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CHAPITRE I : ANALYSE PROTEIQUE GLOBALE DE LA VACUOLE D’ARABIDOPSIS THALIANA

III. 4 - Conclusion

Si l’analyse du protéome membranaire de la vacuole a permis de mettre en évidence un grand nombre de transporteurs contrôlant les activités de stockage et de libération des constituants vacuolaires, l’identification des protéines de la fraction soluble souligne d’autres aspects majeurs des fonctions de cet organite. Les hydrolases (protéases, glycosydases, estérases / lipases et nucléases) par exemple constituent à elles seules près du tiers des protéines listées. La vacuole montre ici un potentiel important de dégradation et de recyclage d’un très large spectre d’éléments cellulaires, dont la régulation est assurée par un certain nombre de protéines inhibitrices (Cystatin, Serpin …) ou activatrices (protéines ubiquitin-related). Certaines de ces hydrolases (chitinases, protéases du programme de mort cellulaire …) ont été également présentées comme des acteurs de la défense cellulaire. Ce second aspect des fonctions vacuolaires est en effet, lui aussi, relativement représenté, notamment à travers la présence de protéines spécialisées dans la réponse au stress oxydant (peroxydases …) ou dans la défense contre les pathogènes (protéines associées aux myrosinases, inhibiteurs des polygalacturonases …).

La présence dans la vacuole de protéines potentiellement dangereuses telles que les hydrolases, et de protéines de réponse à différents types de stress nécessite l’intégration de cet organite au sein d’un réseau de signalisation cellulaire capable de réguler les activités mises en évidence. Un tel réseau se compose d’intermédiaires de signalisation et de régulateurs d’activité protéique, dont un nombre important de représentants a été identifié. Les 47 protéines de ce type (récepteurs, protéines impliquées dans transduction de signal, régulation d’activité protéiques, inhibiteurs de protéases …) constituent sans doute la catégorie la plus intéressante de la vacuole. Elles révèlent un aspect inhabituel de cet organite, et le présente réellement comme un acteur majeur, finement régulé, des activités métaboliques cellulaires.

IV - Conclusion générale

Les analyses protéomiques de la vacuole réalisées au cours de ce travail ont débouché sur l’identification de 371 protéines à partir des extraits solubles, et de 420 protéines à partir des extraits membranaires, soit 689 protéines non redondantes. Les classes fonctionnelles mises en évidences dans la vacuole sont variées, et couvrent l’ensemble des fonctions physiologiques cellulaires. Elles concernent notamment le transport de métabolites, la signalisation, la réponse au stress, ou encore les processus de dégradation et de recyclage, et elles présentent la vacuole comme un organite complexe, particulièrement intégré au métabolisme cellulaire. Mais ces analyses font également ressortir un certain nombre de protéines généralement associées à d’autres compartiments cellulaires, principalement le cytosol. Plusieurs de ces protéines sont même

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identifiées avec un score important, ce qui est en particulier le cas de la subtilase TPPII, ou de plusieurs protéines du métabolisme primaire. Le protéasome, par exemple, est aussi étonnement bien représenté, à travers 8 sous-unités α et 5 sous-unités β différentes. L’identification de ces protéines est relativement surprenante et pourrait dans un premier temps être assimilé à du matériel contaminant. Cependant, plusieurs hypothèses peuvent être envisagées pour expliquer ce phénomène. La copurification d’organites contaminants, tels que la mitochondrie ou le chloroplaste par exemple, sur les gradients utilisés est possible, mais semble néanmoins peu probable. Les identifications réalisées à partir de la fraction membranaire se sont en effet révélées particulièrement adaptées aux protéines hydrophobes, et l’absence de transporteurs majeurs mitochondriaux ou chloroplastiques a pu être soulignée précédement. Cette observation est également confortée par l’absence de contaminations d’origine mitochondriale, plasmalemique et chloroplastiques lors des analyses par western-blot, les marqueurs recherchés étant tous membranaires (Figure 6). C’est essentiellement dans les identifications faites à partir de la fraction soluble que le plus grand nombre de protéines connues pour être localisées dans d’autres compartiments apparaissent, ce déséquilibre suggérant l’absence de contaminants correspondant à des organites entiers. Le cas du réticulum endoplasmique peut-être toutefois différent. Plusieurs protéines connues pour appartenir à cet organite (calréticulines CRT1 et CRT2 par exemple) ont été retrouvées, et leur identification pourrait être reliée à la présence de compartiments prévacuolaires d’origine endoplasmique dans les extraits, comme en témoigne par exemple la détection d’une protéine à motif HDEL, par western-blot, dans les échantillons vacuolaires (Figure 6).

La présence de nombreuses protéines cytosoliques telles que les sous-unités du protéasome suggère par contre que les contaminants observés puissent être associés à la vacuole du côté cytosolique, et co-purifiés avec les organites lors de leur isolement. Il est en effet possible que des protéines majoritaires du cytosol soient liées au tonoplaste de façon transitoire et non spécifique, via des interactions hydrophobes par exemple. Mais ces associations peuvent également correspondre à une nécessité physiologique, et à des interactions spécifiques entre certaines protéines cytosoliques et des composants vacuolaires (membranes ou protéines). La subtilase TPPII, par exemple, est connue chez les mammifères pour son rôle dans les processus de présentation de l’antigène. Elle est en interaction fréquente avec un transporteur ABC, TAP2, qui permet la translocation des peptides qu’elle génère vers la machinerie de synthèse du Complexe Majeur d’Histocompatibilité I (Kloetzel, 2004). L’homologue végétal de ce transporteur ayant été identifié par nos analyses, il est très probable que son interaction potentielle avec TPPII et avec le protéasome explique la présence de ces protéines dans nos extraits (Figure 20).

Enfin la présence de ces protéines pourrait résulter de processus autophagiques, qui conduisent à l’internalisation dans la vacuole de fractions entières de cytoplasme, ces protéines étant alors en cours de dégradation par les protéases vacuolaires.

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Afin de caractériser plus avant le protéome de la vacuole et éventuellement de répondre aux questions soulevées, nous avons mis en place une évaluation protéique semi-quantitative de la fraction soluble des vacuoles pour en identifier les constituants majeurs. Nous souhaitions également comparer la composition protéique vacuolaire avec celle du cytosol et analyser l’organisation supramoléculaire des protéines de la vacuole. Ces aspects de la caractérisation protéique de la vacuole, très peu décrits dans la littérature, sont susceptibles de fournir de nouvelles pistes dans l’étude des processus vacuolaires du métabolisme de la cellule végétale.

Figure 20 : Schéma organisationel et fonctionel possible

du protéasome et de la subtilase TPPII (tripeptidylpeptidase II) chez Arabidopsis thaliana. La copurification de ces protéines (TPPII et certaines sous-unités du protéasome) suggère leur interaction avec la membrane vacuolaire, probablement via leur liaison à des transporteurs du tonoplaste. Chez les mammifères, lors des processus conduisant à l’expression du complexe majeur d’histocompaptibilité 1, le protéasome est décrit pour être impliqué dans la première étape de dégradation des protéines intra-cellulaires en peptides de tailles réduites (A). Ceux-ci sont ensuite pris en charge par TPPII qui les hydrolyse plus avant (B) afin qu’ils soient pris en charge par TAP2 (C), un transporteur ABC localisé au réticulum endoplasmique. Un tel mécanisme de dégradation protéique pourrait également intervenir chez les plantes et impliquer la vacuole, le transporteur TAP2 ayant été identifié dans les fractions membranaires de nos échantillons. L’interaction potentielle entre les différents partenaires (flèches en pointillés) expliquerait alors la présence de sous-unités du protéasome et de TPPII dans nos échantillons. (D) : structure de la TPPII de drosophile, établie par Rockel et al., 2005.

Vacuole Cytosol TPPII Protéasome TAP2 ? (A) (B) (C) (D)