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3. Cadre théorique

3.1. Démocratie directe en Californie

Aux Etats-Unis, toutes les constitutions étatiques contiennent des éléments de démocratie directe (Möckli, 1994). Cependant, seulement la moitié des Etats ont des instruments tels que le référendum, l’initiative, ou le recall (Wagschal, 1997). Ce dernier permet au peuple de convoquer une nouvelle élection en cours de mandat (gouverneur par exemple) si il estime que l’élu a trahi sa confiance (Michelot, 2010). Nous souhaitons cependant nous concentrer dans cette étude sur les initiatives soumises au référendum. En effet, parmi les différentes formes de « citizen lawmaking », les ballot initiatives sont les plus courantes (Kesselman, 2011). Elles peuvent soit être une proposition d’un nouveau texte législatif, soit un amendement de la Constitution. Comme on le voit sur la carte ci-dessous, seulement certains Etats autorisent les deux types d’initiatives (constitutionnelles et législatives) ainsi que le référendum. Les initiatives constitutionnelles amendent le texte organique de l’Etat, alors que les initiatives législatives proposent l’adoption d’une loi et les référendums sont des validations par le peuple de lois votées par l’Assemblée législative (Michelot, 2010).

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Source: ballotpedia.org

De nombreuses importantes lois ont été adoptées par ce biais: quelques exemples datant du début du XXème siècle incluent l’assurance contre les accidents au travail en 1910 dans l’Oregon, l'interdiction du travail des enfants dans l'Arkansas en 1914, la retraite dans l'Arizona en 1914, ou encore la limitation de la journée de travail à huit heures dans le Colorado et l'Oregon en 1912 (Heußner, 1999). Les sujets se sont multipliés depuis, avec des référendums concernant aussi bien les taxes, que la drogue, les droits sociaux, l’immigration, l’avortement, ou encore l’environnement.

Les ballot measures ont en effet été des arènes de choix pour les « guerres culturelles » aux Etats-Unis, notamment du côté des conservateurs, dont le but est de mobiliser des « moral voters » (Kesselman, 2011). Mariage gay, avortement, et immigration, sont par exemple des sujets à la fois sensibles et controversés, et dont de nombreuses propositions les concernaient directement.

Ainsi, en 2008, l’Etat d’Arkansas a refusé l’adoption aux couples gays, ainsi qu’à tout couple non-marié. L’Arizona et la Californie ont aussi adopté des lois anti-mariage gay la même année, et en novembre, 41 Etats avaient passé les amendements constitutionnels définissant pour la plupart l’institution maritale comme étant l’union d’un homme et d’une femme (ibid, 2011). Dans l’Etat du Colorado, une proposition voulait définir la vie humaine comme existant à partir du moment de la fertilisation, ce qui aurait eu de très graves conséquences pour le droit des femmes à l’avortement (ibid, 2011). Un autre exemple est celui de cannabis, interdit au niveau fédéral, mais pour lequel de nombreuses initiatives ont eu lieu au niveau étatique afin de la décriminaliser (utilisation, possession, ou vente). Cela s’est produit dans le Colorado, le Michigan, et l’Utah en 2000, ainsi, que dans l’Etat du Massachusetts en 2008. En revanche, des mesures similaires ont été rejetées en Dakota du Sud, Oregon, Alaska, Nevada, et Ohio. Dans l’Etat de Washington, une initiative datant de 2008 n’a pas récolté assez de signatures pour être au ballot. Enfin, en Californie, la marijuana est décriminalisée, mais la proposition 19 (2010) a été rejetée (personal cultivation, possession and transportation) (ibid., 2011). Ces dernières années, de nombreux débats et affrontements ont aussi porté, dans le secteur de l’éducation, sur l’autorisation et le développement des charter schools. Ces écoles sont publiquement financées, mais ont une gestion privée. Elles sont souvent définies comme

« independant public schools of choice, freed from rules but accountable for results » et les

personnes à leurs têtes peuvent être un groupe de parents ou de professeurs, une entreprise privée,

ou encore une organisation communautaire (Finn, Manno, and Vanourek, 2000). Leur effectivité

(principal argument de leur défenseurs) par rapport aux écoles traditionnelles est plutôt mitigée

(Bettinger, 2005). Pourtant, si l’on regarde l’activité législative au niveau étatique, il semblerait que

ce type d’école ait de plus en plus de soutien dans le public agenda (McNeal and al., 2007). L’Etat

du Minnesota a été le premier à adopter cette réforme de l’éducation, en 1991, qui s’est depuis développée dans la majorité des Etats (ibid, 2007). Le principal problème, pour ses détracteurs, est que n’importe qui peut les créer, et que ces derniers sont libres du programme enseigné. De plus, comme elles fonctionnent principalement comme des entités privées, il y aurait un véritable manque de transparence. Avec ces quelques exemples, on peut donc comprendre que les résultats de la plupart des initiatives populaires aux Etats-Unis ont des implications majeures, et ce dans la plupart des domaines. Selon Kaussman (2011): « citizen lawmaking is a privileged tool for grasping the American political psyche -how individuals attitudes and behaviors interact with politics- and the reflexive tactical adaptations by parties and interest groups » (p. 4). On aurait donc une meilleure perception en étudiant les ballot measures, qui nous font réfléchir au-delà de la simple polarisation entre deux types d’Etats « red conservative Republican » ou « blue liberal Democrat » (ibid). L’Etat auquel nous nous intéressons principalement dans cette étude, la Californie, a adopté en 1911 les initiatives populaires, en tant que moyen d’autoriser les citoyens à directement promulguer des lois et même à amender la Constitution sans devoir accéder aux représentants. Selon Berg et Holman (1989): « the process was instituted in reaction to an unresponsive legislature dominated heavily by well-financed and professional special interest groups ». Rarement utilisées au début du siècle, ces mesures d’initiatives populaires sont devenues pour certains groupes de citoyens le meilleur moyen de défendre leurs intérêts particuliers (Douzet et Cain, 2007). Elles peuvent aussi servir comme outil de contournement de la législature en place par le gouverneur, comme lorsqu’en 2005, Arnold Schwarzenegger avait (en vain) tenté de court-circuiter le pouvoir législatif (ce dernier étant opposé à ses projets de lois) en soutenant des mesures d’initiative populaire (ibid, 2007). Au niveau légal, certains critères doivent être respectés afin de « qualifier » une initiative pour qu’elle soit soumise au vote. Pour le premier type d’initiative (constitutionnelle), il s’agit de 5 % du total des électeurs ayant participé au dernier scrutin pour l’élection au poste de gouverneur. Pour les deuxième et troisième types, il s’agit de 8 %. Le nombre de signatures doit être obtenu sous 150 jours. Si la pétition rassemble moins de 95 % des signatures nécessaires, elle est disqualifiée (donc non soumise au vote); si elle rassemble plus de 110 % des signatures nécessaires, elle est qualifiée et inscrite au vote. En revanche, si elle rassemble entre 95 % et 110 % des signatures nécessaires, cela entraîne automatiquement une vérification individuelle de toutes les signatures (dans les 30 jours) .

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La Californie fait partie des Etats ayant eu le plus recours à ces outils de démocratie directe: « seul l’Oregon – historiquement à l’origine de l’introduction de cet acte de démocratie participative

Informations sur le site du California Secretary of State Alex Padilla:

http://www.sos.ca.gov/elections/ballot-measures/how-qualify-4

initiative/

directe dans la pratique politique américaine au début du xx e siècle – vote plus que la Californie » (Michelot, 2010, p.1). Son expérience dans ce domaine en fait donc un cas exemplaire (Kehler et Stern, 1994), et les consultations populaires sont une composante importante de l’identité institutionnelle de cet État, ces dernières ayant des effets très importants sur la vie publique. Le référendum le plus célèbre du pays a d’ailleurs eu lieu dans celui-ci: il s’agit de la Proposition 13, acceptée en 1978, et qui prévoyait un plafonnement des taxes foncières à 1 % de la valeur des biens, ce qui a eu pour conséquence « une baisse de 57 % des revenus de cet impôt pour l’État de Californie » (Michelot, 2010, p.2). La Californie a souvent servie de modèle aux autres Etats, comme avec la célèbre loi des « 3 strikes », passée en 1994 (proposition 184), et qui a ensuite été exportée ailleurs dans le pays. Cette loi prévoit l’enfermement des récidivistes pour au moins 25 ans à la troisième infraction (peu importe qu’elle soit minime), si les deux premières ont eu un caractère violent, ce qui a conduit à une véritable explosion de la population carcérale (Douzet et Cain, 2007).

L’Etat de Californie, en 2016, était aussi de loin celui qui récoltait le plus de contributions pour les propositions allant être votées, avec un total de 313 millions, soit 289 millions de dollars de plus que la Floride (se trouvant en deuxième position). Suivent le Nevada (5.95M), l’Arizona (5.52 M), l’Oregon (4.44M), le Maine (4.38M), et le Dakota du Sud (4.33M) (The Pew Charitable Trusts, 2016). Au niveau des secteurs, c’est celui de la santé qui récolte le plus de donations (parmi tous les Etats), avec un total de 155.5 millions de dollars, suivi d’assez loin par le secteur de l’énergie (19.7 M), puis la marijuana (19.2M), les armes à feu (12.4M), l’éducation (9.6M), l’application de la loi (6.8M), et le salaire minimum (3.2M) (Ibid, 2016). La Californie est également spéciale de part une bonne disclosure des donateurs, si on la compare aux autres Etats, avec des lois plus dures qu’ailleurs concernant la transparence (et donc une meilleure perception des intérêts privés qui sont derrière ces contributions). Le rapport des contributions faites se font en fonction du type de comité.

En effet, les contributions passent généralement par ce que l’on appelle des ballot measures

committees. Selon la California Fair Political Practices Commission (FPPC), ce genre de comité est

défini comme suit: « any person or group receiving contributions of $2,000 or more in a calendar

year for the qualification, passage, or defeat of a ballot measure or ballot measures ». En 1981, la

Cour Suprême des Etats-Unis a voté sur le fait que si les restrictions de donations pour les candidats

sont possibles, limiter l’argent qui va aux campagnes concernant les initiatives violerait le Premier

Amendement, soit la liberté d’expression (in Citizens Against Control v. City of Berkeley). Les

limitations aux contributions directes pour les ballot measures étant inconstitutionnelles, il existe

donc moins d’incentives à l’independent spending, qui représente seulement 10 % des donations en

Californie entre 2006 et 2010 selon le site FollowTheMoney.org (195’005’934 dollars d’independent spending vs 1’967’086’655 dollars de contributions directes aux campagnes étatiques). La principale différence entre ces deux types de donations est que les dépenses indépendantes ne sont pas coordonnées par un quelconque comité, mais sont directement utilisées dans des canaux de communication politique tels que la télévision, la radio, les mails, etc. (NCSL, 2017). Pour ce qui est des contributions directes aux ballot measure committees: un comité est dit

« primarily formed » si il a été créé dans le but de soutenir ou d’opposer une mesure (ou plus, mais étant votées durant la même élection), ou alors si il utilise au moins 70% des ses contributions totales pour supporter ou opposer une mesure (ou plus, et toujours durant la même année) (FPPC).

Un comité est qualifié de « general purpose » si il a été créé afin de supporter ou d’opposer des propositions dans plus d’une élection ou plus d’une juridiction (ces comités sont généralement associés à un secteur spécifique). Ainsi, pour la première catégorie, ils doivent rapporter toutes les contributions supérieures à $1,000 ou plus, et pour la seconde, toutes celles à partir de $5,000 (ibid).

De plus, les comités « primarily formed » qui récoltent plus de $1,000,000 doivent fournir une liste de leurs 10 contributeurs les plus importants (FPPC

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). Cela nous amène aux principales règles concernant la finance des campagnes visant à l’acceptation ou au refus des initiatives populaires proposées, ainsi qu’à comment elles peuvent impacter l’opinion publique et donc les résultats.

3.2. Campaign Finance & Agenda Shaping

De nombreuses réformes ont eu lieu concernant la régulation du financement des campagnes

politiques, particulièrement après des scandales tels que le Watergate, lorsque le public a été mis au

courant que la campagne de Nixon avait forcé plusieurs compagnies à donner (secrètement) des

milliers de dollars chacune (Clawson, 2001). La régulation de l’argent en politique se fait

généralement par l’imposition de la transparence (disclosure), ainsi que par la limitation des

contributions faites aux campagnes électorales des candidats (NCSL, 2015). Le FECA (Federal

Election Campaign Act) de 1971 définit les principales règles à respecter pour ce qui est de combien

des individus peuvent donner aux PACs, partis, ou candidats. En 1974, la FEC (Federal Election

Commission) a été créée afin de contrôler que l’application de ces règles. Cependant, les Etats,

selon le 10ème amendement de la Constitution, conservent toujours un certain pouvoir au niveau législatif. Ainsi, même si le FECA et la FEC procurent un cadre général pour tous, c’est en réalité au niveau étatique qu’est régulé le financement des campagnes. Cependant, la Cour Suprême de Justice a émis ces dernières années de nombreuses décisions obligeant tous les Etats à s’y plier.

Pour ce qui est des propositions, l’arrêt ‘First National Bank of Boston v. Bellotti, 435 U.S. 765’ de 1978 stipule que les Etats ne peuvent pas interdire aux corporations d’y contribuer financièrement.

En 1981, avec ‘Citizens Against Rent Control v. City of Berkeley, 454 U.S. 290’, la Cour a décidée

qu’il ne pouvait pas y avoir de limites aux contributions pour les ballot initiatives. Par conséquent,

la loi californienne qui les limitaient auparavant a été invalidée. Les donations faites ne sont donc

pas limitées, et n’importe quelle entreprise ou individu peut mettre des millions dans la proposition

puis dans le soutien (ou l’opposition) à une initiative. Alors que l’utilisation du référendum est

généralement pensée comme un contre-pouvoir, et comme une manière pour le peuple de

s’exprimer directement dans un contexte de frustration grandissante envers l’establishment et les

représentants au niveau fédéral, ces décisions renforcent le pouvoir de l’élite américaine dans le

processus politique. De plus, Berg et Holman (1989) expliquent que depuis 1978, il y a eu un clair

tournant vers une professionnalisation de ce processus de démocratie directe en Californie: « what

was once a valuable agenda-setting mechanism for citizens has increasingly become a tool of

professional special interest groups ». Il y aurait une dichotomie grandissante entre les initiatives

qui se qualifient pour le vote et celles qui échouent avant même d’avoir été présentées. En plus

d’une très forte augmentation des donations, ces dernières aurait plus de chance d’être utilisées pour

faire appel à des services spécialisés dans la récolte de signatures (Ibid, 1989). Il y a deux étapes

principales qui demandent un financement important: la première est la proposition d’une initiative

(récolte de signatures suffisante pour qu’elle soit sélectionnée), et la seconde est le soutien ou

l’opposition à une initiative jusqu’à la votation populaire. Selon Overton (2004), le vrai problème

dans le financement de campagne, c’est que de très importantes inégalités de richesse vont causer

d’importantes inégalités dans la participation citoyenne. En effet, avec une telle professionnalisation

et des fonds massifs destinés à influencer l’opinion publique, il est difficile pour des citoyens plus

modestes de s’y mesurer, et de réunir à la fois assez de temps, d’argent, et de volontaires. Cette

étape, « the billion-dollar petition-drive market (…) is far from the romantic image of street-corner

activists hailing down concerned citizens to promote a worthy cause »: « the bustling business

collects signatures for a fee. » (Kesselman, 2011, p. 8). Cela est encore plus inquiétant sachant que

les lois ou les modifications constitutionnelles votées ont un impact tout à fait tangible sur la

population. En effet, selon Matsusaka (2005): « many of the critical policy innovations of the last

several decades were ignited and fueled by initiatives, including term limits, physician-assisted suicide, legalized gambling, medical marijuana, capital punishment, abortion, racial preferences/

affirmative action and, of course, tax cuts ». Il conclut ainsi que: « to a remarkable degree, initiatives and referendums are driving the policy agenda in the states ». Il est alors nécessaire de s’intéresser à la question de comment l’agenda politique est façonné, de ce qui fait le succès des policy proposals. Généralement, lorsque l’on parle d’agenda shaping, on a tendance à penser qu’il s’agit simplement de l’introduction de nouvelles thématiques ou de nouveaux problèmes à l’agenda.

Cependant, Tallberg (2003) n’est pas convaincu que cette définition suffise. Il propose donc de distinguer entre 3 formes d’agenda shaping: agenda setting, agenda structuring, et agenda exclusion. Selon lui, ces trois formes d’influence sont à la fois distinctes et mutuellement exclusives, puisque l’agenda-setting réfère à l’introduction de nouvelles issues sur l’agenda politique; l’agenda-structuring à l’amplification (ou diminution) de certaines issues étant déjà sur l’agenda; et l’agenda-exclusion, enfin, au blocage actif de certaines issues afin d’éviter qu’elles ne s’y retrouvent. L’agenda-setting a souvent tendance à être vu comme la manipulation d’idées et d’informations à des fins privées, ou encore comme fournissant des focal points autour desquels les négociations peuvent converger (Garrett and Weingast 1993). Pour ce qui est de la capacité d’influencer les décisions politiques en mettant l’accent sur certains éléments ou non (agenda structuring), elle est apparemment assez peu reconnue en tant que catégorie indépendante (Tallberg, 2003). Cependant, elle semble essentielle afin de comprendre à la fois les stratégies des acteurs souhaitant pousser l’agenda dans une certaine direction, ainsi qu’une partie des raisons pour lesquelles les citoyens vont voter. Enfin, ce que Tallberg appelle agenda exclusion réfère en réalité au deuxième « visage » du pouvoir, c’est-à-dire celui de la non-décision (Bachrach et Baratz, 1962).

Comprendre le concept de pouvoir, ce qu’il est, et qui le détient, est central pour toute analyse en

Science Politique. Luke distingue 3 dimensions du pouvoir (the 3 faces of power). La première est

celle de l’overt decision: « A has power over B to the extent that he/she can get B to do something

that B would not otherwise do » (Dahl, 1957 : 203). Selon Lukes (1974: 19): « …this first, one

dimensional, view of power involves a focus on behavior in the making of decisions on issues over

which there is observable conflict of (subjective) interests, seen as express policy preferences,

revealed by political participation ». La deuxième dimension est celle du covert agenda setting

(Bacharach et Baratz, 1962: 948): « Power is also exercised when A devotes his or her energy to

creating or reinforcing social and political values and institutional practices that limit the scope of

the political process to public consideration of only those issues which are comparatively innocuous

to A ». Cette vision à deux dimensions permet de considérer « the ways in which decisions are

prevented from being taken on potential issues » (Luke: 25). Enfin, la dernière, latent preference shaping, est définit par Lukes (: 24) comme suit: « to prevent people, to whatever degree, from having grievances by shaping their perceptions, cognitions, and preferences in such a way that they accept their role in the existing order of things, either because they can see or imagine no alternative to it, or because they see it as natural and unchangeable, or because they value it as divinely ordained and beneficial ». De nombreux académiques et journalistes s’interrogent en effet sur la compétence ainsi que sur l’attention des citoyens par rapport à des issues qui sont complexes:

« and if they are not competent, if they can be manipulated into passing laws harmful to the general public » (Matsusaka, 2005). Si l’on se base sur ces différentes manières d’envisager le pouvoir, on peut se demander si, effectivement, les votes ne pourraient pas être biaisés en la faveur d’une minorité qui réussirait à manipuler l’opinion publique et à pousser l’agenda politique en sa faveur.

Les acteurs sont en effet « intentionnels », et ils ont une certaine marge d’appréciation et de

manoeuvre (Knoepfel and al., 2015). De plus, ils vont exploiter les « zones d’incertitude » (Crozier,

1963) des champs sociaux ou domaines politiques afin de promouvoir leurs propres valeurs, idées,

et intérêts (Knoepfel and al., 2015). En plus des zones d’incertitude, les acteurs disposent aussi de

ressources (humaine, monétaire, temporelle, etc.) qui leur permettent de parvenir à leurs fins (ibid,

2015). Selon Klok (1995), l’ « argent » est la ressource la plus intuitive, puisqu’elle est nécessaire à

à la mise en oeuvre de toute politique publique (Knoepfel and al., 2006). Cette ressource réfère à la

capacité des acteurs de mobiliser des fonds leur permettant d’atteindre les objectifs qu’ils se sont

fixés et/ou de modifier l’attitude d’autres acteurs (Lambelet et Pflieger, 2016). Dans le cas des

initiatives, cet argent est souvent utilisé pour la récolte de signatures, ainsi que dans une « guerre

des idées » qui apparaît dès le début du processus: « the best ones excel at framing the terms of

public debates and putting specific ideas on the national agenda (or knocking other ideas

Les acteurs sont en effet « intentionnels », et ils ont une certaine marge d’appréciation et de

manoeuvre (Knoepfel and al., 2015). De plus, ils vont exploiter les « zones d’incertitude » (Crozier,

1963) des champs sociaux ou domaines politiques afin de promouvoir leurs propres valeurs, idées,

et intérêts (Knoepfel and al., 2015). En plus des zones d’incertitude, les acteurs disposent aussi de

ressources (humaine, monétaire, temporelle, etc.) qui leur permettent de parvenir à leurs fins (ibid,

2015). Selon Klok (1995), l’ « argent » est la ressource la plus intuitive, puisqu’elle est nécessaire à

à la mise en oeuvre de toute politique publique (Knoepfel and al., 2006). Cette ressource réfère à la

capacité des acteurs de mobiliser des fonds leur permettant d’atteindre les objectifs qu’ils se sont

fixés et/ou de modifier l’attitude d’autres acteurs (Lambelet et Pflieger, 2016). Dans le cas des

initiatives, cet argent est souvent utilisé pour la récolte de signatures, ainsi que dans une « guerre

des idées » qui apparaît dès le début du processus: « the best ones excel at framing the terms of

public debates and putting specific ideas on the national agenda (or knocking other ideas

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