Permaculture Réseau français de
3. La honte et la culpabilité d'avoir recours à des pratiques qui sont mal vues
2.1.4 L’agriculture de conservation francilienne, un mouvement d’ampleur
L’agriculture de conservation est pratiquée en ÎledeFrance. En effet, les deux principales associations promouvant cette agriculture sont présentes : BASE (Biodiversité, Agriculture, Sol et Environnement) et APAD (association pour la promotion d’une agriculture durable). BASE est présente en ÎledeFrance depuis 2015 ; son président, un agriculteur bio, est installé en Essonne. Le fait que l’association ait un président à la fois en AB et en AC témoigne du caractère hybride de ces deux modes de cultures. L’APAD, de son côté affiche deux objectifs59 : accompagner la dynamique
des agriculteurs en groupes et faire (re)connaître l’agriculture de conservation des sols. Les Yvelines, l’Essonne et la SeineetMarne sont couverts par l’APAD Sud bassin parisien, qui comprend aussi l’EureetLoir et le Loiret, tandis que le Val d’Oise fait partie de l’APAD Picardie. L’ÎledeFrance ne possède donc pas sa propre déclinaison régionale, mais est bien couverte par l’association.
La présence de l’APAD et de BASE prouve que l’ÎledeFrance est un espace où l’AC est en train de se développer et de se structurer, ces structures n’étant présentes que sur les espaces où l’AC est installée (cf. chapitre 1.2). Ce dernier point est essentiel, car si un type d’agriculture est pratiqué sur un territoire mais que les agriculteurs ne possèdent pas de structures de référence et d’encadrement technique, son développement sur le long terme risque d’être compromis ou, tout du moins, délicat (Darré et al, 1989, Ansaloni et Fouilleux, 2006). Au contraire, en se présentant comme des plateformes d’échange, les associations de promotion de l’AC affirment permettre aux agriculteurs de discuter de leurs pratiques, de se regrouper et de parler de leurs problèmes techniques, mais aussi de donner de la visibilité à leur mouvement et ainsi lui conférer une dimension plus importante, à la fois par rapport aux autres agricultures et par rapport aux décideurs locaux.
A partir des données statistiques mises à disposition par le Ministère de l’Agriculture sur le site DISAR60, basé sur le Recensement Général Agricole (RGA) de 2010, et en s’appuyant sur le travail de
François Laurent (2015,) un premier tableau a été construit (tableau 4). Selon ces données, les techniques de conservation des sols et le semisdirect couvrent 40% de la SAU francilienne. En revanche, seuls 12% de la SAU gardent un couvert végétal tout au long de l’année, et moins de 4% conservent les résidus des cultures précédentes. Autrement dit, les agriculteurs franciliens sont nombreux à adopter partiellement l’AC, mais assez peu à s’en emparer totalement. Déclinée au
59https://apad.asso.fr/index.php/lapad/apadassociationnationale 60https://stats.agriculture.gouv.fr/disarweb/
2ème partie
niveau départemental, la même logique se retrouve. Les Yvelines apparaissent comme le département où l’AC est la moins présente, tandis que la SeineetMarne et le Val d’Oise ressortent comme légèrement supérieurs à la moyenne régionale.
Département TCS et SD Couvert végétal Résidus
ÎledeFrance 40% 12% 4% SeineetMarne 44% 14% 4% Essonne 33% 12% 5% Yvelines 33% 5% 3% Val d’Oise 43% 14% 6% Tableau 21 : proportion de SAU selon les techniques de conservation des sols (DISAR, RGA 2010) Pour mieux visualiser la répartition géographique de l’AC en ÎledeFrance, il est nécessaire de créer un indice synthétique regroupant les trois techniques de l’agriculture de conservation. En suivant la méthodologie donnée par Laurent (2015), l’indice synthétique suivant a été utilisé : Ind_synth= Ind_TCS_SD + Ind_Couverts + Ind_Residus – Ind_Monocult Avec : Ind_synth : indicateur agrégé des techniques de conservation des sols ; Ind_TCS_SD : part de TCS et de SD sur le total de surface labourée et de surface en TCS et SD ; Ind_Couverts : part de couverts végétaux et de cultures dérobées sur le total des surfaces en cultures annuelles ;
Ind_Residus : part couverte en résidus du précédent cultural en hiver sur le total des surfaces en cultures annuelles ;
Ind_Monocult : part de cultures annuelles sans rotation durant les trois dernières campagnes.
Cet indice permet ainsi d’avoir un seul chiffre pour l’ensemble des données disponibles. Plus il est fort, plus l’AC est censée être présente sur un espace. Il donne à voir le niveau de déploiement de l’AC sur un territoire donné, et permet de cartographier au mieux l’AC (carte 3). Toutefois, en agrégeant des indices, il ne rend pas compte de l’application concrète de l’AC sur une exploitation. Il permet la comparaison entre des territoires, et en cela montre que l’AC est présente en ÎledeFrance de façon inégale, mais il n’informe pas sur l’engagement des exploitations dans l’AC. Il faut aussi
rester vigilant à l’égard de cet indice, les données mobilisées datant de 8 ans faute de recensement plus récent. Elles ne reflètent donc pas la situation actuelle. A la différence de la méthodologie initiale, l’échelle du canton n’a pas été retenue. En effet, en ÎledeFrance, le secret statistique mite la carte à ce niveau ; il a donc fallu revoir à la baisse le niveau de précision pour obtenir des résultats significatifs. C’est pourquoi la carte 3 a été réalisée sur la base des petites régions agricoles. Les résultats de cette cartographie vont, assez logiquement, dans le sens des observations statistiques du tableau 1. En effet, l’AC est généralement plus présente à l’est et nord de l’Îlede France qu’à l’ouest. Les céréaliers bio ne sont pas installés sur les territoires où l’AC ressort comme présente, à l’exception du sudest de l’Essonne. Carte 22 : situation de l'agriculture de conservation (DISAR, RGA 2010) *** L’agriculture biologique comme l’agriculture de conservation sont des modèles alternatifs en Île deFrance. Si l’AB apparaît comme plus visible auprès des pouvoirs publics et de la société civile et en meilleure voie pour s’affirmer en tant que modèle alternatif au conventionnel grâce à son
2ème partie
ancrage institutionnel, l’agriculture de conservation a d’autres atouts et un fort potentiel de développement. Elle apparaît d’ailleurs comme plus développée au niveau des surfaces engagées d’après ce premier travail statistique, qu’il convient cependant de prendre avec précaution au vue des limites précédemment énoncées.
2.1.5 Les autres modèles agroécologiques franciliens
D’autres alternatives sont présentes en ÎledeFrance, mais sont plus difficiles à cartographier faute de données disponibles à notre connaissance. C’est par exemple le cas de l’agroforesterie. L’un des avantages de l’agroforesterie réside dans sa capacité à s’implanter sur tous types d’exploitation, en fonction du projet de chaque agriculteur. Ainsi, les maraîchers bio comme les céréaliers peuvent se lancer dans un tel projet. L’AFA s’est dotée d’une chargée de mission ÎledeFrance. Le PACT Îlede France (Paysage Agroforestier Commission Territoriale) de 2014 développe un argumentaire pour le développement de l’agroforesterie en ÎledeFrance en jouant sur son rôle positif sur la qualité de l’eau, du sol, de la biodiversité, sur le climat et la production de biomasse (AFA, 2014). Parmi les objectifs se retrouvent la création d’un réseau de fermes pilotes, l’accompagnement, mais aussi la protection des essences locales ou encore l’émergence d’un label de produits agroforestiers, ce dernier étant resté au stade de projet.L’agriculture intégrée, tout comme l’agriculture écologiquement intensive, ne sont pas portées par des structures facilement identifiables. Toutefois, ces agricultures sont assez larges et regroupent une telle diversité de pratiques qu’il est plus que probable qu’elles soient présentes en ÎledeFrance. Ceci est d’autant plus probable que les deux termes, et plus encore l’agriculture écologiquement intensive, trouvent un bon écho dans le discours du syndicat agricole majoritaire francilien, la FNSEA (Bonny, 2011). Il en va d’ailleurs de même pour l’agriculture de précision, dont l’aspect technologique et innovateur séduit les agriculteurs friands de nouvelles technologies (drônes, GPS, SIG, etc.) ; les chambres d’agricultures franciliennes proposent d’ailleurs des prestations61 liées à ces technologies.
Enfin, la permaculture est présente sur le territoire. L’association Brin de paille, en charge de la promotion de la permaculture à travers des formations ou encore des journées de découvertes, possède une antenne régionale. Plusieurs initiatives sont décelables sur internet (stage, projection de film, débat, etc.) essentiellement à l’initiative d’associations (Brin de paille, Transition Paris Îlede France, Connected by nature). De fait, il est difficile d’identifier un acteur clef, structurant et
organisant la diffusion de la permaculture en ÎledeFrance. De plus, il est délicat de connaître le public visé et touché par ces associations : agriculteurs en activité, candidats à l’installation ou particuliers.
***
Nous avons mobilisé, en début de chapitre, les notions clefs de Frank Geels et de Pierre Gourou. D’un côté, la théorie de la transition pose un cadre conceptuel permettant d’appréhender théoriquement les différents processus à l’œuvre lors d’une transition. Pour affiner notre raisonnement, les notions de techniques de production et d’encadrement y ont été incorporées. Ces éléments théoriques ont ensuite été mobilisés dans le cadre de l’agriculture francilienne.
L’agriculture francilienne correspond majoritairement à un ensemble d’exploitations en grandes cultures, exploitations reposant sur un modèle « conventionnel », c’estàdire un recours systématique aux intrants de différentes natures, l’utilisation de machines agricole et un ensemble d’acteurs structurant. Cet ensemble est appelé, à la suite de la théorie de Frank Geels, régime socio technique dominant. La façon de travailler de ces exploitations correspond aux techniques de production du régime sociotechnique dominant. De même, l’ensemble des interactions entre les acteurs de ce régime, ainsi que les médias spécialisés, le cadre juridique, l’enseignement agricole et le discours syndicale majoritaire s’’inscrivent dans les techniques d’encadrement. Ces dernières sont foisonnantes et de nature complexe. Le régime sociotechnique est sous la pression du contexte exogène, qui l’appelle à évoluer vers des pratiques agroécologiques. Cet appel se fait notamment à travers la politique agricole menée pendant cinq ans par Stéphane Le Foll et son Projet Agro Ecologique pour la France ; mais il correspond aussi à des mouvements citoyens et à des évolutions émanant du milieu agricole luimême.
Nous avons vu que, d’après la veille bibliographique et des éléments statistiques, plusieurs des alternatives identifiées dans le chapitre 1.2 sont présentes en ÎledeFrance. Un intérêt plus particulier a été portée à l’AB et à l’AC, ces deux niches d’innovations ressortant comme les plus visibles et les plus développées sur la région, mais les autres n’en sont pas pour autant oubliées : agroforesterie, agriculture de précision, permaculture et enfin agriculture intégrée. Toutes ces niches d’innovations, qu’elles se réduisent simplement à des techniques de productions ou s’accompagnent de techniques d’encadrement, ne sont identifiées que d’après un travail bibliographique. Il reste donc à constater, sur le terrain, ce qu’il en est.
2ème partie Nous savons donc que les injonctions agroécologiques évoquées dans la partie précédente sont en fait des pressions exercées sur le régime sociotechnique agricole. Des niches d’innovations, dont les techniques de productions sont compatibles avec le virage agroécologique amorcé par le contexte exogène, sont identifiables et présentes en ÎledeFrance. Leurs places, leurs rapports avec le régime ainsi que la force du régime sont encore à interroger. De même, si un focus a été fait sur l’AB et l’AC, il reste à comprendre ce qui amène un agriculteur à opter pour une niche plutôt qu’une autre, déterminant ainsi quelles techniques de productions alternatives se développent sur le territoire francilien. De façon similaire, il reste à identifier quelles sont les techniques d’encadrement auxquels sont sensibles ces agriculteurs choisissant un parcours agroécologique.
2.2 Trajectoires agroécologiques des exploitations
franciliennes visitées
2.2.1 Méthodologie
Vingtsept agriculteurs ont été rencontrés dans le cadre de cette thèse : tous ont fait l’objet d’entretiens menés sous forme de récit de vie (cf Chapitre 3, partie 1). Ces récits de vie ont l’avantage de montrer la démarche globale de l’agriculteur, en remobilisant l’ensemble des évènements et incidents amenant à la situation actuelle, sans présupposer ni de la nature, ni de l’ordonnancement de ces évènements. Afin de rendre plus lisibles ces récits de vie, ils ont été schématisés sous forme de frises chronologiques (figure 1). Ces frises reprennent les évènements identifiés comme clefs par l’agriculteur lors des entretiens, et s’inscrivant dans une démarche d’analyse des parcours biographiques. Une date est retenue comme clef à partir du moment où elle est mobilisée à plusieurs reprises lors de l’entretien, et que l’interviewé revient dessus, ou qu’elle marque une rupture, comme l’abandon du travail du sol par exemple. La date importe moins que l’évènement qu’elle marque, mais permet de contextualiser et de rattacher le récit de vie à la temporalité du contexte exogène. Ces évènements forts sont mis en gras, audessus de la date.Entre ces événements forts, un ensemble de faits et de décisions est noté afin de permettre une meilleure compréhension des facteurs amenant à l’événement marquant. Ces éléments sont mis au second plan car ils n’ont pas fait l’objet d’une attention particulière par l’agriculteur lors de l’entretien et ressortent comme le tissu narratif du récit de vie. Ils n’en sont pas pour autant anecdotiques, puisqu’ils expliquent ce qui amène à une situation particulière. Si les événements marquants donnent le rythme du récit, ces éléments donnés comme secondaires en sont le fond.
C’est l’ensemble de ces éléments, bien davantage que les événements marquants, qui donne matière à l’analyse. Ils sont en italiques sur les frises, sous la barre chronologique.
Pour rendre plus lisibles ces frises, elles sont complétées d’un code couleur (figure 7). Ce qui a trait au contexte exogène est mis en vert ; en bleu, ce qui est relatif au régime sociotechnique agricole dominant ; en violet ce qui concerne les niches d’innovations agroécologiques. Enfin, en rouge, les éléments ayant rapport soit à la sphère privée de l’agriculteur (parcours professionnel, volonté d’agir dans un sens, etc.), soit à la situation de l’exploitation (mise en place d’un atelier de diversification, difficulté financière, etc.). Ces deux ensembles sont regroupés pour deux raisons : afin de ne pas trop compliquer la compréhension des frises en les alourdissant, mais surtout car ils sont intimement liés. Vivant sur son lieu de travail, sur des horaires contraignants en fonction des travaux agricoles, dépendant de leurs récoltes pour se payer, la vie privée de l’agriculteur va de pair avec l’état de santé de l’exploitation. Ce phénomène est particulièrement marqué chez les éleveurs (Lourel et Mabire, 2008) mais s’applique plus largement à l’ensemble de la profession agricole (Bellamy et Plateau, 2007). Ce code couleur sera essentiellement repris dans le chapitre suivant.
La construction de ces frises s’appuie sur l’ensemble des notes prises lors des entretiens. Certains entretiens ayant durés plusieurs heures, un tel procédé permet de synthétiser les informations, et facilite la mise en perspective avec des entretiens plus modestes. Par ailleurs, plusieurs agriculteurs ont demandé à être rendu anonyme. Afin de ne pas créer de confusion, l’ensemble des frises a été anonymisé.
2ème partie
Figure 23 : exemple de frise chronologique
Une fois ce travail mené à bien, les 27 frises ont été mises en regard. Les agricultures alternatives mises à jour dans la partie 1 ont alors été remobilisées, pour parfois former une nouvelle catégorie. Chaque agriculteur a été rattaché à un type d’agriculture, comprise comme niche d’innovation, afin de faciliter la lecture du phénomène agroécologique.
Plusieurs citations viennent étayer les paragraphes qui suivent. Ces citations proviennent d’entretiens retranscrits, disponibles en annexes. La retranscription a été rendue possible dans le cadre d’entretiens enregistrés. Ces entretiens sont minoritaires, le choix ayant rapidement été fait de ne plus enregistrer les entretiens. En effet, deux agriculteurs ont refusé d’être enregistrés, tandis que plusieurs ont tenus des propos forts différents une fois le dictaphone éteint, donnant alors lieu à un second entretien souvent plus riche que la première partie ; la situation est différente pour les représentants d’organismes paraagricoles, ceuxci ayant tous été enregistrés dans le cadre d’entretiens semidirectifs (cf. chapitre 3, partie 1).
2.2.2 Le respect de l’environnement comme leitmotiv
L’environnement, une notion sensible chez les agriculteurs Sur les 27 exploitants agricoles rencontrés, tous affirment œuvrer pour une agriculture plus respectueuse de l’environnement à travers un itinéraire technique particulier. Cette affirmation se retrouve mise en avant dans l’ensemble des discours, quelles que soit les pratiques mises en œuvre, du bio à l’agriculture de précision, de l’agriculture de conservation à la réduction d’intrants, S’il convient de regarder de plus près les méthodes mises en place, cette affirmation unanime traduit l’impact des nouvelles injonctions. Le mouvement de fond initié à la faveur du projet agroécologique pour la France est visible dans les discours des agriculteurs rencontrés. Plus largement, cette volonté de mettre en avant une dimension environnementale dans le métier d’agriculteur semble répondre aux demandes certes politiques mais aussi sociales. Pour ces agriculteurs, il y aurait un décalage entre la réalité de leur métier et la perception qu’en auraient les personnes extérieures au monde agricole :« Et puis, je n’en ai pas parlé mais j’en aurais des choses à dire aussi, sur les citadins. Eux, ils sont là, ils nous jugent, d’un côté on peut pas leur en vouloir de pas savoir, mais de l’autre c’est agaçant… Enfin, ils ne savent pas de quoi ils parlent, mais ils critiquent quand même ! » (entretien_Bio_1)
Cette distinction voire opposition entre le monde agricole et une société majoritairement urbaine et ignorante des réalités agraires n’est pas nouvelle (Vidal, 2011), et l’ÎledeFrance n’y échappe pas (Poulot, 2006 ; 2014). Elle se réactive simplement autour de nouveaux objets, à savoir une évolution environnementale de l’agriculture non perçue par les urbains.
Un rapport critique au régime sociotechnique dominant, marqué par l’appartenance syndicale
Dans le même temps, la majorité de ces agriculteurs critique le fonctionnement actuel du régime sociotechnique dominant. Ceci est d’autant plus vrai chez celles et ceux appartenant à un syndicat minoritaire et d’opposition (coordination rurale, confédération paysanne) ; dans le cas des adhérents aux FDSEA, les propos sont adoucis voire noncritiques.
Pour les adhérents aux syndicats minoritaires, les institutions en place feraient tout pour freiner le changement que, eux, représentent. Sont mis sur le même plan les semenciers, les producteurs de produits phytosanitaires, les instituts techniques, les chambres d’agriculture et les représentants de la FNSEA : en d’autres termes, ce sont les acteurs soutenant le régime socio technique dominant qui sont mis en cause. Ainsi, pour l’un des représentants de la coordination rurale, le mouvement de fond est lancé mais est freiné dans son application :
« Le Foll, il savait, il était au fond [de la salle] quand y’avait des conférences de BASE, il était tout le temps làbas, en Bretagne. Et puis, il a forcé les gens à aller sur le terrain, toucher la terre, voir ce que c’était, les gens du ministère je veux dire. Mais y’a des pressions dans les chambres et les coopératives. On complique le tout, on parlemente, on alourdit le cahier des charges. Tout ça pour quoi ? Juste pour noyer le projet. »
« Il faut une volonté dans l’animation pour que se développe ce genre de pratique[l’agriculture de conservation]. Si les chambres animaient, ça prendrait. Mais elles ne font rien, même pas d’essai. Arvalis a travaillé la question… Mais sous l’angle du rendement ! Mais on s’en fout du rendement, on veut que ça résiste aux maladies… »
2ème partie
Dans le même ordre d’idée, un adhérent à la CR, pratiquant le nonlabour, explique que son parcours a été possible grâce à la mise à distance des institutions paraagricoles, phénomène