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Intérêt d’étudier les phases de construction et de démantèlement

PARTIE II. EVALUATION DE LA METHODOLOGIE ACV APPLIQUEE AUX

III. DISCUSSION SUR LES ASPECTS METHODOLOGIQUES

4/ LE PROBLEME DE LA CONSTRUCTION ET DU DEMANTELEMENT

4.3/ Intérêt d’étudier les phases de construction et de démantèlement

Dans toutes les ACV sur des applications en traitement des eaux que nous avons étudiées,

l’intérêt du projet concernait la phase d’exploitation : choix des filières avec les meilleures

performances environnementales permettant une économie en énergie, en réactifs, une

diminution des émissions polluantes dans l’eau, l’air ou le sol, une optimisation des solutions

de valorisations ou de recyclage des sous-produits de traitement… Dans aucune des études,

les impacts de la construction et du démantèlement, lorsqu’ils ont été étudiés, n’ont eu

d’importance dans les conclusions des résultats. Bien souvent d’ailleurs ces phases sont

négligées.

Par ailleurs, dans l’analyse environnementale des procédés, évaluer seul l’impact à l’échelle

du cycle de vie complet ne semble pas suffisant. Il faut évaluer de façon isolée au moins la

phase exploitation pour comprendre l’impact durant la période d’utilisation du procédé. Nous

avons pu constater que le mélange des trois phases du cycle de vie dans l’inventaire d’ACV

apporte une confusion et un manque de précision aux résultats de l’étude. L’ACV doit

permettre de remonter aux parties du système d’où proviennent les flux pertinents générant les

impacts. Par exemple, si l’impact toxicité est causé majoritairement par l’émission d’un ETM,

il faut pouvoir identifier d’où il provient. Il peut être issu de la fabrication de l’acier ou de

l’épandage des boues. Ces deux alternatives ne mèneront pas aux mêmes conclusions.

Si nous traitons le cas de la construction et du démantèlement des procédés en détail, c’est

parce que ces phases tiennent une place spécifique dans l’analyse des procédés de traitement

des eaux : elles nécessitent énormément de temps pour recueillir les données des installations

existantes, leur inventaire est très imprécis (comme nous l’avons vu à cause de la multiplicité

des matériaux utilisés et du manque de données sur les machines dont les fournisseurs ne

souhaitent pas transmettre les bilans environnementaux…) et surtout leur intérêt reste limité.

Les normes ISO tiennent compte de ce genre de cas. Ainsi, selon ces normes, considérer la

construction d’un procédé dans une étude ACV est une question dépendant de l’objectif, du

champ et des frontières de l’étude. La norme [ISO 14 040] nous précise :

- chapitre 5.1.2 : « il convient que le champ soit suffisamment bien défini pour garantir

que l’ampleur, la profondeur et le niveau de détail de l’étude sont compatibles avec

l’objectif défini et suffisants pour y répondre. »

- chapitre 5.1.2.2 : « le choix des entrants et des sortants, le niveau d’agrégation au sein

d’une catégorie de données et la modélisation du système doivent être cohérents avec

l’objectif de l’étude. »

Le critère principal d’inclusion ou d’exclusion de données dans une étude est donc la

pertinence de la donnée vis à vis de l’objectif de l’étude. C’est donc le comité de pilotage qui

et du démantèlement dans les études ACV dépend donc de l’intérêt des commanditaires de

l’étude pour ces phases.

La norme [ISO 14 041] affine l’analyse :

- chapitre 5.3.3 : « dans de nombreux cas, il n’y a cependant ni assez de temps, ni assez

de données, ni assez de ressources pour effectuer une étude aussi complète. Des

décisions doivent donc être prises concernant les processus élémentaires à modéliser et

le niveau de détail auquel ces processus élémentaires sont étudiés. Il n’est pas

nécessaire de dépenser des ressources pour la quantification des entrants et des sortants

qui ne changeront pas de façon significative les conclusions globales de l’étude. »

- chapitre 5.3.3 : « toute décision d’omettre des étapes du cycle de vie, des processus ou

des entrants/sortants doit être clairement indiquée et justifiée. »

Ainsi même si la construction et le démantèlement ont un impact non négligeable sur

l’environnement, la grande quantité de ressources que leur inventaire nécessite ainsi que leur

faible intérêt pour l’étude (il faudra quoi qu‘il advienne construire une STEP) suffisent pour

les négliger.

Si effectivement ces phases du cycle de vie des procédés sont négligées, il faudra néanmoins

justifier ce choix et le signaler lors de la présentation des résultats, cette dernière condition

étant obligatoire dans le cas d’une présentation publique.

La construction des procédés, dont l’inventaire d’ACV nécessite beaucoup de temps et de

ressources pour peu d’influence sur les conclusions de l’étude, semble donc pouvoir être

négligée à condition que l’objectif de l’étude n’accorde pas d’importance à cette phase. Il en

est de même pour le démantèlement des infrastructures. Il faut donc maintenant voir quels

sont les objectifs pour lesquels la phase de construction est susceptible d’avoir une influence

sur les résultats d’étude.

D’un point de vue théorique, nous pouvons envisager différents objectifs d’études et voir dans

quelles circonstances l’intégration des étapes de construction et de démantèlement d’un

procédé apporte un bénéfice à l’étude :

- comparaison de systèmes similaires (deux procédés aux techniques différentes) :

L’intérêt du décideur se portera probablement davantage sur la phase d’exploitation.

Les quantités employées de béton, d’acier et d’autres matériaux seront proches

puisque les deux systèmes utiliseront des matériaux. A un certain écart près, les

impacts de la construction et du démantèlement seront similaires. Ainsi ces deux

phases n’apporteront rien à l’étude.

- comparaison de systèmes différents :

On entend par systèmes différents des systèmes dont l’un a un fort impact durant sa

phase d’exploitation (dépense énergétique, réactifs…) contrairement au second dont

l’impact de la construction est bien plus important (exemple : réseau + station

comparé à de l’assainissement autonome ou une lagune). Là encore l’intérêt du

décideur se portera probablement davantage sur la phase d’exploitation (législation sur

les rejets, énergie…). Toutefois la comparaison des phases du cycle de vie du système

étudié sera intéressante. Par exemple on peut souhaiter comparer une station à des

assainissements autonomes individuels. Ces derniers ne requièrent ni énergie ni réactif

durant leur phase d’exploitation contrairement à la station. L’impact de

l’assainissement autonome sera causé essentiellement par la construction qui sera alors

à intégrer dans l’étude.

- mise en évidence des aberrations technologiques :

Il est possible que l’installation d’une station (rare) ou d’un procédé de traitement soit

plus néfaste pour l’environnement que bénéfique, ceci parce que l’élément traité (eaux

usées tertiaires par exemple) soit de qualité suffisante pour être rejeté sans traitement

supplémentaire alors que la mise en place de ce traitement a un impact en énergie,

génère des émissions au niveau de sa construction et de son exploitation. Dans ce cas,

il peut être également intéressant d’étudier les phases de construction et de

démantèlement.

Dans la collecte de données d’une étude, la part accordée aux étapes de construction et de

démantèlement est prépondérante. Au contraire, l’intégration de ces phases semble être

intéressante seulement dans certains cas plutôt rares : l’étude des systèmes extensifs. Les

préoccupations environnementales actuelles sont en effet surtout focalisées sur des problèmes

liés à l’exploitation. De plus, leur impact semble négligeable, au moins pour la construction

au vu des résultats de l’étude de cas et des conclusions de précédents travaux sur le sujet, et la

fabrication d’une usine d’épuration est incontournable pour protéger un cours d’eau et

répondre à la réglementation. Enfin les normes ISO semblent permettre de négliger certains

éléments à condition que leur inclusion ne change pas de façon significative les résultats de

l’étude.

Nous proposons donc, à l’exception de certains objectifs d’études cités plus haut et hormis

l’étude de systèmes extensifs (séparation à la source, lagunage, assainissement autonome…),

de négliger les phases de construction et de démantèlement dans les études ACV sur des

systèmes d’épuration classiques. Ce choix devra être justifié au regard des objectifs de l’étude

et signalé dans les rapports ou les présentations de résultats. Par ailleurs, nous ne pouvons

qu’encourager la mise en place d’un protocole précis de recueil des données auprès des

acteurs de la construction et du démantèlement des installations de traitement des eaux. Ceci