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L’industrie 4.0., évolution ou révolution ?

«L’usine du futur devra être plus respectueuse de son environnement, grâce à des modes de production moins consommateurs de ressources et moins générateurs de rejets, plus intelligente, avec des modes de production toujours plus sophistiqués qui repensent l’interface homme-machine. Plus flexible, en utilisant des outils de pro- duction reconfigurables, l’usine pourra proposer une offre plus proche des besoins du marché, passant du ‘mass market’ au ‘custom built’. Plus intégrée, connectée au cœur des territoires et proche des acteurs de son écosystème (clients, sous-trai- tants et fournisseurs), l’usine de demain contribuera à dynamiser un réseau et une économie locale.»

Groupes Fives & Dassault Systèmes

illustration I.9 : L’Industrie 4.0. évolution ou révolution ? d’après la feuille de route industrie 4.0 - Plan d’action en écono- mie numérique, Stratégie numérique du Québec, 2016.

En somme, l’usine du futur est «une réponse à plusieurs transitions simultanées : énergétique, écologique, numérique, organisationnelle et sociétale» (Contet Philippe, 2016). Le projet, iden- tifiait 43 leviers de compétitivité et 4 familles d’actions permettant de glisser vers ces audacieux objectifs. En mai 2015, afin de gagner en lisibilité, l’ambition du projet se voit élargie et les 34 plans initiaux fondus et réorganisés en cinq piliers et neuf solutions thématiques :

- Économie des données - Objets intelligents - Confiance numérique - Alimentation intelligente - Nouvelles ressources - Ville durable - Mobilité écologique - Transports de demain - Médecine du futur

Porté cette fois-ci par Emmanuel Macron, en ce temps ministre de l’économie, de l’Industrie et du Numérique, le plan est rebaptisé Industrie du Futur et marque le virage pris par la France vers cette nouvelle ère industrielle. Il s’agit de « poursuivre la modernisation de l’outil de produc- tion et d’accompagner les entreprises dans la transformation de leurs modèles d’affaires, de leurs organisations, de leurs modes de conception et de commercialisation, dans un monde où les outils numériques font tomber la cloison entre industrie et services» (Contet Phi- lippe, 2016). Innovante, agile, tournée vers ses clients, centrée sur l’humain et respectueuse de l’environnement, l’usine se réinvente pour relever les défis du XXIème siècle, gagner en compétiti-

vité ainsi qu’en attractivité. Comme nombre de domaines, l’industrie tend à renouveler son regard sur la production industrielle selon une approche systémique, en intégrant les multiples facettes techniques, économiques, organisationnelles, humaines et sociales. Le vecteur commun de cette nouvelle approche systémique : la connectivité.

Les briques technologiques, socle de cette nouvelle stratégie

L’Industrie du Futur se caractérise par «l’utilisation massive des données et une connectivité for- tement augmentée» (Charlès Bernard & Senard Jean-Dominique (dir.), 2018). Parmi les nom- breuses innovations technologiques et numériques participant à la métamorphose du système productif, neufs ont été désignées comme fondamentales par le Boston Consulting Group (BCG), cabinet international de conseil en stratégie (illustration I.10, p. 34) :

illustration I.10 : Les neufs piliers de l’Industrie du futur - Alliance pour l’Industrie du Futur, interviews d’in- dustriels et d’experts, Analyses BCG. Copyright 2017 by The Boston Consulting Group. All rights reserved.

Robots collaboratifs et smart machines Internet industriel Big Data et intelligence artificielle Intégration verticale/ horizontale Simulation avancée Cloud et cybersécurité Blockchain Réalité augmentée

Production Additive et autres matériaux / processus innovants

35 NOUVELLE MATRICE DE STRATÉGIE INDUSTRIELLE «- Big data et analytics. La présence de capteurs sur les machines et les produits

permet de collecter d’importantes sommes de données. Avec les bons outils de traitement et d’analyse, ces données permettent d’optimiser la chaîne de production en identifiant de manière très fine les problèmes qui surviennent et également d’ac- croître la connaissance sur les habitudes et préférences des consommateurs.

- Robotisation. La robotique avancée permet aujourd’hui de créer des robots tra-

vaillant de façon plus autonome, flexible, et en plus grande coopération avec les opérateurs.

- Simulation. La simulation 3D de produits, matériaux ou procédés s’étend à l’en-

semble de la chaîne de production; l’acquisition de données réelles permet d’affiner les modèles.

- Systèmes d’intégration horizontaux et verticaux. Les systèmes d’information

doivent faciliter l’intégration et la communication intra- et inter-entreprises. Ils aident à l’automatisation de la chaîne d’approvisionnement, de production et de distribu- tion, mais également à la création de liens plus étroits entre les différents départe- ments d’entreprises afin de répondre au mieux à la demande.

- L’internet industriel des objets. Avec la présence de capteurs sur les machines

et les objets en cours de fabrication, les machines peuvent connaître l’historique de production de l’objet, la demande finale correspondante afin d’y répondre de ma- nière automatisée ou via un poste de contrôle central.

- Cybersécurité. La diffusion du numérique et l’augmentation des communications

qui l’accompagne (présence de capteurs générant des données, communications au sein et en dehors de l’entreprise, etc.) font de la cybersécurité un enjeu majeur pour les entreprises industrielles. De nombreux fournisseurs de matériel industriel «4.0 ready» se sont ainsi rapprochés de spécialistes de la cybersécurité afin de pro- poser des offres intégrant cet aspect.

- Cloud. Le cloud est déjà très répandu pour la gestion de logiciels et de données.

La plus grande interconnexion des sites de production et des départements au sein de l’entreprise requiert un partage de grandes quantités de données, rendu plus facile grâce au cloud.

- Fabrication additive. Cette technologie suscite de nombreux espoirs. Au-delà

de la production de prototypes, la fabrication additive permet déjà la production en petites séries de pièces complexes, de pièces de rechange et même d’outils personnalisés. Avec la maturation des technologies, la vitesse et la précision de l’impression devraient augmenter et permettre, dans certains cas, une production à grande échelle.

- Réalité augmentée. Une utilisation directe vise à fournir immédiatement à la main-

tenance des informations sur les techniques de réparation d’une pièce, par exemple via le port de lunettes de réalité augmentée. Cette technologie peut également être utilisée pour faire de la formation, ou rendre des étapes de conception moins abs- traites afin d’y associer plus de parties prenantes».

A l’image de cette liste, le plan de digitalisation à la française que constitue l’Industrie du futur s’apparente à un catalogue de solutions techno-centrées. «En Allemagne, la communication au- tour de l’Industrie 4.0 mets davantage l’accent sur la transversalité de cette approche, sur la capa- cité à s’affranchir des limites physiques des machines et des limites conceptuelles des disciplines et des métiers» (Charlet Vincent, Dehnert Stefan, Germain Thierry, (dir.), 2017).

Le mythe de la technologie salvatrice

Ces briques technologiques sont annoncées comme piliers majeurs du concept d’Industrie du Futur. Elles offrent la possibilité d’améliorer la qualité, la fonctionnalité ou l’efficacité énergétique d’un produit, tout en réduisant la pénibilité du travail industriel et les coût de production. En ce sens, les briques technologiques s’inscrivent comme solutions aux nombreux défis de l’indus- trie du XXIe siècle. L’usine se réinvente «innovante, compétitive, performante, sûre et attractive

[...] propre, silencieuse, économe en matières premières, en énergies et centrée sur l’humain» (Bidet-Mayer Thibaut a, 2016). La modernisation via des équipements, machines et logiciels de l’appareil productif s’affirme comme une nécessité. L’Industrie du Futur représente un important levier de compétitivité. Le Boston Consulting Group, fort de son expérience acquise auprès de ses clients industriels montre «des gains de l’ordre de 10 à 20 % sur les coûts de fabrication hors matières premières, grâce à la mise en œuvre des nouvelles technologies» (Charlès Bernard & Senard Jean-Dominique (dir.), 2018). Ces gains résultent d’une somme d’améliorations de pro- ductivité, de flexibilité et de gestion des stocks (figure I.11, p. 36). Les entreprises pour rester compétitives et réactives face aux évolutions de plus en plus rapides des marchés se doivent d’en- treprendre ce processus de modernisation et d’investir dans ces outils technologiques de pointe. «Le retour sur investissement est considérable» attestent Philippe Silvan, general manager Ingé- nierie - Maintenance - Procurement chez Toray Films Europe, et Olivier Maho, responsable indus- triel & logistique BG Security chez Somfy à Rumilly, lors de conférences au salon Global Industrie.

Toutefois, la technologie salvatrice relève du mythe plus que de la réalité. «Les technologies

- 35-60 %

- 50-60 %

- 20-60 %

Coûts

Durée

Gains de productivité et de coûts