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3. Des pratiques professionnelles qui impliquent la famille auprès des patients

3.2. Des interventions orthophoniques

Comme le souligne Rousseau (2000), rares sont les approches en orthophonie qui tiennent compte :

29 - du déséquilibre familial qu’il provoque ;

- de la fonctionnalité des dispositifs mis en place au quotidien pour tenter de l’atténuer. Alors que «les thérapeutes du langage améliorent toujours la qualité de la communication intrafamiliale en rassurant, déculpabilisant, valorisant les personnes et en dédramatisant les problèmes ainsi qu’en instaurant des conduites langagières adaptées » (Kremer et Lederlé, 2011, p. 89).

De plus, dans l’article 4 du décret de compétence en orthophonie, il est précisé que : « la rééducation orthophonique est accompagnée en tant que besoin, de conseils appropriés à l’entourage proche du patient » (Brin et al., 2011, p.vertes 51). Bien que le contenu de cet article paraisse flou et vaste, il semblerait que deux interventions orthophoniques s’inscrivent dans la démarche de cet article :

 L’aide aux aidants familiaux qui a pour but de former et d’informer ces personnes qui s’occupent de leur proche atteint de maladie neurodégénératives ou victime d’accident vasculaires-cérébraux ;

 la guidance parentale qui accompagne les parents dans le trouble et/ou le handicap de leur enfant et qui semble tenir compte des facteurs environnementaux autour de ce dernier.

3.2.1. L’aide aux aidants

D’après la H.A.S (2010, p.1), l’aidant naturel se définit comme « des personnes non professionnelles qui viennent en aide à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendante de son entourage pour les activités de la vie quotidienne ». Ces personnes interviennent non seulement dans les soins quotidiens du patient (la toilette, l’alimentation, la prise des médicaments…), mais le soutiennent moralement et dans les démarches administratives. En général, ces personnes sont des membres de la famille, c’est pourquoi on parle d’aidant familial. Dans le cadre de l’orthophonie et notamment celui des troubles aphasiques, il s’agit d’informer et former l’aidant à mieux comprendre cette pathologie, de limiter l’impact de celle-ci à la fois pour le patient mais aussi pour son entourage (Fédération Nationale des Orthophonistes, 2010). Grâce à des formations délivrées par des thérapeutes du langage et des psychologues, les aidants vont pouvoir partager leur expérience et élaborer des stratégies pour pallier aux difficultés de communication.

30 Nous trouvons qu’offrir cet espace de parole aux aidants leur permet de se rencontrer, d’échanger sur le vécu et de se sentir un peu moins seul face à la souffrance engendrée par la maladie de leur proche. Compte-tenu de la complexité des troubles aphasiques, il nous paraît difficile de réussir à faire comprendre en quelques jours seulement ces pathologies. Il nous semble que cela nécessite un cheminement de la pensée, qui ne peut se faire que si cet aidant est accompagné régulièrement par l’orthophoniste. Ce dernier répondra au fur et à mesure à ses questions, lui apportera l’aide dont il a besoin au moment opportun et non pas qu’au moment de la formation. Nous pensons que cette construction, ce cheminement de la pensée est le même pour les troubles dyslexiques, d’où l’idée d’impliquer les parents dans les séances d’intervention orthophonique. L’aide aux aidants est utilisée, généralement, pour des patients d’âge adulte atteint de maladie chronique, c’est pourquoi nous allons désormais nous intéresser à une intervention orthophonique qui accompagne les parents dans le développement de leur jeune enfant ayant un handicap.

3.2.2. La guidance parentale : un mode d’intervention orthophonique

Brin et al., (2011, p.122) définissent cette pratique comme un : « ensemble des moyens mis en place, auprès d’un enfant handicapé, quel que soit le handicap, afin de préserver ou rétablir une bonne relation parents/enfant et éviter que d’autres facteurs ne viennent s’ajouter aux difficultés de l’enfant . La guidance parentale est intrinsèquement liée à l’éducation précoce de l’enfant ».

La guidance parentale s’articule autour de trois axes :

 L’accompagnement parental qui va aider les parents à surmonter le handicap de leur enfant, à l’accepter et à revoir leurs exigences éducatives et scolaires ;

 L’information concernant le développement futur de leur enfant.

Les conseils délivrés, au fur et à mesure, sur les attitudes, les conduites à adopter pour favoriser le meilleur développement possible pour leur enfant (ibid.).

Cette pratique professionnelle se situe uniquement dans la prévention primaire ( Kremer et Lederlé, 2011). En effet, il s’agit de donner des conseils adaptés et personnalisés, en fonction du handicap de l’enfant, de ses difficultés et du mode de vie familial. Il existe actuellement un débat entre le terme guidance et accompagnement parental. Si certains auteurs ne différencient pas ces deux pratiques, d’autres comme Monfort (2010) estiment qu’il s’agit de deux interventions orthophoniques différentes. Pour lui, l’accompagnement

31 parental est une démarche utilisée pour des enfants dont le développement est normal mais lent. Pour aider les familles à s’adapter à l’enfant, des informations, des conseils et des modèles vont leur être délivrés. Les modèles seront à reproduire à la maison (ibid.). Or toutes ces aides sont également apportées dans le cadre de la guidance, puisque d’après Brin et al. (2011), cette dernière se définit entre autre par l’accompagnement parental. A première vue, il semblerait que la guidance et l’accompagnement parentaux s’apparenteraient à une forme d’E.T.P. Pourtant, il existe une réelle différence.

3.2.3. Distinction entre « guidance », « accompagnement » et « éducation thérapeutique » : vers un mode particulier d’intervention orthophonique

D’après le Petit Robert (2002, p.1231), guider signifie : « accompagner en montrant le chemin » ou : « faire aller, pousser dans une certaine direction ». Il semble que, dans le cadre du handicap ou du trouble, il n’y a pas qu’une seule direction possible décidée par l’orthophoniste mais plusieurs qui doivent être discutées et approuvées par la famille. Ainsi, cela permettrait de ne plus se situer seulement au stade de la prévention primaire, mais d’être également aux stades secondaire et tertiaire (comme dans le cadre de l’E.T.P) pour répondre au mieux aux besoins quotidiens de l’enfant avec, à l’appui, des informations concrètes données par lui-même et ses parents. De plus, le terme de guidance induit la notion de savoir maîtrisé par l’orthophoniste et met les parents en position de non experts. Or eux aussi ont des connaissances à apporter sur le vécu du handicap au quotidien.

Comme un certain nombre d’auteurs, nous ne différencions pas réellement l’accompagnement parental de la guidance. Cependant, nous nous demandons si l’accompagnement parental ne qualifie pas la pratique qui consiste à accueillir les parents à la fin de la séance d’intervention orthophonique, pour leur expliquer le contenu des activités du jour et les conseiller sur les adaptations à réaliser au quotidien pour s’adapter à l’enfant et à son trouble. Enfin, la signification d’accompagnement ou accompagner se définirait comme « se joindre à (quelqu’un) pour aller où il va en même temps que lui, aller de compagnie avec » (Le Petit Robert, 2002, p. 17). L’idée de se joindre voire de se rejoindre nous plaît car il s’agit de lien, de « rencontrer » autrui. Dans son mémoire de recherche, Mathieu (2011, p.54) parle de l’orthophoniste comme d’un médiateur puisqu’ « il est en lien avec différentes personnes de l’entourage de l’enfant, et contribue ainsi à son épanouissement et à son mieux-être ». Ce lien, dont parle Mathieu (2011), reflète le travail effectué dans le domaine de l’E.T.P, puisqu’il s’agit pour chaque participant (patient-professionnel-entourage) de se

32 mettre d’accord sur les compétences à acquérir pour permettre au malade de vivre le plus confortablement possible (D’Ivernois, Gagnayre, 2008).

Ainsi, le cadre, dans lequel nous aimerions opérationnaliser notre objet d’étude, s’inscrit davantage dans la dynamique de l’éducation thérapeutique. En effet, il s’agirait d’apprécier une pratique professionnelle qui implique les parents à tous les niveaux de la prévention et non plus seulement au stade de la prévention primaire comme c’est le cas dans la guidance ou l’accompagnement parental. Dans ce cadre, les parents et les patients forment une équipe avec le professionnel qui tient compte des représentations, des savoirs et des savoir-faire familiaux pour construire ses interventions orthophoniques.

C’est pourquoi nous allons nous attacher, maintenant, à décrire une pratique professionnelle orthophonique, qui envisage la relation thérapeutique entre l’enfant et l’orthophoniste comme un partenariat. Nous allons étudier cette pratique, initialement formalisée à partir de l’analyse des stratégies d’étayage mises en œuvre par l’orthophoniste en direction de l’enfant.

4. Un mode d’intervention orthophonique en cas de troubles dyslexiques ou une