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4. Méthodes d’analyse de la communication non verbale

4.1 L’analyse structurale

Selon Boudon (1968), la notion de « structure » représente un concept obscur, à caractère polysémique difficilement définissable, car elle renvoie à d’autres notions notamment celles de « [...] système, cohérence, totalité, dépendance des parties par rapport au tout, système de relations, totalité non réductible à la somme de ses parties, etc. » (p. 14). L’auteur met en évidence deux types de contextes inhérents à la notion de structure. Le premier dénote le caractère interdépendant des éléments ou souligne le fait que la méthode usitée a pour objectif de décrire l’objet comme un système ; ce contexte se rapporte à une définition intentionnelle.

Le deuxième contexte s’attache à déterminer la structure d’un objet donné par son analyse et peut être considérée comme une définition effective. Cette dernière représente la perspective dans laquelle notre étude se situe. Par conséquent, la situation de thérapie assistée par l’animal est à envisager comme une structure ou système tel qu’appréhendé par le modèle cybernétique (Wiener, 1958) et celui de la théorie générale des systèmes (Von Bertalanffy, 1947/1984). Ces modèles, qui ont par ailleurs évolué pour constituer le modèle systémique, se fondent sur le concept de feedback ou rétroaction, qui implique un processus continu et circulaire. Tout système ou structure est ainsi constitué d’éléments en relation les uns avec les autres, de telle manière que si un élément est modifié, cela engendre une modification des autres éléments.

Ce système perturbé a donc pour objectif de rétablir son équilibre dynamique ou l’homéostasie.

A partir de cette modélisation de la réalité, une approche microanalytique spécifique aux interactions sociales s’est développée, l’analyse structurale, qui rend compte de manière systématique du processus interactionnel en fonction du contexte dans laquelle il se produit et lui donne un sens. L’analyse structurale représente une approche naturaliste des

comportements qui se produisent au sein d’un événement interactionnel entre deux ou plusieurs individus dans le milieu naturel. Au cours de cet événement, par exemple le rituel de salutation, les individus établissent une coordination comportementale complexe et subtile afin de réaliser le but de l’événement, dans l’exemple mentionné la salutation mutuelle.

Chaque individu utilise une communication mimo-gestuelle, posturale et verbale, comprise au sein d’une même culture, et qui lui permet de maintenir une interaction dans l’espace et dans le temps. L’analyse structurale a pour objectif de comprendre la signification de la communication au sein de l’événement interactionnel considéré. Kendon (1982) rend compte de quatre hypothèses constitutives de cette approche :

1. Les individus en interaction créent un système de relations comportementales qui peut être extrait et considéré comme un objet d’étude en soi.

2. Tout item comportemental et toute forme d’action, y compris le silence et l’immobilité, apporte sa contribution au processus interactionnel.

3. La fonction interactive de chaque item comportemental dépend du contexte dans lequel il se produit. Les comportements s’expriment ainsi au sein d’un pattern relationnel qu’il est nécessaire de prendre en compte pour comprendre leur signification.

4. La production de patterns comportementaux, par des individus en interaction, dépend de leur capacité à organiser leur comportement. Cette organisation permet la coordination des comportements interindividuels. Les patterns comportementaux se caractérisent par une structure et une organisation prédictibles.

Antérieure, mais complémentaire à l’approche de Kendon (1982), l’analyse de contexte (Scheflen, 1966) représente une méthode qui considère les patterns de comportement en fonction du contexte dans lequel ils se produisent. L’objectif de Scheflen (1966) est l’étude des processus comportementaux au sein des séances de psychothérapie. Afin de réaliser son objectif, l’auteur a dû s’opposer à l’approche quantitative-atomiste, inadaptée à son objet de recherche, et qui consiste à extraire les variables et à les analyser isolément. Scheflen souligne

« quantitative techniques may tell us about the incidence of components but they will tell us little about meaning functions and reference. In other words, quantification will not allow us to reconstruct ideas of systems, interactions or processes » (p. 265). Selon Scheflen, la notion de contexte se rapporte au cadre de référence que le chercheur choisi pour effectuer son étude, étant donné que chaque composante comportementale peut appartenir à plusieurs cadres de référence. Le résultat de l’analyse de contexte est une description des unités

comportementales qui constituent la structure des interactions et du pattern qui guide l’évolution de ces unités. Les étapes interdépendantes qui permettent de parvenir à cet objectif sont les suivantes :

Première étape : le prélèvement et la description des données de l’interaction au moyen des techniques audiovisuelles.

Deuxième étape : L’analyse des données en termes de patterns récurrents ou d’unités structurales.

Troisième étape : La comparaison des contextes afin d’établir comment les patterns d’action récurrents situés à un niveau inférieur de l’organisation hiérarchique des comportements influencent la nature de ces contextes.

La description de la structure des interactions en termes d’items comportementaux et de patterns représente les résultats de l’analyse de contexte. Une des règles essentielles de l’analyse de contexte et de l’approche structurale est qu’aucun chercheur ne peut déterminer par avance quels aspects comportementaux sont significatifs au sein du processus interactionnel : « We do not decide beforehand what is trivial, what is redondant or what alters the system. This is the result of the research » (Scheflen, 1966, p. 270).

Notre étude est envisagée à partir d’une approche structurale et éthologique. De par ce fait, il nous semble nécessaire de spécifier les similitudes et les différences de ces deux approches, bien que l’analyse structurale ne soit pas encore une méthodologie entièrement formalisée (Kendon, 1982). Le programme de l’éthologie est basé sur quatre objectifs ou questions fondamentales (de Lannoy & Feyereisen, 1987; Tinbergen, 1953) qui portent sur : 1) les causes internes et externes du comportement (causalité) 2) les effets bénéfique du comportement en regard de sa valeur de survie (fonction) 3) le développement et les modifications du comportement (ontogenèse) et 4) l’évolution du comportement en regard de la survie de l’espèce (phylogenèse). L’éthologie, de par sa définition, considère les comportements d’un point de vue adaptatif et biologique en fonction du milieu dans lequel l’organisme évolue ; en outre, elle offre un double apport concernant le comportement, son origine phylogénétique et ses mécanismes de déclenchement La première étape de cette approche est l’observation sans a priori du comportement dans l’environnement naturel.

L’objectif de cette phase est d’émettre des hypothèses qui pourront être vérifiées par la suite avec la méthode expérimentale. Ainsi l’approche éthologique est semblable à l’analyse structurale de par plusieurs aspects primordiaux. A savoir, l’observation du comportement

dans le milieu naturel et sans « a priori » théorique, ainsi que la recherche de structure (patterns) dans l’organisation des comportements. Mais l’analyse structurale diffère d’un point de vue théorique ainsi que Kendon le souligne :

The interest of ethology, […], is ultimately in understanding how behavioural forms can be accounted for by Darwinian evolutionary theory. The interest of structural approach is in the way more narrow. Its concern is to display the structures into which human behavior is patterned and to consider how theses structures function in the construction of interaction events. (1982, p. 465)

L’analyse structurale envisage de fait les interactions sociales humaines en fonction des processus culturels plutôt que dans une perspective biologique ou tout du moins cet aspect n’est pas fondamental dans l’analyse des mécanismes de fonctionnement d’une structure.

Cependant dans notre étude les interactions sociales au cours de la TAA se produisent entre humains et une autre espèce, le chien, il nous paraît donc difficile de contourner l’aspect biologique et évolutionniste quant à l’explication théorique et à la compréhension des mécanismes interactifs et inter-espèces au sein de cette structure.

5. LES CATEGORIES DE COMPORTEMENTS

Les catégories de comportement présentées dans les paragraphes suivants figurent au sein du répertoire de comportement ou éthogramme utilisé dans notre étude pour coder les comportements des protagonistes au sein des séances d’interactions sociales et de la thérapie assistée par l’animal. Outre leur définition spécifiée dans la grille de codage (Annexes IX, X et XI), le sourire, le rire, le regard et les gestes extracommunicatifs sont mis en lumière à partir d’une perspective éthologique, complétée par des apports de la psychologie, voire d’autres sciences humaines.

5.1 Les communicatifs et les extracommunicatifs

Le répertoire utilisé dans notre étude est inspiré de la classification fonctionnelle des comportements humains selon Cosnier (1982). Elaborée à partir d’une synthèse des recherches antérieures (notamment, Efron, 1942/1972; Ekman & Friesen, 1969b; Mahl, 1968), l’auteur classe les gestes en deux méta-catégories, communicatifs et extracommunicatifs. Les comportements extracommunicatifs sont considérés comme « des gestes qui paraissent étrangers à la fois à la communication et à sa stratégie bien qu’ils

surviennent au cours de l’interaction. » (Cosnier, 1982, p. 272). Ils constituent une classe d’éléments hétérogènes qui comprend entre autres, se ronger les ongles, manipuler des objets, se gratter, bouger la langue dans sa bouche, croiser les jambes. En raison de l’importance et de l’impact de cette catégorie de comportement au sein des interactions sociales, ils sont amplement traités dans le chapitre intitulé « les activités de déplacement ». Concernant les comportements communicatifs, Cosnier y intègre les « quasi linguistiques », patterns aptes à garantir une communication sans recours à la parole (par exemple, les emblèmes) et les

« syllinguistiques » exprimés par le locuteur ou l’interlocuteur qui, comme son étymologie l’indique31, accompagnent le discours verbal (par exemple, les illustratifs, les régulateurs et les expressions faciales). Les communicatifs sont en principe des comportements émis de manière intentionnelle et consciente par un individu (émetteur) et destinés à un autre individu (récepteur). Toutefois cette définition n’est pas entièrement satisfaisante, car certains communicatifs non verbaux ne sont pas systématiquement émis de manière consciente, informative et intentionnelle, notamment le regard et les expressions faciales

De par ce constat, Ekman et Friesen (1969b) distinguent de manière pertinente six paramètres concernant la CNV ; le contexte externe, le lien entre le discours verbal et le comportement non verbal, la conscience qui accompagne l’émission du comportement non verbal, l’intention de communiquer, le feedback émis par l’individu qui observe le comportement et le type d’information transmis par le comportement non verbal. Ce dernier paramètre se rapporte aux caractéristiques informatives, communicatives, et interactives des comportements non verbaux. Selon Ekman et Friesen (1969b), les comportements non verbaux informatifs ont une signification comprise et interprétée de manière identique par la plupart des individus, mais ils peuvent être émis sans être intentionnels. Lorsque l’individu émet un message non verbal de manière intentionnelle, c’est-à-dire claire et volontaire (conscient), le comportement devient communicatif, mais le sens qui lui est attribué n’est pas nécessairement partagé par les autres individus (récepteurs). Enfin, les comportements interactifs représentent des gestes non verbaux qui influencent ou modifient les comportements non verbaux interactifs des autres individus. Par opposition, les comportements extracommunicatifs ne sont pas émis de façon intentionnelle et consciente, néanmoins ils ont une valeur informative implicite, c’est-à-dire une signification qui peut être partagée par les conspécifiques, voire par les individus

31 « syl- » tire son origine du grec « sun » qui signifie « avec » ("Le Nouveau Petit Robert", 2000).

d’une autre espèce, par exemple lors des interactions agonistiques (se rapporter aux paragraphes sur les activités de déplacement).

Bien qu’Ekman et Friesen (1969b) considèrent le terme « communicatif » comme étant trop vaste, et par conséquent distinguent les comportements communicatifs des différents types de comportement non verbaux dans l’interaction, nous avons décidé de l’utiliser dans une acception plus large incluant les caractéristiques interactive et informative.

5.1.1 Le sourire et le rire

Les expressions faciales « sourire » et « rire » sont intégrées en tant que comportements communicatifs au sein de l’éthogramme se rapportant aux êtres humains de notre étude. Ils sont considérés comme un signal social communs et fréquents chez l’être humain (Abel, 2002), émis dans des situations sociales de détente comprenant un ou plusieurs individus (de Lannoy & Feyereisen, 1987) : les humains sourient et rient rarement en réponse à des objets inanimés (Provine, 1997) et rient moins fréquemment seuls (Devereux & Ginsburg, 2001).

Alors qu’il y a pléthore de recherches en psychologie sur le sourire et ses fonctions (pour une revue de la littérature se référer par exemple à Hess, Beaupré, & Cheung, 1999), le rire demeure un sujet d’étude peu investigué.

A partir d’une approche éthologique, van Hoof (1972) et plus récemment Preuschoft (1992) mettent en évidence une homologie anatomique entre le sourire et le rire des humains et certaines expressions faciales chez les primates infra-humains, plus spécifiquement le chimpanzé (Pan troglodytes) et le macaque (Macaca sylvanus). D’un point de vue morphologique, le sourire et le rire chez l’humain semblent envisagés sur un continuum (Andrew, 1963) comprenant au moins deux dimensions en fonction des mouvements de la bouche, des lèvres et des vocalisations (van Hoof, 1972) ; le grand sourire (broad smile) et le rire bouche ouverte (wide mouth laugh) représentent les deux extrêmes de ce continuum. La morphologie du sourire est assimilable à celle de l’expression faciale « bouche ouverte, dents découvertes, sans vocalise » (silent bared-teeth display) chez les primates infra-humains qui se produit le plus souvent lorsque l’incertitude d’une situation est surmontée. Selon Campan (1980), « le rictus [« bouche ouverte, dents découvertes »] dériveraient d’une grimace défensive très répandue chez les mammifères, dont la fonction serait d’exprimer un signal de fuite, de frustration ou d’inconfort » (p. 221). Dans une même optique, van Hoof (1972) suggère que cette expression renvoie à une attitude originelle de soumission qui aurait évolué

chez l’humain vers une manifestation d’attachement social ou amical le plus souvent produite dans un contexte non hostile (van Hoof, 1972). Le sourire représente ainsi un signal d’une disposition à l’interaction (de Lannoy & Feyereisen, 1987), mais également un signal d’apaisement (van Hoof, 1962) et de sympathie. Le rictus « bouche ouverte, dents découvertes, sans vocalise » semble ainsi avoir la même origine phylogénétique que le sourire des humains, de ce point de vue, il existerait donc une homologie physique concernant la musculature utilisée (Preuschoft, 1992; Preuschoft & van Hoof, 1995; van Hoof, 1972), voire probablement une homologie neurobiologique (Schmidt & Cohn, 2001). Cependant ces expressions ne sont pas complètement analogues puisqu’elles ne desservent pas les mêmes fonctions sociales chez les humains par rapport aux primates infra-humains.

Le rire

Exprimé à tout âge chez l’humain, le rire correspond à l’expression faciale « bouche ouverte, visage détendu » (relaxed open-mouth), considérée chez les primates infra-humains comme un signal métacommunicatif indiquant une intention de jeu et/ou une simulation d’agression (Andrew, 1963; van Hoof, 1972). A partir de leur étude sur les chimpanzés, Waller et Dunbar (2005) suggèrent que l’expression « bouche ouverte relaxée » renforce les liens affiliatifs entre individus et par conséquent facilite la cohésion sociale similairement au rictus « bouche ouverte, dents découvertes, sans vocalise ». En outre, le rire humain est également envisagé comme homologue de l’expression faciale play face des primates infra-humain (Chevalier-Skolnikoff, 1982; van Hoof, 1972) et d’autres mammifères, comme les rongeurs (Panksepp &

Burgdorf, 1999) ou les canidés (Simonet, 2005). Contrairement au sourire, le rire est accompagné d’une vocalisation ou exhalation et la bouche est grande ouverte (Schmidt &

Cohn, 2001) ; néanmoins ils sont similaires en ce qui concerne la visibilité des dents (Preuschoft, 1992; van Hoof, 1972). Etant donné que le rire ponctue le discours verbal (en principe à la fin d’une phrase) chez l’humain, Provine (1993) émet l’hypothèse de l’existence d’un processus neurologique programmé responsable de l’organisation temporelle du langage et du rire. Il est intéressant de constater que la plupart des rires ne sont pas corrélés avec des contextes humoristiques, comme par exemple les blagues, mais apparaissent tout au long du discours verbal, avec d’autres expressions faciales ou des changements de posture (Provine, 1993). A noter que la fonction du rire est relativement peu connue, malgré son lien avec des situations ludiques chez de nombreux mammifères et plus spécifiquement les primates (Waller & Dunbar, 2005).

Le sourire et sa relation aux émotions

Déjà considéré comme le reflet d’un émotion de plaisir intense par Darwin (1872/1998), le sourire est souvent associé à des émotions positives (par exemple, Cacioppo, Petty, Losch, &

Kim, 1986; Messinger, Fogel, & Dickson, 2001), en ce sens que les humains le perçoivent comme un marqueur de plaisir. Cependant, les affects attribuées au sourire se placent sur un continuum partant d’émotions positives jusqu’aux émotions négatives (Fridlund, 1994)32. Ainsi, et tendant vers le pôle négatif, le sourire peut exprimer de l’embarras (Edelmann &

Iwawaki, 1987), de l’appréhension (Ickes, Patterson, Rajecki, & Tanford, 1982), de l’excitation ou de l’insécurité (Bänninger-Huber & Kaiser, 1989) et représente également un moyen de dissimulation des affects négatifs (Ekman & Friesen, 1982). Toutefois, il ne semble pas représenter un signal polysémique infini, mais converge vers deux interprétations globales, émotionnelle et sociale (Poggi & Chirico, 1998). Ekman et Friesen (1982) distinguent trois types de sourire : le vrai , le faux et le malheureux. Le vrai sourire ou sourire de Duchenne33 apparaît plus souvent lors de situations élicitant des émotions positives et correspond à des activations de régions cérébrales différentes (Ekman, Davidson, & Friesen, 1990) ; ce sourire spontané est activé34 par le muscle zygomatique (zygomaticus major) induisant un étirement des lèvres latéralement vers le haut et par le muscle orbiculaire de l’œil (orbiculari oculi) provoquant des rides en forme de « pattes d’oies » autour de l’œil. Le faux sourire ou sourire social est exprimé de manière délibérée en tant que signal d’apaisement, mais n’est pas corrélé avec des émotions positives. La distinction morphologique entre le vrai sourire et le sourire social se situe au niveau du muscle orbiculaire de l’œil qui n’est pas activé avec le sourire social. A noter que le muscle orbiculaire de l’œil est difficilement contrôlable par l’individu (Ekman, 2003), observation qui dans une perspective évolutionniste revêt tout son sens (Schmidt & Cohn, 2001). Enfin le sourire malheureux peut apparaître lorsque l’individu retient ses larmes et ses cris et de fait est associé à des affects négatifs, comme la tristesse ou le désespoir. Le sourire de Duchenne se distingue ainsi par son aspect morphologique, sa dynamique et sa valeur en tant que signal social (Frank, Ekman, & Friesen, 1993).

32 La point de vue écologico-comportemental de Fridlund est différent de celui d’autres chercheurs tels qu’Ekman et Izard, puisqu’il ne considère pas les émotions comme un facteur causal fondamental à l’origine des expressions faciales. Selon Fridlund (1994), les expressions faciales sont spécifiques à la motivation et au contexte.

33 Duchenne de Boulogne a été le premier anatomiste à décrire ce type d’expression en 1862.

34 Ekman et Friesen (1978) ont élaboré un système de codage des expressions faciales basé sur la musculature du visage (Facial Action Coding System). Les unités d’action (AU) 6 (muscle orbiculaire de l’œil) et AU12 (muscle zygomatique) sont activés lorsque le sourire de Duchenne ou sourire vrai apparaît.

Le contexte représente un paramètre qui influence l’apparition des expressions faciales, et par là même le sourire. Manstead, Fischer et Jakobs (1999) mentionnent quatre facteurs contextuels prépondérants ; premièrement, l’intensité du stimulus émotionnel qui a un effet sur les dispositions motivationnelles sociales (social motives) de l’individu ; deuxièmement le type d’émotion qui influence non seulement ce que l’individu souhaite exprimer émotionnellement, mais aussi ce qu’il désire communiquer socialement (par exemple, la honte s’exprime par une tendance au retrait, alors que la fierté tend à s’exprimer par une communication verbale avec autrui). Troisièmement, les expressions faciales diffèrent selon la fonction qu’elles desservent, le contexte dans lesquelles elles s’expriment et les dispositions motivationnelles sociales qui les sollicitent. Enfin, le rôle ou statut social de l’individu a un impact sur ses émotions et sur ses dispositions motivationnelles sociales. Ces facteurs sont en outre influencés par les display rules (Ekman & Friesen, 1969b) ou normes sociales et culturelles intégrées par les individus au cours de leur ontogenèse et qui déterminent quand et dans quel contexte révéler ses émotions (Ekman & Rosenberg, 1997).

La fonction du sourire

Dans un contexte psychopathologique, le sourire et le rire semblent représenter des indicateurs objectifs de l’évolution des symptômes de patients dépressifs et des affects de personnes souffrant de schizophrénie (Sakamoto, Nameta, Kawasaki, Yamashita, & Shimizu, 1997). Dans le cadre des interactions sociales humaines, le sourire tend à revêtir un rôle de régulation des échanges interindividuels. A partir de leur modèle de l’équilibre de l’intimité (intimacy equilibrium model), Argyle et Dean (1965) postulent que le sourire, le regard et la proxémie représentent des régulateurs de l’intimité. Plus spécifiquement, le sourire est un

Dans un contexte psychopathologique, le sourire et le rire semblent représenter des indicateurs objectifs de l’évolution des symptômes de patients dépressifs et des affects de personnes souffrant de schizophrénie (Sakamoto, Nameta, Kawasaki, Yamashita, & Shimizu, 1997). Dans le cadre des interactions sociales humaines, le sourire tend à revêtir un rôle de régulation des échanges interindividuels. A partir de leur modèle de l’équilibre de l’intimité (intimacy equilibrium model), Argyle et Dean (1965) postulent que le sourire, le regard et la proxémie représentent des régulateurs de l’intimité. Plus spécifiquement, le sourire est un