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La stratégie du PPRT en pratique

L’approche territoriale en pratique : l’expérience du PPRT de Bollène (Vaucluse)

3. La stratégie du PPRT en pratique

Dans le cas particulier de Bollène, la stratégie du PPRT a été discutée avec le maire de la commune, qui avait déjà une vision claire de ce qu’il voulait faire du territoire exposé. Pour lui, il était essentiel que le site garde sa vocation industrielle, que les activités en présence ne soient pas complètement verrouillées par le PPRT, qu’elles puissent encore évoluer, qu’il y ait encore des possibilités d’accueil pour de nouvelles activités. En revanche, il ne voulait plus de nouvelles habitations sur la zone, ni de nouveaux établissements recevant du public. Enfin, il souhaitait conserver les principes de protection de la zone naturelle préexistante. Il adhérait complètement à l’objectif de sécurisation des personnes, qui consistait à ne permettre que des extensions limitées pour les activités.

Ces diverses orientations étaient plutôt faciles à accepter par les services de l’État et un consensus a été facilement trouvé sur les options du plan. Les principes de cette stratégie ont été actés en réunion des parties associées le 30 mai 2007 et retranscrits dans le projet de règlement mis à l’enquête publique.

Des mesures de réduction des risques à la source

Sur le site, Butagaz exploite un centre emplisseur de GPL avec deux sphères de stockage : l’une de 300 m3 de propane, l’autre de 1 000 m3 de butane. Dans

l’installation, on trouve également un hall d’emplissage, un stockage extérieur, deux postes de déchargement de camions et deux postes de chargement (cf. figure 1).

Le travail de la DDE et de l’exploitant s’est d’abord orienté vers la réduction des risques à la source. La mise sous talus des sphères de stockage a été examinée, mais l’estimation économique faite par Butagaz s’élevait à 5 millions d’euros. La mesure n’était donc pas « économiquement et techniquement acceptable », pour reprendre les critères énoncés par les textes réglementaires et les circulaires de la DPPR. Si elle avait été préconisée, elle aurait été considérée comme une « mesure supplémentaire » du PPRT et aurait due, dans ces conditions, être mise en balance avec le coût des mesures foncières à mettre en œuvre. Mais seules deux maisons sont concernées par le PPRT : la mise sous talus ne se serait donc pas imposée comme la mesure à privilégier. En effet, son coût n’est en rien comparable avec le rachat de deux maisons.

Figure 2 : périmètres PPI et PPRT (source : CETE Méditerranée)

Finalement, le travail de réduction des risques à la source s’est focalisé sur la capacité de remplissage de la sphère de butane, qui a été réduite du tiers, entraînant une réduction non négligeable du périmètre du PPRT. Un travail sur les « mesures complémentaires » a aussi été réalisé. Les types d’effets, en thermique et en surpression, ont été quantifiés. Ça a pris du temps, ce qui explique qu’il a fallu attendre 2008 pour arriver à l’approbation du périmètre définitif de PPRT. On est alors passé du périmètre PPI de 1000 mètres de rayon (au début de

l’expérimentation) à 450 mètres, périmètre du PPRT finalement approuvé (cercle rouge, figure 2).

Pour le reste, il n’a pas été fait d’analyse détaillée des enjeux et de la vulnérabilité. Le travail s’est limité à un traitement du site par orthophotoplan et à une enquête de terrain pour confirmer la validité des données (cf. figure 3). Des rencontres ont également eu lieu avec les habitants et avec les entreprises. Une vingtaine d’entreprises assez diverses avec une centaine d’employés se trouvent sur le site, dont certaines accueillent du public.

Figure 3 : la carte des enjeux du PPRT de Bollène (source : CETE Méditerranée)

Les mesures sur l’habitat, les infrastructures et les réseaux

Sur la zone, il existe sept habitations, dont six sont des habitations principales. La zone naturelle (en rouge, figure 4) fait l’objet d’une interdiction de construire et la zone grise correspond à l’emprise foncière du site de Butagaz. En zones bleues, ce sont les habitations. Dans le périmètre PPRT, il a été aisé de localiser les infrastructures et les réseaux et d’obtenir les données de trafic. Dans la configuration précédente, ou le périmètre PPRT se confondait avec le PPI, la situation était plus

délicate car il fallait compter avec l’autoroute A7. Maintenant que l’étude ne porte que sur un rayon de 450 mètres, seule la voie ferrée est concernée, avec un trafic de 27 trains par jour. Une route départementale (RD 994, 10 000 véhicules/jour) passe en bordure nord du périmètre PPRT et le canal de Donzère-Mondragon est situé à l’est. Sur la base de ces différents éléments et après discussions avec les instances nationales, Butagaz et la collectivité, une carte de zonage a été proposée aux parties associées (cf. figure 4).

Figure 4 : projet de zonage du PPRT de Bollène (source : CETE Méditerranée) Comme dit précédemment, le maire souhaitait maintenir des activités, voire en accueillir d’autres dans le cadre d’une expansion raisonnée. En revanche, il ne voulait pas d’équipements recevant du public ni de nouvelles habitations. Le zonage est donc assez peu permissif. La zone rouge correspond à la zone naturelle, où les usages en matière d’occupation des sols sont très contraints. Partout, les reconstructions sont interdites, sauf en zone bleu clair. Des mesures de réduction de la vulnérabilité sont imposées à toutes les habitations, sauf celles qui auraient pu être concernées par de l’expropriation. La création d’espaces publics ou d’équipements comme des pistes cyclables, aires de camping ou de stationnement, est également interdite. Concernant les constructions existantes, un certain nombre de règles et obligations ont été fixées : identification d’une zone de mise à l’abri, mesures de protection contre les effets thermiques avec des niveaux de performance liés à l’aléa, renforcement des vitrages contre les effets de surpression. Sur ce point précis, le maire a souhaité une réflexion sur un accompagnement financier de la population et des entreprises de la zone, pour les aider à mettre en œuvre les mesures de réduction de vulnérabilité préconisées.

Le projet interdit également l’implantation d’infrastructures et d’équipements d’intérêt général, sauf en cas de nécessité technique impérative (mais sans augmentation du risque technologique). Le droit de préemption s’applique à l’ensemble du périmètre du plan. Il existe déjà un droit de préemption pour Bollène. Le maire ne va donc pas prendre un nouveau droit de préemption au titre du PPRT, mais il utilisera l’existant si l’occasion se présente. Le droit de délaissement concerne deux habitations. Compte tenu des niveaux d’aléas, il n’était pas possible de préjuger que des mesures de réduction de vulnérabilité seraient suffisantes pour atteindre un niveau acceptable du risque. Le PPRT organisera donc le rachat de ces habitations, puisque les deux propriétaires ont déjà annoncé qu’ils souhaitaient faire jouer leur droit de délaissement. Il sera financé par une convention tripartite. Les estimations des deux habitations ont été demandées aux services des Domaines.

Le cas le plus critique est celui du ferrailleur : il concerne une activité et une habitation, avec le problème décrit précédemment. Aujourd’hui, la difficulté est dans l’application réelle, par rapport à cette non-autorisation d’activité et par rapport au fait que le site est pollué et qu’il va falloir trouver une solution pour le dépolluer. On s’oriente vers une participation financière de Butagaz pour aider le ferrailleur à dépolluer la parcelle qui sera libérée. L’identification par la collectivité d’un nouveau terrain d’implantation pour le ferrailleur, le rachat de son habitation pour qu’il puisse s’implanter sur une nouvelle parcelle, la constitution d’un dossier d’autorisation pour l’activité sur cette nouvelle parcelle sont en cours. On voit bien là que les responsabilités sont partagées par rapport à cette situation délicate.