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L’exercice de recueil de données 95

Partie II : Cadre d’analyse et méthodologie 70

Chapitre 4 : Méthodologie 89

4.4. L’exercice de recueil de données 95

Notre terrain de recherche est constitué de trois projets biotechnologiques bénéficiant de subsides de la Région wallonne et associant des partenaires soit industriels, soit attachés à des laboratoires universitaires. Si ces projets constituent en eux-mêmes les limites de notre objet d’étude, les frontières des investigations que nous avons menées sont moins nettes. Elles fluctuent au gré de nos besoins d’information pour cerner au mieux les projets sélectionnés. Ainsi, des acteurs non partenaires des projets furent également rencontrés.

Ces trois projets firent l’objet d’investigations durant un an au minimum et à des moments ne s’enchevêtrant pas complètement. Le projet Visual a débuté en novembre 2007 et a fait l’objet d’investigations systématiques de février 2008 à janvier 2009. Cette date coïncide avec la décision de mener des réorientations majeures au sein du projet. Ensuite, nous avons suivi, à distance, la mise en application de ces orientations au travers de l’observation des mails échangés entre les partenaires du projet91. Le projet Poly est financé de mars 2006 à février 2010 et fait l’objet d’investigations de

février 2009 jusqu’au terme du projet. Le projet Lenses est investigué de mars 2009 au 22 février 2010, date de l’évaluation intermédiaire du projet.

Les premiers entretiens effectués eurent lieu dans Visual avec des partenaires impliqués dans la recherche scientifique, principalement des chefs de services de laboratoires universitaires. Ces entretiens nous sont vite apparus insuffisants car trop formels et trop répétitifs. Ce constat poussa à

91 A partir de la décision de réorienter le projet, nous avons annoncé aux partenaires notre volonté de nous distancer du

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trouver de nouvelles voies pour la construction de la méthodologie. Nous avons élargi notre champ de rencontres pour ne plus limiter les entretiens aux partenaires impliqués directement dans le contenu scientifique des projets mais inclure des partenaires privilégiés ou atypiques comme les interfaces universitaires, la Région wallonne, les cellules juridiques des entreprises, ainsi que les jeunes chercheurs bénéficiant du financement des projets. Ces acteurs nous ont été accessibles en remontant le réseau de relations à partir des entretiens préexistants. Cette démarche renouvelée pour l’ensemble des projets, s’avéra utile puisqu’elle donna accès à des éléments non-perceptibles au préalable.

L’ensemble des partenaires des projets de recherche furent rencontrés ainsi que quelques personnes centrales au projet bien que n’en faisant pas contractuellement partie. Les coordinateurs des proejts firent l’objet d’un centrage plus particulier. Ils furent, tous trois, rencontrés plus d’une fois et au gré des nécessités perçues. Ainsi, le coordinateur du projet Visual92 fut rencontré bien davantage que les

coordinateurs des deux autres projets puisque Visual comprend de quatre à cinq fois plus de partenaires que Lenses et Poly. Au total, 99 entretiens furent réalisés, dont 20 dans Poly, 64 dans Visual et 15 dans Lenses.

Les entretiens débutaient toujours par une invitation à se présenter par rapport au projet. Il n’en fallait parfois pas davantage pour récolter des données d’une grande richesse pendant une heure. Les questions qui suivaient étaient généralement des questions de clarification du contenu ou de précision, parfois entremêlées d’autres questions en fonction de la grille d’entretien. Cette grille servait à vérifier que chacun des thèmes préalablement déterminés étaient abordés et que la personne ne s’éloignait pas trop du sujet. Le caractère plus ou moins directif des entretiens était donc très variable et ne dépendait pas uniquement de nous mais également de l’interviewé.

Chaque entretien était enregistré. Cette démarche nous permettait d’abord d’être entièrement focalisée sur les dires de l’interviewé au moment de l’entretien, ensuite, de revivre la situation en écoutant l’enregistrement, et enfin de permettre une retranscription littérale et entière.

Après les premiers entretiens au sein des projets et l’instauration d’une relation de confiance, les partenaires de chaque projet nous ont autorisé à observer les réunions, à condition toutefois de respecter un accord de confidentialité. Ces réunions correspondaient soit à des réunions obligatoires

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imposées par la Région wallonne et rassemblant l’ensemble des partenaires du projet, soit à des réunions non-imposées par la Région wallonne mais ayant néanmoins lieu en plénière, soit encore à des réunions de sous-groupes de travail. Ces trois types de réunions pouvaient être centrés sur l’avancement scientifique du projet, mais pas uniquement. Concernant Visual, des réunions stratégiques déterminant les orientations générales devant être entreprises ou encore des réunions au sujet des valorisations industrielles avaient également lieu. Ce faisant, dix-huit réunions firent l’objet de nos observations notamment sept observations de réunions de sous-groupes de travail, quatre observations de réunions stratégiques, et deux observations de réunions de valorisation, les autres réunions observées étant des réunions en plénières centrées sur l’avancement scientifique du projet en question.

A l’observation de ces dix-huit réunions, viennent s’ajouter quelques situations d’observation relativement spécifiques. Ainsi, nous avons observé une expérience scientifique apparaissant comme un moment crucial dans la vie de Visual. Le travail à la paillasse au sein d’un laboratoire universitaire du projet Poly fit également l’objet de nos observations, mais de manière plus fortuite cette fois-ci. En effet, dans l’attente d’obtenir trois entretiens, nous nous sommes installée en plein cœur du laboratoire et avons pu, pendant deux heures, observer chercheurs, machines et éprouvettes. A la suite d’une invitation du projet Lenses, nous avons observé la journée de présentation du projet à un jury d’experts dans le cadre d’une évaluation à mi-parcours. Enfin, il nous fut également donné d’assister aux nombreux débats concernant les réorientations vécues au sein de Visual. Ces débats assemblaient certains partenaires du projet mais pas seulement ; investisseurs étrangers et membres du pôle de compétitivité des sciences du vivant s’y retrouvaient également.

Le choix de ces situations furent le résultat d’une sélection a priori à partir de ce que le terrain a amené de plus parlant ou d’une proposition des acteurs eux-mêmes. Si en pratique, nous suivons les acteurs, nous ne le faisons que dans des « localités » préalablement choisies « pas seulement a priori certes, mais en partie déterminée dans le rapport au terrain : C’est un privilège de l’analyse qu’il ne s’agit pas de remettre en cause » (Akrich et al., 2004 : 8). Quoi qu’il en soit, nous avons toujours adopté une posture d’ouverture, ne se fermant jamais d’emblée à une situation s’offrant à nous. Durant les observations de réunions, nous étions installée autour de la table avec les partenaires du projet, mais à la différence d’eux, nous n’intervenions pas. Nous prenions autant de notes que possible et nous nous laissions imprégner de l’atmosphère. Ces moments donnent de précieuses

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indications sur l’ambiance qui règne dans le projet, ou au sein du sous-groupe observé, sur le sentiment général des partenaires et comment ils se sentent ensemble.

Pour être acceptée aux divers événements des projets, il nous a fallu rassurer les partenaires sur la confidentialité de nos observations. En conséquence, un accord de confidentialité nous a lié à chaque projet. Malgré cette précaution et la familiarité qui s’est installée entre les partenaires et nous – familiarité s’expliquant notamment par la rencontre des partenaires au travers d’entretiens et par notre observation systématique aux réunions durant les périodes d’investigations des projets -, les notes que nous prenions de manière parfois discrète, parfois ostensible, suscitaient la curiosité des partenaires et ce, particulièrement lors des moments où les projets furent les plus fragiles. Nous pensons notamment à la période de remise en cause des orientations scientifiques de Visual, étape difficile pour le projet. Il a alors fallu les rassurer quant à notre travail, et nous n’avons pas hésité à rencontrer beaucoup d’entre eux après coup au travers d’un entretien qui permettait, en plus de récolter davantage de données, de fournir un réconfort aux partenaires.