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1. L’ ÉCONOMIE NÉO INSTITUTIONNELLE

Le programme de recherche de l’économie néo-institutionnelle (ENI) trouve ses racines dans les intuitions de Ronald H. Coase (1937). Dans l’article The Nature of the Firm, ce dernier avance qu’il existerait des coûts de transaction associés à l’utilisation du marché et que ces coûts pourraient, sous certaines conditions, être minimisés si la transaction était internalisée dans une entreprise, d’où l’origine de l’existence des firmes et plus largement des organisations. L’article de Coase se démarque ainsi des travaux de l’économie néoclassique qui, considérant l’organisation comme une boîte noire utilisant une technologie donnée et cherchant à minimiser ses coûts ou maximiser ses profits à l’aide d’une fonction de production, ne pouvaient expliquer les raisons de l’existence des firmes.

Depuis les premières intuitions de Coase, la notion de coûts de transaction a été approfondie et s’est conjuguée à d’autres concepts pour construire un important programme de recherche qui continue de progresser et de se perfectionner au fil des années. Le programme de recherche de l’économie néo-institutionnelle inclut deux niveaux d’analyse qui se présentent comme deux volets distincts, mais convergents, de recherche.

1.1 Un programme de recherche à deux volets

Pour comprendre l’origine de ces deux volets de recherche, il faut examiner la distinction entre environnement institutionnel et arrangement institutionnel développée par Davis et North (1971) et plus tard reprise par North (1990). L’environnement institutionnel désigne les institutions qui encadrent l’activité économique. Ce sont les institutions qui dictent les règles du jeu, qu’elles soient informelles (sociales, morales) ou formelles (politiques, légales, étatiques), et qui offrent donc un support aux interactions humaines. L’analyse de l’environnement institutionnel a donné naissance au volet institutionnel de ce programme de recherche. Ce volet préconise une approche plutôt macro-économique et s’est principalement développé à partir des travaux de North [1990]26. Cette approche s’intéresse à l’émergence

26 Les travaux de Greif ont également eu une influence importante dans le développement de cette approche.

L’approche de Greif est cependant différente de celle de North et ce, à plusieurs niveaux. North adopte une approche plus globale et systémique que Greif, qui se focalise plutôt sur l’analyse de communautés spécifiques. Pour Greif, l’origine du changement institutionnel est endogène aux communautés. Le changement provient des comportements individuels des membres de la communauté. North avance plutôt que le changement

des institutions et à leurs effets sur la performance des économies. Le cadre d’analyse développé par North attribue l’émergence d’institutions à un souci de minimisation des coûts de transaction dus aux incertitudes des interactions humaines.

Les arrangements institutionnels renvoient quant à eux aux organisations qui soutiennent l’activité économique. Les organisations sont les joueurs de l’activité économique, elles doivent jouer le jeu avec pour contraintes les règles fixées par les institutions. L’étude des organisations a donné naissance à un autre volet de recherche plus micro-économique, le volet gouvernance, largement développé par Williamson ([1975][1985]) qui a été le premier à proposer un cadre d’analyse opérationnel liant les coûts de transaction, les organisations et les contrats. Le cadre d’analyse de Williamson a par la suite donné naissance à la théorie des coûts de transaction.

Le tableau de Williamson (2000) sur les différents « niveaux d’analyse sociale » (level of

social analysis) de l’économie permet de bien illustrer la différence entre les deux branches

de la théorie des coûts de transaction (tableau 3.1). La première colonne indique le niveau des institutions selon une classification de quatre niveaux déterminée par Williamson. La seconde colonne décrit le type d’institution retrouvé à chaque niveau. La dernière colonne du tableau présente une « durée » fictive de vie des institutions afin de fournir un indicateur de la fréquence (1, 10, 100 ou 1000) des institutions des différents niveaux. Ainsi, le niveau d’analyse du volet gouvernance se trouve au niveau 3 (N3) avec la gouvernance des formes organisationnelles. Le volet institutionnel, quant à lui, se situe au niveau des institutions informelles et formelles, donc respectivement en N1 et N2 dans le tableau 3.1.

Tableau 3.1. L’économie des institutions de Williamson.

Niveau Description Fréquence

N1 Embeddedness *: Institutions informelles, coutumes, traditions, normes religieuses, 102 - 103 N2 Environnement institutionnel : Institutions formelles, règles formelles

du jeu (lois, droits de propriété)

10 - 102

N3 Gouvernance : formes

organisationnelles (contrat)

1 - 10

N4 Allocation des ressources

et de l’emploi (prix et quantité, incitations)

En continu

* Embeddedness est un terme anglais difficile à traduire convenablement en français. Il signifie ici inséré, profondément ancré.

Source : Tiré de Williamson [2000] p. 597.

1.2 Les coûts de transaction : un concept unificateur

Les deux volets du programme de recherche néo-institutionnel, bien qu’ayant des niveaux d’analyse différents, partagent un même accord sur l’importance des coûts de transaction. Dans le volet institutionnel, les coûts de transaction sont associés à la performance des économies. En posant les règles du jeu, les institutions offrent une structure plus stable aux interactions humaines ce qui permet de réduire l’incertitude entourant les échanges et donc, les coûts de transaction de l’économie en général (North [1990]). Selon North, une économie qui a su développer des institutions permettant de minimiser les coûts de transaction est plus performante.

Dans le volet gouvernance, les coûts de transaction sont utilisés comme paramètre de référence dans le choix de structures de gouvernance des transactions (Williamson [1975]). Le principe sous-jacent à ce choix est celui d’alignement discriminant. Selon ce principe, les agents choisissent un arrangement organisationnel selon certains attributs de la transaction afin de minimiser leurs coûts de transaction.

La transaction est donc centrale dans les deux volets. Mais pourquoi cette emphase sur les transactions? Pour les auteurs s’inscrivant dans le courant néo-institutionnaliste, la transaction est au cœur de l’activité économique, et donc de sa performance. Comme l’indique Ménard, on ne pourrait tirer profit de la division du travail et de l’organisation de la production qui en découle sans dispositifs efficaces pour réaliser les transactions (Ménard [2003] p.7). La prochaine section présente les principaux éléments d’analyse du volet gouvernance de l’économie néo-institutionnelle. Le volet institution est présenté dans la section 3.