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L’alignement des bandes et les transitions directes et indirectes

Le tableau 1.3 montre les décalages de bande de valence entre chaque binaire mesurés expérimentalement ou évalués numériquement, tel que rapporté par Vurgaftman (7). Tou- tefois, les écarts observés entre ces valeurs vont de 140 à 260 meV et une telle différence en énergie montre trois choses. D’abord, qu’il est difficile de mesurer l’alignement des bandes directement. Ensuite, que l’interprétation des mesures peut être problématique. Enfin, que les méthodes numériques ne convergent pas. En analysant chaque étude, Vurgaftman propose une valeur représentative d’alignement relatif entre ces binaires. De plus, certaines valeurs ne sont tout simplement pas disponibles puisque l’étude de ces matériaux n’a pas été faite, ou alors, les résultats ne permettent pas d’en tirer une conclusion. En posant la position absolue de la bande de valence de l’InSb à 0 eV, les autres binaires se positionnent par rapport à celle-ci (voir la figure 1.4). La figure 1.4 montre qu’en fabriquant une hété- rostructure GaAs/InAs/GaAs, celle-ci aurait une recombinaison directe (type I) puisque les porteurs se trouveraient dans l’InAs. Pour une hétérostructure GaSb/InAs/InAs, il

- VBO mesuré/calculé (eV) VBO suggéré (eV) GaAs/InAs 0.1 - 0.35 0.21 GaAs/GaSb - - GaAs/InSb - - InAs/GaSb 0.43 - 0.59 0.56 InAs/InSb 0.84 - 1.1 - GaSb/InSb -0.08 - 0.16 0.03

Tableau 1.3 – Décalage de bande de valence entre le GaAs, InAs, GaSb et InSb mesuré ou calculé et la valeur suggérée par Vurgaftman (7).

s’agirait de recombinaison de type III : les électrons dans l’InAs à une énergie inférieure que celle des trous du GaSb. Enfin, une combinaison GaSb/InSb/GaSb serait de type I, mais en ajoutant de l’arsenic dans l’InSb, il serait possible de faire passer la bande de valence sous celle du GaSb, et ainsi produire une recombinaison type II.

Figure 1.4 – Position relative des bandes des binaires en utilisant les valeurs suggérées de VBOGaAs = -0.80 eV, VBOInAs = -0.59 eV, VBOGaSb = -0.03 eV et VBOInSb = 0 eV

(7).

Expérimentalement, la difficulté d’observer directement le passage d’un binaire à l’autre réside dans le fait qu’il est pratiquement impossible d’obtenir une hétérostruc-

ture composée de deux binaires de haute qualité. Le duo le plus simple à produire est l’InAs/GaSb puisque le paramètre de maille est similaire. D’ailleurs, l’écart des valeurs répertoriées n’est que de 140 meV, le plus faible parmi tous les duos. Pour les autres paires, la différence de maille est telle que le matériau ne peut pas croître sans relaxer. L’action de relaxer signifie que la contrainte élastique, entre la structure du matériau hôte et de celle du matériau en surface, est suffisamment grande pour que la structure en sur- face se déforme pour s’accommoder à celle du substrat. Les mesures sur un matériau où l’interface est pratiquement la couche elle-même, ne peuvent que donner des résultats peu concluants puisque l’hétérojonction est la région la plus difficile à contrôler d’un point de vue de croissance. Le tableau 1.4 et la figure 1.5 montrent qu’en comparant la différence de maille relative f (asubstrat−acouche

acouche ) de chacune de ces paires avec celle du Si0.6Ge0.4 sur

Si, l’épaisseur critique est atteinte après quelques monocouches pour tous les couples de binaires (à l’exception du GaSb/InAs). Lorsque cette épaisseur est atteinte, le matériau

- f InAs/GaAs -0.06686 GaSb/GaAs -0.07261 InSb/GaAs -0.1275 GaSb/InAs -0.00617 InSb/InAs -0.06499 InSb/GaSb -0.05919 Si0.6Ge0.4/Si -0.01644

Tableau 1.4 – Différence de paramètre de maille relative (f) entre les différents binaires et le système Si0.6Ge0.4/Si.

La figure 1.5 montre l’épaisseur critique, en fonction de la différence de paramètre de maille relative, selon le modèle de Matthews et Blakeslee (49). Ces prédictions théoriques et ce qui est observé expérimentalement ne concordent pas exactement, comme le montre la figure. En effet, les auteurs ont mesuré expérimentalement une épaisseur critique de

Figure 1.5 – Épaisseur critique d’une couche épitaxiale en fonction de la valeur abso- lue de la différence de paramètre de maille relative (f) selon le modèle de Matthews et Blakeslee (49).

9 nm, alors que le modèle prédit 2 nm. La croissance, contrairement à la théorie, n’est pas parfaitement uniforme et peut être marquée par des changements très localisés qui permettent à la structure de relaxer partiellement. Cette relaxation permet à la couche de croître davantage et donc d’atteindre une épaisseur plus grande que celle prédite avant de complètement relaxer. De manière générale, la figure 1.5 permet d’évaluer l’épaisseur minimale à laquelle pourrait avoir lieu la relaxation.

Puisque les couples de binaires ont une grande différence de paramètre de maille, la majorité des études portent sur des alliages, où la croissance peut atteindre des dizaines ou des centaines de monocouches sans relaxation de la structure. Cependant, l’alignement de bande est entre l’alliage et le binaire, et le décalage entre les binaires se trouve par extrapolation. La manière de faire cette extrapolation demande donc une réflexion sur la relation du paramètre de courbure avec les bandes de valence et conduction. Aussi, les effets de contraintes doivent être considérés, mais le formalisme de Pikus et Bir (50) (celui- ci sera élaboré au prochain chapitre) s’avère très efficace pour évaluer cette contribution énergétique.

En se référant à la figure 1.4, il est clair qu’en passant du GaSb à l’InAs, il y aura une transition de recombinaison type I vers type II. La composition d’indium et d’arsenic, où celle-ci se produit, n’est cependant pas triviale à identifier et dépend de la position prédite des bandes, parfois de manière arbitraire. D’ailleurs, plusieurs publications axées sur les dispositifs titrent une configuration de type II (39, 51–53) ou de type I (25, 32), parfois sans justifications.

Toutefois, Edamura et coll. (54) ont affirmé observer optiquement cette transition dans une étude fondamentale. Selon leurs mesures, la transition se produit à une composition x = 0.30 et y = 0.10 - 0.15. Cependant, la croissance se fait à un rapport d’éléments V/III élevé et possiblement variable (le chapitre 5 couvrira cette dépendance), ce qui peut avoir une forte influence sur l’incorporation. Aussi, la mesure d’arsenic, faite par microsonde de Castaing, suppose une composition de 30 % d’indium sans l’avoir mesuré en l’absence d’arsenic. De plus, les coefficients de courbure utilisés pour prédire l’énergie de bande interdite du quaternaire datent de 1985 et sont très différents des valeurs plus récentes de Vurgaftman. Enfin, les calculs ne tiennent compte ni du confinement, ni de la contrainte. Les mesures expérimentales montrent une signature de la transition, mais il n’est pas clair que les compositions mentionnées soient fiables. Néanmoins, cette étude reste le point de départ de l’observation de la transition de type I vers type II, mais les compositions x et y restent à corroborer.