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I. Indice céphalique. La classification des indices céphaliques selon les écoles française et allemande présentant quelques divergences impor­

tantes, il nous a paru utile de tenir compte des deux, ce qui nous permet de pousser l'analyse plus à fond, et offre ainsi la possibilité d'utiliser nos données de part et d'autre.

Les hommes de notre série burgonde se placent soit dans la classe des mésocéphales (M) 1, soit dans celle des sous-dolichocéphales (F) ; les femmes, de toute manière, sont mésocéphales, tandis que l'indice moyen du groupe total suit le balancement de la série masculine.

Nous avons groupé dans le tableau 19 les divers renseignements que la littérature nous a fournis concernant l'indice céphalique des Burgondes : ces indications sont surtout localisées en Haute-Savoie et en Savoie, grâce aux travaux d'Hovelacque, de Le Roux 2 et de Lagotala. Schwerz a, nous l'avons dit, examiné une centaine de crânes burgondes de Suisse, dont plusieurs se trouvent insérés dans notre étude; quelques crânes de Basse­

court, que Kollmann (1883) et Schürch (1900) ont mesurés, s'ajoutent à ceux que nous avons étudiés. En additionnant les diverses séries (sauf celle

1 M = classifi.cation de Martin; F = classification française.

� On trouvera dans la bibliographie générale la liste des communications faites par Le Roux, à l'Académie florimontane à Annecy, sur des crânes burgondes, où il donne, de ci de là, un chiffre d'indice.

TABLEAU I9, - INDICE CÉPHALIQUE. COMPARAISON AVEC D'AUTRES SÉRIES BURGONDES.

HOMMES FEMMES 1 TOTAL

N

l

Moyenne

l

Min.-max. N

!

Moyenne 1 Min.- max. N 1 Moyenne I Min.- max.

Burgondes (A)

s

79 76.55 69-88 40 78.23 71-93 I I9 77.12 69-93 Id. sauf Bassecourt

s

73 76.64 69-88 35 78.08 71-93 ro8 77.I I 69-93

Id. Suisse Schw. 99 76.8 66--93

Id. H.-Savoie Hov. 14 75.39 72-78

Id. LR 28 75.26 69-83

Id. Gruffy LR 6 76.48

Id. H.-Sav. (B) div. 1 63 75•27

(A + B + C) div. 191 76.38

Id. Bassecourt

s

6 75.43 71-80 5 77.32 71-87 I l 76.29 71-87

Id. (C) Schü-K. 5 73.86 69-85 4 75.27 73-77 9 74.49 69-85

Id. total. div. I I 74.71 69-85 9 76.41 71-87 20 75.47 69-87

1 Hov., LR (1897-1930) , L (ro cr. que nous n'avons pas mesurés).

de Schwerz) nous arrivons à un total de rgr crânes burgondes des deux sexes, avec un indice de 76.38, donc légèrement inférieur à celui de notre propre série. La moyenne la plus basse de la liste est celle dès Burgondes de Haute-Savoie, de Le Roux (75.26) et celle de la série composite qui réunit les crânes des mêmes régions mesurés par Hovelacque, Lagotala (ro crânes) et Le Roux (dans divers travaux) : 75.27, donc de deux unités inférieure à notre moyenne, mais restant quand même, soit sous-dolichocéphale, soit mésocéphale.

Nous avons constitué une série à part avec une vingtaine de crânes de Bassecourt, en ajoutant aux nôtres (rr) ceux de Schürch et de Kollmann (9). Ces derniers se signalent par leur dolichocéphalie (sauf la moyenne féminine, qui est sous-dolicho- ou mésocéphale) ; la moyenne générale de Bassecourt est ainsi plus basse que celle des Burgondes de notre grande série, mais reste un peu au-dessus de celle des groupes de Haute­

Savoie.

L'examen des tableaux de classification ne permet guère de confrontation avec les séries dont nous avons les moyennes; par contre nous avons la répartition des Burgondes de Schwerz, et des 30 crânes du cimetière d'Elisried 1 (mais s'agit-il de Burgondes ?). Ces deux groupes sont classés d'après la sériation de Martin; tandis que Schwerz avait affaire à une majo­

rité de mésocéphales (sr%), le reste étant presque également partagé entre la dolicho- et la brachycéphalie ; Kollmann, à Elisried, répartissait la

1 KoLLMANN, Das Grabfeltl von Elisried ... , 1887. L'auteur ne donne malheureusement que les pourcentages sans aucun chiffre de moyenne.

..

=

45

2 Cantons Zurich, Soleure, Augst.

presque totalité des crânes (sauf ro%, mésocéphales) entre la dolicho-céphalie et la brachydolicho-céphalie (celle-ci englobant les extrêmes, hyper- et ultrabrachycéphales) : 43.3% d'une part, 46.7% de l'autre; rappelons-nous cependant que Schwerz étudiait IOO crânes, Kollmann 30 seulelllent ! Or nos Burgondes n'imitent aucun de ces deux schémas; ils se

rapproche-raient à la rigueur de celui de Schwerz, puisque le pourcentage le plus grand (46.2

%)

se place dans le groupe mésocéphale ; mais pour le reste, on voit une prédominance des crânes allongés (31.9 %) tandis que les brachycéphales n'atteignent que les 21.8% de la série. Si nous regardons ce qui se passe pour chaque sexe, nous constatons que le classement se fait assez également, sauf que la série féminine - et nous n'en sommes pas étonnés - offre une plus grande proportion de brachycéphales (30%) que les hommes (17.8%). Nous pouvons donc conclure à la prépondérance de la méso­

céphalie, l'exemple aberrant d'Elisried n'étant pas convaincant.

INDICE CÉPHALIQUE. CLASSIFICATION FRANÇAISE l (en %),

Hyper- Dolicho. Sous- Mésati. Sous- Brachy. Hyper- Ultra- N

dolicho. dolicho. brachy. brachy. brachy.

Burgondes H. 1.3 34.2 32,9 13.9 12.7 I.3 3.8 (79)

F. 25 30 15 20 7.5 2.5 (40)

o.8 3I.l 3 1 .9 14.3 15.1 o.8 5 o.8 (n9)

Francs. Belg. 46.3 3+4 I0.6 7.9 o.6 . (151)

Id. Norm.-Pic. 57.3 30.7 5.4 5.4 0.9 (202)

Id. Ile-de-F. 50.8 24.1 15.9 4.9 3.6 (2,13)

Id. Champagne 30.6 26.5 30.6 8.l 4 (,i9)

Id. Est 17.4 36.2 20.2 17.3 8.7 (69)

Id. Total 45.1 30. 13.9 6.9 3.3 (598)

Genève m.â. H. 26 20 28 24 2 (50)

F. 6 l6 20 30 12 14 2 (50)

16 I8 24 27 6 8 l (rno)

Lausanne H. 5.2 8.3 12.5 38.5 11.5 16.7 6.3 (96)

F. 5.8 7.7 32.7 13.5 38.5 I.9 (52)

0.7 3.4 7.,1. I0.8 36.5 12.3 24.3 4.7 (148)

Vaud-Laus. H. o.8 3.9 7.7 II.6 32.6 13.9 20.9 8.5 (129)

F. 7 7 33.3 12.3 38.6 I.8 (57)

0.5 2.7 7.4. I0.6 33 13.3 26.1 6.4 (188)

1 65-69.9; 70-74.9; 75-77.76; 77,77-79.9; 80-83.32; 83.33-84.9; 85-89.9; 90- x.

Il nous reste, pour en finir avec l'indice céphalique des Burgondes, à analyser la deuxième classification (F). Si nous y retrouvons la tendance des femmes à la brachycéphalie, nous n'y reconnaissons pas, par contre, le caractère de prédominance de la mésaticéphalie : en effet - et ceci est visible plus particulièrement chez les hommes - la majorité des crânes est ou dolicho- ou sous-dolichocéphale ; en réunissant les trois catégories de dolichocéphalie, nous trouvons 68.4 % chez les hommes, 55 % chez les femmes, 63.8% pour les deux sexes, tandis que l'addition des groupes brachycé­

phales donne 17.8%, 30%, 21.7%; quant à la mésaticéphalie, qui s'étend sur un nombre d'unités très petit (2.2%), elle ne représente pas plus que le 15

%

(femmes) du tout.

Si, pour l'aspect d'un caractère, les tableaux de classification par groupes

..

==

47

donnent une idée plus précise que la moyenne, les graphiques (courbes de fréquence) permettent d'entrer plus avant dans l'analyse (fig. 4). L'examen des courbes relatives à nos Burgondes nous montre, pour les indices fémi­

nins, une moindre homogénéité; les indices masculins dessinent un seul sommet à 75, avec une montée assez régulière (sauf un léger ressaut à 73)

20· % 18 1 6

12.

2

I n d i c e c é p h a l i 9 u e

/\

1 \ I \

,•, ,' \

\ I I ' '

6g 10 1 z � � 15 6 i 8 ' 80 1 2 3 't 85 6 a , 90 1 2. 3

I \

' 1

I \

,� 9 11 3 15 1 9 11 3 BS 1 s 91 3 95

'

,..

\

66 a l0 2 � 6 8 80 2 � 6 s 90 2. 't FIG. 4. - Indice céphalique. Groupement en courbes de fréquence selon diverses combinaisons.

et une descente moins abrupte, qui va se perdre dans les indices brachy-éphal s, représentés par quel ues individus isolés, tandis que la courbe féminine s'interrompt brusquement après une première ascension, repart pour marquer un premier sommet à 73, redescend, remonte plus douce­

ment jusqu'à un palier qui relie les deux autres sommets, à 76 et 77. La suite est moins disloquée et ne se signale que par un groupe plus important

..

de brachycéphales, entre 80 et 82. La courbe réunissant les deux sexes suit de très près le dessin de la série des hommes (sommet à 75) .

Pour faciliter les comparaisons de notre matériel avec d'autres docu­

ments, nous donnons, en plus de ce graphique, deux autres courbes qui réunissent les indices par groupes de deux, la première en commençant par les chiffres pairs, l'autre par les chiffres impairs ; ces deux polygones offrent moins de variations, particulièrement chez les femmes, où ne subsiste plus que le groupe des environs de 80.

De plus, nous avons, pour être complet, ajouté à notre masse les chiffres d'une série de << Burgondes >> obtenus par divers auteurs 1 . La courbe ainsi dressée (163 crânes) et superposée à celle des ng Burgondes de notre série indique très peu de différence. Par contre la classification des 44 crânes de la série composite (non publiée) révèle un sommet très prononcé à 76 (20,4

%) ;

il faut y voir l'effet du petit nombre.

La comparaison avec la courbe publiée par Schwerz (par deux unités, chiffres pairs) montre que sa série a un sommet légèrement plus haut : 76-77 (74-75 dans notre série). Ceci ne concorde guère avec la moyenne, plus basse chez Schwerz que chez nous.

* *

L'indice céphalique est revêtu d'une assez grande signification dans le diagnostic anthropologique ; il est utilisé assez souvent pour que nous nous soyons cru autorisé à élargir considérablement notre cercle de comparaisons.

Nous avons déjà énuméré les divers groupes ethniques, géographiques ou historiques qui nous ont servi dans ce but. Il nous appartient maintenant de les examiner systématiquement (fig. 5).

L'ordre le plus logique, nous paraît-il, est celui qui étudierait d'abord l'état des populations avant l'arrivée des Burgondes (Celtes et Gallo­

Romains) puis les « précurseurs n de ceux-ci: les Scandinaves protohistori­

ques. Viendrait ensuite l'examen des peuples germains appàrentés à nos sujets (Alamans et autres « Barbares » d'Europe). Enfin il resterait à chercher les traces qu'ont pu laisser les Burgondes dans leur patrie d'origine d'une part, dans leur pays d'adoption d'autre part (populations postérieures de la Suisse romande et des départements français avoisinants) ; cette dernière comparaison se ferait, à la fois, a"t'ec des séries craniennes et avec des sujets vivants.

l En plus d d(ll;m1le111s de Hovc.bçquc (8 crQuus), d<: Loi:ou.111 (10), de. :U. Roux (7), de K11l!nuµu1 (8 de llnssecourt) el de Sdiùrcli (1 de Bnssccourt, 4 cl'Elisriod), nnus uvous r�uni quelq1i_es indices publi� 1n1r His et Rillimc.)'Cr (6 cr6ncs d'l!cbllllens, de lo l'oroll d'Oulard, de Corcelles cl d Versoix); donc en tout 44 crl\nes.

=

49

30'

%

- Bur!londts (,19)

-o-.J u. è d.e Fer (ss)

25·1---1--\---JI'-+-

---/\ --x--.f �i'S S ( rom.Fer (so)

\ --•--ihid. �<1/10 -1/om . (;.o) ·

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2.0, 1---�---4'--�----.-'-+-'-- ·-+·- A /a m a n s (365)

6 5 l 2.5.

%

2.0.

1 5

65 1

9 11

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1 9 91

� Genève m.â, e {,oo) --x-

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Lausahne Sa voie (15 1) (M) 1., ·-+- Valais .Saxon (12.g)

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81 3 85 1 1 '1

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91 3

FIG. 5. - Indice céphalique. Comparaisons.

Arcb. siusses d'antbrop. gén. - T. X. - N° 1-2. - 194 x. 4

a) Populations « indigènes ».

Nous avons composé deux senes, l'une, qui réunit 50 crânes datés de l'âge du fer 1, l'autre comprenant 20 crânes considérés comme gallo­

romains 2• (Tableau zr.)

La moyenne générale des premiers est à peine supeneure à celle de nos Burgondes, alors que le mode (76) 3 se place plus haut d'une unité ; les moyennes par sexes marquent plus de différences : les hommes sont un peu plus brachycéphales que les Burgondes, tandis que les femmes - en petit nombre, et avec une plus faible variation -se placent en dessous d'eux.

La courbe générale des indices groupés par deux (d'impair en impair), s'applique assez bien sur celle de notre série burgonde, sauf qu'on y remarque un second petit sommet, à 79, correspondant à une plus forte proportion ,-1p hr"1rhyrPph" ]pc:. nr r'pd hiPn rP qn'inr1iqnP b rlac:c:i-fir,itinn n',ipn"c:

Martin (24% de brachycéphales contre r6% chez les Burgondes). Cette concordance dans la proportion des indices céphaliques des Helvètes et des Barbares du haut moyen âge a déjà été signalée par Hug 4, qui publie à ce propos un graphique des plus instructifs: les deux courbes, établies par unité, de 66.5 à 91.5, évoluent presque exactement, les divers sommets coïncidant étrangement. On peut de cette constatation tirer deux conclu­

sions pratiques : d'abord la prudence qu'il faut mettre dans l'utilisation d'une seule donnée, ensuite la difficulté, dans notre cas particulier, de déceler l'apport barbare dans la population indigène.

L'analyse de la deuxième série antérieure à l'immigration burgonde est viciée par le trop petit nombre des sujets qui la composent : nous n'avons là que zo crânes à comparer à rr9. Mais comme les remarques que cette comparaison nous suggère corroborent celles de Hug, basées sur une série plus imposante 5, nous les exposons quand même. La moyenne de ces 20 Gallo-Romains est de 79.30, donc nettement plus rapprochée de la brachycéphalie que celle de nos Burgondes, quoique la marge de variation (69-88) soit inférieure à celle des :&drbares (jusqu'à 93). Le muùe est à 8I,

1 ScHENK, 1906 (18 crânes de Sion, Savièze, Sierre, Ollon, Vevey, Blonay, Vully) ; PrTTARD, 1914-15 (8 du Valais: S ierre, SM·i61..e, Rarogne); id., 1923 (8 de la station de La Tène) ; id., 1938 (2 de La Baraque) ; VIRCHOW, 1883 (2 de La �l'�nc) : KoLLMANN, 1884 (1 de La Tène) : i�1.1 1.890 (4 de la t< Pierre aux Dames n à Troinex-Genève) ; LAGOTALA, 1922 (3 de La Tène et Hauterive) ; REVERDIN, 1926 (1 de Genève) ; ScHLAGINHAUFEN, 1926 (3 de Grengiols, Valais) . Les crânes de La Tène, de Hauterive et de Genève sont sûrement attribuables à la période de La Tène, ceux de La Baraque à celle de Hallstatt; ceux de Grengiols sont probablement de La Tène.

2 His et RuTIMEYER, 1864 (7 crânes de Bois de Vaud, Bière, Courgenay, Vicques près Dé]émont, Yverdon et du Valais) ; KoLLMANN, 1884 et 1890 (6 de Con-fi.gnon, Hermance et Corsier) ; SCHENK, 1905 (7 de Chevrens, Veyrier, canton de Genève, et de Saint-Thomas, au-dessus d'Evian, Haute-Savoie).

3 Le mode, que nous donnons à côté de la moyenne et des extrêmes, correspond au sommet de la courbe de fréquence.

4 HuG, Die $chiidel ... , r940, p. 420, Abb. 7.

5 Hug a composé sa série romaine à I1aide de 171 crânes de Suisse, d'Allemagne et de France: pre&que; tous ceux que nous avons réunis se trouvent dans sa série, ce qui n'était pas le cas dans la série précédant�� sauf quelques exceptions.

=

SI plus haut de six unités ; la différence est ici très accentuée et la courbe de fréquence la marque bien: elle dessine un palier, entre 75-76 et 79-80, qui précède un sommet à 8I-82, avant de retomber à zéro à 85-86; un petit groupe hyperbrachycéphale donne un second sommet, moindre, à 87-88.

La courbe publiée par Hug (p. 4I8. Abb. 6) possède un sommet principal à 76-77 et une pointe moins forte à 82-83.

Ainsi la population de l'époque romaine (en gros, des quatre premiers siècles de notre ère) présentait un caractère de brachycéphalie plus accentuée que"les Celtes indigènes. L'explication n'est pas si aisée que la constatation.

Est-ce l'apport des colons, soldats e.t fonctionnaires, mainteneurs de la paix romaine, qui brachycéphalise le fond celte, disons plutôt qui augmente la proportion de brachycéphales dans la population auparavant celtique ? Car nous avons souligné que cette proportion était assez forte; elle augmente encore chez les Gallo-Romains. Il n'est pas dans notre intention de rouvrir le débat sur la race celte; Hubert, dans son magnifique ouvrage consacré aux Celtes, a mis en garde contre toute interprétation simpliste des données anthropologiques 1. Mais on est en droit, prenant la composition de l'époque celtique comme un fait, de rechercher les causes des changements qu'elle a subis. Nous n'avons malheureusement pas de raisons valables à donner, il nous faut pour l'instant nous borner à enregistrer la réalité: arrivée de brachycéphales coïncidant avec l'installation et le · cj.éveloppement de la civilisation romaine. Car il nous paraît impossible de parler ici, pour ces quelques siècles, d'une brachycéphalisation interne, comme on semble pouvoir en constater ailleurs et plus tard: Hug a .traité avec conscience des diverses théories qui expliquent cette augmentation de la brachy­

céphalie 2•

Quoi qu'il en soit des causes de ce phénomène anthropologique, ses effets n'ont pas pu se développer bien longtemps ; ou du moins - car nous verrons que cette brachycéphalisation reprend au cours du moyen âge - ils ont été interrompus et retardés par l'arrivée des Burgondes'.

Nous l'avons vu, leur installation sur le fond indigène remet, pour ainsi dire, les choses en place, en accroissant à nouveau la proportion d_es doli­

chocéphales. Il nous faut rechercher maintenant la provenance de ceux-ci : l'examen de populations nordiques va nous la révékr.

1 H. HUBERT, Les Celtes et l'expansion celtique ... , 1932, p. 38 : t< En tout cas il est tout à fait imprudent d'iden­

tifier les Celtes à l'un des éléments dans un de leurs groupes. On s'apercevra que la composition physique de ceux-ci diffère dès l'origine. Il est tout particulièrement imprudent de les identifier aux éléments dominants de leurs groupes occidentaux, qui n'étaient pas autochtones et ont été dénaturés par la forte prop ortion d'éléments étrangers qu'ils ont dû absorber. Il est anti-scientifique de définir un groupe d'hommes, ancien ou moderne, d'après des caractères physiques définis de la sorte. 11

2 HuG, Die Schadel ... , pp. 37I-380.

b) Allemagne septentrionale et Scandinavie à l'âge du fer 1.

Les diverses séries dont nous disposons sont malheureusement composées d'un petit nombre de crânes; leur étude est pourtant instructive.

(Tableau 20.) Elles montrent, en effet, toutes des moyennes franchement dolichocéphales, progressant de 72.I4 pour la Prusse à 74.3 chez les Suédois de Retzius, ce dernier chiffre étant abaissé si l'on ajoute à la série quelques crânes de même origine décrits par Fürst ; entre ces extrêmes se trouvent les Norvégiens et les Danois, avec 72.6. Les séries dont nous possédons les indices moyens par sexe ont leur maximum à 74.5 chez les hommes de la

TABLEAU 20. -INDICE CÉPHALIQUE. COMPARAISONS AVEC LES SCANDINAVES ET LES GERMAINS.

1

1

N ! Moyenne\ Min.-max. HOMMES 1 N 1 .\ifoyenncf i\·lln.-11\n�. FEMMES 1 N 1 Moy,:nne:j,l,th1.-rn:.x. TOTAL Burgondes s 79 76.55 69-88 40 78.23 71--93 II9 77.12 69-93 Alam. Elgg Tr. 26 75.8 69-86 29 76.6 6.5-85 5.5 76.2 65-86

Id. Oerl. H 13 71.6 65-79 II 75.- 71-79 24 73.3 65-79

Id. Zur. A Schn. II 76.3 70-80 8 74.3 70-80 19 75.5 70-80 Id. Zur. B Id. 3 75.6 72-77 8 77.7 76-81 II 77.1 72-81 Id. Zur. tot. div. 53 74.9 65-86 .56 76.I 65-85 109 75 . .5 65-86

Id. Suisse Schw. 14.5 76.6 65-89

Id. Augst Id. 77-3 78.4 174 77.8 65-91

Id. Zur.-Augst 283 76.9 65-91

Id. Sol. Hug 46 78-4 68-88 36 79.2 69-90 82 78.7 68-90 Id. Z.-S. div. 99 76,.5 6.5-88 92 77-3 65-90 191 76.9 65-90

Id. Z.-S.-Augs.t div. 365 77.3 65-91

Suisse. Burg.-Alam. div. 556 77.- 65-93

Gallo-rom. Geb. II Hug 123. 77.2 66-88 76 78.9 69-90 199 77.8 66-90 Id. I Id. 2.5 73.2 67-81 22 74.9 67-82 47 74.- 67-82 Id. III Id. ro8 74.6 64- 87 105 75.5 62,-86 213 75.- 62 - 87 Limes Id. 98 73.8 61-83 75 74.6 65-82 173 74.I 61-83 Mitteldeutsch. Geb. Id. 65 73.4 67-83 67 7.5. - 65--87 132 74.2 65-87 Francs. Belgique Royer 5.5 7.5.08 43 76.1 7 151 75.51 Id. Norm.-Picardie Id. 126 74.48 64 76.67 199 74.89

Id. Ile-de-France Id. 64 75.61 51 75.96 134 75.59

Id. Champagne Id. 29 76.42 17 76.51 49 76.55

Id. Est (Alsace) Id. 37 78.47 20 77.92 68 77.92

Id. total Id. 3II 75.21 195 76.49 601 75.51

Lombards Autriche div. 5 71.32 5 80.42 75-93 I I 75.86 63-93

Gépides Hongrie div. 62 77.79 66-90

Suède Fer Retz. 17 74 . .5 18 74-2 35 74.3 69-81

Id. Id.-F. 45 73.7

Norvège Fer Schr. 25 71.3 67-75 19 74.3 71-80 44 72.6 67-80

Danemark Fer N 41 72.3 36 73.- 77 72.6

Prusse Fer Liss. 14 72.14 65-76

' 1.'ftgc du for, daus ces r<!g!on& gcmrnnlquM du Nord, se prolo11,:c _plus loin dans le temps que ce n'est le cas en Eu:ropc occident.ale; il csl prnbn.blc. qu'un.:i p:3.ctit.1 au moins dô-S Sc.oudlnnvt,s de _nos séries comparatives s_ont contcmpor�lns dos 8nrgonrlo�. $lfi.TR1,111, Prt/,i;loiM de /11 Norvl&•, ,9,6.

LE PROBLÈME DES BURGONDES 53 sene de Retzius, et leur minimum à 7I.3 chez les hommes de Norvège.

- Les amplitudes de variation vont de l'hyperdolichocéphalie (65.5 chez les Prussiens) à la brachycéphalie (M) (8I.6 chez les Suédois, 80.4 chez les Norvégiens).

La classification des indices accuse cette prédominance de la dolicho­

céphalie : en réunissant les pourcentages des hyperdolicho- et des dolicho­

céphales, on obtient 62.3% dans la série suédoise, 86.4 % chez les Norvé­

giens et 8I.9% chez les Danois.

On peut donc supposer que les Burgondes étaient aussi caractérisés par leur tête allongée, et que c'est cette dolichocéphalie, appliquée· sur le fond plutôt brachycéphale de la population gallo-romaine de nos régions, qui a ramené l'indice céphalique au schéma antérieur à la romanisation.

Il est une autre question qui peut se poser : le mélange d'éléments doli­

chocéphales avec d'autres, surtout mésocéphales, s'est-il produit après l'installation des Burgondes en Sapaudia, ou bien faut-il y voir l'effet du contact avec d'autres populations rencontrées en Germanie.

Nous allons essayer de répondre en analysant les chiffres de séries barbares des régions traversées par les Burgondes. Ensuite nous comparerons ceux-ci aux autres peuples germains qui leur sont apparentés.

c) Germains d'Allemagne.

Nous avons à disposition trois groupes constitués par Hug à l'aide de séries locales (Tableau 20) : le premier englobe les ossements des cimetières de l'Allemagne centrale 1 (Anderten, Grone, Rosdorf), les deux autres ceux de l'Allemagne méridionale, du Limes d'une part (triangle formé par le Rhin, le Danube et le Main), de Bavière 2 d'autre part (entre le Danube et l'ancienne frontière autrichienne).

I0 Allemagne centrale. Série dolichocéphale : moyenne de 74.2, avec 72.3% de dolichocéphales chez les hommes et 55.2% chez les femmes.

2° Limes. Série aussi dolichocéphale : moyenne des sexes réunis, 74.2 ; les dolichocéphales vrais en représentent les 63.2% (hommes) et 54.6%

(femmes).

3° Bavière. Série à la limite de la mésocéphalie (75.--) : la moyenne masculine (74.6) est dolichocéphale, la moyenne féminine, mésocéphale (75.5) ; ici les dolichocéphales ne représentent plus que 54.6% et 40% pour

1 Mitteldeutsches Gebieti cf. HuG, carte 2, p. 380.

2 Gallorômisches Grenzgebiet Ill; ce territoire devait être habité principalement par ]es Bajuvares, tandis que le Limes devait être peuplé d'autres tribus �uèves. Gaflorôm. Grenzgeb. I représente l'Alsace-et le Palatinat (rive gauche du Rhin, de la frontière suisse à Mayence) ; G.g.II embrasse le Plateau suisse et le Jura plus la Haute-Savoie; cf. HuG, carte 31 p. 392.

chaque sexe ; cette diminution est compensée par une plus forte proportion dé mésocéphales, les brachycéphales étant plutôt rares.

Il faut, pour ne négliger aucun élément, signaler que les séries dont nous venons de donner les chiffres sont composées de sujets appartenant en grande partie à une époque plus récente que le passage des Burgondes (rne-rve siècles) ; mais nous sommes en droit de supposer que la physio­

nomie anthropologique de ces régions n'a pas dû changer beaucoup en trois ou quatre siècles.

Ainsi, la confrontation de ces populations avec notre série de Burgondes montre que ces derniers n'ont pas dû être ,, mésocéphalisés n avant leur arrivée en Suisse ; îl serait en effet curieux que, se mêlant à des nations germaniques où l'élément mésocéphale était une minorité, ils aient été

<< contagionnés )) précisément par celle-ci ! Force nous est donc d'admettre que le métissage s'est produit avec les habitants des régions où, à partir de 443, ils se répandirent ; ou plutôt - car en parlant ainsi nous avons l'air de donner aux Burgondes une sorte de primauté - il convient de dire que les Burgondes ont dû se fondre dans la population des dites régions.

d) Aùtrês peuples germains « Barbares i>. (Tableau 20.)

1° Alamans. Voisins depuis leur rencontre, au rue siècle finissant, sur le haut Main, Burgondes et Alamans ont dû avoir de fréquentes occasions de se mêler, surtout à partir de l'installation des seconds dans ce qui deviendra

1° Alamans. Voisins depuis leur rencontre, au rue siècle finissant, sur le haut Main, Burgondes et Alamans ont dû avoir de fréquentes occasions de se mêler, surtout à partir de l'installation des seconds dans ce qui deviendra

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