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: Les insuffisances de la conception civiliste moderne de la propriété à saisir l’image des personnes

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 183-200)

218. Plan. Dans l’approche traditionnelle, le droit de propriété et le droit à l’image semblent obéir à des règles différentes qui entravent leur association. Or, c’est notamment la manière dont la doctrine, dite classique, perçoit la propriété qui empêche celle-ci d’appréhender l’image des personnes. On peut alors être séduit par une autre perception de la propriété plus apte à saisir, de manière générale, l’immatériel, et plus spécifiquement, l’objet de notre étude, l’image des personnes. En effet, la rénovation de la théorie de la propriété telle que défendue par le Professeur Frédéric Zenati, que nous qualifions de conception civiliste moderne, a des répercussions, de la même manière qu’un jeu de dominos, sur de nombreuses branches du droit. L’utilisation de la propriété est ainsi étendue, ce qui permet de la replacer au cœur du système juridique. Selon le Professeur Frédéric Zenati, « la propriété mérite mieux que la théorie qu’en fait la doctrine après le Code civil et qui continue aujourd’hui d’être enseignée de manière dominante, celle étroite d’un simple droit patrimonial figurant au rang des diverses formes de biens pouvant composer un patrimoine »712. Sa démarche a, pour conséquence, de faire fi des postulats concernant aussi bien le droit de propriété que les droits de la personnalité et d’arriver ainsi à ne plus les opposer mais, au contraire, à les assimiler. Pour comprendre cette nouvelle approche, il faut revenir dans les grandes lignes à la théorie de la propriété proposée par le Professeur Frédéric Zenati713 (§1) avant de se pencher sur les conséquences que cette dernière a sur le droit à l’image (§2).

712F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.305.

713V. F. ZENATI, Essai sur la nature juridique de la propriété. Contribution à la théorie du droit subjectif, Thèse, Lyon, 1981.

§1 : La rénovation proposée de la propriété

219. Plan. Il serait présomptueux de prétendre présenter, de manière exhaustive, l’analyse de la propriété retenue par le Professeur Frédéric Zenati tant celle-ci regorge de subtilités.

« L’élégance du système de Fréderic Zenati »714 nécessite une étude approfondie pour en saisir tous les tenants et aboutissants. Dans le cadre de cette recherche, nous nous contenterons de n’en dévoiler qu’une infirme portion dont la portée ne pourra être comprise qu’à la lumière de la suite des développements relatifs au droit à l’image. Afin de « tenter de donner au droit civil moderne la théorie de la propriété dont il a besoin »715, le Professeur Frédéric Zenati propose de changer de regard sur la propriété tant du point de vue de son objet (A) que de celui de son contenu (B) dont il propose, pour chacun d’eux, l’expansion.

A) L’élargissement de l’objet de la propriété

220. L’incompatibilité de la propriété et de l’immatériel. L’incompatibilité de la propriété à saisir l’incorporel, et la diminution subséquente de son assiette, proviendrait d’une

« manipulation scolastique des textes romains »716. Il est avancé que c’est une dénaturation du droit romain au Moyen Âge qui a entrainé la modification regrettable de l’objet de la propriété car ce n’est qu’à partir du moment où la propriété n’a plus été analysée comme une puissance du sujet sur l’objet mais comme un simple droit qu’ultérieurement la propriété des droits, et donc des choses incorporelles a été niée. Cette vision « restrictive » de la propriété est celle instruite sur les bancs de l’Université et reprise dans la quasi-totalité des manuels de Droit. En effet, il est enseigné que la propriété est incluse dans la liste des droits patrimoniaux et, plus spécifiquement, dans celle des droits réels puisqu’elle porte sur une res. Elle est même perçue comme le droit réel le plus complet, « le type le plus achevé de droit réel »717 si bien que tous les autres droits réels principaux n’en sont que des démembrements. Le propriétaire bénéficie de l’ensemble des prérogatives que l’on peut avoir sur un bien résumé par le célèbre triptyque

714J.-P CHAZAL, « La propriété, dogme ou instrument politique ? », RTD civ. 2014, p.763.

715F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.305.

716F. ZENATI, op.cit.

717G. CORNU, (dir.), Vocabulaire juridique, PUF-Quadrige, 11ème éd., 2016., V. « Propriété ».

usus, fructus, abusus. Enfin, le droit de propriété est opposable erga omnes, et permet à son titulaire de bénéficier du droit de suite et du droit de préférence. En tant que droits patrimoniaux c'est-à-dire susceptibles d’évaluation pécuniaire, les droits réels, comme les droits personnels, sont considérés comme des biens. L’avant-projet de réforme du droit des biens prévoyait d’ailleurs cette éligibilité des droits réels et des droits personnels à la qualification de bien dans son article 520718. Le droit de propriété étant un droit réel, il est donc également perçu comme un bien. Cependant, du fait de son lien exigu avec le bien sur lequel il porte, le droit de propriété, contrairement aux autres droits, est parfois considéré comme un bien corporel.

221. La propriété, un bien corporel. Conférant au propriétaire toutes les utilités que le bien est susceptible d’offrir, le droit de propriété est souvent confondu avec le bien sur lequel il porte. N’emploie-t-on pas, dans le langage courant, l’expression « ma propriété » pour désigner l’objet dont on est propriétaire ? En revanche, dès lors que l’on ne bénéficie que d’un démembrement du droit de propriété, le droit ne s’identifie plus avec le bien matériel sur lequel il porte. Il y aurait, par conséquent, « une opposition entre le droit de propriété, considéré comme un bien corporel, et tous les autres droits, considérés comme des biens incorporels »719. Cette analyse suggère que le droit de propriété ne porte que sur des biens matériels, car si celui-ci s’identifie avec l’objet sur lequel il porte, il deviendrait alors un bien incorporel, dès lors que son objet serait lui-même incorporel. Ensuite, de l’idée d’incorporation de la propriété dans le bien approprié en découle celle de transfert du droit de propriété lors d’une vente. C’est la raison pour laquelle on parle de transfert de propriété. Plus largement, « les choses ne devraient pas être considérées comme des biens. Car ce qui a une valeur, ce qui est un facteur de richesse, ce ne sont pas les choses en soi, mais les droits dont elles sont l’objet »720. Ainsi, seuls les droits constitueraient l’objet du transfert.

222. La négation de la propriété des droits. L’acception du droit de propriété comme un droit réel, et donc comme un bien, induit qu’il ne peut y avoir de propriété des droits. Tout

718V. par ex l’avant-projet de réforme en droit des biens sous l’égide de l’association Henri Capitant, art. 520 :

« Sont des biens […] les droits réels et personnels ».

719J. FLOUR, J.-L AUBERT et E. SAVAUX, Droit civil. Les obligations. Tome 1. L’acte juridique. Sirey, 5ème éd. 2012, n°5, p.4.

720J. FLOUR, J.-L AUBERT et E. SAVAUX,op. cit, n°4, p.3.

d’abord, selon la vision la plus classique du droit de propriété, ce dernier ne peut porter que sur des choses corporelles, or les droits sont incorporels. Ensuite, sa qualification de droit réel, et donc de bien, le soustrait nécessairement à l’emprise des droits puisque « la propriété ne saurait être cet astre autour duquel tournent les droits puisque, précisément, elle s’inscrit dans la même orbite qu’eux »721. C’est pour cela que l’on parle communément de titularité des droits et non de propriété des droits. Selon cette approche, l’on transfert donc ou son droit de propriété ou un autre droit mais jamais la propriété d’un droit. Le contrat translatif du droit de propriété est une catégorie parmi d’autres d’actes translatifs de droit.

223. Origines des faiblesses de la théorie classique. L’analyse de la propriété comme un droit réel a été fortement combattue par une partie de la doctrine qui relève l’incohérence d’une conception qui consiste à faire de la propriété à la fois un bien et le mécanisme d’appropriation des biens722, ce qui revient à dire que l’on transfère la propriété du droit de propriété. Cette inclusion de la propriété dans la catégorie des droits réels découlerait de la perception de celle-ci comme un droit subjectif par les romanistes médiévaux723. Or, si l’on remonte au droit romain, la propriété n’était pas considérée comme un droit724. Elle recouvrait, à vrai dire, deux réalités. Le droit romain établissait, en effet, une distinction entre le dominium et la proprietas. D’un côté, la proprietas correspondait au bien, objet de propriété, et de l’autre, le dominium coïncidait au pouvoir exclusif d’une personne sur un bien725. Ainsi, « les romains n’ont jamais confondu le bien et sa relation au sujet : c’est la chose qui est dans le commerce, non son rapport d’appropriation »726. Ce n’est que, par la suite, au Moyen Âge, que la propriété aurait été dénaturée pour répondre « aux besoins spécifiques de la société féodale »727. Rappelons, qu’à l’époque, le Seigneur était le seul

721J. LAURENT, La propriété des droits, LGDJ, 2012, n°15, p.15.

722F. ZENATI et T. REVET, op.cit, n°2, p.14 : « Le droit de propriété ne peut être considéré comme un bien sans absurdité. Il n’y a pas de sens à considérer comme objet d’appropriation l’instrument même d’appropriation.

723F. ZENATI-CASTAING, « La propriété, mécanisme fondamental du droit », RTD civ. 206, p.445.

724F. VILLEY, Le jus in re du droit romain classique au droit romain moderne, in Publication de l’Institut de droit romain de l’Université de Paris, 1947, p.193.

725F. VILLEY, Critique de la pensée juridique moderne, Dalloz, 1976. V. également F. ZENATI, op. cit.

726F. ZENATI, Essai sur la nature juridique de la propriété. Contribution à la théorie du droit subjectif, Thèse Lyon, 1981, n°189.

727F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.305.

véritable propriétaire de la terre, il possédait la propriété éminente, la proprietas. Quant au tenancier, il bénéficiait du domaine utile et pouvait à ce titre jouir des fruits de la terre. Il en résulte que « plusieurs personnes sont alors concurrentes sur un même bien-fonds, chacune bénéficiant de prérogatives diverses qui atomisent la relation exclusive en autant d’utilités possibles sur la chose »728. Dit différemment, la propriété de la terre n’était donc plus l’affaire d’une personne mais celle de plusieurs personnes, rompant alors avec l’idée d’exclusivité telle qu’elle existait en droit romain. À cette évolution en a découlé celle de transformer la propriété en droit de propriété729. Bientôt, les tenanciers, ne bénéficiant, au départ, que d’un

« droit sur la chose d’autrui »730, un « jus in re »731, puisqu’ils n’étaient pas propriétaires du bien, se sont vus offrir la possibilité, par le biais de la pratique procédurale en vigueur, d’agir, au même titre que le propriétaire, sur le fondement d’une action en revendication dès lors qu’ils étaient troublés dans leur jouissance732. Ces derniers ne se reposaient donc plus sur la propriété de leur droit sur la chose d’autrui mais sur la propriété de la terre elle-même. Ce faisant, ils ont été élevés au rang de propriétaire. Ce glissement de la qualité de tenancier à celle de propriétaire a conduit à confondre dominium et jus in re, le dominium n’étant que la concentration de tous les jus in re. On est ici aux portes de la théorie des démembrements de la propriété. De cette réduction du dominium à un jus in re en ressort la négation de la propriété des droits puisque n’étant qu’un droit, la propriété ne peut porter sur des droits.

224. Le Code civil et l’immatériel. Malgré l’opinion dominante selon laquelle le Code civil retient cette impuissance de la propriété à saisir les biens dépourvus de corporalité, le Professeur Frédéric Zenati considère, qu’au contraire, le Code civil ne reprend pas cette vision tronquée héritée des post-glossateurs. En effet, rien ne circonscrit les choses susceptibles de propriété, évoquées à l’article 544 du Code civil, à une quelconque corporalité. L’admission des biens incorporels à travers les catégories des immeubles par l’objet auquel il s’applique733

728J. LAURENT, op.cit, n°51, p.42.

729F. ZENATI, « La propriété, mécanisme fondamental du droit », RTD civ. 2006, p.445.

730F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.305.

731F. VILLEY, op.cit.

732F. ZENATI, op. cit.

733Articles 517 et 526 du Code civil.

et des meubles par détermination de la loi734 en est une des manifestations patentes. La notion de « meubles incorporels » est même expressément avancée à l’article 2075 du Code civil735. Dans le même esprit, le Code civil évoque la propriété des rentes viagères736 ainsi que celle des droits réels immobiliers737. Le Professeur Frédéric Zenati avance également que, s’il est vrai que certains biens incorporels obéissent à des mécanismes d’acquisition spécifiques, telle la création pour les œuvres de l’esprit, la plupart des modes d’acquérir s’appliquent aux choses impalpables. C’est ainsi que « les droits incorporels s’acquièrent principalement par constitution. Lorsque celle-ci résulte, ce qui est le cas le plus fréquent, de la volonté de l’homme, il y a acquisition par l’effet des obligations, modes d’acquérir la propriété expressément recensé par la loi (article 711 du Code civil) »738.

225. La jurisprudence et l’immatériel. Enfin, le droit des biens s’ouvre de plus en plus à l’immatériel sous l’impulsion notamment de la CEDH739. La Haute juridiction judiciaire reconnaît la qualité de bien à un numéro de carte bancaire740, à un projet de borne

734Articles 527 et 529 du Code civil.

735Article 2075 du Code civil : « Lorsque le gage s'établit sur des meubles incorporels, tels que les créances mobilières, l'acte authentique ou sous seing privé, dûment enregistré, est signifié au débiteur de la créance donnée en gage, ou accepté par lui dans un acte authentique ».

736Article 1983 du Code civil : « Le propriétaire d'une rente viagère n'en peut demander les arrérages qu'en justifiant de son existence, ou de celle de la personne sur la tête de laquelle elle a été constituée ».

737Article 2181 du Code civil : « Les contrats translatifs de la propriété d'immeubles ou droits réels immobiliers que les tiers détenteurs voudront purger de privilèges et hypothèques, seront publiés au bureau des hypothèques de la situation des biens, conformément aux lois et règlements concernant la publicité foncière ».

738F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.30.

739 Constituent des biens d’après la CEDH : le nom de domaine (CEDH, 18 sept. 2007, Paeffgen gmbh c/Allemagne, n°25379/04, 21688/05, 21770/05 : JCP G 2008, U, 158, n°1, obs. C. CARON ; un intérêt patrimonial relatif à l’habitation (CEDH, gde ch., 30 nov. 2004, Öneryildiz c./Turquie : AJDA 2005, p.550, chron. J.-F. FLAUSS ; AJDA 2005, p.1133, note S. RABILLER ; Europe 2005, comm. 105, obs. N.

DEFFAINS ; RTD civ. 2005, p.422, note T. REVET ; JCP A, 2006, I, 1002, comm. P. YOLKA ; AJDA 2005, p.1081, tribune Y. JÉGOUZO ; Europe 2005, comm. 106, obs. V. LECHEVALLIER ; RDI 2005, p/98, chron. F-G. TRÉBULLE ; RDP 2005, p.806, chron. H. SURREL. V. aussi : CEDH, 29 mars 2010, n°34078/02, Brosset-Triboulet et a. c/France et n°34044/02 Depalle c/France : AJDA 2010, p.1311, note M. CANEDO-PARIS ; RFDA 2010, p.543, note R. HOSTIOU ; D. 2010, p.2024, note C. QUÉZEL-AMBRUNAZ ; RDP 2010, p.1451, note S. MANSON ; RJEP 2010, n°10, p.32, note G. GONZALEZ ; CEDH, 23 sept. 2014, n°46154/11, Valle Perimpié Sociétà Agricola S.P.A.C c/Italie : AJDA 2014, p.2273, tribune R. HOSTIOU), ou une prestation sociale (CEDH, 23 janv. 2014, Montaya c/France : JCP G 2014, act. 175, A. SCHAHMANECHE).

740 Cass. crim.14 novembre 2000 : D.2001, p.1423, note B. DE LAMY ; RTD civ. , p.912, obs. T. REVET.

informatique741 à un nom de domaine742, à une connexion internet743, aux informations relatives à la clientèle744, à l’intérêt patrimonial qui constitue une « espérance légitime » de pouvoir obtenir la paiement de rappel de salaire745 ou encore à l’enregistrement d’images et de sons746. Ces solutions témoignent de l’élargissement de l’objet de la propriété puisqu’en l’absence de dispositif spécial concernant ces biens, la Cour de cassation se base nécessairement sur le droit commun747. De surcroît, le contenu de la propriété connaît également, sous la plume du Professeur Frédéric Zenati, une extension notable.

B) L’élargissement du contenu de la propriété

226. La limitation des prérogatives du propriétaire. Le Professeur Frédéric Zenati reproche à « Bartole et ses épigones »748 d’avoir joué un rôle néfaste dans la définition de la propriété. En qualifiant la propriété de droit réel, celle-ci s’est vue attribuer les mêmes limites puisque les prérogatives inventoriées pour qualifier une personne de propriétaire ne sont, en réalité, que celles qui, à Rome, étaient accordées au possesseur du bien d’autrui749. Ce dernier

741 Cass. crim. 22 septembre 2004 : D. 2005, p.411, note B. DE LAMY ; RTD civ. 2005, p.164, obs. T REVET.

742 CA Paris, 18 octobre 2000, D. 2001, p.1379, note G.LOISEAU.

743Cass. crim., 21 sept. 2011, n°11-80.305.

744Cass. crim., 16 nov. 2011, n°10-87.866, Bull. crim. n°233 ; D.2012, p.137, obs. M. LÉNA ; RTD com. 2012, p.203, obs. B. BOULOC ; RSC 2012, p.169, obs. J. FRANCILLON ; Dr. pén. 2012, comm. n°1, obs. M.

VÉRON ; D.2012, p. 964, chron. N. THOMASSIN ; D. 2014, p.1698, obs. C MASCALA ; AJ Pénal 2012, p.163, obs. J. LASSERRE CAPDEVILLE ; D.2012, p.137, note G. BEAUSSONIE ; D. 2012, p.2917, obs. G.

ROUJOU de BOUBÉE, T. GARÉ, M.-H. GOZZI, S. MIRABAIL et T. POTASZKIN. Dans le même sens, V.

Cass. crim. 22 mars 2017, n°18-85.929.

745Cass. soc. 21 mars 2012 : Bull. civ. V, n°101 ; Cass. soc. 24 nov. 2010 : D.2010, p.2914, obs L. PERRIN ; RDT 2011, p.257, obs. P. FLORES.

746 Cass. crim. 16 déc. 2015, n°14-83.140, Bull. crim. n°304 ; D. 2016, p.587, note L. SAENKO ; D.2016, p.1779, obs. L. NEYRET et N. REBOUL-MAUPIN ; D.2016, p.2424, obs. G. ROUJOU DE BOUBÉE, T.

GARÉ, C. GINESTET, M.-H. GOZZI, L. MINIATO et S. MIRABAIL ; Dalloz IP/IT 2016, p.140, obs. J.

DALEAU ; AJ pénal 2016, p.144, obs. P. KERLOEGAN ; RTD com 2016, p.345, obs. B. BOULOC.

747Dans ce sens, T. REVET, note sous Cass. crim.14 novembre 2000, RTD civ. 2001, p.912.

748F. ZENATI, « Pour une rénovation de la théorie de la propriété », RTD civ. 1993, p.30.

749F. ZENATI, op.cit: « En faisant de la propriété un droit réel, les post-glossateurs l’ont réduite aux utilités que l’on inventorie habituellement pour délimiter les prérogatives accordées au possesseur de la chose d’autrui ».

pouvait se voir concéder notamment l’usus et le fructus750. Les post-glossateurs en ont déduit que lorsque toutes les utilités d’un bien étaient concentrées dans les mains d’une même personne, celle-ci en était propriétaire751. Or, pour le Professeur Frédéric Zenati, c’est une

« curieuse manière de définir la propriété que celle qui se réfère aux droits sur la chose d’autrui »752. Il serait d’ailleurs impossible d’énumérer tous les usages que l’on peut tirer d’un bien.

227. Critique de la définition de la propriété par son contenu. Pour résumer, l’usus, le fructus et l’abusus ne sont que des potentialités offertes au propriétaire et non le résumé de ce qu’il doit faire pour être qualifié comme tel. La propriété ne doit pas être réduite à un triptyque d’attribution. Il y aurait d’ailleurs une incohérence à considérer la propriété comme absolue tout en venant la limiter à certaines prérogatives753. Nous devons notamment à Vareilles-Sommières d’avoir mis en exergue cette incongruité tendant à concevoir la propriété comme une somme de pouvoirs déterminés. Le constat est simple : le propriétaire qui se voit privé de certaines des utilités de son bien en reste tout de même propriétaire. Ainsi, le propriétaire qui a grevé son bien d’un usufruit et qui donc se voit dessaisi de ses pouvoirs d’user et de jouir, ces dernières prérogatives étant attribuées à l’usufruitier, continue de se voir qualifier de propriétaire754. Plus largement, il est fréquent que le propriétaire subisse des restrictions, voire des interdictions, qui diminuent fortement son champ d’action. Pourtant, personne n’avance l’argument selon lequel le droit de propriété est, pour autant, anéanti. C’est ainsi que le propriétaire d’un bien loué, même s’il ne bénéficie plus de l’usage de son bien, en reste propriétaire. Le parallèle est aussi valable pour le propriétaire qui a grevé son bien d’une

750F. ZENATI, op.cit : « À Rome, la proprietas, qualité de la chose d’être propre à quelqu’un s’agrémentait notamment de l’usus et du fructus, avantages pouvant être concédés à un non propriétaire.

751F. ZENATI, op.cit : « Lorsque le propriétaire conserve toutes les utilités de son bien, il apparut expédient aux post-glossateurs de décrire le contenu de son droit comme contenant l’usus et le fructus susceptible d’être accordé à autrui outre l’abusus, usage réservé au propriétaire ».

752F. ZENATI, op.cit

753J. LAURENT, La propriété des droits, Thèse Paris, LGDJ, Paris, 2012, n°199, p.159.

754 V. par exemple : Article 578 du Code civil : « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la

754 V. par exemple : Article 578 du Code civil : « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la

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