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L’impact de la loi du 30 juillet 2003 sur le métier d’inspecteur des installations classées

Christian Floderer

MEEDDAT, DRIRE Alsace

Cette contribution est centrée sur les nouveautés introduites par la loi de juillet 2003 en matière de prévention des risques industriels, sur la nouvelle interface entre l’inspection des installations classées et d’autres métiers touchant à la prévention des risques industriels.

Traditionnellement, la prévention des risques industriels repose sur quatre piliers : la réduction du risque à la source, l’organisation des secours, l’information du public et la maîtrise de l’urbanisation autour des sites à risque (maintenant PPRT).

Le schéma ci-dessous illustre ces quatre approches

1. Quatre piliers définis réglementairement

Au plan européen, la directive Seveso du 24 juin 1982 a donné un premier cadre supranational à la prévention des accidents industriels. La directive Seveso 2 du 9 décembre 1996 a fait de la maîtrise de l’urbanisation une composante à part entière de la prévention. Au plan français, cette directive est traduite dans le code de l’environnement qui reprend la législation des installations classées, les dispositions concernant les PPRT et celles relatives au droit à l’information. La partie de la directive concernant le plan d’urgence externe (PPI) est traduite dans la loi du 13 août 2004 sur la modernisation de la sécurité civile. Quelques installations visées par la directive relèvent du code minier.

En partant des installations dangereuses et en allant vers les personnes exposées (récepteurs sur le schéma), on trouve : la maîtrise de l’urbanisme (qui essaie d’établir

une distance entre les deux) ; la réduction et la maîtrise des risques à la source (pour que le flux de danger soit le moins grand possible) ; le plan d’urgence (pour réduire la réception du danger s’il se manifeste).

L’étude de dangers établie par l’exploitant est au cœur de l’évaluation du risque. C’est la preuve, vis-à-vis de l’État et du public, que l’industriel a fait ce qu’il fallait en matière de réduction du risque à la source. Elle contient les estimations chiffrées (distances d’effet, probabilité, cinétique) qui permettent de dimensionner la maîtrise de l’urbanisation et les plans de secours. Les inspecteurs spécialisés en risque passent beaucoup de temps à évaluer les études de dangers au risque de voir parfois s’impatienter leurs partenaires.

Les partenaires de l’inspection dans la prévention des risques sont les exploitants (ce sont aussi les premiers concernés), les salariés, les riverains et les associations, les élus et les administrations, au premier rang desquelles figure la DDE. Ces différents partenaires participent aux comités locaux d’information et de concertation (CLIC) et certains (exploitants, élus et administrations) sont associés à l’élaboration du PPRT. Les seuls partenaires vraiment « nouveaux » pour la DRIRE, ce sont les salariés. 2. Les préoccupations des acteurs de la société civile face à la maîtrise de l’urbanisation

Les exploitants supportent une bonne partie du coût de la démarche (études, mesures complémentaires de maîtrise des risques, financement des actions foncières). Ils sont conscients de son intérêt à moyen terme, mais craignent beaucoup une réaction de rejet qui peut être double : rejet du voisinage (s’il faut exproprier 200 personnes pourquoi ne pas fermer l’usine ?) et rejet des groupes dont ils dépendent (l’actionnaire européen ou américain ne comprend pas forcément cette démarche et considère qu’elle crée un aléa financier).

À l’inverse, les riverains ne s’estiment pas responsables et sont très partisans du risque zéro. Ils ne souhaitent pas supporter les coûts ou inconvénients de la réduction du risque. Les élus, de leur côté, sont légitimement solidaires des riverains. Ils sont gênés dans leurs projets par les prescriptions sur les voies de circulation et les établissements recevant du public. Ils s’inquiètent également du coût et du risque qui pèsent ainsi sur la pérennité de l’entreprise.

Enfin, les salariés sont représentés par des salariés « protégés » au sens du code du travail, membres des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Ils sont préoccupés par l’emploi et par la sécurité interne. La sécurité interne est pour eux un objectif et un sujet de fierté, ils vivent mal sa remise en question. C’est ainsi qu’une réunion d’ouverture d’une tierce expertise, faite par l’INERIS dans une grande entreprise alsacienne, a commencé par la réception d’une délégation du CHSCT qui s’étonnait qu’on ait besoin d’expertiser.

3. Un nouveau positionnement pour l’inspecteur ?

Au moment où le PPRT est prescrit, les inspecteurs doivent être d’accord avec l’état final de l’étude de danger. En effet, l’inspecteur valide l’aléa, élabore la cartographie et l’explique en CLIC. Les inspecteurs sont, avec les DDE qui les accompagnent, les porteurs du projet, à la fois moralement (nécessité du projet) et techniquement (garant de la procédure). Ils ne peuvent donc pas rester neutres, comme ils s’efforcent

de l’être dans les commissions locales d’information autour des sites de déchets ou des sites nucléaires.

Par ailleurs, l’évaluation de l’aléa, que les inspecteurs doivent approuver et présenter, est conventionnelle et discutable. Tout inspecteur qui a fait modifier une étude de danger sait que les conclusions peuvent être différentes sur l’aléa, et partant sur l’extension des zones sur lesquelles va s’exercer la maîtrise de l’urbanisation. L’inspection doit donc justifier ses choix, par référence à des conventions de calcul. Le PPRT dérange ceux qu’il veut protéger: quand l’inspecteur annonce à des riverains une interdiction d’extension de leur maison ou une obligation d’amélioration du vitrage qu’ils vont devoir financer eux-mêmes, il n’est pas très populaire. Enfin, pour des administrations à petits effectifs et ayant une tradition plutôt technique qu’administrative, la complexité de la démarche PPRT (sur le fond et par la procédure) constitue un véritable challenge à relever : elle suppose un travail formel, minutieux, qui n’est pas dans la tradition de l’inspection des installations classées. Jusqu’alors, l’aspect procédural des autorisations était plutôt géré par les préfectures.

Conclusion — Des régularités, des divergences et