• Aucun résultat trouvé

L’émergence et le développement des soins palliatifs en France (1986-2006)

Dans le document en fr (Page 80-97)

UNE ACTIVITE DE SANTE IMPORTANTE, DONT LES MODALITES DE DEVELOPPEMENT

LES SOINS PALLIATIFS EN FRANCE UN IMPORTANT BESOIN NON SATISFAIT

2.1. L’OFFRE DE SOINS PALLIATIFS EN FRANCE

2.1.1. L’émergence et le développement des soins palliatifs en France (1986-2006)

Le mouvement des soins palliatifs français est né d’une volonté à la fois professionnelle, sociale et politique d’améliorer les conditions de prise en charge des personnes en fin de vie. S’il est parti du terrain sous l’initiative de pionniers (&2.1.1.1.), il a, en effet, été relayé par une partie du corps social (&2.1.1.2.) et est devenu un thème politique majeur (&2.1.1.3.).

2.1.1.1. Une volonté professionnelle

Que l’on cite Cicely Saunders, Elisabeth Kübler-Ross ou Balfour Mount, on constate que le mouvement des soins palliatifs a été initié par des professionnels de la santé, c’est-à-dire par les personnes-mêmes chargées de délivrer les soins. Il en est de même en France, où les premières initiatives émanent des acteurs de terrain. Parmi eux : Maurice Abiven, Henri Delbecque, Michèle Salamagne, René Schaerer et Renée Sebag-Lanoë. Après avoir cherché à comprendre leurs motivations, nous nous sommes intéressés aux initiatives qui en ont découlé et à la façon dont le cadre déontologique médical et infirmier a évolué.

• Facteurs expliquant l’intérêt de soignants hospitaliers français pour les soins palliatifs Les révélations du Jésuite Patrick Verspirien dont nous avons déjà fait état (&1.1.1.2.) ne sont probablement pas étrangères à l’intérêt d’un certain nombre de soignants hospitaliers français pour les soins palliatifs. Dès la fin des années 70, il accuse en effet les hôpitaux de pratiques

euthanasiques fréquentes [Verspieren, 1977-1979 notamment]. Un de ses articles de 1984 [Verspieren, 1984] amplifié par le Monde [Escoffier-Lambiotte, 1984] a eu un effet retentissant : il y explique que l’administration aux patients en fin de vie de substances mortelles (les «cocktails lytiques») est pratique courante dans les établissements hospitaliers. Deux ans plus tard, il publie un ouvrage sur ce thème [Verspieren, 1986], attisant davantage l’attrait des soignants-pionniers pour les soins palliatifs.

Si ses révélations ont sans doute été le déclencheur principal de l’émergence du mouvement des soins palliatifs français, il n’est pas le seul. D’une part, un grand nombre de soignants59 ont été choqués par les propos pro-euthanasie diffusés lors du congrès de la Fédération mondiale des Associations pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD), qui s’est tenu à Nice en Septembre 1984 [Solé, 1984]. D’autre part, nous avons vu que prendre en charge des personnes en fin de vie est une tâche difficile, tant pour les médecins que pour les autres soignants (cf. &1.1.3.1.). D’une façon générale, ces situations les confrontent à un mal-être, d’autant plus grand que le décalage observé entre leur formation théorique et leur pratique quotidienne est important. Michèle Lévy-Soussan, responsable de l’équipe de soins palliatifs de la Pitié-Salpétrière (Paris) illustre bien ces propos, lorsqu’elle explique ce qui l’a conduite à s’orienter vers les soins palliatifs : «Pour ma part, je viens d’une discipline traditionnelle de la médecine : la médecine interne. Un long itinéraire personnel m’a amenée à évoluer en raison de frustrations et d’une formation inopérante face à des situations humaines très difficiles à appréhender. Cela m’a amenée à chercher dans la direction de la santé publique et de l’éthique, plus uniquement dans la seule direction des disciplines biomédicales» [Lévy- Soussan, 2003].

• Les premières initiatives des soignants français en matière de soins palliatifs

Par ce qu’ils proposent, les soins palliatifs se présentent comme une solution séduisante pour améliorer les conditions du mourir. De fait, ils permettraient d’apaiser le mal-être des soignants et de limiter les pratiques euthanasiques. C’est ainsi que, dans les années 80, des associations sont créées par des soignants.

59

Parmi elles, on peut citer les Fédérations :

- l’ASP (Association pour le Développement des soins Palliatifs)60 (1984) (M. Tavernier, F. Dissart) - et JALMALV (Jusqu'à La Mort Accompagner La Vie) (1983) (Dr. R. Schaerer)

et la SFAP (Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs (SFAP, 1989)), qui regroupe toutes les associations au niveau national.

Grâce au soutien financier de l’ASP, la première Unité de Soins Palliatifs française a ouvert ses portes en 1987, à l’Hôpital International de la Cité Universitaire61 (Paris). Cette création a été instiguée par le Dr. Maurice Abiven, aidé par le Dr. Jean Pichard, médecin directeur [Camberlein, 1999]. Il s’agissait d’une unité de 12 lits, destinée à accueillir des patients ayant à vivre «une mort difficile» et dont le pronostic vital était inférieur à trois mois [Barrau, 1988]. Sur les 630 m² que comportait l’unité, 110 étaient réservés à l’accueil des familles.

• Evolution du cadre déontologique médical et infirmier, en matière de soins palliatifs Progressivement, le cadre déontologique qui régit les professions médicales et infirmières s’est dessiné. Sans aller nécessairement jusqu’à l’impératif de mettre en place un véritable programme de soins palliatifs, le souhait des professionnels d’améliorer les conditions de fin de vie est clairement exprimé.

- Cadre déontologique médical

En 1995, le Code de déontologie médicale a été modifié62. Cette quatrième version précise que, si la fonction du médecin est de soulager le patient de ses souffrances, il doit aussi renoncer à «toute obstination déraisonnable», c’est-à-dire à toute forme d’acharnement thérapeutique (article 37 du Code) (cf. &1.1.1.2.). Les conditions d’application de ce devoir de non-acharnement thérapeutique ont été définies en 2006, toute limitation ou arrêt de traitement devant nécessairement passer par une procédure collégiale (cf. Décret du 6 février 2006) (cf. &1.1.1.2.). Si l’acharnement thérapeutique est condamné par le Code de

60

devenue en 1995 l’ASPF (Association pour le développement des Soins Palliatifs Fondatrice)

61

Aujourd’hui, l’Institut Mutualiste Montsouris

62

déontologie médicale, l’acte euthanasique l’est également. L’article 38 de ce code stipule, en effet, que «[le médecin] n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort». En revanche, l’accompagnement des personnes en fin de vie (et donc les soins palliatifs) est présenté comme une priorité de prise en charge. Il doit être réalisé «jusqu’[aux] derniers moments [des patients]» et concerner également ses proches (article 38 du Code) (cf. &1.1.1.2.).

Le Conseil National de l’Ordre des Médecins, qui représente la profession, a rappelé en 1996 l’importance de respecter la personne en général. Il a alors souligné qu’au-delà de ses compétences techniques, le médecin doit faire preuve de compétences psychologiques et humaines, ce qui implique «une écoute attentive, de la compréhension, de la discrétion [et une manifestation de] tout ce que lui dictent sa conscience et son humanité» [Ordre National des Médecins, 1996].

En 2000, l’Académie de Médecine a remis au Président de la République un rapport qui plaide ouvertement pour les soins palliatifs et pour leur extension à «toutes les formes d’affections chroniques» et à la gériatrie [Hollender, 2000].

- Cadre déontologique infirmier

Le décretdu 16 février 1993, qui fixe les règles de la profession infirmière, érige en «devoir», le respect de la vie humaine et de la dignité des patients. Les soins palliatifs et l’accompagnement sont explicitement cités (décrets du 5 mars 1993 et du 11 février 2002). Le décret du 11 février 2002 précise que cette activité fait partie intégrante de l’exercice de la profession d’infirmier, qu’elle dépasse la prise en charge des besoins physiques des patients et qu’elle s’adresse également à leur entourage.

2.1.1.2. Une volonté sociale

Une des caractéristiques des associations de soins palliatifs est leur ouverture à des non- professionnels. Bénévoles, ils reçoivent une formation en soins palliatifs, comme le stipule la

loi du 9 juin 1999 et le décret du 16 octobre 2002. Pour le Conseil Economique et Social (CES), le bénévolat associé aux soins palliatifs en Europe est exemplaire : «[Il] montre de façon convaincante la force avec laquelle l’engagement volontaire peut contribuer à modifier

des conditions politiques et des réalités sociales» [CES, 2002]. Selon une enquête de la CNAMTS, reprise par la SFAP, on recensait en 2003 en France, 4.223 bénévoles d’accompagnement, regroupés en 175 associations [SFAP/ORS, 2003]. Hormis la Corse, toutes les régions sont couvertes, ce qui témoigne de l’ampleur du mouvement. Six régions comptent plus de 10 associations : le Midi-Pyrénées (11 associations), la Bretagne (13), le Nord-Pas-de-Calais (16), l’Ile-de-France (16), la Provence-Alpes-Côte d’Azur (16) et le Rhône-Alpes (21) [SFAP/ORS, 2003]. Ces associations soutiennent activement le mouvement des soins palliatifs, dans une sorte d’«interpellation sociale» [Bounon, 1997]. Pour illustrer cette interpellation, René Schaerer a souhaité que le siège des différentes associations qu’il a initié (JALMALV) se situe hors des établissements hospitaliers [Bounon, 1997].

2.1.1.3. Une volonté politique

Comme le remarque Geneviève Laroque, «pendant des millénaires, les pouvoirs publics, quels qu’ils soient, ne se sont intéressés à la mort qu’après le décès : il fallait savoir ce que l’on faisait du corps, ce que devenait l’héritage. C’était un problème d’hygiène et de droit» [Laroque, 2001]. Qu’en est-il aujourd’hui ? L’objectif que nous poursuivons à travers cette question n’est pas de mener un travail de sociologie sur l’émergence des soins palliatifs en France, mais de mettre en lumière des faits objectifs qui témoignent que la question de l’accompagnement de la fin de vie est devenue un thème politique majeur. Il s’agit aussi de comprendre comment cette activité nouvelle est mise en œuvre et orchestrée. Nous avons donc mené une recherche documentaire pour essayer de qualifier et de quantifier l’intérêt que portent les politiques aux soins palliatifs. Nous avons référencé un certain nombre de documents émanant du Ministère de la Santé, de l’Assemblée Nationale, du Sénat, du Conseil Economique et Social et de la Cour des Comptes. Au total (et probablement sans être exhaustif), 37 références ont été comptabilisées sur la période «août 1986 / mars 2006».

Le tableau suivant reprend les principaux textes, parmi ceux que nous avons référencés. Il serait long et fastidieux de commenter tous les textes que nous avons référencés. Nous avons donc choisi d’en résumer l’esprit général, puis d’axer notre présentation sur les textes qui nous paraissent être le plus important du point de vue de notre recherche, c’est-à-dire, ceux qui gouvernent le développement des soins palliatifs en France.

Tableau – Nombre de références que nous avons comptabilisées sur les soins palliatifs et principaux textes

Type de document Nombre de références Textes fondamentaux

Rapports 7 - Le rapport Laroque (1986)

- Le rapport Neuwirth (1999) Circulaires, arrêtés,

lettres, notes

22 - Les circulaires du 26 Août 1986 et du 19 Février 2002 sur l’organisation des soins palliatifs en France. Les circulaires des 9 et 25 juin 2004, demandant à tous les acteurs de santé d’adopter une démarche palliative.

Lois, décrets 4 - La loi du 9 Juin 1999, qui officialise les soins palliatifs

et ouvre son accès à tous les citoyens.

Programmes 4 - Les Plans Kouchner : 1999-2001 et 2002-2005, qui

planifient le développement des soins palliatifs sur l’ensemble du territoire français.

Le Plan cancer (2003-2007), qui, tout en insistant sur l’importance des soins palliatifs, les place dans un ensemble d’autres activités appelées «soins de support».

• Un esprit conforme aux recommandations européennes et à la loi de bio-éthique

Par l’esprit qui les sous-tend, les textes que nous avons référencés sont conformes aux recommandations préconisées en 1999 par le Parlement européen63 en matière de «protection des droits de l’homme et de la dignité des malades incurables et des mourants». Parmi ces recommandations : la reconnaissance par la loi que les soins palliatifs font partie des droits individuels, l’ouverture de l’accès à ce type de soins à l’ensemble des citoyens, la création de services spécifiques dans tous les grands établissements hospitaliers, une sensibilisation du grand public à ce type de prise en charge et l’interdiction de toute action qui mettrait intentionnellement fin à la vie [Conseil de l’Europe, 1999].

Ces textes vont également dans le sens de la loi de bio-éthique du 29 juillet 1994 sur le respect du corps humain et l’«interdit [de] toute atteinte [à] la dignité de [la personne]».

• Les textes qui ont permis au mouvement des soins palliatifs de prendre de l’ampleur - Les rapports

63

De 1986 à 2005, sept rapports ont été publiés sur les soins palliatifs et l’accompagnement des personnes en fin de vie. Ils ont été réalisés pour la plupart à la demande du Ministre de la Santé (celui de Décisier, du Conseil Economique et Social, ayant été investigué par la plus haute autorité du gouvernement : le Premier Ministre). Deux de ces rapports ont marqué significativement le développement des soins palliatifs en France : le rapport Laroque [Laroque, 1986], qui a servi de base à la Circulaire qui porte son nom, et le rapport Neuwirth [Neuwirth, 1999], qui a conduit à l’élaboration de la loi du 9 juin 1999.

- Les circulaires, arrêtés, notes lettres

Les années 80 marquent une prise de conscience de la nécessité d’améliorer les conditions de fin de vie, notamment dans les hôpitaux. En février 1985, Edmond Hervé, Secrétaire d’Etat à la Santé, a constitué un groupe de travail, consacré à l’aide aux mourants et présidé par Geneviève Laroque64 [Laroque, 2001]. Les réflexions de ce groupe ont abouti à un rapport [Laroque, 1986], puis le 26 Août 1986, à la publication d’une circulaire sur «l’organisation des soins et l’accompagnement des malades en phase terminale» : la «circulaire Laroque». Cette circulaire est un texte de référence. Elle définit de la façon suivante ce que sont les soins palliatifs et d’accompagnement, et ce qu’ils impliquent pour l’équipe soignante : «Les soins d’accompagnement visent à répondre aux besoins spécifiques des personnes parvenues au terme de leur existence […]. Ils comprennent un ensemble de techniques de prévention et de lutte contre la douleur, de prise en charge psychologique du malade et de sa famille, de prise en considération de leurs problèmes individuels, sociaux et spirituels […]. L’accompagnement des mourants suppose donc une attitude d’écoute, de disponibilité, une mission menée en commun par toute l’équipe intervenant auprès du malade». Dans ce cadre, la place et le rôle des bénévoles sont soulignés, et donc reconnus.

Si les modalités d’organisation des soins palliatifs sont précisées dans la circulaire (pour l’hôpital, création d’unités fixes et d’équipes mobiles de soins palliatifs, cf. introduction de la thèse), en revanche, la question de leur financement est ouverte : «Les moyens nécessaires à la mise en application pratique des soins d'accompagnement des mourants seront recherchés par le redéploiement des moyens existants […]. Les soins palliatifs ne sauraient en aucun cas se concrétiser par une médecine au moindre coût». Le 19 Février 2002, une circulaire est donc

64

publiée, en complément au texte original. Elle précise que «les soins palliatifs doivent progressivement s’intégrer dans la pratique de tous les soignants, à domicile comme en établissement de santé». Les circulaires des 9 et 25 juin 2004 concrétisent ce souhait ministériel de faire du soin palliatif, sans induire de dépenses supplémentaires :

- Celle du 9 juin vise à faire connaître à tous les soignants hospitaliers concernés par la prise en charge de la fin de vie, un «guide de bonne pratique de la démarche palliative». Il s’agit de faire en sorte que le patient puisse bénéficier d’un accompagnement, quel que soit l’endroit où il est hospitalisé. Dès lors, la création d’équipes spécialisées en soins palliatifs ne constitue plus une priorité.

- Celle du 25 juin inaugure, pour l’hôpital, un nouveau type de lits : les lits dédiés de soins palliatifs (encore appelés : «lits identifiés de soins palliatifs»). Il s’agit de faire en sorte que chaque service susceptible de prendre en charge des patients en fin de vie, réserve en son sein des lits réservés exclusivement à l’accompagnement de ces personnes. La création de ce nouveau concept de lit passe une demande d’autorisation auprès des Tutelles et par le respect d’un certain nombre de conditions, comme la formation et le soutien des soignants concernés ou l’aménagement des locaux. Ces demandes d’autorisation peuvent s’appuyer sur un guide spécifique : «le Guide pour l’élaboration du dossier de demande de lits identifiés en soins palliatifs» [Comité de Suivi, 2004].

L’analyse de ces quatre circulaires met en évidence une évolution dans la façon dont les politiques envisagent les soins palliatifs dans les hôpitaux français : si la circulaire de 1986 préconisait de redéployer les moyens existants pour financer les soins palliatifs, ce n’est qu’en 2002 que les modalités de ce redéploiement sont précisées. Après avoir longtemps soutenu la création d’équipes spécialisées en soins palliatifs (unités fixes et équipes mobiles), le choix s’oriente de plus en plus vers une optimisation des ressources déjà en place : plutôt que de développer une activité nouvelle, qui requiert des moyens (locaux, lits, postes), pourquoi ne pas initier un changement dans la culture-même des soignants et les amener à modifier leur comportement à l’égard des patients en fin de vie ? Si une formation multi-disciplinaire de ces soignants aux soins palliatifs est requise65, reste à savoir si les soins délivrés ici et là seront de qualité équivalente, du point de vue des patients, comme de leurs familles. Par ailleurs, il faudra aussi démontrer qu’une prise en charge dans un service classique est effectivement moins onéreuse, qu’une prise en charge en unité de soins palliatifs. Nous reviendrons sur ces questions en seconde partie de thèse.

65

Des recommandations en la matière ont d’ailleurs été récemment formulées par le Comité ministériel chargé de développer les soins palliatifs en France [Comité de Suivi, 2005].

Sans commenter un à un les autres textes, signalons simplement ce sur quoi ils mettent l’accent : la nécessité de prendre en charge la douleur (notamment chronique) et d’intégrer les soins palliatifs aux Schéma Régional d’Organisation Sanitaire (SROS), les besoins de formation des soignants en matière de soins palliatifs, le droit des patients hospitalisés (définition de chartes), l’importance de recenser l’offre de soins palliatifs sur l’ensemble du territoire, les liens entre la ville et l’hôpital et l’information du grand public sur ce que sont les soins palliatifs.

- Les lois et décrets

Si la loi hospitalière n°91-748 du 31 juillet 1991 a inscrit les soins palliatifs dans les missions du service public hospitalier66, il faut attendre 8 ans pour qu’une loi spécifique lui soit consacrée : la loi du 9 juin 1999. Cette loi est fondamentale, puisqu’elle vise à garantir un droit d’accès aux soins palliatifs à tous les citoyens «dont l’état le requiert» (article 1er). Lors d’une conférence qui s’est tenue à Paris en 2003, Lucien Neuwirth, sénateur et un des auteurs de la loi, en a retracé la genèse [Neuwirth, 2003]. Après «s’être battu», dit-il, pour faire passer en 1994 une loi sur la prise en charge de la douleur, il explique s’être rendu compte d’un «manque». Cinq ans plus tard, il a donc proposé un projet de loi sur l’accès aux soins palliatifs et à l’accompagnement à tous les malades dont le pronostic vital était en jeu. Cette loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat et par l’Assemblée Nationale, reconnaît officiellement les soins palliatifs et lève les obstacles qui s’opposaient à leur expansion en institution, comme à domicile.

Cette loi définit comme suit les soins palliatifs :

«Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire, à domicile ou en institution ; ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage».

66

L’article L. 711-4 du Code de la Santé Public prévoit, en effet, depuis cette date que les établissements hospitaliers publics «dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état et veillent à la continuité de ces soins, à l'issue de leur admission ou de leur hébergement.»

Cette définition est proche de celle donnée par la SFAP (cf. Introduction du &1.2.). La publication de cette loi a impliqué de modifier à la fois le Code de la santé publique, le code de la sécurité sociale et le code du travail, comme nous le montrons dans l’encadré suivant.

Encadré – Les modifications du Code de la santé publique, de la sécurité sociale et du travail, suite à la publication de la loi du 9 juin 1999

- Modifications apportées au Code de la santé publique

⇒ droit de la personne malade à accéder aux soins palliatifs (et pas uniquement en phase terminale) et à refuser des actes diagnostiques et thérapeutiques

⇒ obligation faite à tous les établissements hospitaliers67

de développer ce type de soins

⇒ inscription de l’activité palliative dans les Schémas Régionaux d’Organisation des Soins (SROS) et dans des contrats d’objectifs et de moyens

⇒ rôle prépondérant des Centres Hospitalo-Universitaires (CHU) dans la diffusion des techniques palliatives (formation initiale et continue des professionnels)

⇒ importance de définir des recommandations de bonnes pratiques cliniques en matière de prise en charge de la fin de vie

- Modifications apportées au Code de la sécurité sociale

⇒ annonce de modalités particulières de rémunération des professionnels exerçant en ville (cette annonce est complétée par le décret du 3 mai 2002, qui définit des contrats-type de rémunération pour

Dans le document en fr (Page 80-97)