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64. L’approche de deux juridictions mérite une attention particulière. Nous examinerons celle de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, parce que sa mission et ses compétences sont similaires à celles de la CourEDH (1), et celle de la Cour internationale de Justice, car sa compétence matérielle n’est pas limitée aux droits de l’homme et sa portée est universelle (2).

1. La Cour interaméricaine des droits de l’homme et sa Commission

65. Le texte de la Convention interaméricaine des droits de l’homme est encore plus vague que celui de la CEDH. L’art. 4 al. 1 in fine CADH prévoit que « [n]ul ne peut être privé arbitrairement de la vie ». De cette formule des plus imprécises découle l’exception du recours à la force létale. Nous allons maintenant examiner comment la jurisprudence a appréhendé cette exception lors de conflits armés internes.

218 HAMPSON, 550 ; et GAGGIOLI,118, note 686.

219 GAGGIOLI,19-20. Afin d’illustrer ce principe, GAGGIOLI proposent l’exemple des droits de l’homme qui complètent et précisent le droit humanitaire quant à la définition du procès équitable et des garanties judiciaires.

A l’inverse, les règles sur la conduite des hostilités du droit humanitaire pourraient bénéficier aux formules vagues et imprécises des droits de l’homme.

220 KOLB, Ius in bello, 137.

221 HAMPSON, 550.

222 KOLB,Ius in bello, 137.

223 MARTIN, 120.

224 GAGGIOLI,25-26.Cette approche nous paraît en outre excessive, car nous ne voyons pas l’utilité de réunir les deux branches sous la même bannière. A notre sens, une telle fusion se ferait au détriment de la précision et de l’adéquation des règles, ces dernières ne prenant plus en compte tous les intérêts et particularités propres aux deux régimes.

66. Dans l’affaire Arturo Ribón Avila c. Colombie, la Commission interaméricaine (ComAHD) déclare qu’étant donné l’absence de précision de la norme conventionnelle, elle doit nécessairement « refer to and apply definitional provisions and relevant rules from humanitarian law as authoritative sources which provide orientation in the resolution of these cases. It is precisely in situations of internal armed conflict that human rights and humanitarian law converge most precisely and reinforce one another. In this specific case, where the execution of several persons linked to a guerrilla group in the context of a military operation is at issue, the relevant rights for the analysis are mainly the right to life and physical integrity, rights which are non-derogable even in situations of armed conflict. Both Common Article 3 of the Geneva Conventions and the American Convention guarantee these rights and prohibit extrajudicial execution, and the Commission should apply both bodies of law »225. Puisque la ComADH applique les deux droits et considère que c’est précisément dans des situations de conflits internes que les droits de l’homme et le droit humanitaire convergent et se renforcent l’un l’autre, son approche peut être qualifiée de complémentariste.

Contrairement à la CourEDH, la ComADH estime non seulement avoir la compétence de prendre en compte le droit humanitaire, mais aussi de l’appliquer. Elle fonde sa compétence sur l’imprécision du texte de la Convention interaméricaine226. Paradoxalement, l’imprécision du texte de la CADH permet ainsi de se référer à des règles précises, alors que les maigres précisions apportées par la CEDH semblent s’ériger en barrière à un tel rapprochement, affaiblissant de ce fait la précision des règles applicables227.

67. La Commission va confirmer cette jurisprudence et compléter les raisons pour lesquelles elle a la compétence d’appliquer le droit humanitaire dans l’affaire Juan Carlos Abella c.

Argentine228. Elle fonde son approche complémentariste sur les cinq arguments suivants229 :

1) l’absence de règles dans la CADH relatives à la conduite des hostilités et le caractère lacunaire de l’art. 4 al. 1 in fine CADH230 ;

2) la convergence et le renforcement mutuel des droits garantis par les deux branches du droit en période de conflit231 ;

3) le fait que presque tous les membres de la CADH sont liés par les CG et d’autres instruments de droit international humanitaire, et qu’en application de l’art. 27 al. 1 CADH, ils ne doivent pas prendre de mesures qui soient « incompatibles avec les autres obligations imposées par le droit international »232 ;

225 Arturo Ribón Avila c. Colombie, Cas n° 11.142, Rapport n° 26/97 de la Commission interaméricaine du 30 septembre 1997, §§173-174 ; traduction anglaise tirée du site internet de l’université du Minnesota (http://www1.umn.edu/humanrts/cases/1997/colombia26-97a.html; 24.01.2013).

226 La ComADH se fonde également sur l’art. 25 CADH qui octroie aux individus un droit à un recours effectif.

Dans un souci de simplification, cet argument n’a pas été repris ici mais figure dans l’analyse du raisonnement de la Commission dans l’affaire Juan Carlos Abella c. Argentine, où elle adopte une approche similaire à cet égard (voir infra puce à numéro 4).

227 Voir supra §23. Voir aussi, HAMPSON,563-565.

228 Juan Carlos Abella c. Argentine, Affaire « La Tablada », Cas n° 11.137, Rapport n° 55/97 de la Commission interaméricaine paru dans le rapport annuel de la Commission de 1998, Chapitre III.

229 Ibidem, §§157-171.

230 Ibidem, §§158-161.

231 Ibidem, §§160-161.

232 Ibidem, §§162 et 168-170. Cet argument est surprenant dans sa logique, car l’art. 27 CADH traite des dérogations possibles à la CADH et de la conformité de ces dérogations. La Commission considère cependant

Partie III : Le rapport entre les droits de l’homme et le droit international humanitaire 4) l’art. 25 al. 1 CADH, qui octroie aux individus un droit de recours effectif « contre tous actes violant [leurs] droits fondamentaux reconnus par la Constitution, par la loi ou par la présente Convention », et qui exige de ce fait un droit de recours contre les violations aux CG dans la mesure où l’Argentine les a ratifiées233 ; et finalement

5) le fait que lorsque le droit humanitaire et les droits de l’homme s’appliquent concurremment, l’art. 29 lit. b CADH234, qui consacre le principe de la clause la plus favorable, exige de la Commission qu’elle prenne en compte, et si nécessaire donne effet, aux règles de droit humanitaire235.

68. Confiante de sa compétence, la Commission mettra alors pleinement en œuvre les principes du droit humanitaire. Le passage qui suit reflète l’ouverture de la Commission sur le droit humanitaire : « lorsque des civils, tels que les personnes qui ont attaqué la base de Tablada, assument un rôle de combattants, en participant directement aux combats, que ce soit individuellement ou en tant que membres d’un groupe, ils deviennent par là même des objectifs militaires légitimes. En tant que tels, ils font l’objet d’attaques individualisées directes au même titre que les combattants. De ce fait, de par leurs actes hostiles, les attaquants de la Tablada ont perdu le bénéfice des précautions […] devant être prises dans l’attaque et pour protéger les civils pacifiques contre les effets d’attaques conduites sans discrimination ou de manière disproportionnée »236.

69. La Cour interaméricaine rejettera cependant cette approche dans l’affaire Las Palmeras, considérant que la question devant la CourADH devrait toujours être de savoir « si la norme ou le fait en question sont compatibles avec la Convention américaine » et que la CADH « ne confère à la Cour que la compétence de déterminer si les actes ou les normes des États sont compatibles avec la Convention elle-même, et non avec les Conventions de Genève de 1949 »237. La Cour refuse de ce fait la compétence d’appliquer le droit humanitaire, mais ne va pas pour autant rejeter expressément sa compétence d’examiner les règles de la CADH à la lumière du droit humanitaire238. A notre sens, la question était essentiellement sémantique. La Commission avait sans doute fait un pas de trop en se déclarant compétente pour appliquer les règles du droit humanitaire directement, ce qui impliquait de sanctionner un Etat pour

que si de telles mesures doivent respecter les autres obligations internationales en cas de dérogations, cela doit aussi être le cas en tout temps (§162 et note 22 ; voir aussi dans ce sens, MARTIN, 133). La Commission revient cependant quelque peu sur ses pas aux paragraphes 168 à 170, sans toutefois réellement clarifier la situation.

233 Juan Carlos Abella c. Argentine, Affaire « La Tablada », Cas n° 11.137, Rapport n° 55/97 de la Commission interaméricaine paru dans le rapport annuel de la Commission de 1998, Chapitre III, §163.

234 L’art. 29 lit. b CADH prévoit qu’« [a]ucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme: […] b) restreignant la jouissance et l'exercice de tout droit ou de toute liberté reconnus par la législation d'un Etat partie ou dans une convention à laquelle cet Etat est partie. »

235 Juan Carlos Abella c. Argentine, Affaire « La Tablada », Cas n° 11.137, Rapport n° 55/97 de la Commission interaméricaine paru dans le rapport annuel de la Commission de 1998, Chapitre III, §§164-167.

236 Ibidem, §178 ; traduction française tirée de SASSOLI/BOUVIER/QUINTIN,2004.

237 Artemio Pantoja Ordoñez et al. c. Colombie, Affaire « Las Palmeras », Décision de la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur objections préliminaires du 4 février 2000, §33 ; traduction française tirée de SASSOLI/BOUVIER/QUINTIN,2759.

238 MARTIN considère que la Cour refuse aussi sa compétence d’examiner les droits de l’homme à la lumière du droit humanitaire. Selon elle, la Cour opte pour une interprétation exclusive de sa compétence, rejetant toute approche complémentariste (MARTIN, 134). Contra, GAGGIOLI qui lit strictement l’opposé dans les mêmes paragraphes de la décision et considère que la Cour admet sa compétence d’appliquer la CADH à la lumière du droit humanitaire (GAGGIOLI,23-24et 187). Bien que l’opinion de GAGGIOLI ne puisse raisonnablement pas se baser sur cette décision, la jurisprudence ultérieure de la Cour lui donnera raison.

respect du droit humanitaire. Comme le note la CourADH dans sa décision Las Palmeras, cela ne rentrait pas dans sa compétence239. Cependant, la Commission aurait, à notre sens, pu arriver aux mêmes conclusions si elle avait simplement déclaré que le droit humanitaire ne servait qu’à éclairer les droits contenus dans la CADH en période de conflit armé. C’est d’ailleurs l’approche que la Cour a par la suite adoptée dans les affaires Sœurs Serrano-Cruz c. Salvador240 et Bámaca-Velásquez c. Guatemala, déclarant dans cette dernière décision que

« les dispositions pertinentes des Conventions de Genève peuvent être prises en considération aux fins de l’interprétation de la Convention américaine »241.

2. La Cour internationale de justice

70. Dans un célèbre avis consultatif du 8 juillet 1996, la Cour internationale de Justice s’est penchée sur la question de la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires242. Amenée à déterminer si l’emploi d’armes nucléaires violait le droit à la vie de l’art. 6 du Pacte ONU II, la CIJ apporta la réponse suivante : « le droit de ne pas être arbitrairement privé de la vie vaut aussi pendant des hostilités. C'est toutefois, en pareil cas, à la lex specialis applicable, à savoir le droit applicable dans les conflits armés, conçu pour régir la conduite des hostilités, qu'il appartient de déterminer ce qui constitue une privation arbitraire de la vie. Ainsi, c'est uniquement au regard du droit applicable dans les conflits armés, et non au regard des dispositions du pacte lui-même, que l'on pourra dire si tel cas de décès provoqué par l'emploi d'un certain type d'armes au cours d'un conflit armé doit être considéré comme une privation arbitraire de la vie contraire à l'article 6 du pacte »243. A l’instar de la jurisprudence interaméricaine, la CIJ opte pour le principe de complémentarité et réconcilie ainsi les deux branches du droit, en raison précisément du caractère lacunaire de la réponse apportée par le texte des droits de l’homme244.

71. L’avis consultatif sur les Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé et l’arrêt sur les Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda) confirment cette approche245 : les deux branches du droit sont applicables en parallèle lors de conflits armés, le droit humanitaire constituant la lex specialis par rapport aux droits de l’homme. La Cour déclare ainsi dans l’affaire relative au mur en Palestine que : « [d]ans les rapports entre droit international humanitaire et droits de l’homme, trois situations peuvent […] se présenter : certains droits peuvent relever

239 Artemio Pantoja Ordoñez et al. c. Colombie, Affaire « Las Palmeras », Décision de la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur objections préliminaires du 4 février 2000, §§32-34.

240 Sœurs Serrano-Cruz c. Salvador, Décision de la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur objections préliminaires du 23 novembre 2004, §§111-119.

241 Bámaca-Velásquez c. Guatemala, Jugement au fond de la Cour interaméricaine des droits de l’homme du 25 novembre 2000, §209 ; traduction française tirée de SASSOLI/BOUVIER/QUINTIN, 1658. La Cour fait cette déclaration en se référant, à l’instar de GAGGIOLI,aux paragraphes 32 à 34 de l’affaire Las Palmeras, malgré le fait que ces paragraphes ne permettent, à notre sens, pas une telle interprétation.

242 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, Avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996, 226.

243 Ibidem, §25.

244 MARTIN, 138. Il est intéressant de noter que la ComADH adoptera une approche identique dans l’affaire Coard et autres c. Etats-Unis, Cas n° 10.951, Rapport n° 109/99 de la Commission interaméricaine du 29 septembre 1999, §§38-44.

245 Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, Avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, 126, §106 ; Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), Arrêt, C.I.J. Recueil 2005, 168, §216. Voir aussi, KOLB, Ius in bello, 138-139.

Partie III : Le rapport entre les droits de l’homme et le droit international humanitaire exclusivement du droit international humanitaire ; d’autres peuvent relever exclusivement des droits de l’homme ; d’autres enfin peuvent relever à la fois de ces deux branches du droit international. Pour répondre à la question qui lui est posée, la Cour aura en l’espèce à prendre en considération les deux branches du droit international précitées, à savoir les droits de l’homme et, en tant que lex specialis, le droit international humanitaire246. » La Cour met ainsi en évidence trois situations qui permettent d’illustrer le caractère complémentaire des deux branches :

1) un droit peut être prévu par le droit humanitaire uniquement, auquel cas, ce droit s’applique et comble la lacune laissée par les droits de l’homme. Il s’agit par exemple des règles sur le personnel sanitaire ou l’emblème247 ;

2) les droits de l’homme peuvent protéger un droit que le droit humanitaire ne prévoit pas. Dans ce cas, ce sont les droits de l’homme qui complètent la protection248. La liberté d’expression, de presse ou de réunion font notamment partie de cette catégorie ; et

3) lorsque les deux branches prévoient un droit, le droit humanitaire s’applique en tant que lex specialis. Rentrent notamment dans cette catégorie, l’interdiction de la torture, le droit des personnes privées de leur liberté à un contrôle de la légitimité de leur détention, le droit à la vie et certains droits économiques et sociaux249.

72. Comme le remarque à juste titre KOLB, le rapport entre les deux droits ne saurait se résumer à une application simpliste du principe de la lex specialis derogat legi generali qui impliquerait que le droit des conflits armés déroge systématiquement aux droits de l’homme. Ce principe doit plutôt être appréhendé comme régissant le rapport entre « deux corps juridiques [qui] se complètent et se renforcent mutuellement de manière complexe »250. Il ne s’agit donc pas de favoriser systématiquement les droits de l’homme ou le droit humanitaire, ni même de toujours choisir la règle la plus protectrice251. Dans la majorité des cas, l’application du principe de la lex specialis se fait sans heurt car les règles du droit humanitaire et des droits de l’homme sont compatibles252, la règle la plus précise constituant alors la lex specialis253. Par exemple, l’art. 3 commun CG, qui se réfère aux « garanties judiciaires reconnues comme indispensables par les peuples civilisés »254, est complété par les règles plus précises des

246 Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, Avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, 126, §106.

247 Voir à cet égard, SASSOLI,Le droit international humanitaire, une lex specialis ?, 386.

248 Incidemment, l’approche séparatiste d’Israël et des Etats-Unis ne respecte pas la décision de la CIJ, car en considérant que lorsqu’une règle n’est pas prévue par le droit humanitaire, elle n’existe pas, cette approche remet en cause l’applicabilité des droits de l’homme en période de conflit armé.

249 DROEGE,The Interplay, 336.

250 KOLB, Ius in bello, 139. Voir aussi, HAMPSON,558-562 ;STEINER/ALSTON/GOODMAN,399-401 ;ABRESCH, 741 ;et GAGGIOLI,28-59.

251 Cela reviendrait dans la grande majorité des cas à donner la préférence aux droits de l’homme. Cependant, cette approche est à notre sens à rejeter, car elle ne prendrait en compte ni la situation exceptionnelle que sont les conflits armés, ni les nécessités militaires (voir à cet égard, SASSOLI,Le droit international humanitaire, une lex specialis ?, 377-378).

252 DOSWALD-BECK,Human Rights in Times of Conflict and Terrorism, 122.

253 SASSOLI/BOUVIER/QUINTIN,546.

254 Art. 3 par. 1 ch. 1 lit. d commun CG : « sont et demeurent prohibés, en tout temps et en tout lieu […] d) Les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal

droits de l’homme. A l’inverse, la Troisième Convention de Genève, relative au traitement des prisonniers de guerre, constitue la lex specialis par rapport aux droits de l’homme pour ce qui est notamment de leur liberté personnelle255. Dans certains cas cependant, les règles des deux branches du droit ne peuvent pas être réconciliées. Il en va notamment ainsi du contrôle judiciaire de la détention des prisonniers de guerre256, et du droit à la vie dans la conduite des hostilités. Pour régler ce conflit, il faut alors analyser les règles des deux domaines par rapport à leur spécificité, leur adéquation et leurs buts257. Dans le cas du droit à la vie, si l’on prend en compte la spécificité et l’adéquation des règles du droit humanitaire relatives à la conduite des hostilités, on peut affirmer que ce sont les règles du droit humanitaire qui constituent dans ce cas particulier la lex specialis, comme l’indiquait la CIJ en 1996258. DOSWALD-BECK déclare à cet égard que « le droit humanitaire doit être utilisé pour interpréter une règle des droits de l'homme et que, réciproquement, tout au moins dans le contexte de la conduite des hostilités, le droit relatif aux droits de l'homme ne saurait donner une interprétation différente de celle du droit humanitaire »259. L’application du principe de la lex specialis se justifie à nos yeux, car par définition, la règle spéciale concrétise la règle générale dans une situation pour laquelle elle est spécifiquement adaptée. Loin d’annuler la règle des droits de l’homme, qui continue à s’appliquer, la règle de droit humanitaire donne corps au droit à la vie dans la conduite des hostilités.