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5.2 Extension aux “super-volcans” siliciques : formation de caldeira

5.2.1 Introduction

Bachmann and Bergantz(2008) r´esume l’´etat des connaissances sur les r´eservoirs de magma qui produisent des super-´eruptions. En reprenant les trois points qu’il met en avant comme base, nous pouvons dresser le r´esum´e suivant.

Premi`erement, les chambres magmatiques qui produisent des super-´eruptions ont un volume compris entre 450 km3 et 5000 km3. Cependant, il existe des cas d’´eruption si- licique ayant ´emis de plus petits volumes de magma et ayant quand mˆeme abouti `a la formation de caldeira (Caricchi et al., 2014). Les grands volumes ´emis montrent qu’il doit exister dans la croˆute des ´enormes zones de magma comportant moins de 50 % de cristaux. Il y a de nombreuses ´evidences que ces chambres magmatiques sont construites par une succession d’injections magmatiques sur une dur´ee allant jusqu’`a 106ans. Il y a ´egalement des ´evidences que le magma dans la chambre magmatique est remobilis´e ra- pidement (Gardner et al., 2002; Wotzlaw et al., 2014, 2015;Wilson and Charlier, 2016;

Troch et al., 2017). Enfin, lors de leur croissance les cristaux semblent voir diff´erentes compositions (Myers et al., 2016; Loewen et al., 2017). Le fait de savoir si la zone de stockage, qui inclue le mush r´esiduel, est significativement plus grande que la chambre magmatique ou non est toujours d´ebattu, car la pr´esence de plutons r´esiduels n’est pas observ´ee (Lundstrom and Glazner,2016).

Deuxi`emement, les chambres magmatiques ont un faible rapport d’aspect. Le rap- port entre la hauteur et la largeur est de l’ordre de 1/5 `a 1/10. Ce faible rapport d’aspect et le diam`etre des caldeiras produites montrent que les chambres magmatiques ont une ´epaisseur comprise entre 1 et 2 km. Cette ´epaisseur moyenne est constante aussi bien pour les petites caldeiras que pour les grandes (Caricchi et al.,2014).

Troisi`emement et derni`erement, les donn´ees p´etrologiques montrent que les chambres magmatiques qui produisent des super-´eruptions sont presque toutes situ´ees `a une profon- deur dans la croˆute comprise entre 4 et 10 km (Bachmann and Bergantz,2008).

Le fait de ne pas imager des chambres magmatiques ayant un volume entre 450 km3et 5000 km3laisse penser que leur existence est ´eph´em`ere (Lundstrom and Glazner, 2016;

Wotzlaw et al., 2015). La faible hauteur totale des chambres magmatiques ainsi que le fait qu’elles soient construites par plusieurs pulses de magma, laissent penser qu’elles pourraient ˆetre stock´ees `a l’´etat solide durant la plus grande partie de leur vie (Michaut and Jaupart,2011;Cooper and Kent,2014;Lundstrom and Glazner,2016;Cooper,2017;

Rubin et al.,2017).

Pour r´esoudre le probl`eme pos´e par le fait qu’un cristal voit diff´erentes compositions au cours de sa croissance,Cashman et al.(2017) proposent que la zone de stockage s’´etend sur toute la hauteur de la croˆute. Ce gigantesque mush est parsem´e de fines chambres mag- matiques en forme de sill, qui se connectent rapidement au moment de l’´eruption. Ce qui permet ´egalement d’expliquer la mobilisation rapide d’un grand volume ´eruptible dans la croˆute.

L’ensemble de ce r´esum´e montre comment la vision des chambres magmatiques s’est adapt´ee aux r´esultats issus de la p´etrologie et de l’imagerie g´eophysique. Cependant, le lien avec la raison physique pouvant expliquer la formation d’une chambre magmatique reste peu regard´e. Notamment la raison physique pouvant expliquer que la grande ma- jorit´e des ´eruptions ait d´emarr´e d’une chambre magmatique situ´ee entre 4 et 10 km de profondeur. De plus, il est assez ´etonnant que, quelle que soit la largeur de la caldeira, la hauteur de la chambre magmatique soit comprise entre 1 et 2 km.

L’hypoth`ese d´evelopp´ee dans l’introduction de cette th`ese au chapitre1, s’appuie sur l’´etat thermique de la croˆute proche des syst`emes actifs, et sur la faible flottabilit´e du magma silicique. La faible masse volumique du magma silicique fait que sa flottabilit´e est positive dans la croˆute continentale. Leur masse volumique peut mˆeme ˆetre encore r´eduite par l’exolution des volatiles qui forment des bulles dans le magma. Physique- ment, ces magmas sont donc soumis `a une force qui les pousse vers le haut. Ces magmas peuvent provenir aussi bien de la fusion partielle d’une partie de la croˆute (Huppert and Sparks,1988;Dev`es et al.,2014) que de la diff´erenciation d’un magma plus basique (An- nen et al.,2006). Ind´ependamment de l’origine de ces magmas siliciques, ils sont produits au niveau d’une croˆute continentale anormalement chaude. La transition entre la partie de la croˆute ayant un comportement ductile et celle ayant un comportement fragile remonte donc jusqu’`a de faibles profondeurs. La rh´eologie ductile de la croˆute ayant tendance `a favoriser la formation de diapir. Le magma silicique doit donc remonter jusqu’`a ˆetre arrˆet´e par la transition fragile-ductile dans la croˆute.

La figure5.12a ´et´e construite `a partir des tableaux5.2et5.3. Elle repr´esente la com- paraison entre la profondeur de la transition fragile-ductile (BDT sur la figure) et celles du stockage avant ´eruptions des magmas pour 5 volcans. Le tableau5.2r´esume toutes les profondeurs de stockage que nous avons trouv´ees dans la litt´erature. Le tableau5.3 cor- respond `a un r´esum´e des profondeurs de la transition fragile-ductile qui ont ´et´e trouv´ees dans la litt´erature. Lorsque c’´etait possible nous faisons la distinction entre la profondeur de la transition au centre du syst`eme volcanique (H(r = 0)) et celle loin du syst`eme actif (H0).

Sur la figure5.12, la variation dans la profondeur de stockage est repr´esent´ee par une barre verticale mauve. Lorsque nous utilisons plusieurs sources bibliographique diff´erentes pour un mˆeme volcan, nous plac¸ons une barre verticale par source. La profondeur de la transition fragile-ductile est repr´esent´ee par la zone grise. Le haut de zone grise corres- pond `a la profondeur la plus faible donn´ee dans la litt´erature, et le bas la profondeur la plus grande. Les deux volcans les mieux document´es sont le Yellowstone (Yw) et les Champs Phlegr´eens (C-F) : pour ces deux volcans il a ´et´e possible de trouver H0 et H(r = 0).

La profondeur de la transition fragile-ductile pour le Taupo (TVZ) et le Santorin (Sant) sont moins bien contraintes. Nous supposons que les profondeurs trouv´ees dans le cas du Santorin correspondent `a H(r = 0). Cependant, la figure5.12 montre qu’il y a bien une similitude entre la profondeur de stockage avant ´eruption et la profondeur de la transition fragile-ductile.

TV Z C -F Yw Sa nt To b −17.5 −15.0 −12.5 −10.0 −7.5 −5.0 −2.5 0.0 Pr ofo nd eu r

(km

)

Gamme

de valeur pour le stockage Valeur unique pour le stockage BDT (de H0 ̀a H(r = 0̀̀

FIGURE5.12 – Comparaison entre la profondeur de la transition fragile-ductile et celle du

stockage du magma juste avant l’´eruption pour cinq grands syst`emes silicique. Les pro- fondeurs de stockage sont donn´ees par les barres verticales mauves ou les ´etoiles rouges. Les donn´ees issues de la litt´erature qui ont permis de les positionner sont r´esum´ees dans le tableau 5.2. La variation de la profondeur de la transition fragile-ductile (BDT sur la figure) est donn´ee par l’´etendue de la zone grise. Les sources qui ont permis de faire cette zone grise sont r´esum´ees dans le tableau 5.3. TVZ : Taupo, C-F : Champs Phlegr´eens, Yw : Yellowstone, Sant : Santorin, Tob : Toba.

TABLE 5.2 – R´ecapitulatif des donn´ees bibliographiques concernant la profondeur de

stockage. Les profondeurs donn´ees sont par rapport `a la surface et incluent les barres d’erreur lorsqu’elles sont donn´ees. Entre parenth`eses `a cˆot´e du nom de chaque volcan se trouve l’abr´eviation utilis´ee pour le designer sur la figure5.12.

Profondeur (km) Publication Yellowstone (Yw) 8 `a 3 km Myers et al.(2016) ≈4 km Troch et al.(2017) ≈4 `a 8 km Loewen et al.(2017) 7 `a 4 km Wotzlaw et al.(2014) Champs Phlegr´eens (C-F) 7 km Zollo et al.(2008) Superficiel : 2 `a 5 km

Stock et al.(2018) (R´esum´e des donn´ees p´etrologiques et g´eophysiques publi´ees)

Profond : 4,7 `a 13,3 km

Stock et al.(2018) (R´esum´e des donn´ees p´etrologiques et g´eophysiques publi´ees) Taupo (TVZ)

2 `a 10 km Gualda et al.(2018)

Majorit´e : 5 `a 10 km

Fusion de la croˆute Charlier et al.(2005) ≈ 15 km

Santorin (Sant)

4 `a 12 km de profondeur Druitt et al.(2016)

4 `a 17 km Druitt et al.(2016) (R´esum´e des ´etudes pr´ec´edentes) Silicique ≈ 8 km Cadoux et al.(2014)

Mafique ≈ 15 km Cadoux et al.(2014) Toba (Tob)

4 `a 6 km Gardner et al.(2002)

Majorit´e des analyses : 4 `a

9 km Reid and Vazquez(2017)

TABLE 5.3 – R´ecapitulatif des donn´ees bibliographiques concernant la profondeur de la

transition fragile-ductile. Les profondeurs donn´ees sont par rapport `a la surface et incluent les barres d’erreur lorsqu’elles sont donn´ees. Entre parenth`eses `a cˆot´e du nom de chaque volcan se trouve l’abr´eviation utilis´ee pour le designer sur la figure5.12.

Profondeur (km) M´ethode Publication

Yellowstone (Yw)

H0=11 ; H(r = 0)=6

Localisation des s´eismes (80% des s´eismes sont au-dessus de cette

profondeur) Chang et al.(2007) H0=12 ; H(r = 0)=5 R´esum´e des donn´ees publi´ees Shelly et al.(2013)

H0=15 ; H(r = 0)=5

Donn´ees sismiques + Flux de chaleur+ R´esum´e de donn´ees publi´ees

DeNosaquo et al.

(2009)

H0=13 ; H(r = 0)=6

Localisation des s´eismes (80% des s´eismes sont au-dessus de cette

profondeur) Smith et al.(2009) Champs Phlegr´eens (C-F)

H0=15 ; H(r = 0)=3

Mod´elisation `a partir des donn´ees g´eophysiques, g´eothermiques et

g´eologiques.

Castaldo et al.

(2019)

H(r = 0)=4

Localisation des s´eismes et flux de chaleur

Carlino and Somma

(2010) Taupo (TVZ)

H0≈ 8.5 km

Bas´e sur la r´epartition des s´eismes

publi´es Sherburn(1992)

H0≈ 9 km

Bas´e sur la r´epartition des s´eismes

publi´es Webb et al.(1986)

H(r = 0) ≈ 6 km

Localisation des s´eismes (80% des s´eismes sont au-dessus de cette

profondeur) Bryan et al.(1999) Santorin (Sant)

H0= 7 Position des s´eismes et flux de chaleur

Konstantinou

(2010) Toba (Tob)

5.2.2

Contraintes g´en´er´ees dans la plaque par un stockage `a l’inter-