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Développement du cadre méthodologique pour la caractérisation des impacts de

CHAPITRE 1 REVUE CRITIQUE

1.3 L’eau en analyse du cycle de vie

1.3.4 Développement du cadre méthodologique pour la caractérisation des impacts de

Suivant les concepts liés aux ressources en ACV présentés ci-haut, l’eau est définie comme une ressource abiotique qui peut être catégorisée en trois sortes différentes selon son taux de renouvellement : 1- Dépôt/stock (taux de renouvellement pratiquement nul, aquifères non renouvelable), 2- Fond/fund (taux de renouvellement bas, typiquement eaux souterraines) et 3- Écoulement/flow (taux de renouvellement élevé, typiquement eau de surface) (Finnveden 1996; Heijungs et al. 1997). L’utilisation de l’eau amène généralement deux types de problèmes distincts : la compétition pour la ressource dans les conditions actuelles, et l’épuisement de la ressource, causé par une extraction supérieure au taux de renouvellement, ce qui affecte les générations futures (Finnveden 1996; Lindeijer et al. 2002).

Les développements méthodologiques visant à intégrer la ressource eau en ACV ont commencé à prendre forme avec les travaux d’Owens (2002) qui a proposé une série d’indicateurs et de définitions visant à harmoniser les développements futurs. Il propose cinq indicateurs liés à la quantité d’eau : 1- utilisation d’eau in-stream, 2- consommation d’eau in-stream, 3- utilisation d’eau off-stream, 4- consommation d’eau off-stream et 5- appauvrissement de la ressource off-

stream. In-stream et off-stream réferrant à un usage « dans le flot » (ex : eau turbinée) et « hors

du flot » (ex : irrigation), respectivement. Il discute ensuite du potentiel de plusieurs paramètres de qualité de l’eau comme partie d’un indicateur de qualité : eutrophisation, demande biologique en oxygène (DBO), température, microorganismes pathogènes, couleur et turbidité, matières en suspensions (MES), toxicité, toxicité humaine et ecotoxicité.

Des efforts ont ensuite été faits pour intégrer la ressource eau, soit par Brent (2004a) qui propose une méthode d’évaluation pour comparer l’utilisation de certaines ressources d’un point de vue

« distance-à-la-cible » pour le contexte Sud Africain, ou par Bauer et Zapp (2005) qui ont mis en évidence la grande variabilité spatiale de la ressource parallèlement avec les points d’exploitation d’aluminium. Cependant, aucune ne permettait encore de modéliser les mécanismes environnementaux liés à l’utilisation de la ressource.

La UNEP-SETAC Life Cycle Initiative a été mise en charge d’examiner les problèmes liés à la consommation de ressources telles que l’utilisation des terres et de l’eau. Dans sa première phase, le projet a abouti à une série de recommandations concernant l’évaluation des impacts liés à l’eau, non publiées mais résumées dans Bayart et collaborateurs (2010b) : i- la méthode d’évaluation devrait être régionalisée en fonction du contexte hydrologique, ii- l’usage consommant de l’eau (différence entre l’eau prélevée et rejetée) génère des impacts en abaissant les niveaux d’eau et en privant les autres usagers de la technosphère et de l’écosphère de la ressource, iii- une série de types d’eau y est décrite, iv- l’épuisement de la ressource peut être considéré comme un problème alors que les impacts sur la santé humaine et les écosystèmes seraient plutôt des dommages, v- la catégorie de dommage sur les ressources peut ne pas être considérée si les impacts sont modélisés jusque sur la santé humaines et les écosystèmes, vi- une chaine cause-à-effet devrait décrire les impacts sur la santé humaine causés par l’utilisation d’une ressource de moins bonne qualité pour les usages domestiques et l’agriculture et vii- les impacts de la compensation de la production alimentaire et ceux sur la biodiversité causés par le desséchement et la perte d’habitat devraient aussi être inclus.

La deuxième phase du projet de la Life Cycle Initiative, appelé Assessment of use and depletion

of water ressources within the LCA Framework (WULCA) a ensuite abouti à la publication d’un

cadre d’étude pour l’évaluation de l’utilisation off-stream de l’eau douce en ACV (Bayart et al. 2010a). Les auteurs y proposent une terminologie, bâtie sur celle d’Owens (2002), définissant les usages dégradatifs - baisse de la qualité - et consommants - transfert d’eau à l’extérieur d’un bassin versant, par évaporation, intégration au produit ou transfert à la mer ou ailleurs en plus de la compétition - lorsque la disponibilité de l’eau est trop faible pour combler les besoins de tous les usagers – et de l’épuisement de l’eau douce – comme étant la réduction nette de la disponibilité d’eau douce dans un bassin versant pour une période donnée. Des recommandations y sont faites concernant l’inventaire lié à la ressource eau. Ils proposent que les flux élémentaires représentent différents types d’eau, chacun avec son propre facteur de caractérisation. Les types

d’eau devraient être distingués par le type de ressource (surface, souterraine, etc.) et la qualité. Cette dernière pourrait être prise en compte soit par une approche « distance-à-la-cible», exprimé en volume d’eau équivalent pour une dilution ou en énergie nécessaire au traitement, ou par une approche basée sur les fonctionnalités, utilisant des standards de qualité établis par des organismes internationaux (Svobodová et al. 1993; WHO 2008; WHO and UNEP 2006). Ils recommandent que le volume d’eau remis à l’environnement soit considéré.

Bayart el al. (2010b) recommandent également trois chaines cause-à-effet décrivant les impacts liés à une utilisation d’eau douce. Ils proposent qu’une utilisation d’eau réduira la disponibilité de la ressource pour trois « sujets à protéger » (ou AoP pour areas of protection) : les usages humains, les écosystèmes et les générations futures. Ces chaines cause-à-effet sont cohérentes avec les recommandations de Stewart et Weidema (2006), qui proposent que le fait d’utiliser de l’eau et de priver d’autres usagers, pouvant causer des impacts par exemple sur la santé humaine, constitue une chaine cause-à-effet en soi, et devrait être adressé de façon additionnelle à l’impact généré sur la ressource même. Le cadre méthodologique incluant ces différentes chaines de cause-à-effet est présenté dans la figure 1-3 ici-bas.

Parmi les usagers humains identifiés (usagers domestiques, agriculture, industrie, transport, pêches, loisirs et hydroélectricité) seuls ceux affectés par un manque d’eau qui leur est fonctionnelle doit être considéré. Par exemple, une eau souterraine n’est pas fonctionnelle pour le transport par bateau, et la qualité est également un facteur qui influe sur la fonctionnalité. La baisse de disponibilité pour ces usagers peut alors entrainer deux scénarios, selon les conditions socio-économiques locales: le manque ou la compensation. Un manque d’eau pour les usagers domestique et agricole engendrera des maladies et de la malnutrition respectivement, et l’intensité de ce manque d’eau devrait être évaluée en fonction de la rareté d’eau locale et de sa qualité. La compensation fait référence à l’utilisation d’une backup technology telle que décrite plus haut et des scénarios génériques sont proposés pour chaque usager.

Figure 1-3 Cadre d’étude présentant les chaînes cause-à-effet proposé par Bayart et collaborateurs pour les impacts d’une utilisation d’eau en ACV (adapté de Bayart, Margni, et al., 2010)

Sans directement suggérer une voix d’impact pour la chaîne cause-à-effet sur les écosystèmes, ils proposent un indicateur au niveau problèmes exprimés en m³ d’eau non disponibles pour les écosystèmes et pointent vers diverses méthodes qui ont entrepris de modéliser certains aspects de cette chaine (Humbert and Maendly 2009; Milà i Canals et al. 2009; Pfister et al. 2009; Van Zelm et al. 2008). Finalement, ils discutent également d’une troisième catégorie d’impacts sur les générations futures causés par l’épuisement de la ressource par une consommation supérieure au taux de renouvellement de la ressource, menant à des impacts sur la catégorie de dommage « ressources naturelles » bien que l’existence de celle-ci soit discutable en ACV (Bayart et al. 2010b; Stewart and Weidema 2006). Ultimement c’est également par l’utilisation d’une backup

technology que la quantité d’eau épuisée sera comptabilisée dans cette catégorie avec, par

exemple, la quantité d’énergie supplémentaire nécessaire à l’extraction de la ressource, ultimement le dessalement d’eau de mer pour la ressource eau. Alors que ce cadre permet de canaliser les efforts de développement dans la même direction, il manque encore une méthode

Inventaire Attribution de la fonctionalité Agriculture Energie Industrie Transport Loisirs Aquaculture Domestique Privation d’eau pour les écosystèmes Épuisement de la ressource Privation d’eau pour les usages

humains

PROBLÈMES DOMMAGES INVENTAIRE

Choix entre privation d’eau ou compensation (basé sur un paramètre socio-économique)

Choix entre modélisation au niveau problèmes ou dommages

Vie humaine Santé humaine Travail Environnement Biotique Production biotique Biodiversité Environnement Abiotique Environnement abiotique naturel Ressources abiotique Environnement anthropique abiotique Inventaire des processus de compensation

d’inventaire qui permettrait de supporter une telle méthodologie, et les chaines de cause-à-effet restent à être modélisées.

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