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3 Dictionnaires pédagogiques de l’anglais

3.3 L’aide à la production

3.3.1 La recherche d’un vocable à partir d’une idée

L’un des problèmes cruciaux, lorsqu’un apprenant cherche à composer un texte, est de trouver la correspondance entre le sens, l’idée qu’il veut exprimer, et un vocable qu’il ne connaît pas. Le classement alphabétique empêche tout regroupement de vocables par thème, ce qui rend le passage du sens au texte très délicat. Pour évaluer l’utilité des monolingues anglais pour apprenant, Bogaards (1996) se propose de trouver la traduction en anglais de 27 vocables n’appartenant pas aux 2 000 vocables les plus fréquents et faisant partie de phrases exprimant des préoccupations de tous les jours. Pour cela, il essaye de trouver les chemins qui mènent aux vocables en question à partir de synonymes, d’hyperonymes ou de méronymes. A la pratique, il s’avère que le nombre de vocables dont la traduction trouvée est considérée comme satisfaisante est compris dans une fourchette allant de 9 (COBUILD) à 13 (LDOCE). Par exemple, il n’a pas été possible de trouver la traduction de délicieux, à partir de good par exemple, ou mécanicien à partir de work, job, profession ou to repair. Il est parfois possible de trouver la traduction à partir des illustrations : c’est le cas pour évier, sink, que l’on trouve dans la page consacrée à la cuisine dans LDOCE mais pas dans la figure de CIDE. Et encore faut-il savoir qu’une telle illustration existe, n’étant pas référencée dans l’entrée kitchen de LDOCE. Par contre on trouve les parties de voiture comme brakes ou exhaust pipes dans les illustrations de voitures. On remarque ici l’utilité de ces illustrations pour la production, ce qui explique en partie le faible score obtenu par COBUILD qui n’en possède aucune.

Le taux de réussite, moins de la moitié des tentatives ont été un succès, peut être considéré comme suffisamment bas pour ne pas inciter les apprenants à utiliser les monolingues. Ils se tourneront alors vers le bilingue. C’est ce qu’indique Atkins et Varantola (1997), où 81 % des utilisateurs consultent le bilingue pour une traduction en L2 contre 19 % qui utilisent le monolingue (et encore, certains ont commencé par le bilingue pour trouver les candidats, puis sont passés au monolingue pour avoir plus de précision). Tels qu’ils sont conçus actuellement, les dictionnaires monolingues pour apprenant sont donc insuffisants pour passer du sens au texte. Notons que les dictionnaires semi-bilingues se tirent plutôt bien de l’épreuve grâce à un index qui permet de passer d’un vocable en L1 en sa traduction en L2. Avec le Password de Kernerman, il a été possible de trouver 24 des 27 items du test de Bogaards, les échecs étant dus aux collocations et à un vocable, deliberation, qui ne s’y trouvait pas.

Le Longman Language Activator (LLA) est présenté par ses auteurs comme le « premier dictionnaire au monde pour la production » et diffère dans sa présentation des entrées de tous les autres dictionnaires. Il répertorie les thèmes de la langue (answer, attention, important, out, etc.) qu’il classe par ordre alphabétique puis, pour chacun d’eux, fait l’inventaire de toutes les idées qui viennent à l’esprit à partir de ces thèmes et donne les vocables, avec définitions et exemples, qui les expriment. Cette présentation semble a priori séduisante et utile. Pourtant, à l’usage, les résultats obtenus sont du même ordre qu’avec les autres monolingues (11 traductions satisfaisantes trouvées). Pourtant, un examen de ces traductions montre que celles qui ont été trouvées correspondent surtout à des termes abstraits, comme deliberate, compromise ou

négotiate qui n’auraient pas pu être découvertes avec les autres dictionnaires, tandis que la recherche des traductions pour des vocables plus concrets mène à l’échec. Il semblerait donc que LLA soit à améliorer pour les vocables concrets, notamment par l’ajout d’illustrations qui ont prouvé leur utilité dans les autres dictionnaires.

3.3.2 Les synonymes

Même si l’apprenant a trouvé le vocable censé exprimer son idée, il peut s’interroger sur sa justesse : « Exprime-t-il vraiment ce que je veux dire ? », « N’y aurait-il pas des vocables plus précis parmi les synonymes ? », « Ne faudrait-il pas un vocable plus neutre, moins négatif, moins véhément ? » En d’autres termes, il lui faut, dans un premier temps, examiner les différentes possibilités qui se présentent pour démasquer les candidats, puis comprendre les différences, parfois subtiles, entre eux pour pouvoir retenir le plus adéquat.

Nous avons vu plus haut qu’il n’était pas toujours aisé de trouver des synonymes ou des vocables reliés par d’autres relations sémantiques. Les renvois ne sont pas systématiques, peu nombreux, la relation n’est pas toujours clairement exprimée. Les réseaux sémantiques apparaissent différents d’un dictionnaire à l’autre et ne présentent pas tous la même densité et la même qualité. Dans certains cas, voir Bogaards 1996, les définitions auxquelles on accède par les renvois ne sont pas suffisamment précises pour distinguer les nuances entre deux entrées. Grâce à ses nombreux renvois, COBUILD présente a priori plus de facilité pour les apprenants. Assez étonnamment, Bogaards relève des renvois qui n’aboutissent à aucun vocable. C’est le cas de natter qui indique chinwag comme synonyme, chinwag n’étant pas une entrée du dictionnaire. Il faut tout de même rappeler que la masse d’informations contenue dans un dictionnaire est telle que l’erreur n’est pas toujours évitable. Mais revenons à la recherche de synonymes. L’étude de Harvey et Yuill (1997) nous éclaire sur ce point. Il faut signaler toutefois qu’elle porte sur la première édition de 1987 du COBUILD, ce qui empêche d’établir des conclusions définitives sur l’édition de 1995, celle-ci ayant quelque peu évolué notamment dans le domaine des synonymes. D’après cette étude, le taux de réussite n’est que de 64 %, 53 % des synonymes ayant été trouvés facilement, en utilisant la colonne supplémentaire, et 11 % avec difficulté, principalement en examinant les définitions. Cependant, le fait de trouver les synonymes n’est pas le but final d’une consultation lors d’une tâche de production. Il reste à savoir si ceux-ci sont adéquats. Et là, il apparaît clairement que les apprenants ont une confiance toute relative dans les synonymes indiqués dans COBUILD 1987. En effet, seulement 34 % des synonymes trouvés dans le dictionnaire

ont été utilisés dans les compositions. Les apprenants ne considèrent pas forcément une recherche comme réussie dès lors qu’elle aboutit à un synonyme. 44 % des recherches infructueuses avaient permis de recenser des synonymes dans la colonne supplémentaire et 33 % un hyperonyme. La principale raison de cette désaffection semble être le manque d’informations suffisantes, en particulier le contexte d’emploi du synonyme. De ce fait, les apprenants sont obligés d’aller consulter l’article qui lui est consacré et rien n’indique qu’ils soient disposés à le faire. Cette méfiance est pourtant justifiée puisque les apprenants ont tendance à mal utiliser ces synonymes, c’est-à-dire qu’ils les emploient dans des contextes non appropriés d’un point de vue syntaxique, sémantique ou stylistique.

3.3.3 Les informations grammaticales

De par l’importance de la grammaire dans l’enseignement des langues ces dernières décennies, les informations grammaticales occupent un espace relativement important dans les dictionnaires pour apprenants. Les utilisateurs ont en effet besoin, plus que les natifs, d’être dûment renseignés sur ce point afin de s’exprimer correctement. Chaque dictionnaire a son système de notation, plus ou moins clair, faisant plus ou moins appel à des notions qui posent parfois des difficultés telles que la transitivité ou l’intransitivité. L’apport le plus significatif est celui de COBUILD dont les définitions sous forme de phrase font clairement apparaître les structures syntaxiques sans pour autant contraindre le lecteur à aller chercher la signification de tel ou tel code. Notons que ce procédé permet en outre, surtout en compréhension, de rester dans le même niveau de lecture : du texte, l’utilisateur passe aux phrases du dictionnaire et évite ainsi le métalangage des codes grammaticaux. COBUILD n’évite pas pour autant les codes car il n’est pas toujours possible de déduire toutes les informations des définitions ou des exemples. Par exemple, COBUILD, qui possède le système de description grammaticale de loin le plus riche, est le seul à faire la distinction entre adjectifs gradués (graded) et non gradués, c’est-à-dire pouvant être notamment accompagnés par des adverbes (assez chaud ou assez froid, mais pas assez absent). Mais pour à revenir à l’influence des codes, l’étude de Harvey et Yuill (1997) est éloquente sur ce point. Une grande majorité des apprenants localisent les informations grammaticales non pas dans les codes qui, chez COBUILD, sont disposés dans la colonne supplémentaire, mais dans les exemples et dans un moindre degré, dans les définitions. La colonne supplémentaire n’est pas en cause puisqu’elle est tout à fait utilisée pour la recherche des synonymes. Ainsi, seulement 9,8 % des recherches fructueuses ont tiré l’information grammaticale des codes de cette colonne. Il n’est pas possible de connaître l’influence des trois autres dictionnaires sur l’aide grammaticale qu’ils apportent, mais pour le COBUILD, le taux de réussite est élevé : dans 76 % des cas, l’information a été trouvée facilement et dans 14 % des cas, même si elle s’est heurtée à plus de difficultés, la recherche a été fructueuse. Les échecs sont dus à une insuffisance d’information (5,6 %), au vocable qui n’était pas dans le dictionnaire (2,8 %) et à l’entrée qui n’a pas été comprise (1,4 %). Si l’on se fie à cette étude, COBUILD présente un bilan plutôt satisfaisant.

3.3.4 Les fréquences et les registres

Signalons enfin deux derniers éléments d’informations qui peuvent guider l’apprenant à mieux choisir son vocable : la fréquence et le registre, ce dernier abordant les problèmes de pragmatique.

L’apport des corpus a contribué de manière notable à la généralisation des indications de fréquence. L’apprenant est ainsi informé de l’utilisation réelle d’une entrée et peut en mesurer, par exemple, son côté démodé ou au contraire dans le vent. Assez étonnamment, OALD et CIDE ne donnent pas cette indication tandis que COBUILD applique systématiquement une échelle de 0 à 5 diamants (pour les plus fréquents) et LDOCE, moins régulièrement, fait la distinction entre l’écrit et l’oral.

Tous les dictionnaires font la distinction entre l’emploi formel ou informel d’un vocable. COBUILD va plus loin dans ces distinctions en appliquant des registres plus spécialisés tels que journalism, legal, literary, offensive, old-fashioned, spoken, written, etc.