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1. LES PRATIQUES ÉDUCATIVES EN ÉS

1.1.3 Importance accordée à l’ÉS

A priori, nous pourrions croire qu’un éducateur qui accorde une importance à la santé dans sa vie personnelle aura tendance à promouvoir cet aspect dans ses pratiques professionnelles. Or, les résultats de notre recherche montrent que malgré une importance déclarée dans leur vie personnelle, certains participants mentionnent intégrer cet aspect modestement dans leurs pratiques. Cela illustre bien qu’il n’est pas facile d’établir une cohérence entre ses valeurs et sa pratique (Korthagen, Kim et Greene, 2013), surtout lorsqu’il s’agit de modifier celle-ci pour y intégrer de nouveaux objectifs, contenus ou stratégies. Cela est d’autant plus vrai s lorsqu’il n’y a pas ou peu d’attentes formelles à cet égard exprimées dans leur activité professionnelle. La plupart du temps, les praticiens ont besoin d’un accompagnement pour y parvenir (Korthagen et al., 2013)

La description des actions posées par les participants pour leur santé permet de préciser que celles-ci sont principalement en lien avec l’activité physique et l’alimentation. Peu d’entre eux mentionnent des actions en lien avec la santé mentale, le sommeil, la gestion du stress ou les compétences sociales. Ces résultats vont dans le même sens que ceux de deux études faites auprès d’enseignants en éducation physique et à la santé. Dans une étude de cas, Loizon (2011) constate que les savoirs enseignés par les enseignants en éducation physique et à la santé sont spécifiques à la dimension corporelle, ce qui se traduit par la transmission d’informations sur la santé et sur les effets des comportements à risques pour le développement des connaissances personnelles de l’élève à la suite d’expériences motrices ou sensorielles. De plus, la dimension psychosociale est aussi évoquée par ces enseignants, à travers la gestion du corps et des émotions ainsi que la discipline et le travail d’équipe. De son côté, Turcotte (2006) a identifié que les pratiques pédagogiques d’enseignants en éducation physique et à la santé étaient principalement centrées sur les

savoirs essentiels liés à l’adoption, la transformation ou le maintien des habitudes de vie pouvant inclure la santé mentale et la gestion du stress. Pour les enseignants participant à ces deux études, l’ÉS est donc grandement liée aux savoirs essentiels, nous portant à croire que, les préoccupations des éducateurs en SGEMS, du moins dans leur vie personnelle, sont intimement liées à l’activité physique et à l’alimentation

Du point de vue professionnel, les participants (n = 28) estiment important d’inclure l’ÉS dans leurs pratiques éducatives. Les participants définissent les manières dont ils intègrent effectivement l’ÉS dans leur quotidien par des pratiques d’encouragement, d’intervention, de modélisation et de renforcement. Ces actions correspondent aux quatre types d’actions identifiées dans l’étude de Rivard et Deslandes (2013) portant sur l’importance de l’engagement des éducateurs et des parents pour la réussite scolaire et le comportement des enfants : 1) la modélisation; 2) le renforcement; 3) l’éducation et 4) l’encouragement. L’engagement identifié dans les résultats de la présente recherche peut être mis en lien avec les pratiques d’encouragement de Rivard et Deslandes (2013) puisque ces deux actions ciblent l’organisation d’activités en lien avec l’ÉS. Quant aux actions d’encouragements ou de récompenses pour ceux, par exemple, qui amènent des dîners santé, elles peuvent être reliées au type d’actions de renforcement auquel Rivard et Deslandes font référence. En lien avec le type d’actions dites d’éducation, les enseignants en éducation physique et à la santé participant à l’étude disent tenter d’inciter la réflexion sur les habitudes de vie chez les élèves (Rivard et Deslandes, 2013), ce qui a été également exprimé par certains participants de notre recherche par des pratiques d’intervention ciblant l’acquisition de connaissances et le développement d’un esprit critique afin que les élèves puissent faire des choix santé par des discussions sur les saines habitudes de vie avec les élèves et les parents. Enfin, en s’identifiant comme modèle, les enseignants en éducation physique et à la santé considèrent jouer un rôle de modélisation (Rivard et Deslandes, 2013). Il en est de même pour les participants de notre recherche en cherchant à donner l’exemple aux enfants par la participation à des concours en lien avec les saines habitudes de vie, par des déplacements actifs ou par des dîners équilibrés.

Par ailleurs, en lien avec l’affirmation de Jourdan et Simar (2010) selon laquelle l’intégration, par l’enseignant, de l’ÉS est significativement liée à des pratiques globales en santé, c’est-à-dire des pratiques qui font place aux « […] dimensions politiques, environnementales (physique et sociale, partenariale (service de santé et communauté éducative) » (p. 741), nous avons constaté que les participants à notre recherche estiment que l’ÉS devrait avoir une place prépondérante dans les services de garde. Certains participants font référence à leur rôle d’éducateur, à leur devoir de continuité avec le projet éducatif de l’école, à leur rôle de prévention ainsi qu’à leur responsabilité au regard du développement global de l’enfant et de la création d’environnements favorables. Ces aspects font effectivement partie des rôles et des responsabilités des services de garde en milieu scolaire selon le Conseil supérieur de l’éducation (2006) et la loi sur l’instruction publique (Gouvernement du Québec, 2018a, Règlement, chapitre I-13.3, article 454.1). Plus précisément, les services éducatifs complémentaires doivent assurer la santé, la sécurité et le bien-être des enfants, contribuer à la mise en place du plan de réussite et promouvoir la collaboration avec les parents. De plus, selon une approche concertée, il est important que les divers partenaires collaborent « […] afin de planifier et de déployer des actions cohérentes, de façon coordonnée et harmonieuse » (Gouvernement du Québec, 2005, p. 3). Les éducateurs et les éducatrices interrogés ont donc ciblé deux facteurs importants dans l’intégration de l’ÉS dans les milieux scolaires : leurs responsabilités quant au développement global de l’enfant et la création d’environnements favorables (Conseil supérieur de l’éducation, 2006).

De plus, quelques participants (n = 9) insistent sur les bienfaits de l’ÉS sur les apprentissages et la réussite scolaire des élèves, comme le soulignent plusieurs études qui ont mis en évidence l’impact d’une bonne santé physique ou de la pratique d’activités sur les résultats académiques, les comportements scolaires ainsi que sur l’estime de soi (Allès- Jardel et Ciarbini, 2000; Calfas et Taylor, 1994; Trudeau et Shephard, 2008; Witterberg et al., 2009). Dans ce sens, la politique de la réussite éducative désire offrir des milieux de vie intégrant des activités tant culturelles que physiques et sportives ou scientifiques et entrepreneuriales (Gouvernement du Québec, 2017b).

Enfin, les SGEMS sont vus comme des milieux particulièrement favorables à l’inclusion de l’ÉS par quelques participants. Ils rejoignent en cela la Politique-cadre pour une saine alimentation et un mode de vie physiquement actif visant à promouvoir la création d’environnements favorables à l’ÉS dans les milieux scolaires, s’adressant aux dirigeants des commissions scolaires, aux directions des écoles, au personnel enseignant et professionnel, au personnel des services alimentaires ainsi qu’aux SGEMS (Gouvernement du Québec, 2007b). Cette politique souligne aussi les divers points d’ancrage pour la mise en place d’initiatives en ÉS du milieu scolaire, dont les services éducatifs complémentaires (Gouvernement du Québec, 2007b). L’intégration de l’ÉS perçues par les participants prend donc une place importante dans les SGEMS (n = 23) et dans les pratiques autodéclarées (n = 28) de plusieurs participants à cette recherche.