• Aucun résultat trouvé

L’hétérogénéité de la jurisprudence inspirée par la nature des litiges

Conclusion du chapitre

II- L’hétérogénéité de la jurisprudence inspirée par la nature des litiges

L’absence de parfaite homogénéité de la jurisprudence de la CJUE ne révèle-t-elle pas, au delà des apparences, une certaine cohérence dont la signification ne doit pas échapper au législateur communautaire ?

Cette diversité des interprétations jurisprudentielles peut être analysée sous plusieurs angles d’appréciation : Tout d’abord, le caractère plus ou moins directif ou abstrait des arrêts de la Cour (A), ensuite le partage des rôles entre le juge communautaire et son homoloque national (B).

Chacun de ces terrains d’observation que nous examinerons successivement semble révéler une logique et une constance dans le message.

A- Une jurisprudence plus ou moins directive et abstraite en fonction de l’objet des litiges

      

297

Arrêt du 26 juin 1997, « Familiapress », affaire C-368/95, Rec. 1997, p.I-3689.

298

Arrêt du 14 septembre 2006, « Alfa Vita Vassilopoulos et Carrefour-Mrinopoulos », affaires C-158/04 et C-159/04, Rec. 2006, p. I-8135.

299

L’étude de la jurisprudence de la Cour permet la classification des arrêts et donc une systématisation en fonction de leur précision ou de leur caractère directif (1) mais aussi du degré d’abstraction des analyses jurisprudentielles (2).

1- Les domaines strictement encadrés par la Cour soucieuse d’une application rigoureuse des règles de libre circulation des marchandises litigieuses

La nature et l’objet des réglementations litigieuses ainsi que leur degré de complexité n’y sont pas étrangers. Autrement dit, l’autorité et le contrôle exercés par la Cour peuvent être illustrés par une échelle dont la graduation varie en fonction de la nature des litiges et naturellement des risques.

Le contrôle effectué par la Cour de justice vise tant les objectifs prétendument poursuivis par les Etats membres que leur mise en œuvre. A cet égard, la Cour apprécie naturellement les buts réellement visés ainsi que la proportionnalité des moyens utilisés pour les réaliser.

Cependant, dans certains domaines tels que ceux de la propriété industrielle et commerciale (a), celui de la protection du consommateur et dans une moindre mesure celui de la protection de la santé publique (b), la prégnance de la jurisprudence de la Cour se manifeste par la définition du cadre précis auquel le droit national devra se conformer ou bien par l’évocation de solutions alternatives moins restrictives des échanges. L’analyse du caractère nécessaire des mesures nationales est alors poussée à l’extrême par une application plus systématique du test de substituabilité. L’une des conséquences louables d’une telle précision est de fournir aux juges nationaux des lignes directrices contribuant au maintien d’une jurisprudence plus stable et plus sûre et par conséquent à une plus grande sécurité juridique.

a- Première illustration : la jurisprudence de la Cour relative à la propriété industrielle

Relevons en effet qu’il s’agit du seul motif de nature économique dans la liste de l’article 36 du TFUE (particularité que la Cour a curieusement niée). Logiquement, les enjeux économiques et commerciaux liés à la reconnaissance des droits de propriété industrielle mais aussi la complexité de la problématique de la conciliation entre le principe de libre circulation des marchandises et les droits nationaux de propriété industrielle pourraient expliquer la

précision (a.1) mais également une relative instabilité des interprétations relatives à l’étendue de ces droits (a.2).

a.1- Une jurisprudence précise et directive expliquée par la nature particulière de la propriété industrielle.

Le caractère détaillé et explicatif des interprétations de la Cour concerne tant les brevets (a.1.2) que les marques (a.1.2). Ces qualités ne doivent cependant pas occulter une certaine fragilité des raisonnements suivis par le juge communautaire (a.1.3).

a.1.1- Une jurisprudence précise au prix de raisonnements marqués par une certaine fragilité

On constate en effet que le critère de conciliation entre le droit du marché intérieur et les droits nationaux de propriété industrielle a été progressivement déterminé au gré des affaires soumises à la Cour et en fonction de leurs spécificités et de leur complexité, ne laissant aucune réelle liberté d’appréciation aux juges nationaux, ni de marge de manœuvre aux États membres.

Il convient en premier lieu de rappeler qu’en vertu des droits nationaux de propriété industrielle et commerciale, l’importation constitue une contrefaçon dans la mesure où le titulaire d’un brevet ou d’une marque dispose d’un monopole de son exploitation. Celui-ci se décline notamment en un droit exclusif de première mise en vente sur le territoire national du produit breveté ou marqué.300 La confrontation avec le principe de libre circulation devient alors inévitable. Une application stricte de l’article 36 TFUE selon lequel « les dispositions des articles 34 et 35 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions d’importation, d’exportation ou de transit, justifiées par des raisons … de protection de la propriété industrielle et commerciale… » aurait pu avoir pour conséquence le sacrifice systématique du principe de libre circulation des marchandises. C’est la raison pour laquelle la Cour en a relativisé les effets, tant pour ce qui concerne le droit national des brevets que pour le droit national des marques. La difficulté de l’exercice évoquée plus haut explique la fragilité des bases théoriques sur lesquelles la Cour fonde son raisonnement dont on a pu douter de la cohérence à plusieurs titres.

      

300

Concernant la première raison, il convient préalablement de préciser que la jurisprudence distingue entre l’existence des droits de propriété industrielle301 et leur exercice. Si l’existence de ces droits ne pose à priori aucun problème au regard du traité, leur exercice risque en revanche de contrarier la libre circulation des marchandises302. Comment dès lors concilier le principe jurisprudentiel selon lequel l’article 34 TFUE n’interdit que les mesures étatiques, tandis que l’exercice des droits de propriété intellectuelle, pouvant constituer une infraction aux règles du traité, correspond en fait à une action de particuliers 303. On peut regretter que les bases théoriques du raisonnement de la Cour manquent à cet égard de solidité, même si on peut arguer de ce qu’une action en contrefaçon intentée par le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle pour faire obstacle à l’importation dans un État membre d’un produit en provenance d’un autre État membre, repose en réalité sur une législation nationale qui en définitive peut être considérée comme la MEERQ.304

Une autre curiosité de la jurisprudence de la CJUE en matière de propriété industrielle tient à une autre forme de contradiction. En effet, la distinction précitée entre l’existence des droits de propriété industrielle et leur exercice, dont la Cour définit précisément les contours sans laisser de marge de manœuvre aux juridictions nationales, laisse entendre que l’objet spécifique des droits de propriété industrielle est avant tout une question qui relève du droit communautaire. Or et dans le même temps, la Cour considère qu’en conséquence de la distinction retenue, l’existence même des droits de propriété industrielle est en l’absence d’harmonisation, une question de droit national.305

Enfin la jurisprudence de la Cour entretient sur le sujet une dernière forme d’ambiguïté résultant de cette dichotomie correspondant à deux types de situations. La première situation concerne les affaires où le titulaire du droit de propriété intellectuelle s’oppose à l’importation d’un produit en provenance d’un autre État membre dans lequel il n’existe pas de droit parallèle et où le produit a été mis pour la première fois sur le marché par un tiers. Le cas

      

301

Précisons que la Cour assimile le droit d’auteur au concept de droit de la propriété industrielle et commerciale figurant à l’article 36 du traité. Voir les arrêts du 20 janvier 1981, « Musik-Vertrieb contre GEMA », affaires jointes 55 et 57/80, Rec. 1981, p. 147; du 4 novembre 1997, « Parfums Christian Dior SA contre Evora BV », affaire C-337-95, Rec. 1997, p. I-6013.

302

Arrêts du 13 juillet 1966, « Etablissements Consten et Grundig contre Commission de la Communauté économqiue européenne », affaires jointes 56 et 58-64, Rec. 1966, p. 429.

303

Il s’agit là d’une caractéristique des articles 34 et suivants du traité par opposition aux articles 101 et 102 du même traité et qui visent le comportement des entreprises.

304

Malcom Jarvis, « The Application of EC Law By National Courts – The Free Movement of Goods », Clarendon Press – Oxford, 1998.p. 295 et 296.

305

Arrêt du 30 novembre 1993, « Deutsche Renault Agcontre AUDI AG », Affaire C-317/91, Rec. 1993, p. I-6227, point 20. Voir en ce sens, Malcom Jarvis, « The Application of EC Law By National Courts – The Free Movement of Goods », Clarendon Press – Oxford, 1998, p. 325.

échéant, le juge communautaire estime que le droit national doit prévaloir sous la réserve que la réglementation nationale ne dissimule pas une discrimination conformément à la condition posée par la dernière phrase de l’article 36 du traité. La seconde vise les situations dans lesquelles le titulaire du droit de propriété intellectuelle est protégé dans les pays d’importation et d’exportation. Or lorsque ce même titulaire a épuisé ses droits dans le pays d’exportation, la Cour définit l’objet spécifique des droits permettant à son titulaire de s’opposer à l’importation sur le fondement de l’article 36 du traité.306

La complexité et l’ambiguïté des raisonnements suivis par la Cour pourraient cependant être compensées par une définition particulièrement précise et directive de l’étendue des droits reconnus aux titulaires de brevets (a.1.1) et aux titulaires de marques (a.1.2) dans le cadre d’un conflit entre les droits nationaux de propriété industrielle et le droit du marché intérieur.

a.1.2- Une définition précise des droits du titulaire de brevet fondée sur « la théorie du monopole incitant » 307

Concernant les prérogatives de l’inventeur, la Cour a dit pour droit que la dérogation à la libre circulation des marchandises ne peut être admise que dans la mesure où elle est justifiée par la sauvegarde des droits qui constituent l’objet spécifique du brevet. Celui-ci consiste à garantir à l’inventeur la récompense de son effort créateur par l’octroi d’un droit exclusif de première mise en circulation du produit breveté,308 qu’il peut exercer directement ou par l’octroi de licences. 309

      

306

Ibid, p. 328 et 329.

307

Présentation de la théorie du monopole incitant selon la définition exposée par le professeur et ancien juge à la Cour de justice, René Joliet : « Le progrès est souhaitable, les inventions et leur exploitation industrielle sont nécessaires pour ce progrès. Cependant les inventions ne seront pas réalisées ni exploitées si les inventeurs et les investisseurs ne peuvent compter que sur l’exploitation compétitive de leur technique. Pour en valoir la peine, et encourager les chercheurs et les investisseurs, la société doit intervenir pour augmenter les chances de profit. Le moyen le plus simple et le plus efficace pour la société d’encourager la recherche est d’accorder des monopoles temporaires sous la forme de brevets ».

308

Arrêts du 31 octobre 1974, « Centrafarm BV et Adrinaan de Peijper contre Sterling Drug Inc. », affaire 15/74, Rec. 1974, p. 1147, points 8 et 9 ; du 14 juillet 1981, « Merck & Co.Inc. contre Stephar BV et Petrus Stephanus Exler », affaire 187/80, Rec. 1981, p. 2063, points 9 et 10 ; du 9 juillet 1985, « Pharmon BV contre Hoechst AG », affaire 19/84, Rec. 1985, p. 2281, point 26 ; du 5 décembre 1986, « Merck contre Primecrown et Beecham contre Europharm », affaire 267/95, Rec. 1996, p. I-6285, point 30 ; du 9 juillet 1995, « Generics BV contre Smith Kline & French Laboratories Ltd », affaire C-316/95, Rec. 1995, p. I-3929, point 19.

309

Cette reconnaissance implicite de « la théorie du monopole incitant » justifie également les droits reconnus aux producteurs de phonogrammes par le droit communautaire dérivé (Directive 92/100/CEE du Conseil du 19 novembre 1992, JO L 346 p. 61, point 24 : l’inclusion des producteurs de phonogrammes parmi les bénéficiaires du droit exclusif de location

« apparaît justifiée par la protection des investissements extrêmement élevés et aléatoires qu’exige la production de phonogrammes et qui sont indispensables à la poursuite de l’activité de création de nouvelles œuvres par les auteurs ». La directive précitée précise la portée du principe de l’épuisement appliqué à ces droits. Elle confirme implicitement ledit principe tel qu’il a été posé par la Cour de justice, et selon lequel « le droit exclusif garanti par la législation d’un Etat membre en matière de propriété industrielle et commerciale a épuisé ses effets lorsqu’un produit a été écoulé licitement sur le marché d’un autre Etat membre par le titulaire même du droit ou avec son consentement ». Mais surtout elle en précise les

a.1.3- Le droit des marques interprété dans un sens favorable à la protection du consommateur

L’objet spécifique du droit de marque justifiant la dérogation de l’article 36 du TFUE est la garantie pour son titulaire d’un droit exclusif de première mise en vente garantissant au consommateur l’origine et donc la qualité supposée du produit.310

Le degré de précision des interprétations de la Cour apparaît notamment dans les affaires mettant en cause la liberté de l’importateur parallèle de modifier l’emballage des marchandises. Ces situations apparaissent souvent dans l’hypothèse où un importateur parallèle de médicaments doit adapter le produit aux règles du marché national.

L’affaire « Hoffmann-La Roche »311 illustre cette situation. Les questions préjudicielles concernent un litige entre la société Hofmann-La Roche qui est titulaire d’une certaine marque, notamment en Allemagne et en Grande-Bretagne, et la société Centrafarm. Cette dernière importe de Grande-Bretagne du valium qu’elle commercialise en Allemagne dans un nouveau conditionnement sur lequel elle appose la marque d’Hoffmann-La Roche. La question posée à la Cour vise à déterminer si le titulaire de la marque peut se prévaloir de son droit exclusif pour s’opposer à l’importation des produits ainsi modifiés.

Dans la ligne de sa jurisprudence, la Cour précise que si le Traité n’affecte pas l’existence des droits nationaux de propriété industrielle, il peut néanmoins en limiter l’exercice. Elle confirme également les limites de la dérogation au principe de libre circulation des marchandises par référence à la nécessité de sauvegarder l’objet spécifique de la marque, à savoir la garantie au consommateur de l’identité d’origine du produit. En l’occurrence, cette garantie de provenance signifie que le produit n’a pas fait l’objet à un stade antérieur de la

        limites dans ses articles 1 et 4. Ainsi, son article 1§1 impose aux Etats membres de prévoir le droit d’autoriser ou d’interdire la location et le prêt d’originaux et de copies d’œuvres protégées par le droit d’auteur ainsi que d’autres objets. Le §4 du même article précise que les droits ainsi visés ne sont pas épuisés par la vente ou tout autre acte de diffusion. La Cour analyse et interprète la directive en distinguant les natures différentes de la location et de la vente. Ainsi, le droit de location demeure au nombre des prérogatives de l’auteur et du producteur en dépit de la vente du support matériel qui contient l’œuvre.309 Autrement dit, le droit de location n’est pas épuisé par la vente ou tout autre acte de diffusion de l’objet, à l’inverse du droit de vente qui l’est en cas de première vente dans la communauté par le titulaire ou avec son consentement.309 L’institution, par la législation communautaire d’un droit de location exclusif ne constitue donc pas une violation du principe de l’épuisement du droit de distribution, dont l’objet et le champ d’application sont différents.

310

Voir également la directive 89/104/CEE du Conseil du21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques (JO n°L 040 du 11 février 1989, p. 1-7 : article 7 : « Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement ».

311

Arrêt du 23 mai 1978, „

« Hoffmamn-La Roche & Co. AG contre Centrafarm Vertriebsgesellschaft Pharmazeutischer Erzeugnisse mbH », affaire 102/77, Rec. 1978, p. 1139

commercialisation d’une intervention par un tiers, non autorisée par le titulaire de la marque et « qui a atteint le produit dans son état originaire »312 . Cette affirmation ne correspond qu’à une première étape de la réflexion de la Cour et à la conclusion provisoire qu’une réglementation de ce type est justifiée, dès lors que l’on se réfère à la seule première phrase de l’article 36. Logiquement, le juge s’intéresse ensuite à la seconde condition fixée par ledit article au terme duquel la mesure nationale ne doit pas constituer une restriction déguisée dans le commerce inter étatique. Comme exemple, la Cour évoque la stratégie du titulaire de la marque consistant à mettre sur le marché un même produit conditionné différemment selon les États, afin de pouvoir s’opposer au reconditionnement et donc à la revente par d’éventuels importateurs parallèles, alors même que l’identité d’origine et son état originaire ne seraient pas affectés.

La précision de l’arrêt s’illustre dans l’explication donnée par la CJCE au juge national sur la manière dont il convient d’apprécier ce dernier constat, à savoir la non affectation de l’état du produit dans l’opération de reconditionnement. Comme illustration, la Cour cite le cas où le produit serait mis en circulation dans des emballages doubles, tandis que le reconditionnement ne porterait que sur l’emballage extérieur.

Dans cet exercice d’interprétation, la Cour liste l’ensemble des exigences dont le juge national devra s’assurer pour déterminer si les conditions de dérogation fixées par l’article 36 sont bien réunies. Outre celle de non affectation du produit, elle ajoute que le titulaire de la marque doit être préalablement averti de la mise en vente du produit reconditionné et qu’il indique clairement que le produit a été reconditionné par lui.313

Des arrêts ultérieurs viennent préciser cette jurisprudence et notamment les affaires « Bristol-Myers Squibb contre Paranova »314 et « Boehringer Ingelheim ».315

Dans la première affaire qui concerne des produits pharmaceutiques dont l’emballage varie légèrement en fonction des États membres dans lesquels ils sont commercialisés, et cela en raison notamment de réglementations nationales différentes, la Cour rappelle les critères

      

312

Ibid, point 7.

313

Ibid, point 12 et dispositif de l’arrêt.

314

Arrêt du 11 juillet 1996, « Bristol-Myers Squibb contre Paranova A/S et C.H. Boehringer Sohn, Boehringer Ingelheim KG et Boehringer Ingelheim A/S contre Paranova A/S », affaires jointes C-427/93, 429/93 et 436/93, Rec. 1996, p. I-3457.

315

retenus par la Cour dans l’affaire Hoffmann-La Roche. Elle précise sa jurisprudence en ajoutant que l’importateur parallèle n’a pas à prouver la volonté du détenteur de la marque de segmenter le marché. Aux conditions que l’importateur parallèle doit respecter pour pouvoir opérer un reconditionnement des médicaments revêtus d’une marque, la Cour apporte un certain nombre d’éléments et complète la liste initiale telle qu’elle figure dans l’affaire Hoffmann-La Roche.

Tout d’abord, le concept d’affectation du produit originaire est précisé par l’indication qu’il concerne le produit à l’intérieur du « packaging ». En effet, la Cour de justice écarte d’éventuels arguments fondés sur de simples risques hypothétiques ou des erreurs isolées et qui viseraient à permettre au titulaire de la marque de s’opposer au reconditionnement de produits pharmaceutiques.316

La Cour ajoute également que l’importateur parallèle doit fournir sur demande du propriétaire, un spécimen du produit reconditionné avant sa mise sur le marché.317 Concernant l’obligation d’indiquer par qui le produit a été reconditionné, la Cour précise également que cette condition signifie nullement que l’importateur doive mentionner que cette opération a été faite sans l’accord du titulaire de la marque. Enfin, la Cour ajoute également à la liste des critères permettant de qualifier la restriction aux importations, l’impact du nouvel emballage sur la réputation de la marque. 318

L’affaire « Boehringer Ingelheim »319 est également l’occasion pour la Cour d’apporter des réponses aux questions relatives au concept de nécessité qui doit permettre de réhabiliter une réglementation nationale restrictive des échanges intracommunautaires. Rappelons que selon une jurisprudence constante,320 correspond à un cloisonnement artificiel des marchés nationaux, l’opposition au reconditionnement d’un médicament, lorsque celui-ci est nécessaire pour permettre la commercialisation des produits importés (tout en préservant les