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I.2.2.1 - Anabolisme

Si le rôle le mieux connu des vacuoles est le stockage ou la dégradation, elles peuvent être également, en quelques occasions, le siège de différentes activités de biosynthèse, que ce soit à

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l’intérieur de la vacuole ou lors du passage des métabolites à travers le tonoplaste (Browne & Coombe, 1984). Ces processus de biosynthèse vacuolaire affectent des voies métaboliques très diverses.

La synthèse du saccharose au niveau du tonoplaste à partir du glucose-phosphate cytosolique, évoquée précédemment, est un exemple d’activité anabolique reliée au tonoplaste. Des invertases sont également présentes dans la vacuole et assurent un équilibre entre les hexoses (glucose, fructose) et le saccharose. Le métabolisme des sucres est d’ailleurs également représenté dans la vacuole à travers la synthèse de fructanes (tels que l’inuline), des polymères de fructose constituant une réserve de carbone (Keller et al., 1988).

La dernière étape de la synthèse de l’éthylène, à partir de l’acide 1-aminocyclopropane-1-carboxilique, a également été observée dans la vacuole (Mayne & Kende, 1986). Une telle localisation de l’étape ultime de la synthèse d’une hormone est intéressante, et semble résulter de la nécessité d’un environnement particulier, optimal pour cette synthèse. Les auteurs montrent en effet que, si la synthèse d’éthylène a lieu dans des vacuoles intactes, la destruction du tonoplaste par divers moyens (découplants ou congélation par exemple) inhibe cette activité, suggérant la nécessité d’un gradient ionique de part et d’autre de la membrane. Cette hypothèse est d’ailleurs soutenue par l’observation d’un accroissement de la synthèse d’éthylène avec l’augmentation du pH du milieu d’incubation entre 5 et 7,5.

Un grand nombre de plantes, principalement des familles des Apocynaceae (ex. pervenche de Madagascar), des Solanaceae (ex. tomate) et des Papaveraceae (ex. pavot), est capable de produire et de stocker des alcaloïdes dans la vacuole. La pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus) a été particulièrement étudiée pour sa capacité à synthétiser plus de cent alcaloïdes différents, dont certains ont une forte valeur pharmacologique (tels que la vinblastine un inhibiteur de la polymérisation de la tubuline utilisé notamment dans le traitement de cancers). Cette synthèse nécessite comme précurseur le géraniol, produit dans le chloroplaste, qui est transporté à l’intérieur de la vacuole, où vont se dérouler les premières étapes de synthèse conduisant à la production des alcaloïdes. Le transport du géraniol est assuré par une protéine de type cytochrome P450 liée à la membrane, G10H (geraniol-10-hydroxylase, Meijer et al., 1993), qui convertit également le géraniol en 10-hydroxygéraniol. Ce dernier est ensuite transformé, via plusieurs étapes vacuolaires, en secologanine, qui est alors couplée à la tryptamine par une strictosidine synthase pour former la strictosidine, le précurseur de tous les alcaloïdes indoliques. La suite du processus de synthèse est moins bien connue, et pourrait faire intervenir des étapes cytosoliques et vacuolaires. La strictosidine serait transportée vers le cytosol où le groupement glucose serait éliminé, conduisant à

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la formation d’ajmalicine, ensuite ré-importée dans la vacuole (De, 2001). Elle y subirait alors d’autres modifications, notamment sous l’action de peroxydases (ajmalicine serpentine).

Les alcaloïdes une fois synthétisés sont en règle générale retenus dans la vacuole, leurs rôles dans la défense contre les pathogènes (Vazquez-Flota et al., 2004) en faisant des molécules potentiellement toxiques pour le métabolisme cellulaire. Cette importance de la séquestration vacuolaire des alcaloïdes a d’ailleurs été récemment confirmée par l’observation de la formation de nombreuses vacuoles dans des cellules en culture soumises à une exposition de quelques minutes à de la cocaïne (Yu et al., 2008).

I.2.2.2 - Dégradation et recyclage des constituants cellulaires

Surtout connue pour son rôle dans les processus de recyclage et d’autophagie, la vacuole présente effectivement un potentiel hydrolytique important, incluant tout autant des activités protéasiques et glycosidiques, relativement bien décrites dans la littérature, que des activités de type estérases (phosphomonoésterases, phosphodiésterases et acétylésterases) et nucléases (Abel et al., 1989), probablement impliquées dans le turn-over des membranes et dans celui des acides nucléiques.

a) Activités protéasiques

Parmi les protéases cellulaires, les endopeptidases sont décrites pour être exclusivement vacuolaires. Les aminopeptidases majoritairement cytosoliques, peuvent aussi être présentes dans la vacuole. Comparées aux formes cytosoliques, les peptidases vacuolaires présentent une grande stabilité lorsqu’elles sont soumises à des attaques protéolytiques, et sont capables de dégrader les protéines du cytosol plus efficacement que les protéases cytosoliques (Canut et al., 1987), ce qui souligne leur rôle fondamental au cours des mécanismes d’autophagie. Leur activité est toutefois extrêmement régulée, via leur dépendance à un pH optimum d’activité (Canut et al., 1987), mais également via la présence d’inhibiteurs de protéases dans la vacuole (Ryan, 1980).

Moriyasu et Tazawa (1988) furent parmi les premiers à mettre en évidence une activité protéasiques à l’intérieur de la vacuole en remplaçant, par perfusion, une partie du contenu de vacuoles purifiés par une solution de BSA qui est entièrement digéré après 16 h d’incubation. Le remplacement total et non plus partiel, de la fraction soluble ne permettant pas d’observer une quelconque activité protéasique, les auteurs conclurent à la présence de peptidases solubles, et non associées à la membrane, dans les vacuoles (Moriyasu & Tazawa, 1988). De façon très intéressante, ce type d’expérience mit également en évidence l’importance de l’intégrité du tonoplaste pour cette activité, aucune dégradation protéique n’étant observée lors de l’incubation de BSA dans une suspension de vacuoles lysées (Canut et al., 1985).

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Les activités protéasiques de la vacuole interviennent dans le cadre de plusieurs fonctions cellulaires. Elles sont par exemple impliquées dans la dégradation de protéines annormales, qui peuvent être spécifiquement dirigées vers la vacuole afin d’y être recyclées. Un tel mécanisme a pu être mis en évidence suite à l’expression de protéines mutées, fonctionnelles ou non, dans des cellules de plantes, redirigées vers la vacuole par le métabolisme cellulaire pour y être dégradées (Pueyo et al., 1995 ; Chang & Fink, 1995).

Les protéases vacuolaires peuvent également intervenir dans la maturation de certaines protéines. Celles-ci, non fonctionnelles dans le cytosol, deviennent actives après maturation dans la vacuole (phosphatase alcaline vacuolaire par exemple, Noda et al., 1995). A l’inverse, la vacuole peut être impliquée dans la régulation négative de l’activité de certaines protéines à travers leur dégradation, dans le cadre d’un turnover plus ou moins rapide (Canut et al., 1985).

Quoique mis en évidence uniquement chez la levure, un autre aspect particulièrement intéressant des activités protéasiques de la vacuole consiste en la régulation de la signalisation inter-cellulaire (Chvatchko et al., 1986). Certaines levures émettent en effet des phéromones protéiques (facteurs a et α), qui se lient à des récepteurs plasmalemmiques. Ces complexes sont ensuite internalisés puis transportés dans la vacuole où ils sont dégradés.

b) Autophagie

L’autophagie est un processus particulier au cours duquel des fractions entières non sélectives de cytosol, pouvant éventuellement inclure des organites, sont transférées dans la vacuole pour y être dégradées. Ce phénomène est connu depuis longtemps et fait partie des premières fonctions attribuées à la vacuole (Villiers, 1967). Ce processus peut avoir principalement deux origines : une carence en éléments nutritifs conduisant à un recyclage d’une partie des éléments cellulaires, ou une évolution de la cellule vers une spécialisation.

Le phénomène d’autophagie lors d’une carence carbonée a pu être mis en évidence suite à l’observation par microscopie électronique d’une forte régression du cytoplasme, associée à une expansion de la vacuole, chez des cellules cultivées dans un milieu pauvre en carbone (Aubert et al., 1996). Ces mêmes travaux montrent toutefois que l’activation des processus d’autophagie dans la cellule ne dépend pas de la quantité de sucre (saccharose ou hexoses) disponible, mais plutôt de la présence de substrats de la respiration (pyruvate et glycérol en particulier) pour les fonctions mitochondriales. L’importance de ces processus dans la réponse de la plante aux carences est également soulignée par l’hypersensibilité de mutants affectés dans les mécanismes d’autophagie (Atatg4a4b-1) lorsqu’ils sont cultivés dans des conditions limitantes en différents nutriments (Bassham et al., 2006).

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L’autophagie prend des proportions extrèmes lorsque la vacuole est lysée dans le but de libérer dans le cytosol les hydrolases qu’elle contient, ce qui conduit à la mort de la cellule. Ces processus particuliers ont par exemple lieu lors de la différenciation cellulaire et ont été notamment observés lors de la formation de cellules laticifères chez Euphorbia characias, lors du développement des cotylédons ou lors de la gamétogenèse (De, 2001 ; Bassham et al., 2006). Ce phénomène est également à l’origine de la formation du xylème primaire, à partir des cellules du méristème (Wodzicki & Humphreys, 1973). Dans un premier temps, la cellule stoppe son activité photosynthétique et commence à produire la paroi secondaire. Elle augmente alors la synthèse d’enzymes hydrolytiques, DNase ou protéases à sérine notamment, qui sont stockées dans la vacuole. Lorsque la consolidation de la paroi est terminée, la vacuole est lysée et l’ensemble des enzymes libéré dans le cytosol.

On retrouve un processus identique lors de l’activation du programme de mort cellulaire induit par des pathogènes (réponse hypersensible). Ce mécanisme requiert la présence d’une protéase particulière, γ-VPE (Vacuolar Processing Enzyme), une protéase à cystéine comparable aux caspases (intervenant dans le programme de mort cellulaire chez les mammifères). Lors d’une attaque par certains pathogènes, cette protéase est surexprimée sous forme de préprotéine. Son autolyse en proprotéine dans le cytosol permet de l’accumuler dans la vacuole, où une nouvelle maturation permet de l’activer. La vacuole est alors lysée et les protéases libérées (Seay & Dinesh-Kumar, 2005).