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S ITUATION POUR LES ENSEIGNES QUI NE PROPOSENT PAS DE LIVRAISON DANS LES

Dans le document Avis 19-A-12 du 04 juillet 2019 (Page 134-137)

C. LE COMMERCE EN LIGNE

2. S ITUATION POUR LES ENSEIGNES QUI NE PROPOSENT PAS DE LIVRAISON DANS LES

a) Les contraintes et barrières

563. Comme évoqué ci-dessus, deux tiers des enseignes de commerce en ligne consultées par l’Autorité ne proposent pas de livraison à destination des DROM, et très peu d’entre elles ont un projet de développement dans ces territoires.

564. Les contraintes invoquées sont principalement celles identifiées supra. Pour certaines entreprises, la prise en charge des frais de livraison et de retour constitue un élément tellement fort de leur identité qu’elles préfèrent y renoncer que de faire supporter ces frais à leurs clients. Des difficultés logistiques (liées par exemple à la nécessité d’avoir un dispositif particulier permettant l’édition et l’apposition d’un étiquetage spécifique pour les colis à destination des DROM) ou informatiques, telles que l’absence de compatibilité des flux informatiques existants avec les transactions vers les DROM, ou la nécessité de créer une interface spécifique sur le site (les différences fiscales et douanières ne permettant pas d’offrir aux consommateurs ultramarins les mêmes prix, promotions et autres conditions de vente que ceux proposés aux consommateurs métropolitains), constituent également autant de freins pour ces enseignes.

565. Dans ce contexte, plusieurs enseignes ont indiqué que les investissements nécessaires pour pallier ces différentes contraintes s’avèrent trop élevés au regard notamment de la faiblesse de la demande locale ; réaliser des marges peu élevées compte tenu des coûts précités nécessiterait des volumes particulièrement importants, surtout pour des enseignes dont la volonté stratégique est d’afficher des prix bas. L’étroitesse du marché conjuguée aux contraintes précitées génère donc une problématique de masse critique et, in fine, de rentabilité.

566. À titre d’exemple, une grande enseigne de commerce en ligne proposant notamment des produits électrodomestiques et d’équipement de la maison, a cessé de livrer directement les DROM en 2016, et a été contrainte de recourir à une solution de réexpédition.

567. Les enseignes consultées indiquent que les facteurs suivants seraient de nature à les inciter à envisager de développer une livraison vers les DROM :

- une baisse « significative » des frais de livraison et des droits de douane afin de pouvoir proposer une offre compétitive ;

- une simplification des tarifs douaniers, afin de pouvoir présenter au consommateur, sur les sites de commerce en ligne, un tarif « prédictible » incluant les différents droits et taxes ;

- un allègement des formalités administratives, permettant notamment de récupérer facilement les taxes et droits lorsque le produit est retourné en métropole par le consommateur ;

- le développement de volumes de transactions suffisants permettant l’implantation de relais logistiques locaux.

b) Une solution alternative : la réexpédition

568. Pour se faire livrer un produit à la vente sur un site qui ne propose pas de livraison outre-mer, le consommateur ultramarin peut opter pour un service de réexpédition. Celui-ci consiste pour le client à renseigner, au moment de sa prise de commande sur le site marchand, l’adresse d’un prestataire de réexpédition généralement situé en métropole – auprès de qui il aura préalablement créé un « compte client » – comme lieu de livraison. Le prestataire se voit alors livrer le produit par l’enseigne, le stocke et le réexpédie au client à tarif « réduit », c’est-à-dire négocié avec des prestataires de transport.

569. Le consommateur règle au prestataire, selon les modèles proposés, soit un forfait global, soit des frais décomposés en fonction des prestations (frais liés à la réception du produit, au stockage, à la livraison et à l’assurance, ou encore à l’accomplissement des formalités douanières).

570. Afin d’assurer la bonne réception des produits dans les DROM, certains prestataires de réexpédition ont une implantation locale dans les DROM.

571. Le recours à un service de réexpédition nécessite donc pour le consommateur d’avoir connaissance de l’existence de ce type de service ; or le plus souvent, les sites qui ne proposent pas de livraison vers les DROM ne font pas apparaître cette solution dans le tunnel d’achat, lorsque l’internaute renseigne un code postal ultramarin. Certaines enseignes ont néanmoins des partenariats avec un prestataire de réexpédition, celui-ci étant alors proposé au client lors de sa passation de commande pour se faire livrer.

572. Certains prestataires de réexpédition proposent également aux consommateurs un stockage de leurs produits dans leurs entrepôts métropolitains, durant quelques semaines, de manière à permettre aux clients d’opérer un groupage de produits sur des commandes qu’ils passeraient séparément, éventuellement sur plusieurs sites de commerce en ligne, afin de réduire les frais de livraison. Les colis peuvent également être ouverts par le prestataire afin de s’assurer que les produits correspondent bien à la commande du client et qu’ils ne sont pas abîmés, ce qui permet d’éviter des retours inutiles et donc des frais supplémentaires.

573. Du point de vue des enseignes, le recours à un service de réexpédition permet d’accéder aux marchés des DROM tout en déléguant presque entièrement la gestion des aspects logistiques à un tiers. Les consommateurs ont quant à eux accès aux produits commercialisés par le site, sauf restrictions de produits émanant des transporteurs, et peuvent optimiser leurs frais de livraison grâce à un éventuel groupage de colis. Le service de réexpédition constitue donc potentiellement un facteur d’animation de la concurrence.

574. Bien qu’offrant une alternative crédible, ce service semble encore relativement méconnu et peu utilisé par les consommateurs ultramarins ; lorsqu’elles tracent cette activité, la plupart des enseignes consultées indiquent que le chiffre d’affaires ainsi réalisé via un prestataire de réexpédition est très marginal, de l’ordre de quelques dizaines de milliers d’euros annuels par DROM, ou correspondant à moins de 1 % du chiffre d’affaires lié au commerce en ligne français.

575. L’attractivité de cette solution alternative est également entravée par le paiement de la TVA au taux métropolitain – et non au taux réduit ultramarin – par le consommateur, puisque l’adresse du prestataire de réexpédition est située dans l’hexagone. Même si c’est bien le taux réduit qui sera in fine supporté par le client, celui-ci paye un prix total plus élevé que celui dont il est réellement redevable.

576. C’est pourquoi un ré-expéditeur auditionné par les services d’instruction de l’Autorité a développé une API (application programming interface, en français « interface de

programmation d’application ») qui, connectée au site de commerce en ligne, prend en compte la localisation du destinataire final du produit et permet au client ultramarin d’acheter le produit hors taxes, malgré une adresse postale métropolitaine (celle du ré-expéditeur). Ce système permet au client, tout en bénéficiant de frais de livraison réduits, de ne régler que la TVA locale, moins élevée que la TVA métropolitaine. Cette solution n’est cependant opérationnelle que sur un nombre très réduit de sites ; il nécessite l’accord de l’enseigne, qui devra en outre régler au prestataire un pourcentage de commission sur chaque transaction réalisée.

577. Lorsque cette API n’est pas opérationnelle, c’est-à-dire sur la majorité des sites de commerce en ligne, les enseignes vendent les produits toutes taxes comprises, l’adresse du prestataire de réexpédition étant métropolitaine. À l’arrivée du produit, les services des Douanes détaxent le produit du taux métropolitain, pour le re-taxer au taux local réduit, et appliquent également l’octroi de mer.

578. Ce système très innovant est encore peu utilisé et peut entraîner quelques difficultés de type administratives (absence de dédouanement, double taxation, etc.). Les prestataires de transport ou de réexpédition doivent par ailleurs remplir un formulaire douanier par

« importateur »182 – c’est-à-dire par client final destinataire du colis – ce document servant à liquider les droits et taxes dus à l’arrivée. Selon un prestataire de réexpédition auditionné par l’Autorité, cette formalité occasionne des frais (à distinguer des droits de douane, cf. supra point 516) situés entre 8 et 15 euros, répercutés sur le prix facturé au consommateur.

En pratique, pour une palette de 25 colis groupés à destination de 25 clients distincts, le prestataire de transport, généralement représentant en douane de l’enseigne de commerce en ligne, doit réaliser 25 déclarations différentes.

182 S’il autorise la déclaration de marchandises soumises à des taux de taxation différents sur un seul et même formulaire lorsque celles-ci sont à destination du même consommateur ultramarin, le code des douanes de l’Union ne permet en revanche pas une déclaration unique pour des marchandises soumises à des taux de taxation différents à destination de plusieurs consommateurs ultramarins.

Dans le document Avis 19-A-12 du 04 juillet 2019 (Page 134-137)