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L’apport de l’épigénétique environnementale et des origines

B. LE RENOUVELLEMENT DE L’ÉTIOLOGIE DE PLUSIEURS MALADIES

2. L’apport de l’épigénétique environnementale et des origines

Ces deux approches apportent un autre éclairage sur l’étiologie des pathologies examinées précédemment en soulignant le rôle des facteurs environnementaux ou l’hypothèse d’une origine fœtale des maladies de l’adulte.

a. L’épigénétique environnementale

L’étude précitée de 2010 (4), rappelle les deux considérations sur lesquelles repose l’épigénétique environnementale.

La première réside dans le lien existant entre exposition aux facteurs environnementaux et pathologies : « il existe un grand nombre de produits toxiques qui se sont avérés être des promoteurs de maladies. C’est pourquoi les facteurs environnementaux sont décisifs dans l’étiologie des maladies ». À cet égard, les auteurs relèvent que la génétique seule ne peut plus expliquer, depuis plusieurs décennies, toutes les fréquences des maladies.

1) Gerda Egger et al, Epigenetics in human disease and prospects for epigenetic therapy, Nature 429, 459 (2004).

2) C’est le cas de Mme Claire Francastel, directrice de recherche au CNRS-université Paris Diderot, Centre épigénétique et destin cellulaire, audition publique de l‘OPECSTdu 16 juin 2015.

3) Marcus Pembrey, Genetics and epigenetics of human disease, 2012.

4) Michaël Skinner et al, Epigenetic transgenerational actions of environmental factors to disease etiology, Cell, janvier 2010.

Selon la seconde considération, les expositions peuvent entraîner des effets à très long terme : « Ce sont les mécanismes épigénétiques dont on présume qu’ils sont au moins en partie impliqués qui expliquent comment l’exposition à un âge précoce aux perturbateurs endocriniens peut causer une maladie à l’âge adulte longtemps après que l’agent a disparu ».

Mais c’est de façon générale que, aux yeux des chercheurs en épigénétique environnementale, les expositions à l’environnement peuvent produire de tels effets.

Ainsi, rendant compte des travaux d’un colloque international, Michael Skinner, professeur à la School of Biological Sciences de l’université de l’État de Washington, relève-t-il : « Les organisateurs du colloque Keystone (lequel a réuni des spécialistes de l’épigénétique environnementale) ont cherché à fournir la preuve que les expositions à l’environnement au cours du développement précoce peuvent comporter le risque de développer des pathologies telles que l’asthme, l’autisme, le cancer, les maladies cardio-vasculaires, le diabète, l’obésité et la schizophrénie, plus tard, en modifiant l’épigénome » (1).

Pour autant, comme cela sera rappelé ultérieurement, bien que le nombre d’études se soit accru de façon exponentielle, la littérature à laquelle les rapporteurs ont eu accès, ainsi que les propos tenus par les chercheurs lors de l’audition publique du 16 juin 2015, montrent que la connaissance exacte des modes d’action de ces facteurs environnementaux comporte encore de nombreuses inconnues.

i. Cancer

De nombreux types de cancers sont impliqués. Les facteurs environnementaux susceptibles de contribuer à leur développement sont également très divers.

Agents toxiques

On se limitera ici à trois exemples d’exposition concernant respectivement la fumée de tabac, les métaux lourds et les particules émises par le diesel.

o La fumée de tabac

Beaucoup d’études sur la carcinogenèse du poumon liée à la fumée de tabac se sont focalisées sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques (PAH selon l’acronyme anglais), la plupart sur le benzo[a]pyrène, qui est le plus carcinogénétique. Bien que, à l’heure actuelle, le mécanisme ne soit pas élucidé, les cibles épigénétiques des PAH provenant de la fumée de tabac peuvent causer des dommages à l’ADN à travers les sites Cpg méthylés.

1) Michael Skinner, Environmental epigenomics and disease susceptibility, EMBO Reports, 2011.

Plusieurs études ont associé fumée de tabac et modifications de la méthylation de l’ADN, ce qui est un facteur de risque de cancer et de maladies chroniques à l’âge adulte en cas d’exposition prénatale à la fumée.

Enfin, une récente étude suggère que les modifications du profil de certaines histones, qui peuvent être considérées comme les biomarqueurs des maladies chroniques induites par la fumée de tabac, jouent un rôle épigénétique important dans la pathogénèse des maladies chroniques du poumon induites par la fumée, telles que le cancer du poumon.

o Les métaux lourds

Des modifications de l’expression des microARN ont été identifiées lors de l’exposition au cadmium, à l’arsenic et au mercure dans les cellules cancéreuses de mammifères.

En ce qui concerne, par exemple, l’exposition au cadmium, elle peut décroître la méthylation de l’ADN dans les proto-oncogènes et promouvoir l’expression des oncogènes pouvant résulter de la prolifération des cellules.

o Les particules émises par le diesel

Une étude a indiqué que, dans les cellules épithéliales bronchiques de l’homme, les particules provenant des gaz d’échappement du diesel avaient causé l’expression aberrante de microARN dans environ 63 % des microARN étudiés. De tels changements dus à une exposition chronique aux particules de gaz d’échappement du diesel peuvent potentiellement causer des maladies respiratoires ou le cancer.

Nutrition

On a fait observer que, bien que les effets directs des facteurs nutritionnels sur les changements épigénétiques soient peu connus, il y a des exemples dans lesquels le lien est mieux compris (1).

Ainsi, plusieurs études ont-elles montré que la consommation d’alcool est associée à différents changements épigénétiques dans les cancers. Par exemple, d’après une importante étude épidémiologique entreprise aux Pays-Bas sur la nutrition et le cancer, l’analyse de la méthylation de l’ADN a montré que la prévalence du promoteur de l’hyperméthylation de nombreux gènes était plus élevée chez les patients atteints du cancer colorectal et ayant consommé beaucoup d’alcool et peu de folate que chez les patients également atteints du cancer colorectal mais ayant consommé beaucoup de folate et peu d’alcool.

1) Zdenko Herceg, Epigenetics and cancer: towards an evaluation of the impact of environmental and dietary factors, Mutagenesis, Vol. 22-2, 2007.

De même, des études suggèrent-elles que la consommation d’éthanol change le métabolite de SAM (1) en le réduisant, ce qui, par la suite, conduit à l’hypométhylation globale de l’ADN, à la cirrhose du foie et à un risque accru du cancer des cellules hépatiques (HCC pour l’acronyme anglais). En outre, l’alimentation déficiente en donneur de méthyle fournie à des rongeurs a provoqué une hypométhylation ainsi que l’activation d’oncogènes contribuant au développement du HCC (acronyme anglais pour hepatocellular carcinom - hépatocarcinome, qui est un cancer primitif du foie).

Pathogènes infectieux

L’exposition à des pathogènes infectieux – en particulier les bactéries et les virus – provoque une inflammation et un stress oxydant (2), qui pourrait, à son tour, causer des phénomènes épigénétiques dans les cellules et les organes-hôtes.

C’est ainsi que l’infection bactérienne causée par l’Hélicobacter pylori constitue un facteur de risque important du cancer gastrique. En outre, cette infection a été associée à l’hyperméthylation d’îlots CpG spécifiques dans la mycose gastrique, ce qui est conforme aux marques aberrantes de méthylation de l’ADN, que l’on constate dans le cancer gastrique.

De même, un lien a-t-il été établi entre le virus de l’hépatite B et le carcinome hépatocellulaire, une étude ayant indiqué que la majorité des modifications spécifiques apparaissait à un stade précoce. C’est ainsi que des modifications épigénétiques ont été identifiées dans la carcinogenèse de la protéine X (3) causée par le virus de l’hépatite B, incluant l’hyperméthylation de l’ADN ou encore l’hyperméthylation de multiples îlots CpG.

ii. Maladies métaboliques

Les recherches ont visé à étudier l’impact épigénétique des environnements prénatal et postnatal sur le développement du diabète et de l’obésité.

Environnement prénatal

Les études se sont fondées sur des populations humaines ayant connu des variations naturelles dans leur régime alimentaire, pour étudier l’impact du régime nutritionnel de la mère avant et durant la grossesse sur la méthylation de l’ADN chez les enfants.

1) SAM pour S-adénosylméthionine est un métabolite présent dans les cellules et qui est impliqué en premier lieu comme enzyme dans les réactions de transfert de groupe méthyle (CH3).

2) Le stress oxydant consiste en une oxydation des constituants de l‘organisme due à un excès de molécules particulièrement nocives, que l’on appelle les radicaux libres, lesquels viennent de l’oxygène respiré pour vivre. Cette oxydation dénature les protéines, les lipides, les sucres et même l‘ADN et par là les membranes cellulaires et les cellules.

3) La protéine X permet au virus de l’hépatite B de lutter contre les systèmes de défense d’une cellule dans laquelle il s’est introduit.

Ainsi, des chercheurs ont-ils fait appel à la cohorte des descendants adultes des personnes ayant subi la famine survenue aux Pays-Bas durant l’hiver de l’année 1944, afin d’étudier les effets de l’exposition prénatale à une période de sévère sous-nutrition de la mère sur la méthylation de l’ADN des gènes impliqués dans la croissance et le métabolisme à l’âge adulte.

Les résultats ont fait apparaître l’importance du moment de l’exposition dans son impact sur l’épigénome, les effets épigénétiques significatifs ayant été seulement identifiés chez des individus exposés à la famine au début de la gestation. Ainsi, les modifications épigénétiques sont-elles intervenues conjointement à l’augmentation de l’indice de masse corporelle (BMI).

Pour autant, cette recherche n’a pu répondre à la question de savoir si ces modifications étaient survenues lors du développement précoce ou si elles ont été la conséquence d’un BMI plus élevé.

D’autres études récentes ont indiqué que la surnutrition de la mère au cours de la phase prénatale et un environnement obésogène ou diabétogène de la mère étaient également associés à des modifications de la méthylation de l’ADN dans les gènes liés au développement embryonnaire, à la croissance et aux maladies métaboliques de sa progéniture.

En outre, bien que les données disponibles soient peu nombreuses, il y a des indications selon lesquelles l’obésité paternelle peut conduire à modifier la méthylation des gènes imprimés chez le nouveau-né ; cet effet étant considéré comme une conséquence des modifications épigénétiques survenues au cours de la spermatogenèse.

Environnement postnatal

L’épigénome est établi au cours du développement embryonnaire. C’est pourquoi certaines marques épigénétiques apparues au stade embryonnaire sont très stables tout au long de la vie.

Si l’environnement prénatal joue un rôle significatif dans la configuration de l’épigénome, les études s’accordent, toutefois, sur le fait que les changements survenant dans l’épigénome arrivé à maturité sont dus à l’influence d’une série de facteurs incluant les altérations liées au vieillissement, à l’exposition aux toxines ou à l’alimentation.

Par exemple, une étude a montré que, en réponse à une alimentation très grasse, des modifications étaient intervenues dans la méthylation de nombreux gènes du muscle squelettique et du PGC1A (1) du tissu adipeux.

1) PGC1A (pour Peroxisome proliferator activated receptor gamma coactivator 1 alpha) est un coactivateur transcriptionnel régulant les gènes impliqués dans le métabolisme énergétique.

Des opérations destinées à réduire le poids ont également été associées à des changements dans la méthylation de l’ADN. À cet égard, des études ont indiqué que les profils de méthylation de l’ADN du tissu adipeux, des cellules mononucléaires du sang périphérique et du tissu musculaire de patients antérieurement obèses sont devenus plus similaires aux profils de personnes maigres, à la suite de la perte de poids.

De nombreuses études ont mis en évidence que l’exercice physique pouvait également influencer la méthylation de l’ADN. C’est ainsi que des chercheurs ont testé l’hypothèse selon laquelle l’exercice affectant toute l’énergie corporelle modifie intensément la méthylation de l’ADN dans le muscle squelettique. Ces chercheurs ont rapporté que la méthylation de l’ensemble du génome avait diminué dans les biopsies musculaires d’hommes et de femmes sédentaires et saines, à la suite d’un exercice intense.

Plus récemment, une autre étude a testé les effets de six mois d’exercice sur les profils de méthylation du tissu adipeux d’individus sains. Il est apparu que l’exercice avait altéré la méthylation globale de l’ADN et affecté les niveaux de méthylation de l’ADN de 17 595 sites CpG de 7 663 gènes. En outre, dans trente-neuf gènes candidats de l’obésité et du diabète de type 2, des écarts de méthylation ont été observés sur le tissu adipeux des patients soumis à cet exercice.

Enfin, des études ont indiqué que l’exposition à des polluants chimiques pouvait avoir des effets obésogènes. Il en est ainsi du TBT (Tributylin) et du TBBPA (Tetrabromobisphénol A), qui peuvent moduler les étapes décisives de l’adipogenèse in vitro et in vivo, en prédisposant les cellules souches mésenchymateuses à devenir des adipocytes, c’est-à-dire des cellules de stockage de graisse, par le truchement de l’empreinte épigénétique.

Par exemple, une étude animale a montré que les effets de l’exposition au TBT sur la taille du dépôt de graisse et sur la reprogrammation des cellules souches pourraient se produire jusqu’à la génération F3 suivant l’exposition de la souris (FO) en gestation.

iii. Maladies auto-immunes

Nutrition

Les auteures d’une étude (1) font observer que l’on a suggéré l’existence de liens entre nutrition et auto-immunité. Toutefois, alors que de tels liens ont été établis par des études animales utilisant des régimes alimentaires arbitrairement choisis, les données humaines tirées d’essais cliniques randomisés ne sont pas conclusives à l’heure actuelle.

1) Judith M. Green et Pamela McCombe, The role of epigenetic mechanisms and processes in autoimmune disorders, Biology; Targets and Therapy, 2012, 6.

Pour autant, des recherches ont émis l’hypothèse que l’obésité puisse prédisposer à l’auto-immunité. Par exemple, l’obésité et le diabète maternels ou l’obésité de l’adolescence peuvent prédisposer ultérieurement à la sclérose multiple.

En outre, des niveaux élevés de leptine sont associés à un nombre décroissant de cellule T régulatrices (1) chez les patients atteints de sclérose multiple.

Expositions à l’environnement

Évoquant le rôle du rayon ultraviolet (RUV), les auteurs de l’étude précédemment citée indiquent que le RUV est connu pour induire de multiples modifications épigénétiques ; nombre d’entre elles sont immunosuppressives, incluant l’hyperméthylation de plusieurs gènes promoteurs, la phosphorylation et l’acétylation de certaines histones.

S’agissant de l’exposition aux métaux lourds, il est apparu que des contaminants très répandus dans l’environnement – tels que le nickel, le cadmium, le plomb, le mercure et l’arsenic – pouvaient avoir des effets toxiques à travers des mécanismes épigénétiques, comme des changements globaux de la méthylation de l’ADN, des modifications des histones et des changements de niveau des mARN.

Médicaments

Une étude (2) indique que plus d’une centaine de médicaments sont connus pour causer des maladies analogues au lupus au terme d’une longue exposition, la pathologie disparaissant lorsque l’exposition a cessé. La plupart de ces médicaments sont caractérisés par leur capacité à induire des modifications épigénétiques, suggérant la possibilité d’un mécanisme d’auto-immunité. Les médicaments induisant la plupart des syndromes d’auto-immunité sont notamment, la 5-Azacytidine, la Procaïnamide et l’Hydralazin.

iv. Maladies neurodégénératives

Plusieurs facteurs ont été étudiés : le régime alimentaire, le stress oxydant et l’exposition à des métaux.

Régime alimentaire

De nombreuses études ont documenté les profils aberrants de méthylation chez les sujets atteints de la maladie d’Alzheimer (MA), suggérant que l’altération de la méthylation de l’ADN peut être détectée non seulement à un stade tardif de la

1) Cellules capables de supprimer les réponses immunitaires.

2) Javierre BM, Hernando H, Ballestar E, Environmental triggers and epigenetic deregulation in autoimmune disease, Discovery Medicine, 26 décembre 2011.

maladie d’Alzheimer, mais également de façon précoce au cours de la phase préclinique.

Une hypométhylation graduelle de l’ADN accompagne le vieillissement et la maladie d’Alzheimer. Dans ce contexte, on a montré que la déficience en folate peut entraîner une cascade d’altérations suscitant une hypométhylation globale et le développement de la maladie d’Alzheimer. En outre, la déficience en folate non seulement accroît les niveaux d’homocystéine (1), ce qui accroît le stress oxydant en liaison avec la sévérité et la progression de la maladie d’Alzheimer mais, également, réduit les niveaux de 5-adénosylméthionine (SAM) (2).

Outre la folate, des études épidémiologiques et expérimentales font état d’autres agents intervenant dans les mécanismes de méthylation du vieillissement et de la maladie d’Alzheimer, tels que la choline, la bétaïne et la vitamine B12.

S’agissant des effets des aliments fonctionnels (3) sur la modification des histones, des chercheurs (4) font valoir que de nombreux rapports suggèrent que les aliments fonctionnels ou les suppléments ayant des activités enzymatiques en liaison avec l’acétylation, peuvent moduler une acétylation défectueuse, laquelle, est associée au début de la phase de diminution de la mémoire ou à la pathogénèse des maladies neurodégénératives, dont la maladie d’Alzheimer.

L’exemple du sodium butyrate, composant alimentaire que l’on trouve dans des aliments tels que le beurre ou le fromage, a été identifié comme affectant les activités des protéines impliquées dans la maladie d’Alzheimer et comme améliorant la mémoire et l’apprentissage.

L’étude précitée de S. Davinelli et al. indique, pour ce qui est des mARN, que leur expression est contrôlée par de nombreux facteurs incluant la nutrition.

Pour autant, peu de recherches se sont intéressées à l’impact de la nutrition sur la régulation des mARN, alors que divers composants alimentaires – tels que la folate, l’acide rétinoïque, la vitamine D, la vitamine E, le sélénium, l’oméga 3, les acides gras, le butyrate et les phyto-chimiques – peuvent modifier l’expression des mARN et leurs cibles dans plusieurs types de cancers.

1) L’homocystéine – que certaines publications médicales appellent le « nouveau cholestérol » – est un acide aminé qui participe à la dégradation des vaisseaux sanguins et entraîne potentiellement des pathologies, telles que la maladie d’Alzheimer.

2) La SAM est un métabolite présent dans les cellules et qui est impliqué en premier lieu comme coenzyme dans les réactions de transfert de groupe méthyle.

3) D’après la Pr Annelise Lobstein, professeure de pharmacognosie, laboratoire d’innovation thérapeuthique-CNRS-université de Strasbourg, « Les aliments fonctionnels sont proches des aliments traditionnels (aspects, qualités nutritives) mais ont un intérêt nutritionnel au préventif revendiqué à l’égard des maladies humaines dû à une modification de leur composition ». Il s’agit, par exemple, de minéraux, de vitamines, d’acides gras spécifiques ou de fibres alimentaires.

4) Sergio Davinelli et al, Epigenetic nutraceutical diets in Alzheimer’s disease, The Journal of Nutrition, Health and Aging, avril 2014.

Des découvertes récentes impliquant les polyphénols (1) et la maladie d’Alzheimer ont montré qu’une alimentation complétée par la Quercétine, l’Hespéridine, la Catéchine et la Curcumine, module l’expression hépatique dans le gène de l’APOE (apolipoprotéine E) (2) d’une souris déficiente.

Stress oxydant

Le terme de stress oxydant désigne l’état d’un neurone dont les défenses anti-oxydantes ne font plus face aux oxydants intra ou extracellulaires. Le stress oxydant est impliqué dans les mécanismes de mort cellulaire lors des maladies neurodégénératives.

Il correspond à une agression des cellules par des radicaux libres appelés également « espèces réactives de l’oxygène » (ERO), ces radicaux libres étant produits en permanence par l’organisme à partir d’oxygène dans la cellule, notamment au niveau de la mitochondrie, dans la chaîne respiratoire. Les ERO sont des substances réactives et très toxiques.

Le stress oxydant est causé par un déséquilibre entre les radicaux libres pro-oxydants et les antioxydants.

Le stress oxydant est à l’origine de certaines modifications épigénétiques. Il peut ainsi influencer la méthylation de l’ADN, le peptide bêta-amyloïde (3) pouvant jouer un rôle dans ce processus.

Le stress oxydant agit également à travers les ERO, dont l’accumulation détériore la fonction des cellules du poumon, les modifications d’histones, les protéines non histones, ainsi que la fonction des enzymes remodelant la chromatine.

Exposition à des métaux

Grâce aux travaux reposant sur la DOHaD (acronyme anglais pour origines développementales de la santé et des maladies), évoqués ci-après, plusieurs études humaines ont montré que l’exposition à des métaux – à un stade précoce de développement – pouvait être un facteur de risque potentiel des maladies neurodégénératives.

Il en est ainsi de l’exposition au plomb, qui peut causer des déficits cognitifs et comportementaux chez les enfants.

1) Les polyphénols constituent une famille de molécules organiques largement présentes dans le monde végétal. Ils prennent une importance croissante, notamment grâce à leurs effets bénéfiques sur la santé.

2) L’APOE joue un rôle important dans le transport et la redistribution des lipides. Il est un facteur de risque de la maladie d’Alzheimer.

3) Le peptide bêta-amyloïde est un fragment de protéine produit par les neurones et normalement éliminé par le cerveau.

De même, des études de cas-témoins ont-elles indiqué que l’exposition chronique des travailleurs au plomb ou à d’autres métaux – comme le manganèse – était associée à la maladie de Parkinson.

Les effets d’une forte teneur en aluminium dans l’eau potable ont, pour leur part, fait l’objet de résultats contradictoires. Certaines études y ont vu un facteur de risque de la maladie d’Alzheimer. En revanche, d’autres études n’ont pu établir une telle relation. On a expliqué ces résultats contrastés par la sélection inappropriée des cas et des témoins.

Quant aux études animales, des études effectuées sur des rongeurs ont montré que l’exposition au plomb au cours du développement cérébral prédéterminait l’expression et la régulation du gène du précurseur du peptide amyloïde (APP en anglais), qui est impliqué dans pathophysiologie de la maladie d’Alzheimer.

Des expériences sur les primates ont également indiqué que l’expression de l’APP ainsi que sa régulation transcriptionnelle étaient élevées chez les singes âgés, qui avaient été exposés au plomb lorsqu’ils étaient petits.

Toutes ces études tant humaines qu’animales, illustrent donc que l’origine des maladies, comme le propose la DOHaD, peut-être de nature développementale.

b. La DOHaD (origines développementales de la santé et des maladies) L’hypothèse de l’origine développementale de la santé et des maladies est apparue dans les années 1980 et postule que l’environnement au cours de la période de développement peut conduire un individu à contracter des pathologies chroniques à l’âge adulte. Cela a été popularisé sous le nom d’« hypothèse de Barker » et confirmé expérimentalement par l’étude de modèles animaux.

David Barker, un épidémiologiste britannique et ses collègues ont cherché à confirmer les résultats auxquels étaient parvenus d’autres épidémiologistes britanniques, indiquant que les régions du Royaume-Uni dans lesquelles on observait une mortalité néonatale et infantile élevée dans les années 1920 étaient aussi celles dans lesquelles on constatait un taux de mortalité d’origine cardiovasculaire dans les années 1970.

Se fondant sur une échelle géographique plus restreinte – celle d’une ville et d’un comté – David Barker a reconstitué plusieurs cohortes concernant les naissances survenues dans la première moitié du XXe siècle. Ces cohortes ont démontré une relation inverse entre le poids de naissance et la mortalité mais aussi diverses maladies chroniques (cardiovasculaires, bronchopneumopathie chronique, diabète de type 2, etc.), de même que la présence de facteurs de risque de ces maladies à l’âge adulte chez les hommes comme chez les femmes.