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Préambule

a publicité est depuis bien longtemps un sujet de débat social sur lequel différents auteurs se sont penchés, l’ont étudiée et ont donné leur avis, ainsi que des pistes d’analyse pour mieux comprendre ce phénomène qui est partout et qui touche toutes les couches de la population.

Parmi toutes les formes que la publicité peut revêtir, il y en a une que l’on retrouve partout où l’on va et qui s’impose à notre regard. Il s’agit des affiches publicitaires. Ces dernières peuvent parfois être confondues avec une autre sorte d’affiches : il s’agit des affiches dites engagées. En effet, les élèves retrouvent ce type d’affiches partout ; sur le chemin de l’école, lorsqu’ils marchent dans la rue, que cela soit à la ville comme à la campagne, dans les journaux ou encore sur Internet. Nous allons donc nous intéresser, entre autre, aux dimensions qui entrent en jeu dans la constitution d’une affiche de ce genre et dans son décodage.

Je distingue l’affiche engagée de l’affiche publicitaire. En effet, par affiche engagée, j’entends l’affiche qui a été construite dans le but de nous faire réfléchir sur un objet, un évènement ou encore un thème donné, qui n’implique pas l’achat de l’objet que vante l’affiche, mais qui vise plutôt un impact sur un fait de société, sur un évènement politique ou social, qui est réalisée dans un but de prévention ou encore de nous faire réfléchir sur notre manière de vivre. Pour exemple, cette affiche engagée où l’on voit la mort personnifiée tenant dans une de ses mains un drapeau de course1. Dans ce cas précis, le but de cette affiche est de faire de la prévention en matière de sécurité routière en interpelant le conducteur sur les dangers de la route en assimilant la course de voitures et la mort de manière très claire. Cette interprétation est confirmée lorsque l’on va sur le site Internet des créateurs de cette affiche. Nous voyons donc que la finalité de cette affiche est de faire réfléchir le conducteur et de modifier un comportement, c’est-à-dire la manière de conduire de certains usagers de la route.

A l’inverse, l’affiche publicitaire est réalisée dans un but commercial, avec à la clef, la vente d’un produit et des bénéfices commerciaux. Prenez, par exemple, l’une des nombreuses affiches alimentaires dont le but est la promotion et la vente d’un aliment2.

1 Cf. affiche 2, annexe n°2.

2 Cf. affiche 5, annexe n°10.

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Mais, comme dans beaucoup de situations, cette distinction est plus facile à faire en théorie qu’en pratique. En effet, si je prends l’affiche « Mettez le casque. Ou priez. »3 – que j’ai faite passer dans mon entourage – je peux être confrontée à cette problématique. Sans entrer dans les détails, le but premier de cette affiche est de prévenir des blessures graves, voire mortelles, à vélo en encourageant le cycliste au port du casque. Mais, en même temps, cette affiche sous-entend implicitement l’achat, donc la vente, d’un produit commercial qui est le casque cycliste. Ainsi, la frontière entre affiche publicitaire et affiche engagé est parfois très mince ! Dans ce projet de mémoire, je m’intéresse à la création d’une séquence d’enseignement aux messages visuels, qu’ils soient scripturaux et/ou iconiques, véhiculés par les affiches engagées pour une classe de 6P de l’école primaire genevoise. Cette séquence se composera de six leçons et aura comme finalité la production, par les élèves eux-mêmes, d’une affiche engagée. Pour ce faire, nous travaillerons, lors des différents modules, la rhétorique par le biais du slogan, ainsi que l’argumentation par l’image sur la base de différentes affiches engagées analysées. De plus, je souhaite également mettre en œuvre moi-même, dans l’optique de ma formation en tant que future enseignante, cette séquence d’enseignement dans les conditions réelles que sont celles de la classe. Cet exercice me permettra de porter, suite au temps de terrain, un regard critique sur ma pratique enseignante et plus particulièrement sur la manière de transmettre l’objet de savoir, ainsi que d’apporter les éventuels ajustements nécessaires à la séquence créée. Le but de cette séquence, au-delà de la création d’une affiche engagée, est de sensibiliser les jeunes élèves aux messages scripturaux et iconiques, comme je l’ai dit précédemment, en leur donnant des outils pour leur faire face, les aborder et les interpréter. A long terme, je souhaite que cette séquence d’enseignement participe à l’acquisition et à la mobilisation par les élèves, de compétences permettant la construction et le développement d’un esprit critique face à ce type de message.

La décision de travailler essentiellement sur les affiches engagées, qu’elles soient faites à des fins de prévention, de propagande ou encore d’interpellation, est un choix personnel. Il résulte d’une part, du fait que je n’aurai que six leçons pour aborder ce thème en classe. Ainsi, je n’aurai pas le temps de travailler tous les types d’affiches. D’autre part, je pense que l’affiche engagée, comme je l’entends dans la brève définition que j’ai donnée auparavant, est moins souvent sujette à ce travail d’analyse dans les livres qui traitent de ce thème.

3 Cf. affiche 5, annexe n°2.

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Justification du projet de recherche

e pense que ce genre de projet que je m’apprête à entreprendre a sa place dans l’institution scolaire. En effet, l’école se veut comme une microsociété, un lieu « clos », mais cette institution est pénétrée, traversée par une multitude d’éléments venant de l’extérieur, véhiculés par les élèves, qui ne les déposent pas à l’entrée de leur salle de classe. Comme je l’ai dit précédemment, les affiches engagées font partie intégrante du quotidien des élèves. Ils les côtoient tout le temps, que cela soit dans les journaux, dans les magasins ou encore dans la rue ou sur le chemin de l’école. Ces affiches ont un impact sur les enfants, qui souvent n’ont pas le recul nécessaire, ni les outils pour décoder et interpréter ces messages imposés à leurs yeux. Pour exemple, prenons la polémique qu’a donné lieu l’affiche dite du « mouton noir »4 en 2007. Bien entendu, je suis consciente que des élèves du primaire entre onze et douze ans, avec qui je souhaite travailler, ne sont pas le public cible de l’exemple que je viens de donner.

Mais si je me réfère à mes remplacements, à mon entourage et à la presse, ces derniers ont néanmoins été touchés par cette affiche qu’ils ont vue dans la rue et que cela a suscité des discussions dans certaines familles ou entre eux. Pour l’affiche dite du « mouton noir », de très jeunes enfants, interviewés par la TSR dans le cadre d’une émission de la chaîne, ne comprenaient pas pourquoi ce qui semblait être un « pauvre petit mouton noir » était rejeté par les autres. Lors d’un remplacement dans une classe de 4P, des élèves sont venus me demander mon avis sur cette affiche et voulaient parler du racisme, entre autre. Sans vouloir tirer des conclusions hâtives ou vouloir faire des généralités, je remarque que ce genre d’affiches a un impact certain sur les enfants et qu’ils s’y intéressent. La séquence n’aura pas pour but de traiter de sujets socio-politico-culturels en tant que tels, mais de donner aux élèves certains outils leur permettant de lire ce genre d’affiches, de pouvoir les interpréter et, à long terme, de pouvoir les lire avec le recul nécessaire.

Joly encourage « l’éducation » à l’image très tôt et je pense qu’il est également un devoir de l’école que d’instruire les futurs citoyens du monde à la lecture et à l’interprétation des messages scriptovisuels. En effet, ces derniers seront, un jour, le public cible de certaines de ces affiches, qu’ils seront amenés à voter, ainsi qu’à prendre des décisions. C’est ce qui a déterminé mon choix à travailler cette thématique avec de jeunes élèves.

4 Cf. annexe n°28.

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Ainsi, je souhaite découvrir avec les élèves comment fonctionne une affiche engagée, quel est son but, comment elle se construit et se lit. Pour ce faire, je me base sur mes lectures5 et travaux menés précédemment, tels que le mémoire de licence de Beget (2007) ou les ouvrages de Joly6, afin de continuer et de reprendre les recherches, tout comme les pistes déjà données sur le sujet.

Cette recherche, qui s’inscrit principalement dans la didactique du français et des arts plastiques, a un intérêt pratique. En effet, elle pourrait donner des pistes aux enseignants de ces disciplines souhaitant traiter leur matière sous un autre angle qui pourrait être celui de l’affiche engagée, avec l’intention, secondaire ou principale, de former un peu plus encore les citoyens de demain à ce propos et d’éveiller leur sens critique. En tant qu’étudiante, ce projet de recherche me permet également de compléter ma formation au sein de la section des sciences de l’éducation en me donnant l’occasion de créer et de mettre en œuvre, du début à la fin, une séquence d’enseignement dans les conditions réelles de la classe, tel que je serai amenée à le faire dans ma future profession.

Ce projet de mémoire a également, à mon sens, un intérêt théorique puisqu’il met en évidence l’outillage et l’articulation entre la réception et la production de supports qui combinent le scriptural et l’iconique. Ce mémoire pourra aussi m’apporter encore quelques informations supplémentaires ou complémentaires au domaine de la transposition didactique et à celui de l’analyse de pratique enseignante, mais également à celui de la sensibilisation des élèves aux affiches engagées.

Pour mener à bien ce projet de mémoire, les cours suivis à l’université, tels que ceux de la didactique du français, des arts plastiques et des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) m’ont aidée à construire une séquence d’enseignement sur les affiches engagées. De plus, la formation que je suis maintenant depuis trois ans, de par les cours suivis en « approches transversales » et les expériences en stage, me permettront d’avoir un regard plus critique sur ma pratique de classe.

5 Cf. références bibliographiques.

6 Martine Joly est professeur émérite à l'Université de Bordeaux et a écrit des livres sur l’image et les signes.

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