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III. LES RESULTATS

III.3 Autour du 1 er bâtiment : l’enceinte du castrum, les annexes, le fossé et divers

III.3.1 L’enceinte du castrum 8004

Cette maçonnerie était connue par les plans du XVIIIe siècle et avait été repérée en 2005

(UA 3030). Elle est relativement mal conservée : l’escalier hors-œuvre du donjon a été construit au début du XXe siècle sur l’extrémité sud de l’enceinte. Plus au nord, elle a été entièrement

récupérée. En 2005, une portion avait été retrouvée sous la place de la République, dans le secteur 1. L’essentiel de la maçonnerie UA 8004 avait déjà été dégagé et décrit en 2005. L’extension de la fouille a apporté quelques éléments supplémentaires concernant la chronologie.

III.3.1.1 Description

Le mur est conservé sur une longueur de 8,36 m. Au-delà, il a été entièrement récupéré (UA 8017, récupération US 8340). Son arase se situe autour de 39 m NGF. Seule l’assise supérieure peut être considérée comme correspondant à l’amorce des élévations, car associée à un niveau d’occupation postérieur à la démolition de l’annexe intérieure (UA 8010, ES 4), elle- même postérieure à l’enceinte. Il s’agit d’un petit appareil de moellons, identique à celui de la première turris, avec une portion en opus spicatum (pl. 47-A). Le niveau de circulation se situait aux alentours de 38,7 / 38,8 m NGF.

81 Les prélèvements ont été effectués sur l’ensemble du bâtiment, mais les meilleurs proviennent de l’UA 8001, en raison de l’accessibilité de son blocage. Le choix des charbons a été laissé au laboratoire. Courbes en annexes.

Les fondations (UA 8032) ont été construites dans une tranchée étroite, contrairement à celles de la turris. Si parfois cette tranchée déborde, c’est uniquement en raison de l’effondrement des parois au moment de son creusement : c’est le cas du côté ouest (US 8191, comblement US 8190, pl. 30-B). Les fondations consistent en un vrac de moellons grossiers (petit à moyen appareil) liés par un mortier beige clair qui ne colmate pas tous les vides. C’est principalement le cas là où la tranchée traverse les niveaux calcaires précédemment évoqués (US 8307 et 8107). Plus au nord, à travers les niveaux de terre noire du haut Moyen Age (face est), le mortier est plus abondant et comble tous les vides entre les blocs et la paroi de la tranchée. La tranchée de fondation entame les niveaux haut médiévaux mais à peine les niveaux antiques, sans atteindre le substrat rocheux dans la zone fouillée (fond à environ 38,3 / 38,5 m NGF). Ceci est bien perceptible dans la zone récupérée (ES 5, coupe est).

Les descriptions de Claude Masse restent les plus parlantes. Il décrit dans une légende les « murs de l’enceinte du chasteau bastie d’une manière brute sans talent, ni art, mais qui paroit très ancien ». Si les élévations étaient constituées d’un petit appareil de moellons à peine dégrossis, comportant une série de blocs disposés en arêtes de poisson, comme celle conservée, elle pouvait effectivement surprendre au XVIIIe siècle. La fouille a essentiellement mis en évidence la

récupération importante qui a été faite de ces maçonneries, sans pour autant que nous ayons pu montrer la trace de blocs antiques de grand appareil en remploi, pourtant mentionnés dans les écrits de l’abbé Julien-Laferrière 82. Selon lui, ils proviendraient de l’assise de fondation de la partie

où l’enceinte se rattache au donjon, lors de sa destruction en 1843. Rien de ce que nous avons mis à jour ne corrobore ces découvertes, à moins que ces blocs ne proviennent de la partie récupérée de l’enceinte, au contact de la maçonnerie 8005, ou aient été utilisés spécifiquement pour l’élévation de l’enceinte. La question de l’origine des blocs antiques conservés dans le parc de la mairie reste ouverte.

Les plans de Claude Masse indiquent un tracé en demi-cercle, rejoignant à l’opposé du site la chapelle-porte Saint-Gilles (pl. 08). La surface délimitée est de presque 1,5 ha. On ne peut dire si l’ensemble de l’enceinte appartenait à une même campagne de construction, même si la régularité du tracé plaide pour cela. Le tracé restituable à hauteur de la porte Saint-Gilles indique que l’enceinte se raccordait à la façade orientale de l’édifice, du milieu du XIIe siècle et non à la porte

primitive située légèrement en retrait. A cet endroit, une légère modification du tracé a dû être réalisée 83.

III.3.1.2 Chronologie relative et datations

Un sondage a été réalisé sous le flanc ouest de l’escalier du donjon afin de déterminer la chronologie relative entre l’enceinte et la première turris. A cet endroit, seule une assise de fondation de l’enceinte est conservée, sous les fondations de l’escalier (UA 8032, pl. 47-B). Le bloc dégagé a clairement été posé contre le parement du mur nord de la turris, qui se prolonge au-delà vers l’est. Les photographies anciennes (pl. 13), prises après la démolition de l’enceinte, laissent deviner ce parement enduit, confirmant ce collage sur toute la hauteur de l’élévation conservée de la 1ère turris. Au-dessus, des pierres de taille correspondant à l’arrachement de l’enceinte sont visibles. Il doit s’agir du chaînage réalisé lors de la construction de l’actuel donjon.

La chronologie relative est confirmée par la stratigraphie sédimentaire : la petite tranchée de fondation de l’enceinte (US 8205) recoupe le comblement de celle de la turris (US 8178) 84. Son

comblement est identique à celui observé par ailleurs : terre noire et éclats calcaire (US 8204). L’enceinte est par contre antérieure à la construction de deux annexes de la turris, établies de part et d’autre (UA 8000 et 8010), ainsi qu’à celles de la chemise intérieure du donjon (UA 8005) et de la fausse-braie (UA 8008 / 8009). Il est difficile de dire si le fossé existait déjà ou non. Son tracé suit celui de la turris et de l’enceinte, plaidant pour l’antériorité de l’enceinte. Si les niveaux 82 Julien-Laferrière 1880, p. 82.

83 Mandon 2008, p. 19.

84 Les deux tranchées recoupent les niveaux antiques : US 8179 (terre marron), mais également l’US 8206, niveau de terre noire, épargné au pied de l’enceinte par le décaissement réalisé lors de la construction de l’annexe extérieure de la

calcaires traversés par cette dernière sont issus du creusement du fossé, ce dernier pourrait être antérieur et peut-être cerner une première enceinte en bois ou en terre. Aucun indice n’a été repéré allant dans ce sens, dans le secteur où l’enceinte a été entièrement récupérée. Il faut peut- être plutôt imaginer un enchaînement rapide entre le creusement du fossé et l’édification de l’enceinte. Le creusement du fossé permettait en effet de fournir en amont les matériaux de construction.

Le rare mobilier archéologique trouvé dans le comblement de la tranchée de fondation n’est guère utile (antique résiduel). Quatre datations par le radio-carbone ont été réalisées à partir des charbons de bois prélevés dans le mortier de l’enceinte : deux lors de la campagne de 2005 et deux en 2008. Elles sont relativement homogènes et présentent des âges calibrés situés entre :

- 887 et 1011 ap. J.-C. (prélèvement 3030 E, dates les plus probables : 902, 968, 915)

- 894 et 1017 ap. J.-C. (prélèvement 3030 C1, dates les plus probables : 980, 905, 965, 945, 1015)

- 881 et 1014 ap. J.-C. (prélèvement 8004 P10, dates les plus probables : 917, 966, 900, 785) - 779 et 984 ap. J.-C. (prélèvement 8004 P2, dates les plus probables : 891, 785)

Les résultats sont identiques à ceux de la turris, avec des courbes analogues, formant des paliers vers 900 et dans le 2e tiers du Xe siècle. Parmi les dates les plus probables proposées par

le laboratoire de Lyon, un plus grand nombre se situe dans la 2e moitié du Xe siècle. Comme pour

l’autre série, un prélèvement se détache avec une datation légèrement plus haute (et une fourchette plus large). La prudence invite à ne retenir que l’intervalle resserré, en l’occurrence 894- 984. La grande proximité entre les deux séries pose question, sur laquelle nous reviendrons.

Le fait que l’enceinte relie deux édifices aux origines anciennes (la turris et la chapelle-porte Saint-Gilles) plaide pour son homogénéité. Le castrum devait avoir dès l’origine la même superficie.