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CHAPITRE 4 : Problématique et méthodologie

III. Vers un premier bilan suite aux observations non participatives de classe

III.1. Informations sur les différents projets d’enseignement

Afin de mieux connaitre les projets des enseignants sur le calcul mental et posé, nous avons demandé à chaque professeur de répondre à des questions préparées à l’avance (annexe B.1). Malgré les questions un peu trop ouvertes66, et les difficultés que nous avons eues pour faire « expliciter » leurs pratiques aux enseignants, des informations précieuses ressortent sur les parcours de chacun, leurs représentations du calcul mental et leurs usages du procédé La Martinière67.

66 Les entretiens auraient d’ailleurs gagné à être moins formels et davantage ciblés.

67 Le procédé introduit au 19e siècle dans l’école La Martinière consiste à utiliser l’ardoise et obéit à l’origine à des règles strictes : le maître pose une question. Le maître laisse les élèves réfléchir quelques instants. Au

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Classe A Classe B Classe C

Enseignant

13 ans d’ancienneté 8 ans d’ancienneté 36 ans d’ancienneté CAFIPEMF obtenu en

2008

Direction de l’école depuis 2010

Enseigne en CE2 depuis quatre ans

Enseigne en CE2 depuis deux ans

Enseigne en CE2/CM1 depuis trois ans Evaluations

CE1

Prises en compte pour repérer les difficultés des élèves et différencier dès le début de l’année.

Manuels Enseignant : aucun Elève : aucun

Enseignant : « A portée de maths » (Hachette Education, 2009) car il est bien structuré Elève : aucun Enseignant : aucun en particulier Elève : « Compagnon maths » (SEDRAP, 2009) Importance du calcul mental du côté enseignant Importance de la rapidité Pratique régulière nécessaire pour progresser. Compréhension des rapports entre les nombres.

Gymnastique de

l’esprit qui s’acquiert en s’entrainant.

Utilité du calcul mental

perçu par les élèves (selon

eux)

Utile pour effectuer un calcul posé avec des grands nombres

Utile si on l’associe à la résolution de problèmes.

Aucune s’il n’est pas rattaché à des situations concrètes.

Utilité du procédé La

Martinière

Impératif de faire vite et

bien Utiliser l’ardoise rend la recherche de résultats moins solennelle.

Il plait aux enfants et change du papier crayon

Tableau 4.1 : Eléments relatifs aux parcours professionnels, aux représentations du calcul mental et aux usages du procédé La Martinière des enseignants A, B et C

Nous sommes en présence de trois enseignants expérimentés qui ne « découvrent » pas le CE2, mais qui ont moins de cinq ans d’ancienneté dans ce niveau de classe. Un seul parmi eux a un manuel de référence « A portée de maths » pour construire sa programmation et ses leçons de mathématiques. Tous ont un discours un peu convenu sur l’utilisation des résultats des évaluations en CE1. Ils évoquent la différenciation mais sans donner, concrètement, les modalités qu’ils ont mises en place pour adapter leur enseignement aux besoins des élèves.

Ces entretiens permettent d’extraire quelques idées qui émergent et qui traduisent le rapport de ces trois enseignants du premier degré avec le calcul mental. En premier lieu, les trois enseignants font faire du calcul mental à leurs élèves, à raison en moyenne de vingt

premier signal, les élèves écrivent la réponse. Au second signal, ils lèvent leurs ardoises. Le maître contrôle les résultats et corrige.

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minutes par jour. Ils appliquent les recommandations des instructions officielles (principe 1 de Roditi énoncé plus haut). Pour eux, le calcul mental s’apparente au calcul sans support papier. Ils n’évoquent pas le calcul en ligne. Le côté pragmatique du calcul mental est prédominant. Il est nécessaire et suffisant de pratiquer, de s’entrainer (deux enseignantes évoquent la gymnastique) pour progresser. Notons que le terme « d’automatisme » présent dans les instructions officielles n’est pas repris. L’idée sous-jacente d’acquérir des automatismes n’est pas évoquée en ces termes. Seule, l’enseignante de la classe C évoque la valence épistémique du calcul mental en effleurant l’idée qu’il existe « un rapport de compréhension entre les nombres ». Sinon, l’enseignante qui associe calcul mental et rapidité justifie en partie, ainsi, l’utilisation du procédé La Martinière, alors que les deux autres enseignants choisissent cette modalité car ils pensent que le fait de « lever » l’ardoise motive les élèves ou que le fait « d’effacer » autorise l’élève à se tromper.

Pour les trois enseignants, le calcul mental est bien perçu et bien vécu par les élèves car les modalités choisies sont différentes des modalités habituelles. Le statut de l’erreur n’est pas le même. Comme le dit un enseignant, elle n’est pas soulignée en rouge ou en vert mais aussitôt faite, aussitôt effacée. Autre constat, chaque enseignant pense que la pratique du calcul mental doit être rattachée à des situations concrètes, à la résolution de problèmes ou au calcul posé pour avoir du sens auprès des élèves. Et pour finir, les trois enseignants sont « satisfaits » d’enseigner le calcul mental. On peut supposer que les exercices d’entrainement qu’ils proposent permettent d’évaluer à court terme des réussites chez les élèves (principe 5 de Roditi énoncé plus haut). Ils ne se questionnent pas sur leurs pratiques, ni sur les techniques et technologies mobilisées par les élèves et ne parlent pas, même indirectement, de certains élèves qui, eux, seraient en difficulté. La différenciation pédagogique dans ce domaine n’est pas mentionnée. Quand nous avons abordé la question de l’aide individualisée, les réponses sont restées évasives. Autre élément surprenant, aucun n’évoque « le calcul réfléchi », pourtant tous les trois sont des enseignants expérimentés qui ont eu à mettre en œuvre les programmes de 2002. Peut-être que la forme de l’entretien (orale), sans préparation, ne permet pas d’être exhaustif sur sa pratique.

En conclusion, ces entretiens montrent que les enseignants ne sont pas « vraiment demandeurs » de nouveaux projets pour l’enseignement du calcul mental soustractif. Pour Margolinas (2007) et Robert, Roditi et Grugeon (2007), comme ils ne sont pas confrontés à une « crise grave », ils accepteront de renouveler leurs pratiques « mais toujours dans un

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cadre suffisamment stable », sans changements radicaux. Cela confirme la nécessité de mieux cerner la façon dont ils enseignent pour leur proposer, par la suite, une organisation mathématique et didactique qui ne les déstabilisera pas d’emblée (hypothèse de travail 1).