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Première partie : Le Pastoralisme à l’épreuve des politiques publiques

Chapitre 2: Cadre théorique et méthodologique

III. La méthode de recherche

3. L'analyse des données

Cette deuxième étape de l’analyse a consisté à extraire du matériau tous les objets de débats, les points de différences et les différends entre les membres de chaque campement. Il s'agissait d'une part, de répertorier les débats et, d’autre part, de distinguer d’entrée de jeu ce qui nous posait question par rapport à la problématique du rapport au changement des éleveurs. Cela nous a permis de repérer les différences relevées dans les pratiques par rapport à celles décrites dans la littérature technique sur le pastoralisme et celles identifiées dans nos expériences passées de terrain. L'identification et l’organisation des points de débat est une étape décisive qui évite la présentation des résultats suivant une typologie simpliste par site, ou par saison. Les effets de sites et de saisons apparaîtront explicitement en filigrane dans les grands thèmes synthétiques identifiés. Ces grands thèmes sont donc définis empiriquement à partir de la problématique du rapport au changement. Ils portent sur : la conduite du troupeau, le système économique, l'ancrage au mode de vie pastoral, les éleveurs et les institutions.

88 Chaque grand thème couvre plusieurs objets d’analyse qui seront étayés dans la présentation des résultats. Nous avons identifié des profils d’éleveurs qui se dégageaient sur les trois sites.

Ce travail permet de comprendre les principes d’action qui guident les éleveurs dans leur choix de pratiques et d’orientation de leur système de vie et de production, à partir de données factuelles, de visions différenciées de l’élevage.

Les trois sites ayant des singularités, il est possible de faire une analyse site par site et de les comparer. Bien que plus simple, cette démarche n'est pas pour autant la plus pertinente pour cerner globalement le rapport au changement des éleveurs. Toutefois, nous avons prêté attention à des grandes tendances de changement internes à chaque campement. Cette démarche met en lumière les effets de structures et de sites qui ne sont pas négligeables. A côté des effets de site, il y a aussi les effets de saison, étant donné que le recueil des données s’est fait en deux temps. Mais ces effets saisonniers n’ont pas structuré l’analyse car les saisons représentent une donnée du contexte parmi d’autres, que les éleveurs intègrent.

Conclusion

Inscrire notre problématique de recherche ainsi que notre démarche dans des cadres théoriques connus était l'objectif de ce chapitre.

Nous avons tour à tour interrogé notre objet en nous référant aux réflexions dans le champ de la recherche sur les identités sociales et professionnelles, l'action collective, le mouvement social, et les méthodes de recherche en sciences sociales.

Certains apports des théories sociologiques de l'identité sont identifiés. Du point de vue fonctionnaliste, l'identité est le fruit des socialisations ou résulte d’une incorporation d'un habitus. Cette conception réduit partiellement le rôle des structures sociales à la reproduction de l'ordre social. L'approche qui remet le plus nettement en question ces points de vue met en relief l'incomplétude de la socialisation, développée en partie par Peter Berger et Thomas Luckmann ; cette approche insiste sur le rôle important joué par l'acquisition de savoirs par les individus déjà socialisés pouvant induire des changements dans les caractères institués par ces socialisations. Ce détour théorique a été bénéfique pour mesurer la portée d'une théorie qui synthétise et propose une acception de la construction des identités en puisant dans tous les points de vue des acteurs. Il s'agit de la définition de Dubar, pour qui l'identité est le résultat d’interactions entre dimensions biographiques et relationnelles de la vie des individus, point de vue dans lequel nous tentons d'inscrire notre compréhension de l'identité sociale et professionnelle des éleveurs.

89 Cette perspective théorique permet de centrer notre analyse sur la diversité des formes identitaires et leurs dynamiques, car les logiques qui déterminent les conduites d’élevage varient d’un éleveur à un autre, même si les contraintes et les opportunités semblent les mêmes.

Ce n’est pas la diversité en soi des formes identitaires qui nous intéressait, mais le repérage des positionnements et leur signification en termes de conception de métier et plus largement de changement social. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes référée à Touraine, qui relie dans son cadre d’analyse les revendications identitaires et la capacité à se constituer en acteur de développement.

Ce cadre théorique ainsi présenté a guidé notre regard et facilité notre choix du dispositif de recherche pour appréhender le rapport au changement. Nous avons été guidée tout au long de la recherche par ce fil directeur théorique.

S'agissant des outils utilisés pour questionner notre objet de recherche, l'entretien et l'observation ont été utilisés. Ainsi, nous avons approché notre terrain en repérant les espaces porteurs et constitutifs de dynamiques de changement. Ces « lieux » d'interaction sociale appelés "monde" en référence à Becker (1988) ont été investis avec un regard que nous avons voulu distancé. Ceci nous a conduit à enquêter dans le monde des institutions publiques du secteur de l'élevage, dans le monde des organisations d'éleveurs et enfin dans le groupe professionnel des éleveurs du Ferlo. Les résultats tirés de ces enquêtes et l'analyse que nous en faisons sont traités dans la deuxième partie de thèse.

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Deuxième partie : Le développement de