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Interactions pharmacocinétiques :

Interactions medicamenteuses des AVK

I. LES MECANISMES DES INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES :

1. Interactions pharmacocinétiques :

Les interactions médicamenteuses constituent une cause importante d’effets indésirables médicamenteux. L‘âge, le sexe, le nombre de comorbidités, le nombre de médicaments, la durée d’hospitalisation sont des facteurs de prédisposition aux interactions médicamenteuses [53]. Elles sont définies par l’effet de l'administration concomitante ou successive de deux ou plusieurs médicaments. Elles ont un impact considérable sur la morbidité et la mortalité, associées à un recours important au système de soin avec les coûts de santé qui en résultent [54].

Les médicaments susceptibles d’interagir avec les AVK sont très nombreux, ils peuvent augmenter l’activité de l’anticoagulant, d’où le risque hémorragique, ou au contraire le diminuer et augmenter le risque de thrombose. Il convient de mettre les patients en garde contre les dangers de l’automédication et lors de toute prescription, il faut prendre connaissance [52].

I. LES MECANISMES DES INTERACTIONS

MEDICAMENTEUSES :

Les interactions médicamenteuses sont classées en deux (2) groupes : les interactions pharmacocinétiques et les interactions pharmacodynamiques.

1. Interactions pharmacocinétiques :

Elles peuvent se manifester à tout niveau du parcours métabolique d’un médicament : l’absorption, la distribution, la métabolisation et l’élimination. Elles se produisent lorsqu’un médicament entraîne des modifications de

Nous allons passer en revue les différents mécanismes d’interactions dans chacune des quatre étapes [23], de la pharmacocinétique.

a. Les interactions au niveau de l’absorption :

L’absorption est le passage du médicament de son point d’application (surface de la peau ou lumière du tube digestif) par exemple, vers un milieu intérieur (liquide interstitiel, plasma) au travers d’une barrière anatomique (peau, entérocytes).

L’absorption digestive des médicaments ; comme c’est le cas pour les AVK ; est précédée d’une phase de solubilisation du principe actif à partir de la forme pharmaceutique. Puis le principe actif, dont la forme non ionisée est suffisamment liposoluble, traverse la muqueuse digestive par diffusion passive ou transport actif, Il est alors transporté par la veine porte vers le foie. Le principe actif grâce à son affinité pour l’hépatocyte arrive donc au niveau du foie, une fraction de la dose qui a été absorbée subit un premier passage hépatique, avant d’atteindre la circulation systémique, ce passage hépatique réduit la quantité de principe actif qui arrive dans la circulation sanguine.

L’intestin est le lieu privilégié d’absorption, l’importante surface de contact entre le médicament et la muqueuse intestinale grâce aux villosités intestinales, a tendance à contrebalancer l’effet de l’ionisation, expliquant ainsi la possibilité de résorption d’acides faibles à libération entérique. De plus, dans l’intestin la dissolution préalable nécessaire à l’absorption est favorisée [56].

 L’alimentation : Les aliments sont susceptibles de modifier la

vitesse et/ou l’intensité de résorption de médicaments. Certains sont mieux résorbés lorsqu’ils sont pris en dehors des repas alors que d’autres principes actifs présentent une meilleure biodisponibilité lors d’une prise au cours d’un repas.

 L’organisme :

Valeur du pH du milieu : pH acide gastrique / pH alcalin intestinal.

Ralentissement ou accélération de la vidange gastrique et/ou du transit intestinal

- Au médicament lui-même. - Le degré de liposolubilité.

- Caractère acide ou basique conditionnant le degré d’ionisation du médicament selon le pH du milieu.

- Concentration libre dans la lumière intestinale. - Poids moléculaire.

- Support galénique (forme à libération prolongée). - Association médicamenteuse.

- Complexation : Cette interaction survient lorsque, dans la lumière du tube digestif, la substance active forme avec un autre médicament un complexe de haut poids moléculaire, qui ne peut pas être résorbé au

- Ralentissement du péristaltisme intestinal : Certains médicaments ralentissant le transit intestinal sont susceptibles d’augmenter le temps de contact avec la muqueuse digestive des médicaments co-prescrits et d’augmenter ainsi leur résorption.

- Accélération de la vidange gastrique : Tout médicament

qui accélère la vidange gastrique entraîne une accélération de la résorption de certains principes actifs associés [56].

Il est important de ne pas confondre l’absorption à la biodisponibilité qui selon l’European Medicines Evaluation Agency (EMEA, Human guideline 2001) se définit comme étant la vitesse et l’étendue avec lesquelles la substance active ou sa fraction active est absorbée à partir de sa formulation pharmaceutique et devient disponible au site d’action. Étant donné que le site d’action n’est généralement pas identifié, la biodisponibilité est redéfinie comme étant la vitesse et l’étendue avec lesquelles la substance ou sa fraction active gagne la circulation générale c'est-à-dire parvient jusqu’à la circulation artérielle (aorte).

L’absorption est seulement l’une des étapes qui sépare l’administration du médicament de son arrivée à son site d’action (nommé biophase). Il importe de bien reconnaître ces deux concepts pour expliquer l’origine d’une faible biodisponibilité ; c’est ainsi qu’une substance peut être absorbée à 100% et n’avoir qu’une faible biodisponibilité [57].

Figure 15 : Phase d’absorption d’un médicament administré par voie orale [58].

b. Les interactions au niveau de la distribution :

Après l’absorption, le médicament est distribué dans la circulation générale pour une diffusion dans les différents tissus. Les médicaments sont transportés par une liaison aux protéines plasmatiques et tissulaires [59]. Parmi ces protéines transporteuses :

 L’albumine : représente la protéine la plus importante dans le plasma. Elle est synthétisée dans le foie et répartie dans le plasma et les fluides

 L’alpha1-glycoprotéine  Les lipoprotéines

Le degré de liaison aux protéines plasmatiques déterminé par le rapport de la concentration de médicament lié / concentration de médicament libre. Il varie considérablement en fonction des médicaments. Les médicaments qui ont un degré élevé de liaison aux protéines plasmatiques sont potentiellement plus susceptibles d'être déplacés par un autre médicament avec une plus grande affinité pour le même site de liaison. D'un simple point de vue clinique, ce déplacement pourrait être associé à des symptômes, des effets secondaires ou des toxicités lorsque le médicament déplacé a un degré de liaison plus élevé aux protéines plasmatiques (> 90%), un volume de distribution réduit et un indice thérapeutique étroit [59].

L’exemple type est le déplacement pharmacologique observé lorsque la warfarine et le diclofénac sont Coadministrés. La warfarine et le diclofénac ont la même affinité pour l'albumine, donc l'administration de diclofénac à un patient traité de manière chronique avec la warfarine entraîne un déplacement de ce dernier de son site de liaison. L'augmentation de la concentration plasmatique de warfarine libre provoque des hémorragiques graves [59].

c. Lesinteractions au niveau du métabolisme :

Le foie est un passage obligatoire pour la très grande majorité des médicaments. Ceux qui sont administrés par voie digestive, après avoir franchis

veineux et parviennent au foie, secondairement, par la circulation artérielle. Pour un médicament administré par voie digestive, comme c’est le cas des AVK, le métabolisme débute au niveau intestinal. Le tube digestif a, en effet, un équipement enzymatique non négligeable qui est localisé principalement dans l’intestin grêle, puis s’appauvrit peu à peu pour devenir minime au niveau colique. C’est néanmoins le foie qui, grâce à la richesse et la diversité de son équipement enzymatique, est le principal organe impliqué dans le métabolisme des médicaments [60].

La biotransformation d’un grand nombre de médicaments est assurée par le cytochrome P450 comprenant de nombreuses isoenzymes. Chez l'homme, il existe environ 30 isoformes du CYP, qui sont responsables du métabolisme médicamenteux et répartis en quatre familles (CYP1, CYP2, CYP3 et CYP4) [61] et sous familles.

Les principales sous-familles impliquées sont : CYP1A2, CYP2C8, CYP2C9, CYP2C19, CYP2D6, CYP3A4. Cette dernière est quantitativement la plus importante chez l’homme : elle représente 30% et 50% du contenu hépatique, et il est également présent au niveau intestinal (entérocytes). Environ la moitié des médicaments métabolisés le sont notamment par l'intermédiaire du CYP3A4 [61].

Stimulation du catabolisme d’un médicament par un autre :

Ce phénomène s’explique par le mécanisme d’induction enzymatique. Il est le fait de substances inductrices, majorant la synthèse et l'activité des CYP.

enzyme mais concerne principalement les CYP2C et 3A. L'induction est progressive et atteint son maximum en 10 à 15 jours. De la même façon, cet effet disparaît progressivement à l'arrêt de l'inducteur [61].

Inhibition du catabolisme d’un médicament par un autre :

Elle est le fait de substances inhibitrices, principalement médicamenteuses. L'inhibition, à l'inverse de l'induction, s'exerce le plus souvent au niveau d'un seul CYP et répond schématiquement à deux mécanismes :

Une inactivation irréversible du CYP par l'inhibiteur,

Une compétition au niveau d'un même CYP entre deux substances administrées simultanément, fixées et métabolisées par le même CYP. Ce deuxième mécanisme, plus fréquent, résulte d'une affinité de la substance inhibitrice, pour l'enzyme considérée, qui est supérieure à celle de la substance inhibée. En fonction de leur degré d'affinité pour une enzyme, certains médicaments vont inhiber le métabolisme des

médicaments moins affines, et de la même façon, voir leur métabolisme inhibé par des médicaments plus affines qu'eux sur cette enzyme [61].

d. Interactions au niveau de l’étape de l’élimination :

L’élimination ou l’excrétion des médicaments et de leurs métabolites est assurée par diverses voies dont la plus importante est la voie urinaire, les autres voies étant la voie biliaire ou encore la voie pulmonaire, la voie fécale, la voie salivaire, la voie lacrymale, la voie sudorale et la voie lactée.

La demi-vie d’élimination d’un médicament (t1/2) est le temps nécessaire pour que la concentration de ce médicament présente dans le plasma diminue de moitié. La valeur de la demi-vie est fonction des processus de métabolisme et d’élimination. Une demi-vie longue traduit une faible élimination et une demi- vie brève traduit une forte élimination. La demi-vie plasmatique est une notion statistique donnée à titre indicatif, mais elle est variable d’un patient à l’autre en fonction de l’état physiopathologique individuel [56].

Interactions pharmacocinétiques lors de l’élimination urinaire :  Au stade de la filtration glomérulaire :

Tout médicament capable d’augmenter le flux sanguin glomérulaire facilite l’élimination des autres produits. Tout médicament capable de déplacer un autre médicament de ses sites de fixation sur les protéines plasmatiques augmente le taux de la forme libre de ce dernier et donc son élimination par filtration glomérulaire [56].

 Au stade de la sécrétion tubulaire :

Lorsque deux médicaments sont mis en présence au niveau du tube contourné distal, ils peuvent parfois entrer en compétition au niveau du site de

 Au stade de la réabsorption tubulaire :

Un médicament peut voir sa réabsorption tubulaire majorée ou diminuée s’il est réabsorbé par un mécanisme de transport actif commun à celui impliqué dans la réabsorption d’un autre médicament présent simultanément [56].

Interactions pharmacocinétiques lors de l’élimination hépatique [56]:

La voie d’élimination biliaire est généralement une voie accessoire. Certains médicaments ont cependant une élimination hépatique prédominante, en effet, des médicaments de masse moléculaire élevée sont sécrétés de façon active par les hépatocytes dans les canalicules biliaires. Cette voie d’excrétion peut devenir prépondérante si la voie principale d’élimination rénale est défaillante. Après passage hépatique, la fraction du médicament non métabolisé peut retourner dans la circulation générale ou être excrétée par la bile.

Lors de certaines interactions médicamenteuses, l’élimination hépatique est mise en cause. Elle peut être :

 diminuée par des ralentisseurs du débit sanguin dans la circulation porto- cave ou par compétition entre les médicaments au niveau des transports actifs d’excrétion biliaire.

 augmentée par des accélérateurs du débit sanguin hépatique . Le cas particulier du sujet âgé :

plus modifiée par l’âge est l’excrétion rénale, conséquence de l’altération physiologique de la fonction rénale chez le sujet âgé. On observe donc une diminution de la clairance rénale qui concernera les médicaments dont le rein est la principale voie d’élimination. Les variations des paramètres pharmacocinétiques d’un médicament nécessitent son ajustement posologique afin d’éviter des phénomènes de toxicité ou au contraire une inefficacité

thérapeutique. D’une manière générale, la posologie doit être réduite chez le sujet âgé du fait d’une diminution de nombreuses fonctions organiques [63].

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