque implique un choix parmi des alternatives possibles pour réduire les effets du risque. Par conséquent, elle nécessite des connaissances suffisantes pour évaluer le compromis entre les changements de risque, les résultats attendus, la liberté d’entreprendre ainsi que d’autres variables.

2.4.3.1.2 Le capital financier

Les agriculteurs aux moyens de subsistance faibles trouvent des difficultés de mettre en action les stratégies de gestion des risques ex ante. Ils se fient aux stratégies de gestion des risques ex post avec comme conséquence une vulnérabilité qui s’intensifie dans le temps. A long terme, les agiculteurs sont dans une trappe à pauvreté (Fischer & Buchenrieder, 2010). Le manque de moyens financiers suffisants est une contrainte pour eux pour pouvoir adopter des stratégies pour prévenir et/ou atténuer des risques. Par exemple, le développement de la Grameen Bank au Bangladesh a permis aux

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agriculteurs les plus pauvres d’investir dans différentes activités et la pauvreté a été a été relativement réduite (W B, 1996).

2.4.3.1.3 La perception

La résilience des agriculteurs est influencée par les facteurs internes tels que la perception ou les attitudes vis-à-vis des stratégies de gestion des risques. Marschke et Berkes (2006) ont montré que le savoir vivre dans divers risques et savoir s’auto- organiser sont des facteurs importants dans la résilience des pêcheurs au Cambodge. Les auteurs (Marshall & Marshall, 2007) ont identifié en Australie du nord quatre perceptions, facteurs de résilience des ménages qui pratiquent la pêche : (i) la perception du risque associé au changement, (ii) la capacité à apprendre, à planifier et à innover, (iii) la capacité de faire face et (iv) le niveau d’intérêt pour le changement dans le contexte australien. Le tissu social, la personnalité et la culture sont également liés à la perception (Luchner & Satterwhite, 2016).

2.4.3.2 L’environnement externe

Les systèmes agricoles sont influencés par l’environnement externe - l’environnement socio-économique et politique. Par conséquent, si les systèmes agricoles se veulent être durables, il est essentiel de comprendre comment ils subissent l’influence de l’environnement qui prévaut. Dans la gestion des risques via l’adoption de pratiques durables, le contexte social, politique et culturel de l’agriculture peut être ignoré. En l’absence des appuis socio-politiques découle une faible production et donc une faible résilience vis-à-vis des chocs endogènes et exogènes. L’enquête menée par Truong et Yamada à Can Tho au Vietnam a montré que malgré la perception positive dans la technologie, les agriculteurs rencontrent des difficultés d’application de celle- ci en l’absence de directives gouvernementales et vu le manque de politiques de compensation pour assurer de meilleurs rendements (Truong & Yamada, 2002). Généralement les politiques interventionnistes dans la gestion des risques sont de trois types : les contraintes budgétaires, l’aide sociale en cas de graves catastrophes et l’orientation vers le marché (Skees, Barnett & Hartell, 2005). Cependant, les politiques interventionnistes peuvent causer l’émergence d’autres risques. Ainsi, l’augmentation du volume de la production grâce à une politique interventionniste vis- à-vis des risques agricoles peut générer des risques de marché liés à une offre excédentaire de produits1. Les risques agricoles sont donc affectés par les interrelations et les interdépendances entre les marchés, les actions gouvernementales et les stratégies de production et de commercialisation des agriculteurs (OCDE, 2009). L’environnement social au sens restreint est composé de communautés qui sont des groupes d’individus (les agriculteurs) qui partagent un lieu ou une identité et qui interagissent mutuellement. Les communautés comprennent des groupes d’individus qui vivent à proximité, des groupes religieux, groupes ethniques, des associations de solidarité, etc. Elles agissent sur base de confiance, de normes sociales et défendent des intérêts communs. A travers ces réseaux, ces communautés peuvent aider les membres à faire face aux risques idiosyncratiques ou systémiques (W B, 2014). Par

1L’excédent sur le marché à la suite d’une politique interventionniste est évoqué dans les pays développés. En

l’absence des risques liés aux catastrophes, la question de régulation de l’offre agricole sur le marché est une préoccupation des autorités gouvernementales en collaboration avec les Organisations Inter Professionnelles.

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ailleurs, l’existence des risques systémiques dans une communauté des agriculteurs nécessite le concours et la force d’un groupe ou d’une communauté (OECD, 2009). Par exemple, dans une communauté rurale de Nyagatoke en Tanzanie, 120 ménages ont formé au moins 40 groupes pour faire face à certains risques. Ces groupes disposent d’une caisse d’assurance funéraire, d’associations de tontines d’épargne et de crédit, font une entraide mutuelle en termes de main-d’œuvre et un élevage commun. Ces groupes offrent une assurance utile aux villageois et la plupart des résidents appartiennent à un ou plusieurs groupes. Les groupes ont des règles verbales ou écrites régissant les contributions et les modalités de remboursement pour des événements spécifiques ainsi que les sanctions contre les non contributeurs. Certains groupes renforcent leurs règles par des cérémonies qui soulignent l’unité et l’importance de l’aide mutuelle. Il existe également un groupe qui patrouille pendant la nuit pour renforcer la sécurité des membres (W B, 2014).