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2.1.2 – L’ANIMATION INTERNE DE LA PIXELLISATION

LE VIVANT DANS LA MATIÈRE DE L’IMAGE

2.1.2 – L’ANIMATION INTERNE DE LA PIXELLISATION

La vibration particulière du signal vidéo

Comme le démontre Mort à Vignole, la matière des images n’est pas neutre. Elle paraît

même infiltrer le vivant dans Nick's Movie/Lightning Over Water de Wim Wenders et Nicholas Ray. Le cinéaste allemand est un fervent admirateur du réalisateur américain, auteur de Johnny Guitar (1954) et Rebel Without a Cause (La fureur de vivre, 1955). Après l’avoir dirigé dans Der Amerikanische Freund (L’ami américain, 1977), Wim Wenders propose à Nick Ray de créer ensemble un film en mélangeant Super 8, 16 mn, 35 mn et vidéo, à l’image de We Can’t Go Home Again (1976) la dernière œuvre inachevée de l’auteur étasunien. Nicholas Ray, atteint du cancer, envisage alors cette collaboration comme son testament cinématographique « pour se reprendre avant de mourir ». Comme l'explique Wim Wenders dans ses commentaires pour l’édition DVD, Nick’s Movie « a véritablement permis à Nick de retrouver le respect de lui-même. Il l’a fait de manière tellement courageuse et sa rigueur était incroyable. Il a été un exemple pour nous tous, avec ce film, son travail…181 »

Wim WENDERS - Nicholas RAY, Nick's Movie/Lightning Over Water, 1981

Pour les besoins du long-métrage, Wim Wenders tourne avec une caméra 35 mm tandis que l’assistant du cinéaste américain, Tom Farrell, filme en vidéo. Le montage final réunit les deux médias et confronte ainsi les deux points de vue. Leur complémentarité est manifeste dans la partie consacrée à la conférence de Nicholas Ray au Vassar College de Poughkeepsie dans l'État de New York. Pour son allocution, qui correspond à un « document réel », comme le spécifie Wim Wenders dans l’édition DVD, les séquences en 35 mm proposent un portrait de Nicholas Ray respectueux, à bonne distance, comme si la caméra de cinéma et la pellicule posaient un voile pudique sur la réalité. Par contraste, les images vidéo, avec leurs trames visibles, ajoutent une vibration particulière à la captation. Elles semblent n'enregistrer que ce qui gangrène le réel de l'intérieur, comme si la caméra vidéo disséquait en direct, à cœur ouvert, la réalité des faits. La différence entre 35 mn et vidéo est significative. Leur montage alterné est particulièrement éloquent sur la mort au travail. Automatiquement, notre œil octroie à la vidéo un supplément d'authenticité - un supplément d'âme - au détriment du 35 mm associé à l'artifice de la mise en scène. La puissante introspection de la caméra vidéo n'est

pas sans effarer Wim Wenders qui la redoutait avant le tournage, comme le signale un des dialogues entre les deux réalisateurs.

Wim : « Je savais que je verrais ta faiblesse et que tu serais gêné d’être vu comme ça. Mais maintenant ça va. Autre chose m’est venu à l’esprit dans l’avion hier soir, qui me fait encore plus peur. J’ai pensé que je pourrais me trouver attiré par ta faiblesse, ou par ta souffrance et… Si c’était le cas, je crois que je devrais te quitter. J’aurais le sentiment de te tromper ou de te trahir.

Nick : Ça n’arrivera pas. »

Techniquement, dans l'auditorium du Vassar College, Tom Farrell filme la conférence de Nicholas Ray juste devant la scène, proche du cinéaste américain tandis que Wim Wenders et son équipe tournent depuis un échafaudage dressé dans la salle. Tom Farrell vérifie son image à l'œilleton de sa caméra et sur un moniteur test installé à ses côtés. Wim Wenders écoute et regarde l'intervention de Nick Ray entouré de ses techniciens, Ed Lachman, Martin Schäfer et Martin Müller. Il ne vérifie pas l'image à la caméra. Il n'écoute pas la prise de son. Ses assistants-cameramen et le preneur de son sont à deux endroits différents. Les premiers sont sur l'échafaudage avec le réalisateur allemand. Le second est parmi le public. La dissociation des deux fondamentaux de l'image cinématographique symbolise la distance morale que s’impose Wim Wenders vis-à-vis de son sujet. Tom Farrell, malgré lui, semble s’engager davantage. Son implication se voit aussitôt à l'écran dès que le montage du film passe du 35 mm à la vidéo. Sans dramatisation, le spectateur a l'impression d’une image à l’autre de passer de la fiction à la réalité, avec la vive sensation d'ausculter les symptômes de la maladie de Nicholas Ray à travers la VHS. La vidéo est implacable. Par-delà son grain, plus visible que celui de la pellicule, et par-delà sa définition moindre que celle du 35 mm, le portrait du réalisateur propose un examen introspectif, qui parait plus objectif que la mise en scène cinématographique.

« J’ai utilisé la vidéo pour montrer Nick » dit Wim Wenders dans ses commentaires du film. « Je l’ai fait exprès car on considérait ça comme le cancer à l’intérieur du film. Les images vidéo venaient interrompre le film. Elles représentaient le cancer à l’intérieur du film. Il ne faut pas oublier qu’on est en 1978, à la fin des années 70. La vidéo et le film n’avaient pas « fusionné » et n’étaient pas encore devenus les outils de travail que l’on utilise aujourd’hui. C’est bizarre mais pour moi, à l’époque, la vidéo était l’ennemie. Si on regarde cette image VHS, on comprend ce que je veux dire quand je parle du cancer à l’intérieur du film. Ce qui était le plus incroyable, c’est que plus on regardait ces images vidéo à la fin d’un tournage ou après une scène, c’était étrange à quel point très souvent, c’était plus proche de la réalité que l’image bien éclairée, bien cadrée des plans filmés en 35 mm. L’aspect brut, l’aspect un peu abîmé de

l’image vidéo saisissait davantage la réalité et montrait de manière plus vraie l’état de Nick. La pellicule semblait le transformer et montrait une image embellie de lui. Le film crée une aura autour des gens. La vidéo ne faisait pas ça, elle montrait sans complaisance qu’il lui restait peu de temps à vivre.182 »

Wim WENDERS - Nicholas RAY, Nick's Movie/Lightning Over Water, 1981

La vidéo semble transpercer les apparences comme si le « grouillement » de la trame anticipait la décomposition cadavérique. Les commentaires de Nick Ray pendant sa conférence sur les aléas du tournage de The Lusty Men, qui s'improvisait jour après jour, sont

eux-mêmes allégoriques de cette impression. « Plus je me rapproche de ma fin, plus je tends à réécrire mon début. […]. Arrive-t-il que la représentation soit de l’art ou ne le soit pas, que la réalité soit imaginaire ou ne le soit pas? »

À la fin du tournage à Vassar, de retour dans l'appartement, Tom Farrell et Wim Wenders regardent sur moniteur les images vidéo enregistrées plus tôt. L’émotion des deux hommes est palpable tant la captation VHS est sans équivoque sur l’état de santé de Nicholas Ray. Ils sont muets de stupeur. Le discours filmé de Nicholas Ray continue de peindre un portrait de lui- même sans fard. « Le film, c’est un homme qui veut se reprendre avant de mourir. Retrouver son respect de lui-même. » Wim Wenders, après s'être enquis de l'opportunité de la vidéo auprès de Tom Farrell, reste songeur devant les images du moniteur et s'interroge sur le pouvoir d'objectivité de la caméra qui le dépasse et qui contrarie sa pudeur vis-à-vis de son ami malade.

"J’étais perdu. Quelque chose se passait dès que la caméra était sur Nick, une chose qui échappait à mon contrôle. Dans la caméra même, quand je regardais Nick dans le viseur. Comme un instrument de précision, elle montrait clairement et sans pitié que son temps était compté. Ça ne se voyait pas à l’œil nu, il y avait toujours de l’espoir. Mais pas dans la caméra. Je ne savais pas comment prendre ça. J’étais terrifié. "

Nick's Movie montre que notre perception des images sur écran est profondément différente de celles projetées en salle, non parce que leurs lumières sont de différentes natures, mais parce qu’elles « vibrent » différemment, suscitant une reconnaissance distincte. Pendant longtemps dépréciée parce qu’elle ne correspondait pas à la chaleur du grain de la pellicule, la trame des points/lignes, visible ou quasi imperceptible, gênait la lecture et l’appréciation de l’image. Comme un voile qui empêchait de mieux voir, elle embarrassait. Sa définition paraissait toujours inférieure à celle des représentations cinématographiques, plus riches en textures, en variations de contrastes, de lumières et de teintes, donc en sensibilité réflexive.

Dans la nuit digitale

Durant les années 60-70, les pionniers de l’art vidéo ne manquèrent pas de revendiquer l’« insuffisance » vidéographique comme un atout, arguant même que son signal vacillant

conférait aux images une véritable picturalité. Sa singularité se distinguait comme le premier élément de langage de la vidéo. Les téléviseurs modifiés de Nam June Paik, les premières installations de Bill Viola et de Gary Hill sont des modèles de cette revendication non feinte de la qualité picturale et sensible du signal, prétendument « déficient ».

Néanmoins, ces artistes n’aspirèrent pas à stagner à tel stade ou à tel autre de l’évolution technologique pour des raisons esthétiques. Ils ne cherchèrent pas à rester à tel niveau de définition de l’image vidéo par choix. Ils suivirent le progrès pour restituer leurs visions artistiques, cherchant discrètement à concurrencer le cinéma et ses techniques. Les « accidents de matière » sont même devenus au cours des années 1990 et 2000 des effets à part entière pour instiller une caution expérimentale à des produits commerciaux comme les clips musicaux, les messages publicitaires et les annonces des émissions télévisées. Ils se confondaient ou remplaçaient les rayures, les poussières et les brûlures de la pellicule, mais leurs applications ne reflétaient pas de réelles aspirations artistiques dans leur traitement.

Aujourd’hui, le signal vidéo se repère et se consomme comme un indice esthétique, au même titre que le grain photographique ou le noir et blanc du 16 mm et la couleur en 35 mm. La lumière du moniteur vidéo, et par extension des supports de diffusion d’images numériques, parait s’extraire d’une obscurité sensible. Cette révélation change en profondeur notre perception des représentations digitales. Le regard considère maintenant les mutations vidéographiques de l’image comme des percepts du vocabulaire numérique. Nous sommes conscients d’une matière qui a vieilli et qui a donc une histoire. Dès lors, ce qui pouvait se concevoir comme une image « inférieure » en qualité et en sensibilité par rapport au cinéma devient une représentation chargée d’un passé dans lequel nous nous projetons. La trame vidéographique se mêle avec le fil du temps. Elle se targue d’une épaisseur sensible. Elle acquiert son indépendance et s’autorise désormais à outrepasser les prérogatives du cinéma.

Aujourd’hui encore, devant un écran digital en veille, le spectateur perçoit comme une énergie qui couve dans le noir qui palpite. À examiner de près, la pixellisation flotte, en attente d’une excitation lumineuse pour modeler une image. Rien ne vient arrêter le regard. L’œil se perd mais reste soucieux d’une émergence visuelle. À l’inverse du cinéma, théâtre d’ombre, qui projette sa lumière, l’écran numérique est une pénombre productrice d’illuminations. Il se conçoit comme un puits sans fond d’où fusent les images. L’écran digital accueille les incrustations, les transparences, les variations engendrées par les effets

spéciaux les uns après les autres. Comme un livre dont on prend connaissance du contenu page après page, chaque strate s’ajoute à la précédente. Revenir en arrière soulève progressivement le voile sur les potentialités du noir digital.

La structure régulière de la pixellisation électronique ne suggère pas de situation chaotique. Elle se perçoit par notre imaginaire comme une nébuleuse constitutive des images. La lumière numérique provient d’un écran noir d’où surgissent les images comme des émanations d’un univers infini, insondable. La lumière se profile à partir d’un « trou noir » qui par analogie avec l’idée de matière s’imagine en volume. Associée à la pulsation électronique, l’obscurité s’apparente à une matière. Sa conformation est perceptible, quand les images offrent plusieurs niveaux de transparences se confondant les uns les autres.

Les représentations digitales sont natives d’une matrice ténébreuse où nos yeux aiment s’enfoncer par-delà la grille de pixellisation. Ils y errent comme dans la perspective atmosphérique. Des configurations se révélant dans la trame électronique, la grille de pixels correspond à un entrelacement de fibres où se confine l’aura des phénomènes visuels. L’image qui surgit de la nuit digitale se matérialise sous une forme qui n’appartient en propre ni au monde comme il est fait, ni à notre univers personnel tel que nous l’entendons. Elle existe de façon à être vue et perçue comme une entité, que nous pouvons décrire allégoriquement selon une citation de Merleau-Ponty :

« Chaque fois que nous voulons y accéder immédiatement, ou mettre la main sur elle, ou la cerner, ou la voir sans voiles, nous sentons bien que la tentative est un contre-sens, qu’elle s’éloigne à mesure que nous approchons ; l’explication ne nous donne pas l’idée même, elle n’en est qu’une version seconde, un dérivé plus maniable. […] Ainsi il est essentiel à ce genre d’idées d’être ‘voilées de ténèbres’, de paraître ‘sous un déguisement’. Elles nous donnent l’assurance que la « grande nuit impénétrée et décourageante de notre âme » n’est pas vide, n’est pas « néant » ; mais ces entités, ces domaines, ces mondes, qui la tapissent, la peuplent, et dont elle sent la présence comme celle de quelqu’un dans le noir, elle ne les a acquis que pas son commerce avec le visible auquel ils restent attachés. […] Leur texture charnelle nous présente l’absence de toute chair ; c’est un sillage qui se trace magiquement sous nos yeux, sans aucun traceur, un certain creux, un certain dedans, une certaine absence, une négativité qui n’est pas rien, étant limitée très précisément à ces cinq notes entre lesquelles elle s’institue, à cette famille de sensibles qu’on appelle des lumières. Nous ne voyons pas, n’entendons pas les idées, et pas même avec l’œil de l’esprit ou avec la troisième oreille : et pourtant, elles sont là, derrière les sons ou entre eux, derrière les lumières

ou entre elles, reconnaissables à leur manière toujours spéciale, toujours unique, de se retrancher derrière eux parfaitement distinctes les unes des autres, inégales entre elles de valeur et de signification. 183»

Un effet de cristallisation s’ensuit par la combustion des motifs dans la lumière et les couleurs digitales. Pour le spectateur, les images donnent l’impression de devenir tangible au sein de l’immatériel. Elles sont promises à une visibilité dite « tactile » en référence à nos habitudes de perception qui cherchent le contact avec le support de l’image. Nous concevons l’écran numérique non comme un espace de représentation mais comme le lieu de phénomènes. Les couleurs, les motifs et les signes confinés dans la pixellisation digitale se sédimentent ensemble pour constituer une masse vibratile, comme dans les œuvres du britannique Tim Head, qui traite explicitement de la matière du numérique.

Expressivité plastique de la trame électronique

Depuis la fin des années 1990, l’artiste londonien184 se consacre à de grandes projections numériques qui ressemblent à des « tableaux de pixels ». Le mouvement des couleurs est régi par ordinateur à partir d'une palette graphique de seize millions de nuances. Leurs combinaisons s'effectuent en temps réel à partir d’un programme informatique créant chaque seconde une image différente. Une dynamique aléatoire suggère une indépendance des effets chromatiques. L'animation de la trame inspire une impression de vie, qui semble retarder la mise en forme définitive. Les travaux les plus significatifs de Tim Head sont Treacherous

Light (2000) et Illicit Light (2003), réalisés avec le développeur multimédia Simon Schofield, ainsi que Tears of Rage (2008) et Scent (2009) programmés par Paul Harter. Les dimensions des projections des « tableaux de pixels » sont généralement de 480 cm de base sur 360 cm de hauteur.

Lors d’un entretien avec Martin Herbert, l'artiste explique que la trame électronique est un champ d'expression plastique quand elle se synthétise à l'atomisation de ses points.

183 Maurice MERLEAU-PONTY, Le visible et l’invisible (1964), Paris, Tel/Gallimard, 2011, p. 195 ; les citations entre guillemets sont de

Marcel PROUST, Du côté de chez Swann, II, p. 189, NRF/Gallimard, 1926

184 Élève des peintres anglais Richard Hamilton et Ian Stephenson à l'Université de Newcastle-Upon-Tyne de 1965 à 1969, il poursuit sa

formation aux USA à New York comme assistant de l'artiste pop américain Claes Oldenburg, puis il revient à Londres pour suivre les cours du sculpteur britannique Barry Flanagan à la St. Martin's School of Art. Professeur, il enseigne au Goldsmith's College de Londres de 1971 à 1979 et depuis 1976 à la Slade School of Fine Art, University College de Londres.

« Je voulais explorer l’espace électronique de l’écran de l’ordinateur – je voulais isoler les propriétés intrinsèques de l’espace électronique et me débarrasser des éléments que je pensais avoir été empruntés à d’autres moyens. On se retrouve avec quelque chose de purement électronique, qui exploite donc le support au maximum – c’est comme une sorte de Modernisme électronique. L’autre aspect important, c’est qu’un programme qui agit en temps réel soit utilisé ; l’action se déroule en même temps qu’on le regarde, et rien ne se passera deux fois de la même manière.185 »

Tim HEAD, Scent, 2009

Les œuvres de Tim Head séduisent celui qui y discerne une animation chromatique proche de la peinture. Elles jouent avec la mémoire visuelle du spectateur qui projette dans le crépitement des pixels les palettes des peintres impressionnistes, pointillistes et divisionnistes. Continuant de nourrir son examen optique, il y recouvre aussi, près de l'écran, l'abstraction géométrique de Josef Albers, et loin de celui-ci, le fourmillement de signes des toiles de Mark Tobey et de Jackson Pollock. La crépitation numérique se rapproche encore des images

185 Cité dans le site web de l’artiste : http://www.ucl.ac.uk/slade/timhead/texts/mh_xygen.htm; XY GENERATION, Martin Herbert, Two-

Minute Interview, eyestorm, 2000 : “I wanted to explore the electronic space of the computer screen - to isolate the properties that are intrinsic to the electronic space and get rid of the things that I felt were borrowed from other mediums. You're left with something that is purely electronic, so it really uses the medium - it's like electronic Modernism. The other aspect is that it's using a real-time program; it's happening at the time that you're looking at it, and will never do it the same way twice.”

(peintures, photographies, films et vidéos) dont la forte présence du grain participe de leurs esthétiques respectives.

Vibrantes, les projections numériques de l'artiste anglais proposent une picturalité sensible de la matière numérique au plus près du pixel, mais l'abstraction ne domine pas le sentiment esthétique. L'analogie avec l'activité moléculaire des corps vivants est évidente et induit une perception « organique » du mouvement des couleurs dont l'irrésolution et l'instabilité transmettent l’impression d’une nature secrète.

Excité sans cesse, l'œil arrange une logique d'apparition dans les fusions et les conflits entre les nuances et met en perspective leurs scintillements par le moyen de la suggestivité visuelle. Une forme se dégage d'un côté, une vision fugitive s'évanouit d'un autre. Quelque chose survient en réponse à l'imagination et se cristallise dans l'irisation des pixels.