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CHAPITRE 1 REVUE CRITIQUE

1.2 L’analyse du cycle de vie

1.2.1 Méthode

L’analyse du Cycle de Vie (ACV) est une méthode scientifique, obéissant à des normes ISO (ISO 14040 2006), permettant d’évaluer et de quantifier les impacts environnementaux potentiels générés par un produit ou un service, pendant tout son cycle de vie. Celui-ci inclut les étapes suivantes : l'extraction et la transformation des matières premières, la fabrication, l'emballage et la distribution, l'utilisation et la fin de vie du produit. La méthode est divisée en quatre étapes itératives, tel que présenté dans la figure 1-1. Le projet proposé ici concerne particulièrement les étapes d’inventaire et d’évaluation des impacts.

Figure 1-1 Étapes de l’Analyse du Cycle de Vie

Définition du but de l’étude Analyse de l’inventaire Évaluation des impacts Interprétation

1.2.1.1 But de l’étude

La définition du champ de l’étude est probablement l’étape la plus importante, puisque c’est ici que les frontières du système, l’objectif de l’étude, son application et l’audience visée sont définis. L’unité fonctionnelle, la mesure de la fonction du produit ou service sur laquelle seront basés tous les calculs, est également définie à cette étape.

1.2.1.2 Analyse de l’inventaire

L’analyse de l’inventaire consiste à recueillir les données sur tous les intrants et extrants du système, représentant les ressources extraites de l’écosphère vers la technosphère (faisant partie du système économique), et les émissions depuis la technosphère vers les différents milieux de l’écosphères (eau, air, sol). Cet inventaire est recueilli pour la valeur de l’unité fonctionnelle, pour chaque étape du Cycle de vie du produit ou service évalué. Des bases de données favorisent le travail de collecte de données en fournissant des données d’inventaire pour des milliers de processus industriels. La plus exhaustive est ecoinvent (Frischknecht and Jungbluth 2004). 1.2.1.3 Évaluation des impacts

Le but de l’analyse d’impacts est de comprendre et évaluer l’importance des impacts potentiellement générés sur l’environnement. L’analyse d’impacts caractérise l’inventaire recueilli en impacts en passant par différents modèles permettent de traduire et de regrouper ces données en différentes catégories d’impacts, d’abord à un niveau « Problèmes » ou « midpoints », situé au milieu de la chaîne cause-à-effet, puis à la toute fin de celle-ci, à un niveau « Dommages », ou « endpoint », tel que présenté par la figure 1-2.

Figure 1-2 Caractérisation de l’inventaire en problèmes et dommages en ACV (ILCD handbook (European Commision Joint Research Center 2010))

L’évaluation des impacts en ACV se fait par la multiplication de la valeur d’inventaire par un facteur de caractérisation propre à ce flux élémentaire, résultant en un score d’impact pour une catégorie spécifique, tel que décrit par l’équation 1.1 (Udo de Haes et al. 1999).

Équation 1.1

Où Ij est l’indicateur de la catégorie d’impact “j” (ex : écotoxicité), Mp est la masse de la

substance émise ou extraite “p” (ex : kg plomb) et FCj,p représente le facteur de caractérisation de

la substance “p” pour la catégorie d’impact “j” (ex : Impact écotoxicité/kg plomb). Un FC intermédiaire qui multiplie l’inventaire mène aux impacts au niveau problèmes, qui peuvent normalement être eux-mêmes multipliés par un FC dommages pour aboutir à des impacts à ce niveau.

1.2.1.4 Interprétation

Finalement, l’étape d’interprétation permet aux résultats des étapes précédentes d’être évalués en fonction de l’objectif de l’étude afin de fournir des conclusions et recommandations. De plus, tout au long de l’étude, les résultats sont interprétés pour identifier les contributeurs principaux, effectuer des études de sensibilité et d’incertitudes afin de revenir peaufiner les paramètres les plus critiques de l’étude.

1.2.2 Attributionnelle vs conséquentielle

Une étude ACV sera abordée soit avec une approche attributionnelle, de type comptabilisation, ou alors conséquentielle, qui étudie les conséquences possibles d’un changement entre deux systèmes de produits alternatifs. La distinction entre ces deux approches est importante dans le cadre de ce projet puisque les deux approches sont abordées, les scénarios de compensation présentés en addendum au chapitre 4 et en annexes (3) se référant davantage à l’approche conséquentielle. La différence conceptuelle entre ces deux approches ressemble à la différence entre la comptabilité et la planification financière : en comptabilité, le coût approprié de chaque item est attribué au compte correspondant alors qu’en planification financière un estimé est fait de comment les activités prévues affecteront les coûts futurs. En ACV, cela se traduit par une différence des frontières du système qui incluent uniquement les processus affectés par la décision dans le cas de la conséquentielle, versus tous les processus nécessaires à la réalisation de la fonction pour l’attributionnelle. Bien qu’une ACV attributionnelle n’est peut–être pas la meilleure option dans un contexte décisionnel, les méthodes attributionnelles sont plus souvent utilisées vu les problématiques liées à l’identification des conséquences, et le manque de consensus ou de méthodes permettant de le faire de façon systématique. Aussi, la disponibilité des données reflète davantage les opérations moyennes plutôt que les conséquences d’un changement d’opérations (Weidema 2003).

1.2.3 Sensibilité et incertitudes

Une analyse de sensibilité permet de tester la robustesse des résultats et leur sensibilité aux données, au modèle et aux choix effectués. Il est donc nécessaire d’identifier les paramètres qui ont le plus d’influence sur le résultat (Jolliet et al. 2005). Ceci peut se faire en faisant varier chaque paramètre d’un même pourcentage, et comparer l’incidence sur le résultat : les paramètres les plus sensibles feront davantage varier le résultat. Le paramètre peut également être varié sur la base du minimum et maximum de la donnée, lorsqu’un tel intervalle est disponible, résultant en une sensibilité plus représentative. Finalement, un ensemble entier de paramètres peuvent être variés afin d’évaluer la sensibilité d’un ensemble cohérent de ces choix de paramètres (analyse de scenario) sur les résultats. Ces analyses permettent d’identifier les paramètres et choix qui méritent une plus grande attention de ceux qui peuvent supporter une plus grande incertitude.

Comme tout outil d’aide à la décision, les incertitudes sont rarement considérées en ACV, bien qu’elles puissent être très élevées. Il est important d’évaluer les incertitudes puisqu’elles sont la réelle mesure du progrès scientifique, permettant d’évaluer le progrès d’un modèle à un autre, de quantifier la confiance que nous avons dans nos résultats d’ACV ainsi que de tester l’impact des choix qui sont faits, augmentant ainsi la crédibilité de l’ACV. Les incertitudes peuvent être définies comme les divergences entre une quantité mesurée ou calculée et la vraie valeur de celle- ci (Finnveden et al. 2009). Le problème en ACV c’est que cette « vraie valeur » est souvent impossible à identifier. Ainsi, tel que discuté par Heijungs (2004), la seule validation possible consiste en la validation de chaque étape individuelle, et, assumant que l’agencement de ces étapes suit des règles mathématiques et procédures strictes, on peut espérer que l’ACV en soit sera pertinente. En ACV, les incertitudes proviennent des données, des choix (scénarios) et des relations (modèles).

Une des sources d’incertitude des modèles en ACV est reliée à la variabilité spatiale des impacts. En effet, alors que l’ACV intègre les impacts dans le temps et dans l’espace et que cela peut sembler pertinent pour des catégories globales telles que le réchauffement climatique ou la destruction de la couche d’ozone, il n’en est pas de même pour les autres catégories dont les impacts dépendent de la localisation de l’émission : l’acidification (aquatique et terrestre), l’eutrophisation (aquatique et terrestre), le smog photochimique, la toxicité humaine, l’écotoxicité et l’utilisation des terres (Toffoletto et al. 2007). Les impacts liés à l’utilisation de l’eau sont également certainement très sensibles à une variabilité spatiale vu la grande disparité de la distribution et de l’utilisation de la ressource dans le monde.

1.2.4 Limites de l’ACV

Bien que l’ACV ait connu des développements importants et que plusieurs de ses limites aient été surmontées, quelques unes demeurent, bien que souvent l’objet d’études supplémentaires. Finneveden et collaborateurs (2009) résument bien les principales limites dans leur revue des nouveaux développements en ACV. Elles sont : 1- le manque de données, bien que les bases de données sont en constante croissance, 2- le manque de modèle d’évaluation d’impacts pour certains secteurs, tel que l’utilisation des terres et la ressource eau, 3- les choix possibles et manque de consensus sur certains aspects de la méthode tel que la délimitation des frontières du système et des choix méthodologiques pouvant mener à des conclusions différentes,

4- les incertitudes liées au manque de données et 5- le manque de consensus sur les méthodes de pondération et normalisation.

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