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4.3 Vibrations acoustiques des nanoplaquettes sous pression

4.3.2 Interprétation des résultats

Estimation de la dépendance en pression pour une plaquette libre

Sous l’effet d’une pression de confinement P la fréquence de respiration d’une pla-quette libre est donnée par :

ν0(P ) = 1 2e(P )

s

C11(P )

ρ(P ) (4.2)

Trois termes apparaissent dépendant de la pression dans l’expression de ν0(P) : l’épaisseur de la plaquette e(P ), la densité ρ(P ) et le coefficient élastique C11(P). Ces

4.3. Vibrations acoustiques des nanoplaquettes sous pression 55 dépendances sont évaluées avec les relations suivantes :

e(P ) = nMC· a(P ) (4.3)

ρ(P ) = ρ0·V (P )V0 (4.4)

C11(P ) = C11(P0) + C11· ∆P · 3.56 · 10−2 (4.5) Dans l’expression de e(P ), a(P ) réfère au paramètre de maille. V0/V (P ) réfère à l’évolution relative du volume de la maille zinc blende, V0 étant le volume initial dé-duit des mesures in-situ de diffraction des rayons X sous pression pour les deux échan-tillons CdS 4 et 14 MC (voir annexe C). Enfin, la dépendance en pression du coefficient C11(P) (∆P est en GPa) vient de la mesure expérimentale sur CdS en phase wurtzite [84] supposée relativement proche de celle de la phase cubique, la valeur pour la phase zinc blende n’étant pas disponible. La variation relative de ces trois paramètres entre 0 et 7 GPa est illustrée figure 4.7. La variation la plus importante est celle due au coeffi-cient C11(P) alors que celle due à l’épaisseur est négligeable. Il n’y a pas de différence notable entre l’évolution de la densité des plaquettes fines (CdS 4 MC, cercles) et des plaquettes plus épaisses (CdS 14 MC, triangles).

L’équation 4.2 nous permet d’estimer la variation relative de fréquence sous pres-sion telle qu’elle est calculée pour une plaquette libre de CdS 4 MC à la prespres-sion P = 7 GPa (c’est à dire sans l’effet de masse des ligands) :

∆ν ν0 = 1 2 ∆C11 C11,0∆e e01 2 ∆ρ ρ0 = + 25% 2 + 6% −12%2 = 12% (4.6)

Seuls sont pris en compte ici les effets de densification sur la structure et le co-efficient C11. L’évolution de la fréquence avec la pression calculée est représentée en ligne pointillée dans la figure 4.6.A et comparée aux données expérimentales. L’aug-mentation de 37 % de la fréquence de respiration entre 0 et 7 GPa pour CdS 4 MC n’est clairement pas en accord avec l’estimation issue du calcul (12 % seulement). Cela signi-fie qu’un mécanisme autre que la densification des plaquettes est responsable de cette forte dépendance vis-à-vis de la pression.

Discussion

Au vu de la forte dépendance en pression de la fréquence de respiration des pla-quettes, on peut questionner en premier lieu la dépendance en pression du coefficient C11pour la phase zinc blende. En effet notre calcul est basé sur la dépendance en pres-sion du C11de la phase wurtzite (structure du cristal macroscopique), celle de la phase zinc blende n’étant pas connue. Néanmoins, même si plausible, cet effet est considéré

0 1 2 3 4 5 6 7

-0.1

0.0

0.1

0.2

0.3

P (GPa)

FIGURE4.7 – Evolution relative des trois paramètres dépendants de la pression dans la fréquence du mode de plaquette : C11 en noir, ρ en rouge et l’épaisseur en bleu. Les cercles correspondent à CdS 4 MC et

les triangles à CdS 14 MC.

comme négligeable devant celui exposé ci-après.

Une autre possibilité pourrait être liée à un effet d’impédance acoustique avec la mise sous pression. Les modes de respiration de nature principalement longitudinale dissipent de l’énergie acoustique dans la matrice environnante et sont particulière-ment sensibles aux effet de matrice. La compression a pour effet de densifier l’huile de sorte que son impédance acoustique Zhuile=ρvhuile se rapproche de celle des pla-quettes ZN P L=ρvN P L. Nous avons pu voir avec la figure 2.4 du chapitre 2 que lorsque Zhuile/ZN P L → 1 l’énergie vibrationnelle est plus facilement dissipée dans le milieu environnant. Cela se traduit par une forte augmentation de la fréquence de résonance (≈ 50 % pour le mode de respiration de nanoparticules sphériques) et de l’amortisse-ment (élargissel’amortisse-ment des bandes Raman) entre les régimes de sphère libre et sphère blo-quée. Si dans le cas des plaquettes sous pression, le régime bloqué n’est probablement pas atteint on peut s’attendre à ce que de façon analogue aux cas des nanoparticules sphériques (figure 2.4), la densification de l’huile soit responsable de l’augmentation "anormale" de la fréquence de respiration.

4.3. Vibrations acoustiques des nanoplaquettes sous pression 57 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 0 10 20 30 40 50 60 70

4.8 GPa

P

atm

7.4 GPa

R

a

m

a

n

sh

if

t

(c

m

-1

)

1/h (nm

-1

)

plaqu ette libr e

P

atm

FIGURE4.8 – Comparaison des fréquences de respiration des nanopla-quettes CdS 4 MC et 14 MC sous pression avec les prédictions des

mo-dèles "plaquette libre" et "plaquette lestée".

53, 52] sont relativement bien connus. En première approximation les fréquences de résonance sont bien reproduites par un modèle de sphère libre. On peut donc s’at-tendre à ce que la fréquence de respiration des nanoplaquettes dans l’huile densifiée se rapproche de la fréquence d’une plaquette libre, occultant progressivement l’effet de masse inertielle associée aux ligands. L’évolution sous pression des fréquences de res-piration des nanoplaquettes CdS 4 MC et CdS 14 MC sont comparées avec le modèle de la plaquette libre et le modèle de la plaquette lestée dans la figure 4.8. A pression ambiante les fréquences de respiration correspondent à celles prédites par le modèle de la plaquette lestée. Bien que l’application de la pression amorce une transition vers le régime libre, ce dernier n’est pas atteint aux pressions PMAX

14MC = 4.8 GPa et PMAX 4MC = 7.4 GPa. Ces pressions correspondent aux pressions de transition vers la phase rock-salt au-delà de laquelle le mode de respiration n’est plus discernable dans le spectre Raman.

Il est probable au vu de la figure 4.8 que les fréquences de respiration mesurées sous pression soient le résultat d’une double contribution de la baisse de la fréquence due à l’effet de masse et d’une augmentation due à la densification de l’huile et à l’aug-mentation du rapport Zhuile/ZN P Linduit par pression.

Dans l’hypothèse d’un empilement des plaquettes, l’environnement de chaque pla-quette est constitué de ses ligands organiques interdigités avec ceux des plapla-quettes voi-sines les molécules d’huile pouvant s’infiltrer dans le manteau de ligands. L’effet de la densification de l’environnement sous pression serait majoritairement dû à la rigidifi-cation des oléates et peu à l’huile. Il est également possible que l’huile produise une désolidarisation des nanoplaquettes par solubilisation. Dans ce cas, l’effet sandwich est perdu ce qui se traduit par une contribution plus faible des oléates à l’impédance acoustique "effective" du milieu environnant au profit de l’huile. Dans chacune de ces deux possibilités, l’effet de la compression est très fortement ressenti par le mode de respiration des plaquettes.

4.4 Conclusion

Pour conclure, nous avons étudié le mode de respiration de nanoplaquettes colloï-dales de CdS et CdSe dont l’épaisseur varie entre 1 nm et 4 nm par diffusion Raman basse fréquence. Par opposition aux résultats de la littérature concernant les nano-feuillets dépourvus de ligands organiques produits par exfoliation, les fréquences de résonance des plaquettes colloïdales sont abaissées par rapport à la fréquence attendue pour une plaquette libre. Nous avons montré que cet effet résulte de la présence d’un "manteau" organique qui se comporte comme une masse inertielle. Cette interprétation contraste avec l’approche habituelle qui consiste à considérer le milieu environnant comme une matrice avec une impédance acoustique. Les expériences sous pression nous ont permis d’observer une très forte augmentation de la fréquence de respira-tion des plaquettes qui ne peut être attribuée à la seule dépendance en pression des constantes élastiques des nanoplaquettes. Ce comportement a été interprété comme résultant de la densification du milieu environnant, tout en conservant l’effet de masse dû aux ligands. Sonder les régions Zhuile/ZN P L→ 1 où l’huile serait solidifiée permet-trait de compléter la transition vers le régime de plaquette libre, mais cela n’a pas été possible en raison de la perte du signal Raman associé à la transition structurale vers la phase haute pression.

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Chapitre 5

Hybridation acoustique de

nanoparticules métalliques

De longue date la spectrométrie Raman basse fréquence a permis d’étudier les modes de Lamb de nanoparticules métalliques de petite taille enchâssées en matrice vitreuse, bénéficiant de l’exaltation de la diffusion liée à la résonance avec le plasmon de surface. Cela a notamment permis d’étudier les effets d’interaction des modes avec la matrice [42] qui se manifestent par de faibles décalages des fréquences de résonance par rapport au modèle de la sphère libre et un élargissement des modes [51, 13]. En revanche les effets d’interaction entre les nanoparticules sur les modes de Lamb ont souvent été occultés, laissant penser que soit ces expériences ont majoritairement me-suré les vibrations d’objets pas ou peu couplés, soit la diffusion Raman est peu sensible à ces effets d’interaction. Quelques expériences cependant relatent des effets d’interac-tion collectifs, tels que les effets de cohérence dans des assemblées supracristallines de petites nanoparticules d’argent [4]. Plus tard la mesure par spectrométrie pompe-sonde de modes de vibration de nanoparticules métalliques couplées [85] ont suscité des questionnements théoriques concernant l’hybridation des modes de Lamb [86]. Les évidences expérimentales de ces effets d’interaction restent malgré tout peu nom-breuses surtout dans le domaine de la diffusion Raman basse fréquence. Ce chapitre a donc pour vocation d’étudier le couplage inter-nanoparticules sur les modes de Lamb. Plus spécifiquement nous allons nous intéresser aux effets de l’interaction à la base de l’hybridation acoustique de nanoparticules métalliques de diamètre 10 nm < D < 100 nm.

Dans un système de nanoparticules métalliques couplées l’hybridation acoustique va de pair avec l’hybridation plasmonique, problématique centrale dans ce chapitre puisqu’elle situe les conditions de résonance des expériences Raman basse fréquence. Nous avancerons donc tout au long du chapitre parallèlement sur les deux fronts, en caractérisant conjointement les effets de l’interaction acoustique et les effets de l’inter-action plasmonique dans les systèmes étudiés. La question de la réponse optique d’une nanoparticule métallique isolée ayant été abordée dans le chapitre 2, nous expliquons maintenant succinctement les concepts de l’hybridation des plasmons. Nous poursui-vrons avec les résultats expérimentaux obtenus sur des assemblées de nanoparticules puis sur des dimères uniques de nanoparticules.

5.1 Résonances optiques de nanoparticules métalliques

cou-plées

La réponse optique d’une sphère métallique isolée est gouvernée dans le visible par la résonance du plasmon de surface. Pour des tailles de particules petites par rap-port à la longueur d’onde de la lumière, les variations de champ ressenties par la particule sont homogènes sur tout son volume et l’oscillation des charges à l’origine de la RPS est majoritairement dipolaire. Le plasmon dipolaire d’une sphère seule est triplement dégénéré et caractérisé par les nombres quantiques de moment angulaire (L=1, m=±1,0). Lorsque deux nanoparticules sont rapprochées d’une distance suffi-samment petite pour interagir d’un point de vue électromagnétique, l’effet de l’inter-action va être de lever partiellement la dégénérescence associée au plasmon dipolaire des sphères isolées. On observe alors la naissance de deux nouvelles résonances : un mode transverse du dimère (m=1, doublement dégénéré) et d’un mode longitudinal du dimère (m=0, non dégénéré). A titre illustratif, le spectre d’extinction d’un dimère unique de nanoparticules d’or mesuré par la technique SMS (spectroscopie à modula-tion spatiale) [71] est représenté figure 5.1. On rappelle que l’extincmodula-tion est la somme de l’absorption et de la diffusion.

FIGURE 5.1 – Spectres d’extinction d’un dimère d’or unique (diamètre des NPs ≈ 100 nm, séparation d = 4 nm). A gauche la résonance du plas-mon tansverse est enregistrée pour une polarisation perpendiculaire à l’axe du dimère. A droite la résonance du plasmon longitudinal est

5.2. Hybridation acoustique de dimères d’or 61