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Chapitre 2. La légitimité 49

2.1 Légitimité des organisations et institutions 49

Pour comprendre la notion de légitimité organisationnelle et institutionnelle, nous choisissons de nous appuyer sur la publication : « Organizational Legitimacy : Six Key Questions » de Deephouse et al. (2017) afin de compléter notre savoir sur la légitimité institutionnelle des organisations. Nous notons que l’un des co-auteurs est Mark C. Suchman, cité ci-dessus et l’un des premiers grands auteurs à propos de la légitimité avec son recueil : « Managing Legitimacy: Strategic and Institutional Approaches » (1995). Deephouse et al. (2017) ont passé en revue près de 1300 publications et papiers de conférence, utilisant la racine

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de mot « legitim » dans le titre, le résumé ou les mots clés. Les publications en question proviennent de disciplines diverses : communication, sciences politiques, administration publique, sociologie…et non pas seulement des papiers relatifs au management.

La publication s’articule comme l’indique le titre, autour de six points : Qu’est-ce que la légitimité organisationnelle ? Pourquoi la légitimité est-elle importante ? Qui accorde la légitimité ? Comment est-elle accordée ? Quels critères sont utilisés (pour appliquer des évaluations de légitimité) ? Comment la légitimité change au cours du temps ? Bien que toutes ces questions soient importantes, nous nous intéressons principalement à trois d’entre elles afin de mieux comprendre notre terrain : qu’est-ce que la légitimité organisationnelle ? Qui accorde la légitimité ? Comment évolue-t-elle ?

2.1.1 Qu’est-ce que la légitimité organisationnelle ?

Si Deephouse et al. (2017) reviennent sur cette question de définition, c’est parce que la plupart des recherches sur la légitimité se contentent de citer la définition de Suchman (1995) sans pour autant la remettre en question, et nous reviendrons sur ce point. Deephouse et al. (2017) commencent par présenter différents essais de leurs prédécesseurs, de définitions sur la légitimité organisationnelle. Le premier essai fait référence à Max Weber (1922/1978), pour qui la tradition, la croyance et la loi forment le socle de la légitimité (2.1.1.1). Ils s’intéressent ensuite à la théorie néo-institutionnelle (Meyer et Rowan 1977) qui pose les bases de plusieurs dimensions de légitimité (2.1.1.2). Puis ils font remarquer que la légitimité peur être présentée comme présence ou absence de questionnement (Meyer et Scott 1983) (2.1.1.3). Dans cette même période, DiMaggio et Powell (1983) s’intéressent à l’isomorphisme des institutions, permettant aux organisations d’accéder à la légitimité (2.1.1.4). Puis Deephouse et al. (2017) s’appuient sur les définitions de Scott (1995) et Suchman (1995) avant de donner leur propre définition (2.1.1.5). Les auteurs terminent en précisant les quatre états de la légitimité organisationnelle : accepté, acceptable, controversé et illégitime (2.1.1.6).

2.1.1.1 L’ordre légitime selon Weber

Weber (1922/1978) est le premier à introduire la notion de légitimité en théorie sociale et dans les études sur l’organisation. Il pose chapitre 7, les bases de la légitimité : tradition, croyance, et loi, gouvernées par la notion de domination et d’ordre. Il distingue la domination charismatique, la domination traditionnelle comme la croyance quotidienne dans la sainteté

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de traditions valables et enfin la domination ou ordre des lois. Il explique comment les sociétés, les bureaucraties sont structurées par des relations d’autorité et de dominance légitimes.

Tant qu’une action sociale n’est pas seulement dérivée de la peur ou de motifs de convenance, une volonté de se soumettre à un ordre imposé par un homme ou un petit groupe, implique toujours une croyance en une autorité légitime ». Les acteurs sociaux considèrent comme légitime la dominance d’une institution à partir du moment où ils sont en conformité avec son existence (Weber 1922 p37).

L’action sociale, sous croyance de légitimité inclut la complicité ou l’approbation de l’action de la part du sujet. Les acteurs sociaux n’ont pas besoin d’accepter pleinement une pratique ou institution pour être légitime, mais ils doivent conformer leur comportement à leur existence. Pour Weber (1922 p31) « l’ordre légitime » correspond à la légitimité renforcée par un réseau de normes et de croyances. La légitimité selon Weber peut résulter de la conformité avec à la fois les normes sociales générales et avec les lois formelles.

2.1.1.2 Théorie néo-Institutionnelle et légitimité

En 1977 émerge La Théorie Néo-Institutionnelle (TNI) avec deux publications, celles de Meyer et Rowan (1977) et Zucker (1977) qui mentionnent la légitimité. Pour autant, les auteurs ne proposent pas de définition explicite sur la légitimité. Ils posent néanmoins les bases de dimensions qui seront développées à partir de 1995 : la légitimité pragmatique, la légitimité réglementaire ou sociopolitique et la légitimité normative ou morale.

2.1.1.3 La légitimité comme présence ou absence de questionnement

Meyer et Scott (1983) traitent plus profondément la légitimité et proposent la définition suivante :

Une organisation complètement légitime serait celle à propos de laquelle aucune question ne pourrait être soulevée. [Tout but, moyen, ressource, et système de contrôle est nécessaire, spécifique, complet et sans alternative.] La légitimation parfaite est une théorie parfaite, complète (c’est à dire sans incertitude) et non remise en cause par quelque alternative (p201).4

4A completely legitimate organization would be one about which no question could be raised. [Every

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En résumé la légitimité peut être conceptualisée comme la présence ou l’absence de questionnement. Pfeffer et Salancik (1978) adoptent une « définition négative » assez proche : « La légitimité est plus facilement reconnue quand elle est absente que quand elle est présente. Quand les activités d’une organisation sont illégitimes, des commentaires et des attaques auront lieu » (1978, p194).

2.1.1.4 Légitimité et isomorphisme

Les sociologues DiMaggio et Powell (1983) développent en théorie des organisations, le concept d’isomorphisme institutionnel. Ils expliquent comment organisations publiques et privées s’homogénéisent en intégrant les pratiques dominantes de leurs domaines d’activité respectifs. Or pour les auteurs, cet isomorphisme est bien plus institutionnel que concurrentiel. En s'intéressant aux organisations institutionnelles, P. J. DiMaggio et Powell (1983) proposent une approche sociologique. Les auteurs introduisent les thèmes du changement et du conflit, ainsi que l'identification de facteurs pouvant freiner ou au contraire favoriser le maintien et l’établissement de la légitimité (Huault 2009).

2.1.1.5 Définitions de la légitimité

1995 est une année pivot dans le développement de la théorie de légitimité. Le livre de Scott (1995) Institutions and Organizations inclue la définition suivante : « la légitimité n’est pas un bien à être possédé ou échangé mais une condition reflétant l’alignement culturel, le support normatif ou l’adéquation avec les règles et les lois ». Ces trois facteurs ont généré dans ses recherches les bases cognitives, normatives et réglementaires de la légitimité. Il introduit le concept de la légitimité à partir des trois piliers de l’institution qu’il a prédéfinis (réglementaire, normatif, cognitif). Concernant le pilier réglementaire, la légitimité se conforme aux règles et aux lois ; pour le pilier normatif, la légitimité s’érige sur des bases morales et des normes ; et pour le pilier cognitif, est légitime tout ce qui vient de l’adoption commune de schémas cognitifs et culturels.

La même année, Suchman (1995) publie “Managing legitimacy: Strategic and institutional approaches”. Il écrit (p571) :

Perfect legitimation is perfect theory, complete (i.e., without uncertainty) and confronted by no alternatives”.

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« La légitimité est un point d’ancrage d’un vaste dispositif théorique qui aborde les forces normatives et cognitives qui contraignent, construisent, et responsabilisent les acteurs organisationnels ».

Suchman avertit aussi que la littérature existante offre des ancrages conceptuels assez fragiles. En effet, si jusqu’à aujourd’hui de nombreux chercheurs utilisent le terme légitimité, peu le définissent. Suchman (p574) définit la légitimité comme étant :

« un postulat partagé selon lequel les actions d’une entité sont perçues comme (désirables), convenables et appropriées dans des systèmes socialement construits de normes, de valeurs, de croyances et de définitions ».

Nous notons que Deephouse et Suchman (2008) ont par la suite revu cette définition en supprimant le terme « désirables », afin d’éviter toute confusion avec la notion de statut ou de réputation. Exceptée cette modification, la définition fait toujours référence dans les recherches liées à la légitimité.

Suchman (1995) introduit la légitimité pragmatique, la légitimité morale et la légitimité cognitive. La légitimité pragmatique repose sur les intérêts personnels des organisations et de leurs audiences immédiates. La légitimité morale (ou normative) va être accordée ou non à une organisation en fonction de la moralité de ses actions. Une organisation obtient la légitimité cognitive lorsque la société considère qu’elle suit des objectifs propres et désirables. Une fois obtenue, cette dernière légitimité est considérée comme acquise (taken for granted).

Les deux publications (Scott 1995; Suchman 1995) ont largement contribué à donner plus de visibilité à la légitimité, en particulier dans les recherches liées aux organisations à but lucratif. Dès lors, certains chercheurs ont repris telle que la définition de Suchman, tandis que d’autres ont utilisé les éléments de cette définition pour obtenir somme toute des définitions très proches.

Etant donné ces diverses approches/définitions de la légitimité, voici la dernière courte définition proposée par Deephouse et al. (2017) :

« La légitimité organisationnelle est la pertinence d’une organisation dans un système social en termes de règles, valeurs, normes et définitions ».

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Les règles, valeurs, normes et définitions reflètent les critères ou dimensions réglementaires, pragmatiques, moraux et culturels-cognitifs pour évaluer la légitimité.

2.1.1.6 Affiner les caractéristiques de la légitimité organisationnelle

Pour autant, des débats existent autour du concept de légitimité. Alors que Deephouse et Suchman (2008) proposaient une vision dichotomique de la légitimité (une organisation est soit légitime, soit illégitime), ils proposent suite à de nouvelles recherches, une vision plus fine sous forme de quatre états de la légitimité organisationnelle : accepté, acceptable, controversé et illégitime

(

accepted, proper, debated, and illegitimate) (Deephouse et al. 2017).

Accepté peut être employé pour des évaluations plus passives qui reflètent le ‘taken- for-grantedness’, alors que acceptable devrait être utilisé pour les jugements obtenus d’une manière plus délibérative (Bitektine et Haack 2015; Meyer et Rowan 1977; Suchman 1995; Tost 2011). La majorité des organisations dans un système social sont acceptées par la plupart des personnes et perçues comme acceptables par d’autres.

Controversé reflète la présence d’un désaccord actif dans un système social, souvent parmi plusieurs parties prenantes ou entre des personnes dissidentes et l’organisation. La controverse inclut souvent des questions ou des enjeux provoqués par des parties prenantes au sujet des activités d’une organisation ou de ses valeurs fondamentales. La controverse a aussi lieu lorsqu’une organisation tente d’étendre son domaine à de nouveaux secteurs ou s’engage dans de l’entreprenariat institutionnel. Une organisation agroalimentaire souhaitant se lancer dans les OGN en est un bon exemple.

Illégitime pour finir, reflète l’évaluation par le système social que l’organisation est inappropriée et qu’elle devrait être radicalement refondée ou cesser d’exister.

Après avoir tenté de répondre à la question « qu’est-ce que la légitimité organisationnelle », nous nous intéressons en relation avec notre recherche, à une autre question soulevée par Deephouse et al. (2017) : qui accorde la légitimité, et comment.

2.1.2 Qui accorde la légitimité, et comment ?

Pour Deephouse et al. (2017) diverses sources accordent la légitimité. Les sources sont des acteurs internes ou externes qui observent les organisations (et d’autres sujets de

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légitimité). Elles évaluent la légitimité, que ce soit consciemment ou inconsciemment, en comparant les organisations à partir de critères particuliers ou standards (Ruef et Scott 1998, p880).

Deephouse et al. (2017) utilisent le terme source pour désigner l’entité qui rend des jugements de légitimité explicites ou tacites à propos d’une organisation. A noter que d’autres chercheurs utilisent le mot « audience » ou « évaluateur ». Les auteurs distinguent de nombreuses sources que nous classifions en deux catégories : les sources qui accordent de la légitimité par des actions collectives (de la part de plusieurs individus) versus les sources correspondant à des actions individuelles (de la part d’un seul individu).

2.1.2.1 Les sources de niveau collectif

L’Etat : Les premiers écrits sur la légitimité voient l’Etat-nation comme la

principale source de légitimité (Meyer et Scott 1983). Les auteurs font remarquer que même au niveau des organisations et de la gouvernance privée, interviennent des agents de l’Etat qui jouent un rôle important dans l’attribution de légitimité.

Les organisations dans un champ organisationnel sont considérées dans d’autres récits comme sources de légitimité, et la légitimité est conférée par leur endossement, souvent sous forme de relations organisationnelles formelles (Galaskiewicz 1985; Singh, Tucker, et House 1986).

L’opinion publique est une autre source de légitimité qui reflète en particulier les valeurs sociales. Elle peut être mesurée grâce à des enquêtes et en étudiant des formes de communication publique (Dowling et Pfeffer 1975).

Les médias sont devenus une source de légitimité fréquemment étudiée à cause du lien entre les médias et l’opinion publique (Bansal et Clelland 2004; Lamin et Zaheer 2012). Les recherches considèrent que les médias reflètent l’opinion publique dans le système social au sens large (Dowling et Pfeffer 1975), mais qu’ils l’influencent aussi (Deephouse 1996). Notons que les travaux sur les médias sous forme électronique sont intéressants car connectés aux réponses de différents acteurs (Vergne 2011). Aujourd’hui, le monde médiatique change. La communication de masse est moins importante et de nombreux empires médiatiques traditionnels se lézardent. De plus, les organisations, les groupes d’intérêt, les mouvements sociaux et les individus utilisent les technologies digitales pour informer et persuader les autres sur la légitimité des organisations et leurs pratiques. Par conséquent la vraie

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signification « d’autorité » médiatique est remise en question : les médias de prestige comme The New York Times or The Wall Street Journal ne peuvent plus donner le ton sans tenir compte de l’avis substantiel (et potentiellement opposé) d’individus faisant part de leurs opinions et doutes.

Les mouvements sociaux et les groupes d’intérêt ont aussi une influence importante sur l’opinion publique et la politique gouvernementale. Ils réclament la légitimation de certains sujets et la délégitimation de certains autres (Rao, Morrill, et Zald 2000; Strang et Soule 1998), en attirant l’attention sur des critères particuliers comme par exemple les droits des personnes LGBT (Creed, Scully, et Austin 2002; Elsbach et Sutton 1992) ou l’environnement naturel (MacKay et Munro 2012). Leurs arguments apparaissent dans les médias sociaux mais sont souvent statués par des régulateurs, des tribunaux ou des législateurs (Bitektine et Haack 2015; Edelman et Suchman 1997; Suddaby et Greenwood 2005). Nous rajoutons l’exemple dans le cadre de notre recherche, de la publication de Scaraboto et Fischer (2013) qui décrit comment des activistes « fatshionistas » réclament plus d’inclusion et de légitimation dans le marché mainstream de la mode, non pas pour des organisations, mais pour elles-mêmes.

2.1.2.2 Les sources de niveau individuel

Deephouse et al. (2017) font remarquer que la plupart des recherches se sont intéressées à la légitimité accordée par des sources influentes à un niveau collectif d’analyse et non pas individuel.

Deux publications ont toutefois retenu leur attention : Bitektine (2011) observe que la recherche regarde généralement les évaluateurs comme des audiences passives. Lui au contraire, les considère comme des processeurs actifs d’information. Tost (2011) de son côté développe un modèle qui regarde les individus comme des évaluateurs de légitimité. Elle souligne que les jugements faits par les individus sont rapides et naturels, avec une acceptation passive des indices de légitimité offerts dans un environnement institutionnel. A contrario lorsque la légitimité est contestée, les individus s’engagent dans un processus d’évaluation plus actif.

Nous pensons qu’il faut rajouter à l’intersection de la source collective « mouvements sociaux / groupes d’intérêt » et de la source « individus » une source que nous nommons « activiste ». Il a les mêmes caractéristiques que la source « mouvements sociaux / groupes

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d’intérêt », mais il agit seul, avec la force que peut lui conférer la visibilité sur les réseaux sociaux. Nous le distinguons de l’individu qui évalue au sein de l’organisation. Tost (2011) pense que les évaluateurs sont soit des individus ou soit des composés d’individus lorsqu’ils prennent des décisions organisationnelles. Nous faisons cette distinction dans le tableau ci- dessous.

Deephouse et al. (2017) concluent sur les sources de légitimité en pointant que la plupart des recherches sur les processus individuels de jugement de légitimité font le point sur les efforts cognitifs pour comprendre les organisations (Bitektine 2011; Bitektine et Haack 2015; Tost 2011).

En résumé, Deephouse et al. (2017) recommandent à propos des sources (l’Etat, ses agences de réglementation et son système judiciaire, les professions, les investisseurs, l’opinion publique, les mouvements sociaux, les médias et les individus), que les chercheurs considèrent soigneusement ce que les sources spécifiques de légitimité font lorsqu’elles évaluent des organisations, c’est-à-dire : comment elles perçoivent et évaluent les informations en relation avec la légitimité, pour faire - à la fois activement et passivement - des évaluations de légitimité, et communiquer ces évaluations ; et comment ces sources interagissent les unes avec les autres et avec les organisations en question (Bitektine 2011; Tost 2011).

Nous avons résumé ci-dessous par un tableau récapitulatif, les sources selon Deephouse et al. (2017). Nous reprendrons ultérieurement ce tableau, qui sera alors complété avec des données empiriques illustrant les sources identifiées dans cette partie théorique.

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QUI (QUELLE SOURCE) ACCORDE LA LEGITIMITE ? (d'après Deephouse & al, 2017)

SOURCE THEORIE

LES SOURCES DE NIVEAU COLLECTIF

L'ETAT ET SES AGENTS Première source de légitimité identifiée

LES ORGANISATIONS Endossement de la légitimité sous forme de relations organisationnelles formelles

L'OPINION PUBLIQUE Reflète les valeurs sociales

LES MEDIAS Lien particulier avec l'opinion publique

LES MOUVEMENTS SOCIAUX & GROUPEMENTS

D'INTERETS

Réclament la dé-légitimation de certains sujets. Leurs arguments apparaissent communément dans les médias sociaux

et peuvent être repris par des régulateurs ou des législateurs

LES SOURCES DE NIVEAU INDIVIDUEL

LES INDIVIDUS Jugements rapides et naturels ; acceptation passive des indices de légitimité. En

cas de légitimité contestée, processus + actif d’évaluation LES INDIVIDUS ACTIVISTES

Réclament la dé-légitimation de certains sujets. Leurs arguments apparaissent communément dans les médias sociaux

et peuvent être repris par des régulateurs ou des législateurs LES INDIVIDUS DANS

L'ORGANISATION

Distinguer la légitimité évaluée par les individus / évaluée par ces mêmes individus en collectivité. Permet de développer un modèle de processus qui relie

les niveaux micro et macro.

2.1.3 Comment évolue la légitimité ?

Deephouse et al. (2017) observent que les acteurs acceptent ou contestent la légitimité de l’organisation, ainsi que les actions de l’organisation cherchant à se défendre. Suchman (1995 p585) avait déjà réfléchi à trois challenges dans la gestion de légitimité : acquérir, maintenir et réparer la légitimité. Deephouse et al. (2017) vont plus loin et proposent cinq scénarios de légitimation : l’acquisition, le maintien, la contestation, la réponse, l’innovation institutionnelle.

2.1.3.1 Acquisition de la légitimité

Acquérir (gaining) la légitimité a lieu dans un environnement stable, afin que l’organisation puisse démontrer qu’elle correspond aux standards réglementaires préexistants,

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aux valeurs morales et aux systèmes de significations culturo-cognitives. Certaines recherches examinées ci-dessus ont donc examiné comment de nouvelles organisations gagnent en légitimité (Blanchet 2018). Bitektine (2011 p165) signale que les entrepreneurs accomplissent souvent cette tâche en présentant largement leur innovation pour englober le savoir existant et invoquer des catégories cognitives familières. Deephouse et al. (2017) distinguent le scénario d’acquisition de légitimité qui consiste à montrer une conformité avec des normes existantes, et le scenario d’innovation institutionnelle (voir en dernier point) qui implique une démarche plus radicale consistant à remettre en question ces normes.

2.1.3.2 Maintien de la légitimité

Maintenir (maintaining) la légitimité implique une attention de routine pour renforcer auprès des acteurs l’idée que l’organisation continue d’adhérer aux standards de pertinence. Il y a peu de recherche sur les organisations maintenant leur légitimité parce que la stabilité crée peu de gaps théoriques, mais requiert des interventions managériales actives et permanentes (Humphreys et Carpenter 2018).

2.1.3.3 Contestation de la légitimité

Deephouse et al. (2017) aborde la notion de légitimité contestée (challenged by). Ce scénario souligne l’existence de multiples parties prenantes qui peuvent remettre en question la légitimité. Les auteurs reconnaissent les contestations comme une part unique du processus de légitimation, séparées des réponses (voir le prochain point) utilisées pour gérer ces contestations.

Pour autant nous pensons qu’il est difficile dans un processus de légitimation, d’isoler d’un côté les faits reliés à une contestation de légitimité de ceux reliés à la réponse par l’organisation à cette contestation, si ce n’est dans une étude prenant beaucoup de recul, et pouvant « isoler » dans un contexte de niveau macro, la contestation d’un côté et la réponse à la contestation de légitimité de l’autre. Si nous observons un processus de légitimation comme