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2.4 Spectroscopies vibrationnelles de nano-objets

2.4.2 Diffusions Raman et Brillouin

Diffusion Raman

La diffusion Raman telle qu’utilisée traditionnellement permet de sonder avant tout les vibrations optiques des matériaux. Il peut s’agir de vibrations atomiques dans un cristal, ou encore de vibrations moléculaires, le point commun étant la localisation de la vibration au niveau de la liaison interatomique. Deux unités sont couramment utilisées pour quantifier les fréquences de ces vibrations : les nombres d’onde (unité : cm−1) et les Hertz (1 cm−1= 30 GHz). Les fréquences mises en jeu par ces vibrations sont typiquement supérieures à 100 cm−1 / 3000 GHz et peuvent atteindre plusieurs milliers de cm−1(≈10 THz), ce qui correspond au domaine classique d’investigation de la spectroscopie Raman. Une vibration optique d’un cristal peut être perçue dans une vision classique comme l’oscillation d’une masse liée à d’autres masses environnantes (atomes voisins) par des ressorts de raideur k. La fréquence de vibration s’exprime alors comme une fonction de k et de la masse réduite µ :

ω = s

k

µ (2.23)

avec 1/µ = P 1/mi, miétant la masse des atomes voisins participant à la vibration. La raideur k dérive du potentiel dans lequel baigne l’atome en vibration généré par les forces de liaisons intermoléculaires dans les trois directions de l’espace :

k = 2Ep ∂x2 + 2Ep ∂y2 + 2Ep ∂z2 (2.24)

La "raideur" de ce ressort dépend alors de la nature de la laison : ionique, cova-lente... A titre illustratif, la figure 2.7 montre le spectre Raman enregistré à la longueur d’onde λ = 532 nm correspondant à un cristal quelconque. Les fréquences sont indi-quées en cm−1 (échelle du bas) et en GHz (échelle du haut). Un mode optique situé vers σ = 300 cm−1 est représenté. Le vecteur d’onde q ≈ 2·10−2 nm−1 associé à cette vibration est fixé par l’expérience et est très petit devant le bord de zone situé typique-ment vers π/a = 6.3 nm−1 (pour un paramètre de maille arbitraire a = 0.5 nm), cette valeur pouvant changer selon la direction cristallographique. C’est la raison pour la-quelle on dit que la diffusion Raman est sensible aux phonons de centre de zone (de petit q). Cela est illustré dans la figure 2.7 en juxtaposant une courbe de dispersion schématique (échelles non respectées) au spectre Raman expérimental du cristal. La pente des courbes de dispersion des phonons optiques en centre de zone (représentées par la courbe verte) étant quasi-nulle, la fréquence de ces modes dépend très peu du vecteur d’onde, et donc de l’angle de diffusion θ (cf équation 2.21). C’est pour cela que les phonons optiques sont dits non dispersifs dans la région d’intérêt de la diffusion Raman. Le niveau de population des phonons optiques est décrit par la statistique de Bose Einstein qui devient la loi de Boltzmann pour ¯hΩ > kBT (kBétant la constante de

FIGURE2.7 – Spectre Raman du mode de vibration optique longitudinal d’un cristal de CdS zinc blende comparé avec une courbe de dispersion schématique du cristal. La bande Raman résulte de la diffusion par les

phonons de centre de zone (de petit q).

Boltzmann), c’est à dire pour des nombres d’onde σ > 200 cm−1à T = 300 K. A tempé-rature ambiante, si NE1et NE0 sont les populations des niveaux E1et E0tel que ∆E = E1-E0= hcσ :

NE1

NE0 = exp(−k∆E

BT) (2.25)

A température ambiante le niveau de plus basse énergie E0 étant plus peuplé, la transition Stokes a plus de probabilité d’être observée que la transition anti-Stokes. Cela se traduit au niveau du spectre Raman par une intensité Stokes supérieure à l’in-tensité anti-Stokes. Typiquement le spectre anti-Stokes est réduit à néant au-delà de quelques centaines de cm−1autour de la température ambiante.

Diffusion Brillouin

La fréquence des phonons acoustiques sondés par diffusion inélastique de la lu-mière est beaucoup plus faible et située autour de quelques dizaines de GHz (≈ 1 cm−1) fixée par la longueur d’onde de la lumière utilisée (équation 2.22). Le principe de la diffusion Brillouin est schématisé dans la figure 2.8.A. On retrouve en bleu le spectre Raman du cristal et le pic à 300 cm−1 correspondant au phonon optique, au-quel s’ajoute en rouge un spectre Brillouin du même cristal, constitué d’un pic qui

2.4. Spectroscopies vibrationnelles de nano-objets 19 correspondrait à la fréquence Brillouin attendue vers 2 cm−1 (pour une vitesse acous-tique arbitraire v = 5000 m.s−1). Ce pic résulterait de la diffusion inélastique par les phonons acoustiques longitudinaux se propageant dans le cristal. La juxtaposition de ces deux spectres Raman/Brillouin nous donne ainsi une vue schématique des deux familles de vibrations optiques/acoustiques que nous rencontrerons tout au long de cette thèse. On remarquera cependant que la pente de la branche acoustique représen-tée dans la courbe de dispersion n’est pas nulle en centre de zone. Cela vient du fait que les phonons acoustiques sont dispersifs, c’est à dire que leur fréquence varie en fonc-tion du vecteur d’onde q. Ainsi, autant en Raman la fréquence détectée est indépen-dante de la géométrie de diffusion, autant en Brillouin cette géométrie a un impact sur la fréquence détectée. On notera également qu’un seul pic Brillouin est présent dans le spectre, alors qu’on devrait retrouver un pic correspondant aux branches acoustiques transverses (non représentées dans le schéma des courbes de dispersion qui se veut pédagogique). Cela est dû au fait que la plupart des mesures Brillouin sont faites en rétrodiffusion, configuration dans laquelle l’angle entre les vecteurs d’onde de la lu-mière incidente et collectée vaut θ = (ki,kd) = 180. Les modes acoustiques transverses sont très peu actifs dans cette configuration, et leur détection requiert une géométrie de diffusion différente.

FIGURE2.8 – A. à gauche : représentation schématique de l’ensemble des deux fenêtres spectrales accessibles au spectromètre Brillouin (rouge) et Raman (bleu) dans le cas d’un cistal quelconque. A droite : courbes de dispersion des phonons optiques et acoustiques correspon-dant. B. Même représentation dans le cas d’une nanoplaquette du même cristal d’épaisseur 4 nm dans laquelle un effet de confinement acous-tique est observé : disparition du pic Brillouin et apparition d’un pic

Ici encore plus qu’avec la diffusion Raman les phonons étudiés par spectroscopie Brillouin sont ceux pour lesquels Ω ≪ ω0, c’est à dire proches du centre de la zone Brillouin, où la dépendance en q est linéaire. La relation de dispersion donne alors Ω=vL/Tq où vL et vT sont les vitesses du son correspondant aux ondes acoustiques longitudinales et transverses respectivement. Cette relation permet d’exprimer avec l’équation 2.22 la fréquence Brillouin d’une onde acoustique de vitesse v = vL ou v = vT en fonction de l’indice de refraction n, de la longueur d’onde de la radiation incidente et de l’angle de diffusion θ :

Ω 2π = νB= 2vn λ0 sin θ 2 (2.26)

Le dispositif fréquemment utilisé pour les mesure Brillouin est en configuration de rétrodiffusion avec θ = 180auquel cas le q transféré est maximal ainsi que la fréquence Brillouin qui s’exprime comme :

νB= 2vn

λ0 (2.27)

La mesure de la fréquence Brillouin permet d’accéder dans le cas d’un matériau isotrope aux vitesses du son longitudinale et transverse définies par les relations :

vL= s C11 ρ (2.28) vT = s C44 ρ (2.29)

Les coefficients C11 et C44 sont les coefficients élastiques représentant la déforma-tion dans le sens de la contrainte et perpendiculairement à la contrainte respectivement et ρ la densité. Le coefficient C44est parfois appelé module de cisaillement G.

Nuance Raman/Brillouin

Nous avons également abordé la notion de confinement acoustique, qui suit une loi de proportionnalité inverse avec la taille de l’objet confinant. Lorsque cet objet est une sphère de diamètre D, ν ≈ vL/T/D et lorsque cet objet est une plaquette d’épaisseur e, ν = vL/2e. On comprend alors que les fréquences mises en jeu par les vibrations acoustiques confinées dépendent du régime de taille considéré. L’effet du confinement acoustique dans une nanoplaquette d’épaisseur e = 4 nm est représenté figure 2.8.B conjointement sur les spectres Raman/Brillouin et sur la courbe de dispersion. On re-marque tout d’abord la suppression du pic Brillouin vers 2 cm−1. En effet la longueur d’onde associée au phonon longitudinal vaut Λ = vL/ν = 83 nm (avec vL= 5000 m.s−1). Une vibration de longueur d’onde 83 nm ne peut pas se propager au sein d’un objet de dimension 4 nm. La longueur d’onde la plus grande que peut accommoder l’épaisseur de la nanoplaquette est λ = 2e. Il s’agit alors d’une onde stationnaire à la fréquence

2.5. Diffusion Raman par des modes de Lamb ℓ > 2 21