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Inuence du rapport J 1

2.4 Analyse spectrale du hamiltonien

2.4.2 Inuence du rapport J 1

J2(1−2u2) J1(−2uv) J1(−2uv) J2(1−2v2)

avec u = sina2qx et v = sina2qy. Les valeurs propres de cette matrice décrivent deux bandes d'énergie dans l'espace réciproque. Si le spectre possède un minimum localisé, alors le réseau a un état fondamental bien déni. Si la bande de basse énergie est plate, l'état fondamental est massivement dégénéré et le système se comporte à basse température comme un liquide de spin. Le prol de la bande de basse énergie est déterminé par les valeurs relatives des couplages J1 et J2.

2.4.2 Inuence du rapport

J1

J2

sur le spectre

En diagonalisantJ dans le cas général (J1 6=J2), nous pouvons observer comment évolue la bande de basse énergie en fonction des couplages. Nous allons voir que le système exhibe trois phases distinctes selon les valeurs de J1 etJ2.

Cas J1 > J2 La bande de basse énergie possède des minima clairement dénis aux points M de l'espace réciproque, associés à l'état AF. Comme cet état fondamental est doublement dégénéré, son entropie par site est nulle. Il correspond au pavage de vertex T1 qui apparaît communément dans le réseau carré expérimental. En eet, avec des interactions dipolaires nous avons J1 = 3√

2 et J2 = 2. La glace carrée expérimentale se trouve donc bien dans le cas J1 > J2. La bande de basse énergie est représentée en gure 2.19a pour J1 = 2 et J2=1. Cas J1 = J2 Les couplages sont maintenant équivalents (J1 = J2 =J). Le spectre corre-spondant est représenté en gure 2.19b pourJ1 =J2 = 1. Les valeurs propres deJ décrivent

deux bandes d'énergie Eice(q) etEice(q) qui s'expriment : Eice(q) = 2Jsin2 qx

2 + sin

2 qy

2 −1 et Eice(q) =−2J La bande de basse énergieEice

est constante en tout point de l'espace réciproque, elle est donc plate. L'état fondamental est massivement dégénéré et le système présente des caractéristiques d'un liquide de spin. Les vecteurs propres V etV associés aux deux bandes s'expriment :

Vice = √ 1 u2+v2 v −u Vice = √ 1 u2+v2 u v (2.20) Nous montrerons dans la section 2.4.3 que Vice décrit bien les états ice rule. Comme cette bande est plate (cf. g. 2.19b), les états ice rule ont la même énergie et le système exhibe la physique du modèle de Lieb. Nous avons vu au chapitre 1 que cette phase possède une entropie par site égale à S = 43kBln32 [55] (cf. Ÿ1.2.2).

0 0 a) E (a.u.) 0 0 E (a.u.) 0 0 E (a.u.) b) c)

Figure 2.19 Représentation des deux bandes du réseau carré, calculées dans la première zone de Brillouin pour : a) J1 = 2, J2 = 1 b) J1 = 1, J2 = 1 et c) J1 = 1, J2 = 2. La bande plate qui apparaît en b) indique que l'état fondamental du système est massivement dégénéré. Cas J1 < J2 La bande de basse énergie présente des minima au niveau des axes (qx = 0) et (qy = 0). L'ordre est localement ferromagnétique car le réseau se compose entièrement de vertex T2 aimantés. Cependant, la bande ice rule est encore dégénérée sur les axes (qx= 0) et(qy = 0). Cela signie que le réseau est globalement désordonné. Une telle conguration est représentée en gure2.20a. Elle est constituée de lignes de spins aimantées traversantes, mais indépendantes les unes des autres. Calculons maintenant l'entropie de cette phase, que nous appelons F (localement ferromagnétique). Comme les spins sont corrélés en lignes, le réseau en gure 2.20a possède le même nombre d'états que les deux groupes de spins indépendants de la gure 2.20b. Un réseau deN spins dans cette phase a donc les mêmes degrés de liberté que 2√

N spins indépendants. Le nombre d'états de cette phase s'exprime alors : Ω = 22

N

À partir de Ω et de l'expression de l'entropie statistique, nous en déduisons l'entropie par site : S = 1 NkBln Ω = 2kBln 2 √ N (2.21)

Bien que le nombre d'états Ω augmente exponentiellement avec la largeur du système, l'en-tropie par site de la phase F tend vers 0. Il ne s'agit donc pas à proprement parler d'une phase massivement dégénérée. Remarquons que cette dégénérescence peut être levée en ajoutant à J des termes d'interaction à longue portée. L'état fondamental serait alors de type lignes de spins alternées (cf. g. 2.20c). Nous appelons cet état Manhattan (M), par analogie avec la circulation routière de ce quartier.

a) b) c)

Figure 2.20 a) Réseau de 60 spins dans un état de la phase F, composé entièrement de vertex T2 localement aimantés. b) De part les corrélations de la phase F, ces dix spins indépendants susent pour reconstruire le réseau en a). c) État ordonné de type Manhattan, composé de lignes alternées. Il s'établit sous l'eet de l'interaction dipolaire entre troisièmes voisins J3.

Selon les valeurs relatives de J1 et J2, l'état fondamental du réseau peut donc être de type ferromagnétique, antiferromagnétique ou massivement dégénéré. Nous montrerons au chapitre 4 comment avoir un contrôle direct du rapport J1

J2 dans un réseau expérimental. Posons-nous maintenant la question du sens physique de ces spectres.

Lien entre énergie des bandes et état magnétique Une conguration de spin donnée dans l'espace direct n'est pas localisable de façon simple sur le spectre. Cependant, une telle correspondance peut être établie pour certaines congurations ordonnées. Leur facteur de structure doit présenter des pics de Bragg sur des points de haute symétrie de l'espace réciproque. L'état est alors localisé de façon ponctuelle. Et même dans ce cas, l'identication de la bande du spectre décrivant cette conguration reste un problème délicat. Il peut exister des états spectralement purs pour lesquels ne contribue qu'une seule bande. Mais l'énergie d'un état peut aussi résulter de la combinaison de plusieurs bandes. Nous nous proposons ici de localiser sur le spectre quelques congurations par un raisonnement énergétique simple. Nous allons calculer l'énergie d'états ordonnés puis, pour chacun, identier la bande d'énergie correspondante.

Glace dégénérée J1 = J2 = J Le spectre du modèle de glace conventionnelle, avec J1 = J2 = J, possède une bande plate d'énergie Eice

= −2J par maille unité. Celle-ci est supposée représenter les états ice rule du réseau inni dans l'espace direct. Pour vérier cette armation, calculons l'énergie de deux états ice rule typiques : l'état aimanté et l'état AF.

a) b) c)

Figure 2.21 Représentation des interactions entre une maille (en rouge) et le réseau en-vironnant (en blanc), dans un modèle d'interactions à courte portée J1, J2. Pour le calcul de l'énergie par maille, les interactions en traits pleins (resp. pointillés) sont comptées positive-ment (resp. négativepositive-ment). Les trois cas correspondent aux congurations a) aimantée, b) antiferromagnétique, c) de type all in/all out.

La gure2.21a représente les interactions d'une maille de l'état aimanté avec son environ-nement. Tous les vertex sont de type 2. L'énergie de cette maille s'exprime comme la somme des interactions internes avec la moitié des interactions externes :

ET2 = (Einterne) + 1

2(Eexterne) = J1+ 1

2(−4J1+ 2J1−4J2) = −2J2 =−2J

Calculons maintenant l'énergie de l'état AF représenté en gure 2.21b. Un même raison-nement montre que son énergie vaut :

ET1 =−J1 +1

2(−6J1+ 4J2) = −4J1+ 2J2 =−2J

Pour les deux congurations ice rule triviales, nous avons calculé dans l'espace direct une énergie par maille identique à celle de la bande de basse énergie dans l'espace réciproque. De la même manière, nous pouvons identier l'état de plus haute énergie. Celui-ci est composé d'un arrangement antiferromagnétique de vertex T4 (all in/all out) (cf. g. 2.21c). L'énergie par maille de cet état vaut :

ET4 =J1 +1

2(6J1+ 4J2) = 4J1+ 2J2 = 6J

Cette valeur correspond bien aux maxima du spectre du modèle de glace dégénérée, localisés enM. Nous obtenons encore une correspondance parfaite entre l'énergie calculée dans l'espace direct et celle lue sur le spectre.

Cas J1 6= J2 La dégénérescence de la bande ice rule est maintenant levée. Nous traitons le cas du spectre en gure 2.19a, avec J1 = 2 et J2 = 1. Les énergies par maille des trois congurations précédentes s'expriment maintenant :

Comme la bande ice rule n'est plus plate, il faut tenir compte de la localisation dans la première zone de Brillouin des états d'énergie ET1 et ET2. À l'état aimanté d'énergie ET2 correspond un pic de Bragg en Γ. À l'état AF d'énergie ET1 sont associés des pics en M. L'observation du spectre en gure 2.19a permet de retrouver les énergies ET1 et ET2 sur la bande ice rule. L'état d'énergie ET4 est lui toujours localisé sur la bande excitée.

La correspondance entre ces états particuliers et les bandes d'énergie peut sembler triviale. Pourtant, nous montrerons au prochain chapitre que cette propriété n'est pas toujours vraie. Dans la partie suivante, nous allons vérier que la bande de basse énergie des spectres en gure 2.19 est bien associée aux états ice rule.