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5.2 Les données primaires

5.2.5 Encadrement technique de la théiculture

5.2.5.1 Organisation et communication

L’encadrement technique se fait du haut (OTB siège) des usines à la base (chez l’exploitant-théiculteur). A Teza et Ijenda, un gérant est à la tête de la gestion et de l’organisation. Chaque complexe théicole est constitué de 5 services : le service plantation, le boisement, l’usinage, l’administration et la comptabilité. Dans chaque

7Dans les paragraphes précédents, nous avons mentionné que le travailleur embauché, est logé et nourri gratuitement

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service, se trouvent des sous-divisions et il est placé à la tête de chaque service un chef qui assure la responsabilité de ce service. Des réunions hebdomadaires de chefs de service sont organisées par le gérant ainsi que des réunions du conseil de l’entreprise. Le gérant de chaque complexe organise des réunions chaque fois que besoin à l’intention de tout le personnel de l’entreprise (les chefs de service, les travailleurs de la catégorie cadres, la collaboration et l’exécution). Les chefs de service réunissent, à leur tour, le personnel sous leurs ordres pour échanger sur l’avancée (positive ou négative) et les défis du service et proposent des stratégies à arrêter en vue d’améliorer le rendement.

L’encadrement des exploitants-théiculteurs est assuré par le service plantation du complexe tant à Teza qu’à Ijenda. A Teza, en plus de l’encadrement des plantations familiales, le service est également responsable des plantations étatiques du complexe. A Ijenda le service s’occupe des plantations théicoles familiales uniquement. Au sein du service plantation, il est planifié et exécuté des extensions des superficies dans les milieux villageois et étatique. De plus, le service est chargé de la distribution des engrais minéraux (NPK), la supervision de l’état de toutes les plantations, la cueillette et la collecte des FV. Le service est en contact permanent avec les exploitants- théiculteurs, il est l’œil du gérant de l’usine.

A Ijenda, les plantations sont éparpillées dans plusieurs communes administratives de la zone (Mugongo-Manga, Nyabiraba, Mukike, Rusaka, Gisozi, etc.). Cette zone est subdivisée en deux périmètres sous la responsabilité de deux agronomes ainsi qu’une dizaine de vulgarisateurs. De même à Teza, il est distingué deux périmètres (Bukeye 1 et Bukeye 2) sous la responsabilité de deux agronomes. Le périmètre de Bukeye1 est subdivisé en trois zones sous la responsabilité de vulgarisateurs : zones Bukeye, Busangana et Nyarucamo. Le secteur de Bukeye 2 est subdivisé en 4 zones sous la responsabilité de vulgarisateurs également : zones Muramvya, Shombo, Ryarusera et Bugarama.

L’encadrement des exploitants-théiculteurs se fait principalement au niveau de l’entretien des champs (le sarclage et la taille), de la cueillette et du transport des FV du théier. La tâche d’encadrement est rendue facile par les moniteurs/vulgarisateurs agricoles. Leur rôle est indispensable : ce sont eux qui font appliquer les règles et normes émanant du haut de leur hiérarchie et communiquent aux exploitants- théiculteurs toutes les informations relatives à la nouvelle phase d’extension (l’inscription, la distribution des plants), le calendrier de distribution d’engrais minéral, le calendrier de cueillette, le calendrier de taille, etc. La communication de ces informations est généralement faite aux hangars de vente de FV du théier. Les exploitants-théiculteurs ont l’habitude de se rendre le soir dans des petits bistrots situés sur les collines pour se rafraîchir en vin de banane ou en bière d’éleusine « ruyeye ». Les moniteurs profitent de ce moment pour leur communiquer la période de sarclage, d’obtention des engrais minéraux et la période de taille. Cette communication est rapidement transmise de bouche à oreille dans les ménages des exploitants-théiculteurs.

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5.2.5.2 Le sarclage

Les moniteurs visitent régulièrement les plantations des secteurs sous leur responsabilité pour voir si les champs sont ou ne sont pas bien entretenus. Un champ théicole exige deux sarclages par an. Le sarclage du théier est une activité à la responsabilité de chaque exploitant-théiculteur. Si cette activité n’est pas réalisée, différentes mesures peuvent être prises. Le moniteur donne des remarques au hangar lors de la vente de FV. Connaissant par cœur tous les champs ainsi que leurs propriétaires, les exploitants-théiculteurs qui n’ont pas encore sarclé leurs champs sont ciblés et sont interpelés pour s’expliquer sur ce comportement. Un contrôle plus rigoureux des FV de ceux qui n’ont pas effectué le sarclage est effectué. En plus de ce contrôle rigoureux, l’exploitant-théiculteur peut être menacé de ne pas vendre ses FV puisque son champ n’est pas sarclé. En effet, un champ non-entretenu donne une production de mauvaise qualité. Certains exploitants-théiculteurs sont conscients que le théier non sarclé donne des feuilles de qualité inférieure et sont moins lourdes que le même volume de feuilles d’un champ bien entretenu. Parfois, les exploitants- théiculteurs sont menacés de ne pas recevoir de l’engrais minéral (NPK) aussi longtemps que leur champ n’est pas sarclé.

Lors de l’introduction du théier au Burundi, les engrais minéraux (NPK) étaient subventionnés. C’était une manière d’encourager les exploitants ruraux à adopter une culture de rente dont ils ne connaissaient pas encore les avantages vis-à-vis des cultures vivrières. Des primes en numéraire étaient octroyées aux exploitants qui avaient entrepris la plantation du théier. Un des répondants nous dit : « l’engrais minéral était subventionné et l’Etat nous donnait une prime de 4.500 FBu chaque mois pour nous encourager à planter cette culture étatique. Certains arrachaient les bananeraies pour planter le théier ».

Plus tard (en 1992), les engrais minéraux (NPK) servant à la fertilisation du théier sont vendus à crédit aux exploitants-théiculteurs par les usines théicoles étatiques de transformation. La quantité octroyée à chaque exploitant-théiculteur est fonction de la dimension de la superficie de la plantation à raison de 2,5 kg/are. La distribution se fait une ou deux fois l’année. Pour payer les engrais minéraux, l’OTB retranche une certaine somme le jour de la paie pour le paiement des engrais chimiques reçus à crédit jusqu’à ce que la dette soit payée en totalité. Avec le prix d’un kg de la FV de 250 FBu, il est retranché 30 FBu/kg. La somme qui revient à l’exploitant-théiculteur est de 220 FBu pour l’apurement de la dette de l’engrais minéral (NPK).Payer le prix des engrais par retrait à la source des FV vendues est un avantage évident pour les exploitants-théiculteurs. En effet, un champ théicole non fumé et bien entretenu est moins productif. Selon les agronomes, l’application de l’engrais minéral se fait deux fois l’année. Les enquêtes menées à Teza confirment cette règle. Par contre, tous les répondants de la zone d’Ijenda nous ont révélé que l’application de l’engrais minéral se fait une seule fois l’année.

5.2.5.3 La taille

La taille du théier au Burundi se fait une fois tous les 3 ou 4 ans et pour chaque secteur le même jour. Pour bien tailler le théier, un apprentissage sur le tas pour rappeler la technique est dispensé aux exploitants-théiculteurs. Le chef plantation, les

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agronomes et les vulgarisateurs ciblent un champ de théier donné. Les théiculteurs des environs se rassemblent autour du champ et une dizaine de pieds de théier sont taillés. Une serpette bien aiguisée est utilisée pour ne pas abîmer les branches.

5.2.5.4 Le paillage

Une autre activité vulgarisée pour un bon entretien du théier est le paillage. Le paillis sert à la fertilisation du théier. Le paillage du théier présente de nombreux avantages : il empêche l’évaporation du sol pendant la saison sèche, enrichit le sol en humus et en apport important d’éléments minéraux, lutte contre les mauvaises herbes et participe à la protection contre l’érosion pluviale. L’application du paillis au théier est intégrale. Le paillis peut provenir de plusieurs origines. A Teza, le paillis peut être constitué de feuilles d’Eucalyptus, de Callitris, de fanes de récolte (du blé, des haricots, ...), de feuilles du roseau, de feuilles et écorces du bananier, d’herbes, ainsi que de feuilles des branches du théier taillé. La majeure partie des exploitants utilisent les feuilles d’Eucalyptus et des branches du théier taillé comme paillis. Ceux qui recourent au paillage par l’usage du paillis susmentionné (auquel ils ajoutent les feuilles des branches du théier lors de la taille) sont de l’ordre de 78%. Le nombre d’applications du paillis n’est pas limité. Le paillage se fait à chaque fois que le paillis est disponible. A Ijenda, les exploitants-théiculteurs utilisent uniquement le paillis des feuilles du théier une fois taillé. La taille se faisant une fois tous les trois ou quatre ans. De toute manière, ce paillis s’avère insuffisant. La différence au niveau du type de paillage dans les deux zones situées dans une même région naturelle s’explique par le fait que le paillage du théier n’est pas une obligation. Dans tous les cas, le paillage devrait être une obligation pour maximiser le rendement du théier.

5.2.5.5 La cueillette

A chaque cueillette les moniteurs/vulgarisateurs se promènent dans les plantations et font une démonstration sur le tas d’une bonne cueillette. Pour faire respecter les normes de cueillette : les bonnes feuilles - Pekoe+1, Pekoe+2, Pekoe+3 jeunes feuilles et le banjhi tendre doivent représenter 75% de l’ensemble des feuilles cueillies. Selon les exploitants-théiculteurs la cueillette du Pekoe+3 jeunes feuilles et le banjhi tendre n’est plus acceptée. Pour faire respecter la norme, toutes les autorités du service plantation y compris le gérant sont mobilisées les jours de la cueillette. Ces autorités n’y vont pas par quatre chemins : une cueillette grossière (faite sans respecter les normes de cueillette) est refusée. Le transport des feuilles vertes est surveillé. Les feuilles du théier doivent être dans un panier ouvert. La cueillette peut être faite dans un sac ou un pagne (ikirepe) si la distance à parcourir du lieu de la cueillette au hangar n’est pas grande pour ne pas occasionner la brûlure des feuilles. Malgré toutes ces mesures contraignantes, la majorité des exploitants-théiculteurs sont satisfaits de l’encadrement technique. A Ijenda, 87% des exploitants-théiculteurs interrogés contre 90% de ceux de Teza sont totalement satisfaits de l’encadrement.

Le choix de la culture de rente - le théier - demande l’acceptation de certaines contraintes. L’arrachage du théier pour planter d’autres cultures (généralement les arbres) est formellement interdit. L’arrachage du théier se fait si l’exploitant- théiculteur constate que le théier planté est de mauvaise qualité (généralement de grandes feuilles) sous condition de remplacer les pieds arrachés par d’autres plants de

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théier. Cet arrachage se fait avec l’accord des vulgarisateurs qui se rendent sur terrain et qui constatent la nécessité du remplacement. Si cette action est faite à volonté, l’exploitant-théiculteur est dans l’obligation de remplacer le théier arraché et paie en plus une amende allant de 100.000 FBu à 200.000 FBu. Suivant les dimensions du champ sur lequel se trouvent les pieds arrachés, l’exploitant-théiculteur peut écoper d’une peine d’emprisonnement. Le non entretien du théier est un signe évident d’abandon du champ. Il s’agit d’une manière de contourner l’amende ou l’emprisonnement si on arrachait le théier. Le non entretien du champ préserve l’exploitant des pertes en énergie, en temps et en coût qui seraient consacrées au théier non productif, c’est-à-dire qui ne dégage pas de la valeur ajoutée. Profitant de la crise socio-politique de 1993, les exploitants-théiculteurs ont arraché du théier qui n’était pas productif.